Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 24 novembre 2020, point 20 de l'ordre du jour

Texte déposé

 

En juin 2020, le Conseil d’Etat a présenté le Plan climat dont l’objectif est d’atteindre la neutralité carbone en 2050 pour le canton. La première étape consiste à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 50 à 60% d’ici 2030 (par rapport à 1990). En juin 2020, lors de la présentation de ce plan climatique par le Conseil d’Etat, la Ministre Métraux indiquait que l’objectif est calqué sur celui du Conseil fédéral et d’autres cantons : « Il s’agit d’être crédible en fixant des objectifs qui ne soient pas inatteignables. » (Le Temps, 24 juin 2020).

 

Selon le Plan climat : « Il apparaît prioritaire d’assurer la mise en œuvre de la Conception cantonale de l’énergie (CoCEn), mais également d’envisager un renforcement des moyens engagés pour atteindre ses objectifs à plus courte échéance » (p. 22). Il vise à « augmenter largement la production locale d’énergies renouvelables » (mesure 7, p. 45). Pour ce faire, il faut « accélérer la mise en œuvre de la CoCEn en ramenant les objectifs 2035 à 2030 » (p. 46). Pour l’éolien, cela représente 600 GWh/an (CoCEn, p. 24) d’ici 2030, soit 13% de la consommation électrique du canton en 2018.

 

Or, la Ministre Métraux a déclaré lors d’une séance le 8 octobre 2020 en présence des élus communaux du Jura-Nord vaudois : « Il y a six dossiers à l’examen au Tribunal fédéral. Je n’exclus pas que le Conseil d’État revoie sa politique éolienne. Mais je ne peux pas en dire plus j’attends les arrêts » (La Région, 9 octobre 2020). Doit-on en inférer que le Conseil d’Etat pourrait revoir à la baisse la cible de 600 GWh/an à l’horizon 2030 qu’il vient d’approuver dans le Plan climat de juin 2020 ? Le Conseil d’Etat est-il conscient que cette déclaration déstabilise fortement l’éolien vaudois en ouvrant une période d’incertitude puisque le Tribunal Fédéral ne rendra probablement son 1er arrêt qu’en 2021.

 

Il est malheureusement de notoriété publique que le développement des parcs éoliens est extrêmement long et difficile. Des procédures administratives interminables et les oppositions systématiques font que le développement d’un parc éolien prend au minimum 15 ans en Suisse. En conséquence, la Suisse ne produit que le 0.2% de son électricité grâce à l’éolien alors que la moyenne européenne — pour un demi-milliard d’habitants — est déjà de 15%, soit 75 fois plus ! Afin de respecter l’Accord de Paris et tenir compte de l’urgence climatique, toutes les études (AIE, IRENA, Greenpeace, Bloomberg NEF) montrent que l’éolien sera la première ressource énergétique du continent : elle assurera entre 35 et 50% de la production électrique à l’horizon 2050. Ces études mettent en avant le fait que le bilan écologique de l’éolien est le meilleur après celui de l’hydroélectricité : l’éolien permet de décarboner le plus efficacement le système énergétique. Le graphique ci-dessous présente l’excellent bilan écologique -impacts sur le climat et l’environnement- de l’éolien en Suisse :

 

 

 

UCE = unité de charge écologique

https://www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/economie-consommation/info-specialistes/les-bases-methodologiques-des-ecobilans/la-methode-de-la-saturation-ecologique.html

 

Deux mesures devraient permettre de faciliter le développement des projets éoliens :

-    la révision de la LATC, entrée en vigueur au 1er septembre 2018, qui donne la possibilité de mettre à l’enquête des Plans d’affectation valant Permis de construire (PAPc, art. 28 LATC) ;

-    le COPEOL (Comité de planification des éoliennes) qui permet la coordination des différents services de l’Etat.

 

Les retours d’expérience que nous avons reçus des développeurs de parcs éoliens dans le canton sont mitigés quant à l’efficacité de ces deux mesures. En tenant compte des effets de la crise sanitaire actuelle sur le traitement des dossiers, ils font les constats suivants.

 

Révision de la LATC

-    Les exigences du canton concernant la mise à l’enquête des projets éoliens PAPc évoluent en fonction de l’avancement des dossiers. Les développeurs se retrouvent donc confrontés à des procédures incomplètes et mouvantes, ce qui allonge et complexifie considérablement le développement des parcs.

-    A cela s’ajoute le fait qu’il n’y a pas de reconnaissance explicite par le canton de cet état de fait ; il est donc parfois impossible de créer les conditions nécessaires à une collaboration efficace entre les parties prenantes (administration cantonale, communes et développeurs).

-    Un flou demeure quant au traitement des demandes d’autorisations pour les aménagements situés en dehors ou à cheval du PA (mesures de compensation ou aménagements parallèles au parc nécessaires). Il conviendrait de spécifier explicitement quels sont les objets devant procéder à un examen préalable (EP) en amont de la mise à l’enquête du PAPc afin d’être conformes à la LATC et d’éviter tout vice de procédure potentiel.

-    Une optimisation de la coordination des procédures entre services, surtout lorsqu’ils n’appartiennent pas au même département, est nécessaire afin d’éviter la multiplication des procédures pour EP portant sur le même aménagement. Par exemple, certaines mesures de compensation déjà validées par les services compétents doivent être validées une seconde fois par d’autres services lors d’un EP supplémentaire avant de recevoir l’autorisation de mettre à l’enquête. Il en résulte une perte de temps, tant pour l’administration cantonale que pour les porteurs de projet.

 

Bureau COPEOL

-    Dans la réponse d’octobre 2019 à l’interpellation du député Petermann («Parcs éoliens vaudois, jusqu’à quand va-t-on brasser de l’air avant de voir une éolienne en brasser dans notre Canton ? », 19_INT_374) le Conseil d’Etat mentionne la mise en place du bureau COPEOL qui réunit les principaux services institutionnels concernés par l’éolien et indique dans sa réponse que COPEOL : « […] permet de répondre de manière concertée aux thématiques soulevées dans le cadre du développement des différents projets en cours et d’assurer une réponse dans les délais impartis aux examens préalables ».

-    Bien que le bureau COPEOL facilite les échanges interservices, les délais impartis aux examens préalables ne peuvent être tenus, faute de disponibilité de certains services et d’un.e coordinateur.trice dédié.e entièrement à ces projets comme cela était le cas jusqu’en 2018.

-    Comme énoncé précédemment, le manque de coordination entre les différents services de l’Etat remet en cause l’intention du Conseil d’Etat développée dans sa réponse à l’interpellation du député Petermann.

 

Questions

Au vu de l’urgence climatique et du rôle prépondérant que l’éolien sera amené à jouer dans le canton de Vaud et en Suisse, je souhaite adresser au Conseil d’Etat les questions suivantes :

 

1.     Le Conseil d’Etat maintient-il son objectif d’atteindre une production éolienne de 600 GWh/an d’ici 2030 ?

2.     Que compte entreprendre le Conseil d’Etat pour accélérer significativement le traitement et la coordination par ses services et le COPEOL des dossiers éoliens afin d’atteindre son objectif de 600 GWh/an de production éolienne d’ici 2030 ?

 

Je remercie d’avance le Conseil d’Etat pour ses réponses.

Conclusion

Souhaite développer

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Carole Schelker (PLR) —

Ce n’est pas la première intervention qui souligne l’urgence de mettre en œuvre le Plan climat, qui pointe du doigt les lenteurs administratives accompagnant les projets de parc éolien. La réponse du Conseil d’Etat à l’interpellation de notre collègue Olivier Petermann, il y a plus d’une année, laissait entrevoir des améliorations dans le traitement des dossiers. Force est de constater qu’aujourd’hui les délais pour l’aboutissement des examens préalables sont toujours aussi longs, et ce malgré la création du comité de planification des éoliennes (COPEOL), censé faciliter les échanges interservices. L’intervention de Mme la conseillère d’Etat, le 8 octobre 2020, devant les élus communaux et repris par le journal La Région n’a rien pour rassurer. En effet, elle disait « il y a six dossiers à l’examen au Tribunal fédéral, je n’exclus pas que le Conseil d’Etat revoie sa politique éolienne, mais je ne peux en dire plus, j’attends les arrêts. » Face à cette déclaration quelque peu déstabilisante, j’interpelle le Conseil d’Etat pour savoir s’il souhaite toujours se donner les moyens d’atteindre les objectifs ambitieux de 600 GWh par an de production éolienne en 2030.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

L’interpellation est renvoyée au Conseil d’Etat qui y répondra dans un délai de trois mois.

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