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Résultats intermédiaires des sondages menés par l’epfl auprès des enseignant·e·s

Le Centre LEARN de l’EPFL a procédé durant le printemps à un sondage quantitatif réunissant les réponses de 5666 professionnel·le·s, soit 42% du corps enseignant vaudois. Des entretiens qualitatifs ont ensuite été menés, au début de l’été, avec un millier d’enseignant·e·s pour affiner le tableau.

Les réponses des participant·e·s à l’enquête montrent que la grande majorité des enseignant·e·s étaient conscient·e·s de la nécessité d’adopter des approches différentes pour l’enseignement à distance, de créer des contenus nouveaux et adaptés. Ils ont donné la priorité au maintien à tout prix du contact social avec leurs élèves, à leur suivi et à la diffusion de contenus pédagogiques. Ils ont pu observer des problèmes récurrents rencontrés par certains élèves, tels que le manque d’autonomie, un déficit de motivation et bien sûr les grandes disparités dans l’encadrement familial – accès aux outils numériques, présence et attention d’un parent, espace favorisant la concentration. Autant de facteurs ayant empêché ces élèves de profiter pleinement de l’offre d’enseignement à distance. Ces inégalités et les moyens de les réduire se trouvent au cœur des recherches qui sont actuellement menées ; car il est primordial que l’école, même à distance, puisse continuer à poursuivre son objectif central de garantir l’égalité des chances.

En France, durant le confinement, le décrochage massif des élèves a constitué un thème de controverse majeur. Une enquête a mesuré des taux de décrochage partiel à total pouvant s’élever jusqu’à plus de 40% des élèves d’une classe. Le sondage mené auprès des enseignant·e·s vaudois·e·s est plus rassurant : à peu près 50% des sondé·e·s ont indiqué que 3 élèves ou moins par classe à l’école obligatoire ne suivaient pas l’enseignement à distance. Les pourcentages d’élèves non-suiveurs établis (autour de 15% par classe) sont ainsi très inférieurs aux chiffres discutés en France. Ils sont toutefois à prendre avec beaucoup de prudence. On sait qu’ils ont évolué au fil du semi-confinement. Le sondage a été réalisé au terme des quatre premières semaines du travail à domicile, or les ratios ont connu une nette augmentation après les décisions d’annulation des examens de fin de scolarité. Il y a par ailleurs une très grande variation entre degrés d’enseignement, donc selon l’âge des élèves. Le phénomène a été le plus marqué au cycle 3 (9e-11eS) et au gymnase ; dans les écoles professionnelles, il était davantage présent qu’au degré primaire (cycles 1 et 2), mais moins fort qu’au cycle 3 et dans les gymnases.

Quoi qu’il en soit, pour prévenir le décrochage, il a été primordial de maintenir un contact le plus régulier possible avec tous les élèves, ainsi que de donner à leur travail un rythme par des rituels bien établis, ce qui pose la question des outils les plus efficaces pour y arriver. À cet égard, l’email et la messagerie instantanée WhatsApp se sont imposés comme les deux canaux principaux pour garder le contact avec les élèves et/ou leurs parents. Le téléphone arrive en 3eposition, surtout utilisé pour assurer le suivi de tous les élèves. Le recours à la visioconférence, avec les applications Zoom ou Webex, a surtout concerné l’enseignement gymnasial. Dans ce cas, il y a une association positive entre l’utilisation de visioconférences pour une gamme d’activités pédagogiques et le nombre de suiveurs. On constate encore une corrélation positive entre le sentiment de confiance de l’enseignant·e et l’utilisation des outils de visioconférence.

Si l’email ou les messageries instantanées ont été massivement utilisés, ce n’est pas que ces outils étaient forcément les plus efficaces, mais ils étaient immédiatement disponibles et connus des enseignant·e·s. Cela renforce l’un des présupposés de base de l’éducation numérique : avant la fourniture de nouveaux outils, la priorité réside dans la formation des enseignant·e·s et des élèves pour maîtriser ces outils. Le sondage a aussi démontré qu’il n’existait aucun « outil miracle », mais que chacun d’entre eux, parmi le panel à disposition, répondait à une fonction précise. Ainsi, par exemple, la visioconférence permet d’instaurer des rituels utiles pour rythmer la journée de travail ou pour maintenir le lien social. Les outils collaboratifs, eux, permettent à l’enseignant·e de donner des retours sur le travail des élèves.

À propos des outils, les besoins exprimés par les enseignant·e·s seront précisés et nuancés par les entretiens qualitatifs conduits dans la deuxième phase de l’enquête de l’EPFL. Plusieurs réponses d’enseignant·e·s suggèrent déjà un certain désarroi face aux ressources pédagogiques en ligne. Perçues comme abondantes sur des plateformes qu’ils·elles connaissent, elles sont toutefois très peu utilisées. Peut-être parce que les enseignant·e·s ont l’impression de s’y perdre. Cette hypothèse, qui revient dans plusieurs commentaires, reste à vérifier. Elle imposerait alors de penser l’accès à ces ressources pédagogiques en ligne selon des critères de facilité et d’efficacité. Selon d’autres commentaires spontanés, la vraie difficulté de l’utilisation d’outils éducatifs numériques consiste à répondre à la question : « que puis-je faire avec mes élèves grâce à cet outil ? »  L’enjeu principal ne serait donc pas le choix des outils, mais bien la qualité des activités d’apprentissage à réaliser avec ceux-ci. La prééminence des contenus sur les contenants paraît ainsi devoir s’imposer, confirmant la fonction à haute valeur ajoutée des enseignant·e·s dans le cadre du déploiement de l’éducation numérique.

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