6.(Re)découvrir la rivière des vaudois
La Venoge si chère à Gilles
La Venoge
On a un bien joli canton:
des veaux, des vaches, des moutons,
des chamois, du brochet, du cygne,
des lacs, des vergers, des forêts,
même un glacier, aux Diablerets;
du tabac, du blé, de la vigne.
*
Mais jaloux, un bon Genevois
m'a dit d'un petit air narquois:
" Permettez qu'on vous interroge:
où sont vos fleuves, franchement? "
Il oubliait tout simplement
La Venoge!
*
Un fleuve? En tout cas c'est de l'eau
qui coule à un joli niveau.
Bien sûr, c'est pas le fleuve Jaune.
Mais c'est à nous, c'est tout vaudois,
tandis que ces bons Genevois
n'ont qu'un tout petit bout du Rhône.
*
C'est comme: " Il est à nous le Rhin! "
Ce chant d'un peuple souverain,
c'est tout faux, car le Rhin déloge.
Il file en France, aux Pays-Bas,
tandis qu'elle, elle reste là,
La Venoge!
*
Faut un rude effort entre nous
pour la suivre de bout en bout.
Tout de suite on se décourage.
Car, au lieu de prendre au plus court,
elle fait de puissants détours,
loin des pintes, loin des villages.
*
Elle se plaît à traînasser,
à se gonfler, à s'élancer
- Capricieuse comme une horloge -
elle offre même à ses badauds
des visions de Colorado
La Venoge.
*
En plus modeste évidemment.
Elle offre aussi des coins charmants ,
des replats, pour le pique-nique.
Et puis, la voilà tout à coup
qui se met à faire des remous
comme une folle entre deux criques,
*
Rapport aux truites qu'un pêcheur
guette, attentif dans la chaleur,
d'un oeil noir comme un oeil de doge.
Elle court avec des frissons,
ça la chatouille ces poissons.
La Venoge.
*
Elle est née au pied du Jura.
Mais, en passant par la Sarraz,
elle a su, battant la campagne,
qu'un rien de plus, cri nom de sort!
Elle était sur le versant nord:
Grand départ pour les Allemagnes!
*
Elle a compris! Elle a eu peur,
quand elle a vu l'Orbe sa soeur
- Elle était aux premières loges -
Filer tout droit par Yverdon
vers Olten! Elle a dit : pardon!
La Venoge
*
Le Nord est un peu froid pour moi.
J'aime mieux mon soleil vaudois.
Et puis entre nous: " Je fréquente !"
La voilà qui reprend son élan
en se tortillant joliment.
Il n'y a qu'à suivre la pente.
*
Mais la route est longue, elle a chaud,
Quand elle arrive elle est en eau
- Face au pays des Allobroges -
pour se fondre amoureusement
entre les bras du bleu Léman,
La Venoge!
*
Pour conclure, il est évident
Qu'elle est vaudoise cent pour cent.
Tranquille et pas bien décidée
elle tient le juste milieu.
Elle dit: qui ne peut ne peut!
Mais elle fait à son idée.
*
Et certains, mettant dans leur vin
de l'eau, elle regrette bien
ma fois - C'est tout à son éloge -
que ce bon vieux canton de Vaud
N'ait pas mis du vin dans son eau,
La Venoge!
La Venoge, par Gilbert Salem
Ce n'est qu'une toute petite rivière,
mais les vaudois ont raison de l'évoquer comme un fleuve.
Car la Venoge, c'est indéniable, va à la mer. Il y a vingt mille ans, elle coulait vers celle du Nord et la Baltique, mais, par un phénomène long et compliqué de déplacements géologiques, de captures de cours d'eau, de vicissitudes où interviennent les glaciers quaternaires, elle a changé de cap ; elle est devenue lémanique, c'est-à-dire méditerranéenne.
La Venoge est surtout un fleuve mythologique
A l'instar du Styx aux serments inviolables, à l'exemple du Rubicon qu'il suffisait de franchir pour devenir empereur ou du Rhin des épopées wagnériennes, jonché de caillasse d'or et peuplé d'ondines. Mais Gilles l'a dit : il est plus modeste que le Colorado. Car « elle est vaudoise cent pour cent, tranquille et pas bien décidée, elle tient le juste milieu, elle dit : « Qui ne peut ne peut ! » Mais elle fait à son idée ».
Cette même modestie, qui découle de l'humour euphémique,
est la vertu la plus méritoire de notre chansonnier national
Il aurait pu célébrer la Venoge en édifiant un chant grandiose, une illiade, une Enéide. Non, il s'est contenté de lui dédier une chansonnette. Ca se susurre, ça se sifflote, ça ne rend pas hommage à une patrie, mais à une terre. Ca ne s'inscrit que plus profondément dans une conscience collective. »

La Venoge par Guido Olivieri
"Un cours dépassant à peine les quarante kilomètres, le « fleuve » de Gilles pourrait n'être que l'une des nombreuses rivières vaudoises. Est-ce parce qu'après s'être dirigée vers le Rhin elle décide soudain de demeurer bien de chez nous, virant abruptement vers le Léman à la Sarraz, qu'elle est si chère aux habitants du canton ? Il doit y avoir de ça.
Mais aussi la Venoge résume, au fil de trois tronçons facilement définissables, tout un pays :
- De l'Isle à la Sarraz elle est jurassienne, quittant un pâturage pour se perdre par moments à l'ombre des forêts après avoir traversé un village, dans un paysage agréablement mouvementé.
- De la Sarraz à Cossonay c'est la rivière - le canal devrais-je dire, avec ce qu'on en a fait - d'une région agricole opulente.
- Enfin, depuis le site des anciennes câbleries tréfileries de Cossonay, elle aborde un parcours lémanique haut en contrastes, paressant par instants dans de beaux bois, entrecoupés de zones industrielles.
C'est encore un cours d'eau qui semble ne pas avoir d'enfance, naissant déjà adulte. Le Rhin part d'un tuyau de fontaine, l'Adige est aisément sauté à pieds joints par un gamin de quatre ans. Dès sa source, et même en période de basses eaux, la source de la Venoge réclame quelques précautions pour être franchie à pied sec ; alors que quelques dizaines de mètres plus bas, elle est déjà moitié aussi large qu'à son arrivée au lac. Croquis d'une verte ensorceleuse."

Voyage photo au fil de l'eau

Plan de situation














La Venoge en automne, vue d'en haut
La Venoge vue d'en haut, entre la source du Chaudron et l' Ile aux oiseaux
La Venoge dans sa réalité quotidienne par une journée d'automne; entre cordons boisés naturels serpentant au pied du Jura, canalisée pour céder de la place à l'agriculture à partir d'Eclépens et depuis Cossonay en alternant tronçons naturels et environnement construit, pour se frayer sa route jusqu'au Léman.






























Légende des photographies:
- Cordon boisé, entre la source du Chaudron et le village de l'Isle
- L'Isle avec son bassin
- Cordon boisé entre l'Isle et Cuarnens
- La traversée de Cuarnens
- En aval de Cuarnens, cordon boisé serpentant au pied du Jura
- Entre Moiry et Ferreyres
- En direction du nord-ouest depuis Ferreyres
- Ferreyeres, La Sarraz et Eclépens, la Venoge arrive sur le plateau
- La Tine de Conflens au pied de Ferreyres, la Venoge y rencontre le Veyron
- Arrivée dans la plaine, au bas de la Sarraz, début de la canalisation
- Le pont de la Sarraz. La Venoge y est canalisée
- Traversée en canal de la plaine, Eclépens, Daillens, Villars-Lussery; la Venoge effleure le centre de tri de la Poste
- Entre deux murs, vers Villars-Lussery
- En route vers Cossonay
- Elle se fraie son chemin dans le peu d'espace qui lui reste, longeant les anciennes câbleries de Cossonay
- Cossonay-gare, Penthaz, les Grands-Moulins
- Le pont sur la Venoge, au bas de Vufflens-la-ville
- Tronçon naturel préservé à travers la forêt alluviale (Vufflens-la-ville)
- La forêt alluviale vue sous un autre angle
- Forêt alluviale et étang du Bochet
- Au Moulin du Choc, avant l'arrivée dans la zone industrielle de l'Ouest-Lausannois
- Vue générale de la "Basse Venoge"
- Vue générale sur la région Echandens - Ecublens
- Passage sous l'autoroute et la voie CFF Lausanne-Genève
- En aval de la gare de triage de Denges
- Dernier tronçon de divagation, avant l'embouchure
- Fin de parcours
- Vue direction du Nord (St-Sulpice - Préverenges)
- Embouchure avec l'île aux oiseaux
- Vue globale du bassin de la Venoge, (en direction du nord)
Photos J.-M. Zellweger. En cas d'utilisation prière de mentionner la source.
Date des prises de vue: 17 octobre 2007.
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