18 décembre, journée internationale des migrant-e-s

- Catégorie : Communication et Population

Dans le cadre de la journée internationale des migrant-e-s du 18 décembre, le BCI a souhaité revenir sur plusieurs études parues en 2019 qui abordent différents aspects de la vie des personnes migrantes en Suisse. Des questions d’emploi aux difficultés à trouver un logement, nous vous proposons un petit tour d’horizon des études qui permettent de mieux comprendre et mieux appréhender le vécu des personnes migrantes.

La Suisse a une population plurielle dont 37% des suisses est d’origine ou descendant de migrants, 25% est migrante et 17% des plus de 15 ans a une double nationalité selon les statistiques officielles de 2018. Le canton de Vaud abrite quant à lui 33,3% de personnes étrangères. Dans ce contexte multiculturel, il est particulièrement important d’étudier et de s’informer sur les aspects de la vie quotidienne qui impactent les personnes migrantes et sur les problèmes qu’elles peuvent rencontrer dans divers domaines.

La discrimination à l’embauche, une réalité toujours d’actualité

Deux études se sont penchées sur les discriminations à l’embauche pour tenter d’éclairer le phénomène et de comprendre les raisons qui poussent les recruteur-euse-s à écarter des dossiers provenant de candidat-e-s d’origine migrante ou descendants de migrants.

La première étude, Discrimination des personnes hautement qualifiées issues de la migration dans le domaine social ?, parue dans SFM Studies en septembre 2019 fait état des discriminations à l’embauche subies par les suisse-sse-s d’origine migrantes hautement qualifiés. Avec un focus particulier sur l’accès à des postes de cadre dans les institutions du domaine social, l’étude montre que les suisse-sse-s naturalisés hautement qualifiés sont mis à l’écart par les recruteur-euse-s pour des raisons qui apparaissent à ces derniers comme légitimes, telles que la qualité des cursus de formation à l’étranger qui demanderaient une vérification ou les compétences linguistiques. Cette discrimination est particulièrement marquée pour les postes qui ont des positions plus visibles dans l’espace public, tels que des postes de direction ou ayant trait à la communication. Le lieu de formation des candidat-e-s joue un rôle prépondérant et les personnes ayant suivi un cursus dans un pays limitrophe sont moins discriminées que celles ayant suivi un cursus dans un pays tiers. L’étude mentionne par contre qu’il n’y a pas de différence significative entre femmes et hommes, suissesses et suisses naturalisés sont tout autant discriminés.

FIBBI, Rosita, FEHLMANN, Joëlle et RUEDIN, Didier. Discrimination des personnes hautement qualifiées issues de la migration dans le domaine social ? Neuchâtel : SFM Studies #72, Septembre 2019.

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L’importance du lieu de formation ne devrait plus compter pour la deuxième génération

Une seconde étude de l’université de Neuchâtel, Do Swiss Citizens of Immigrant Origin Face Hiring Discrimination in the Labour Market ?, conduite par le groupe nccr-on the move s’est penchée sur les discriminations dont sont victimes les citoyen-ne-s suisses d’origine immigrée. Le focus de cette étude porte sur les personnes ayant effectué leurs études en Suisse et sur des postes nécessitant un apprentissage. Il serait logique que, si la discrimination des suisse-sse-s naturalisés porte sur le lieu de formation et le doute quant à leurs compétences linguistiques, les suisse-sse-s de seconde génération ne subissent plus ces discriminations à l’embauche. Or, ces derniers sont encore discriminés sur la base de leurs noms de famille. Les chances d’obtenir un entretien d’embauche pour les citoyen-ne-s dont le nom de famille est originaire de pays tiers ou des Balkans est inférieures à celles des citoyen-ne-s dont le patronyme est originaire d’un pays limitrophe européen, elle-même inférieure à celles des citoyen-ne-s dont le nom de famille est local.

Cependant, le taux de discrimination varie selon les postes, des métiers comme celui d’électricien-ne tendent à montrer moins de discrimination à l’embauche que ceux qui demandent une relation avec la clientèle. Ce qui rejoint l’étude Discrimination des personnes hautement qualifiées issues de la migration dans le domaine social ?, qui montre une plus grande discrimination dans les postes ayant plus de visibilité dans l’espace public. Les citoyen-ne-s suisses descendants de migrant-e-s sont assimilés à des personnes provenant directement de l’étranger, et de même, les personnes binationales sont considérées comme étrangères avant d’être suisses, une confusion qui montre la difficulté à se représenter la diversité comme ancrée dans la structure de la population suisse, inscrite dans le territoire, l’ici et le maintenant.

ZSCHIRNT, Eva et FIBBI, Rosita. Do Swiss Citizens of Immigrant Origin Face Hiring Discrimination in the Labour Market ? Neuchâtel : nccr-on the move, Working paper #20, Février 2019.

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Former les adolescent-e-s et jeunes adultes arrivés tardivement en Suisse : une nécessité

Les adolescent-e-s et jeunes adultes arrivés tardivement en Suisse font face à de nombreux défis. Au moment où les Suisse-sse-s de leur âge se préparent à la vie professionnelle, les jeunes migrant-e-s sont confrontés à l’exil, à des parcours parfois difficiles pour rejoindre la Suisse et à la procédure d’asile avec les incertitudes qui l’accompagnent. Dans ce cadre, offrir à ces jeunes un accès, non seulement à des cours de langue, mais aussi à des formations professionnalisantes, à des passerelles pour rejoindre les structures régulières et à des préapprentissages est une nécessité pour augmenter leurs chances d’accéder au marché du travail. Augmenter l’accès et le nombre de cours est d’autant plus important que les réglementations diffèrent selon les cantons, engendrant une grande disparité entre ces jeunes selon le lieu où ils se trouvent. Ces adolescent-e-s et jeunes adultes ont passé l’âge de la scolarité obligatoire et n’ont souvent pas eu accès à des formations dans les pays dans lesquels ils étaient avant d’arriver en Suisse.

Ces adolescent-e-s sont souvent confrontés à des frustrations entre leurs rêves (travailler dans un domaine qui requiert en Suisse une formation en HES par exemple) et la réalité dans laquelle ils ont de la peine à obtenir un permis qui les autorise à se former et à travailler, ou alors la situation inverse lorsqu’ils doivent devenir financièrement indépendants le plus vite possible. L’étude pointe encore les bénéfices pour la société suisse d’offrir ces formations de base aux jeunes arrivés tardivement en Suisse. D’une part, les mesures d’intégration précoce permettent d’économiser des dizaines de millions de francs chaque année, les bénéficiaires pouvant être autonomes plus rapidement ; d’autre part, ces mesures ont un effet positif sur la santé mentale de ces jeunes entraînant une réduction des coûts de la santé. De plus, l’accès à ces formations permet de diminuer la délinquance que peuvent connaître certain-e-s requérant-e-s à cause de l’inaction persistante et du manque de perspectives. Finalement, les mesures d’intégration précoce aident à combattre la pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans certaines branches.

Donner aux adolescent-e-s et jeunes adultes arrivés tardivement en Suisse une formation qui, à terme, leur donne accès au marché du travail est donc une nécessité, pour elles et eux comme pour la société d’accueil, et est d’autant plus efficace que les jeunes ont accès à ces formations dès leur arrivée en Suisse.

FEHLMANN, Joëlle, EFIONAYI-MÄDER, Denise, LIECHTI, David et MORLOK, Michael. Le plus tôt est le mieux pour tous. Neuchâtel : SFM studies #74, octobre 2019.

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Des difficultés à trouver un logement

Une étude parue cette année, Discrimination ethnique sur le marché suisse du logement, mandatée par l’Office fédéral du logement (OFL), fait ressortir la discrimination dont sont victime les personnes migrantes lors de la candidature pour des appartements. Menée à large échelle sur le plan national et dans toutes les régions linguistiques, cette étude est la première à se pencher sur la discrimination ethnique sur le marché suisse du logement.

Comme pour les études sur l’accès à l’emploi, en Suisse, un nom de famille qui situe la personne comme d’origine étrangère est le facteur principal qui conduit à écarter des candidat-e-s à des logements. Portant autant sur des logements dans les agglomérations que sur des logements situés dans les zones rurales, l’étude montre une légère différence entre les hommes et les femmes qui sont moins discriminées, et une différence plus nette en fonction des qualifications des personnes. Ainsi les personnes migrantes ou descendantes de migrant-e-s ayant un diplôme de niveau tertiaire sont nettement moins discriminées. La qualité de la rédaction de la demande influence aussi très clairement les chances de se voir proposer une visite pour un logement à louer. Il y a aussi une nette différence entre les personnes provenant ou descendant de migrant-e-s de pays limitrophes et celles provenant ou descendant de migrant-e-s de pays tiers, les personnes issues des pays des Balkans étant particulièrement défavorisées.

L’étude montre encore que cette discrimination des personnes à patronyme étranger est plus faible dans les villes que dans les zones rurales, et que les chances de se voir proposer une visite vont varier considérablement d’une commune à l’autre, tendances qui semblent en relation avec les tendances politiques communales. L’étude se conclut sur le fait que la discrimination sur le marché du logement en Suisse est similaire à celle observée dans des études comparables dans d’autres pays occidentaux.

AUER, Daniel, LACROIX, Julie, RUEDIN, Didier et ZSCHIRNT, Eva. Discrimination ethnique sur le marché suisse du logement, Bern : OFL, février 2019.

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