Ambulancier, un métier technique et relationnel au service de la santé

Étudiant ambulancier, Julien Gaillard surveille en permanence l’état de ses patients (ici une situation fictive). CHANTAL DERVEY

Ni médecins ni chauffeurs, les ambulanciers sont les experts des soins préhospitaliers de base et d’urgence. Immersion sur le terrain.

"Vous êtes médecin?" La question posée par un témoin de l’arrivée de l’ambulance aux Diablerets n’étonne plus Maxime Pasquier, responsable de formation au Centre de secours et d’urgences du Chablais et des Alpes vaudoises (CSU-CAVD). «Notre métier est mal connu. On nous prend soit pour des chauffeurs, soit pour des médecins », sourit l’ambulancier. Son équipe est là pour apporter les soins préhospitaliers de base à une dame âgée vivant seule qui a fait une méchante chute dans son jardin. Aujourd’hui, la prise en charge est assurée par Julien Gaillard, étudiant ambulancier de deuxième année en stage au CSU-CAVD, sous la supervision de Titienne Loretan, ambulancière diplômée, et de Maxime Pasquier. Les stages font partie intégrante de la formation. Ils sont l’occasion de mettre en pratique les connaissances acquises aux cours et lors d’exercices fictifs. Ici, il ne s’agit pas d’une situation simulée, mais bien de la réalité du terrain.

Intervention et autoévaluation
Calme et rassurant, Julien Gaillard se présente avant de se livrer à une analyse globale de la situation. Ses collègues le secondent, tout en observant son travail. Les gestes techniques sont sûrs, la collaboration est efficace entre les professionnels. Du premier examen de l’état de santé de la patiente à l’immobilisation de sa jambe blessée en passant par l’administration d’un antidouleur par voie intraveineuse, tout s’enchaîne sans heurts. Julien Gaillard s’est aussi renseigné sur les pathologies dont souffre la patiente et sur les médicaments qu’elle prend régulièrement. La dame a tout noté dans un petit carnet qu’elle porte sur elle, en cas d’urgence. «Nous connaissons les médicaments et leurs interactions», commente l’étudiant ambulancier. En cette fin d’après-midi, l’air fraîchit. Julien Gaillard pose une couverture sur les épaules de la dame reconnaissante, qui est ensuite installée sur le brancard, puis dans l’ambulance. Au volant, Maxime Pasquier conduit en évitant les à-coups, direction l’hôpital de Rennaz. «L’image de l’ambulance toutes sirènes hurlantes ne reflète pas notre réalité quotidienne. Dans la plupart des situations, l’ambulance roule sans feux bleus ni sirènes. Il y a une part de plus en plus importante de situations à caractère social et sans atteinte somatique.» Pendant le trajet, Julien Gaillard discute avec la patiente et adapte le dosage de l’antidouleur. À l’hôpital, la dame est confiée à l’équipe d’urgence qui prend le relais. Les ambulanciers rentrent à la centrale où ils reconstituent les stocks de matériel, rangent et nettoient l’ambulance. Le moment est venu pour les trois collègues de faire le point de l’intervention. «C’était la première fois que je prenais le rôle de leader et la plupart des décisions - choix de l’antalgie et du moyen de relevage, hôpital de destination, explication aux proches - tout au long de l’intervention», précise Julien Gaillard. «Je me suis dit que j’avais choisi le traitement adapté à la problématique et que la prise en charge était bonne. Mais le point important qui ressort de cette intervention est le fait que je n’ai pas couvert la patiente assez rapidement.» Le jeune homme de 25 ans, qui s’est d’abord formé comme infirmier, a choisi cette deuxième profession pour le contact humain et l’imprévisibilité du quotidien: «Ce que j’aime, c’est de devoir m’adapter aux circonstances.»

Une formation à l’écoute de la société
La formation théorique s’adapte, elle aussi. «Le métier d’ambulancier  est une sentinelle de l’évolution psychosociale, et notre formation intègre des thèmes actuels», relève Frédéric Salamin, doyen pédagogique de l’École supérieure d’ambulancier et soins d’urgence romande ASUR. Le dernier module du cours d’éthique organisé sur trois ans prépare les futurs ambulanciers à gérer les situations de mobbing, de harcèlement ou d’insultes, qu’ils soient témoins ou victimes de tels agissements dans leur quotidien professionnel. Vanessa Kampf vient d’entamer sa dernière année de formation et suit ce cours avec intérêt. Agée aujourd’hui de 38 ans, la jeune femme s’est dirigée vers les soins préhospitaliers après avoir été agente de détention, puis assistante de sécurité publique. «Ce qui me motive depuis toujours, c’est le relationnel. Ici, on nous prépare aux situations d’exception, mais je n’ai pas vécu le quart des interventions présentées en cours. Nous sommes confrontés à beaucoup de misère.» Dans les professions longtemps exclusivement masculines qu’elle a exercées, Vanessa Kampf a su trouver sa place. Future ambulancière diplômée, elle consacre son travail de fin d’études à l’arrivée des femmes dans les ambulances et aux stéréotypes de genre dans le milieu des soins préhospitaliers. La capacité de travailler en équipe et à gérer le stress, l’esprit d’analyse et la vue d’ensemble sont des qualités indispensables aux ambulanciers. Accessibles sur concours après un CFC, une maturité ou un certificat ECG, les deux écoles supérieures de Genève et de Lausanne forment par année chacune 25 personnes recrutées parmi plus de 200 candidats, et collaborent avec les services régionaux d’ambulances pour la formation pratique.

Corinne Giroud
Office cantonal d'orientation scolaire et professionnelle

Publié dans le 24 heures du 13 octobre 2022

 

 

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