Point séance

Séance du Grand Conseil du mercredi 21 décembre 2022, point 17 de l'ordre du jour

Texte déposé

Motion

 

Actes de naissance, actes de décès, reconnaissances de paternité, cérémonies de mariage civil : pourquoi tant de retards ? Il est temps d’agir !

 

 

Depuis plusieurs mois, le centre administratif de l’état civil souffre de nombreux retards, comme le relèvent certains articles de presse.

 

Le 30 juin dernier, notre collègue Pierre Zwahlen interpellait le Conseil d’État sur la même problématique. Depuis le dépôt de son interpellation, la situation ne s’est pas améliorée ; au contraire, elle semble s’être encore dégradée.

 

Dernièrement, un reportage de la RTS du 3 novembre 2021[1] signalait des dysfonctionnements graves : retards dans les actes de naissances, employées et employés démotivé-e-s et fatigué-e-s d’une charge de travail trop importante. Selon le reportage, un tiers des effectifs auraient démissionné de leur poste en moins de 2 ans. Les témoignages sont édifiants : culture de la peur, mise en concurrence entre officières et officiers, sentiment de travailler à l’usine…  Toujours selon ce reportage, ce sont 1500 dossiers qui sont actuellement en attente.

 

On peut évidemment estimer que ces problèmes ont été déclenchés par le Covid. Mais en réalités, ces lenteurs et problèmes existaient déjà avant la pandémie, comme le relate un article paru dans le journal La Côte début 2020 (26.02.2020). Celui-ci relate des conditions de travail difficiles, le stress, le manque de ressources et des salaires trop bas en comparaison d’autres cantons limitrophes. Le Grand Conseil avait été sensibilisé à ces problématiques, puisque des officières et officiers d’état civil avaient déjà manifesté leur désarroi un mardi de séance du Grand Conseil devant le Parlement. Selon l’article de La Côte, 7 officiers ont démissionné, 3 ont pris leur retraite alors que seulement 3 officiers avaient été engagés pour les remplacer.

 

La pandémie a évidemment aggravé la situation. Pour les reconnaissances en paternité, j’ai récemment été contacté par des familles qui confirment qu’un délai de six mois n’est plus l’exception. D’autres personnes m’ont témoigné avoir dû patienter des dizaines de minutes au téléphone afin de pouvoir parler à une collaboratrice ou un collaborateur de l’état civil, qui finalement leur a répondu qu’il fallait faire preuve de davantage de patience. Un père s’est – de guerre lasse – décidé à faire cette reconnaissance de paternité dans le canton de Zurich. En sept jours, il avait obtenu un rendez-vous et la reconnaissance en paternité était réglée.

 

En juin 2020, le journal 24 Heures[2] relatait que les actes de décès peinaient à être délivrés dans des délais « raisonnables ». Ces actes sont pourtant essentiels pour permettre aux familles de régler les questions administratives, mais aussi pour commencer leur deuil. D’après les professionnels de la branche contactés, il a fallu attendre août 2021 pour que l’obtention d’un acte de décès se fasse à nouveau dans des délais acceptables, soit deux à trois jours. Jusqu’au début de l’été 2021, il était de deux mois… En Valais, le temps administratif nécessaire à son établissement est d’une dizaine de minutes et peut être directement réalisé par les Pompes funèbres. D’autres solutions sont donc possibles et réalisables.

 

Les actes de naissance posent aussi problème : une mère vaudoise témoignait fin juillet à la RTS de son désarroi, puisqu’elle a reçu l’acte de naissance un mois et demi après la naissance de son bébé. Or, sans cet acte, pas de possibilité de recevoir des allocations familiales, de recevoir un numéro AVS ou encore une carte d’assurance-maladie.

 

Compte tenu de ce qui précède, les député.e.s soussigné.e.s demandent à ce que le Conseil d’État mette tout en œuvre pour permettre un retour rapide à la normale au sein de l’état civil vaudois et ainsi soulager les services de l’état civil ainsi que la population vaudoise qui souffrent inutilement de ces lenteurs, notamment :

  • en identifiant rapidement la nature des problèmes et en proposant de nouvelles façon d’organiser le centre administratif de l’état civil,
  • en simplifiant et accélérant certaines procédures administratives, en s’inspirant notamment d’autres cantons suisses,
  • en réévaluant la grille des salaires pour les officières et officiers d’état civil et en formant et engageant de nouvelles officières et officiers d’état civil.

 

 

Denis Corboz

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[1] https://www.rts.ch/info/regions/vaud/12615105-retards-et-nombreux-departs-a-letat-civil-vaudois-un-service-dans-la-tourmente.html

[2] https://www.24heures.ch/deborde-depuis-des-mois-letat-civil-ne-se-remet-pas-du-covid-612215255929

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Alexandre DémétriadèsSOC
Julien EggenbergerSOC
Vincent JaquesSOC
Claire Attinger DoepperSOC
Eliane DesarzensSOC
Jean TschoppSOC
Cendrine CachemailleSOC
Jean-Claude GlardonSOC
Carine CarvalhoSOC
Monique RyfSOC
Julien CuérelUDC
Maurice TrebouxUDC
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Jérôme ChristenLIBRE
Delphine ProbstSOC
Céline MisiegoEP
Yves PaccaudSOC
Cédric EchenardSOC
Anne-Sophie BetschartSOC
Salvatore GuarnaSOC
Circé Barbezat-FuchsV'L
Stéphane MontangeroSOC
Muriel ThalmannSOC
Didier LohriVER
Stéphane BaletSOC
Yvan PahudUDC
Sébastien CalaSOC

Documents

RC - 21_MOT_25_Corboz_Etat civil

21_MOT_25-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice

Notre collègue Denis Corboz a insisté, lors des travaux de la commission, sur le fait qu’il ne voulait en aucun cas porter des attaques contre l’Etat civil et ses collaborateurs. La motion vise à améliorer une situation devenue tendue quant aux délais, notamment s’agissant des reconnaissances de paternité ou les procédures préparatoires de mariage. Cette motion demandait :

  1. d’identifier la nature des problèmes et de proposer de nouvelles méthodes d’organisation ;
  2. de simplifier et d’accélérer des procédures
  3. de réévaluer la grille des salaires.

Le Conseil d’Etat a rappelé certains éléments et présenté des tableaux et graphiques contenant des informations sur les délais de traitement. S’agissant des délais, ils ne sont pas toujours imputables à l’administration puisque les personnes administrées doivent fournir certains documents qu’ils ont parfois de la peine à fournir dans les délais. De plus, certains actes et procédures, comme les mariages, doivent être effectués en présentiel par les officières et officiers d’Etat civil. Il est vrai que la pandémie du Covid a provoqué un certain nombre de retards. Toutefois, un certain nombre de mesures ont déjà été prises pour la réorganisation de l’entité, notamment avec une centralisation et une plus large ouverture des guichets à Lausanne. On l’a vu sur les tableaux présentés, il y a déjà une amélioration de la situation ; des ETP ont été octroyés pour l’année 2022 et doivent donc déjà être en fonction depuis que la commission a siégé. Ils devraient ainsi permettre de raccourcir les délais. On a également vu que la création de l’hôpital Riviera-Chablais a créé un certain nombre de retards, car on a dû prendre en compte des naissances qui étaient auparavant sur le territoire valaisan.

Lors des travaux de la commission, plusieurs questions ont été soulevées. Les commissaires se sont accordés à dire que les délais restent longs pour les reconnaissances, les mariages et les reprises de nom de célibataire. L’office de l’Etat civil nous a aussi dit que 2022 serait compliqué, puisqu’il y a une augmentation de 15 % des naissances au premier semestre 2022, qu’il y a eu l’entrée en vigueur de la loi sur le Mariage pour tous et qu’il y a les possibilités de changer de sexe et de prénom depuis le 1er janvier 2022 à l’Etat civil. On sait que cela va à nouveau provoquer quelques engorgements.

Il faut également relever que toute la procédure d’Etat civil est régie par le droit fédéral. On n’a donc pas beaucoup de marge de manœuvre au niveau cantonal pour changer les choses. Un certain nombre d’actes de procédure doivent être effectués par des personnes ayant le brevet d’officière ou d’officier d’Etat civil ; il y a un certain nombre de personnes en formation actuellement, mais c’est un métier pour lequel il est plus difficile de recruter que pour des employés de commerce. L’Etat civil a déjà pris beaucoup de mesures ; des journées de travail volontaire les samedis ont permis des actions coup de poing pour diminuer le nombre de dossiers en suspens.

En conclusion, la commission s’est accordée sur le constat que des mesures ont été prises. Le motionnaire a décidé de transformer sa motion en postulat. On s’est mis d’accord sur une prise en considération partielle, avec une modification de la conclusion : le postulat demande au Conseil d’Etat un rapport sur les mesures d’amélioration prises et leur efficacité, avec le souhait que les mesures fassent l’objet d’une communication large à la population. La commission a adopté cette motion transformée en postulat à l’unanimité.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Denis Corboz (SOC) —

Lorsque j’ai déposé cette motion, la presse relayait depuis plusieurs mois, dans différents articles ou reportages sur la RTS, les difficultés dont souffrait l’Etat civil – des retards, des démissions en cascade, une culture de travail ou d’entreprise difficile à supporter pour les officières et officiers d’Etat civil. Ces lenteurs et problèmes avaient déjà été relayés avant la pandémie – il est bon de le rappeler. Un article paru dans le journal La Côte en février 2020, soit juste avant le début du Covid, relayait ces préoccupations. Ceux qui étaient là lors de la dernière législature s’en rappellent peut-être : des officiers d’Etat civil étaient venus manifester devant le Grand Conseil pour se plaindre de leurs conditions de travail. Il y a également des difficultés autour des actes de naissance, qui posent toujours un problème. Fin juillet 2021, une mère vaudoise témoignait à la RTS de son désarroi, puisqu’elle avait reçu l’acte de naissance un mois et demi après la naissance de son bébé. Or, sans acte de naissance, il n’est pas possible de recevoir des allocations familiales, un numéro AVS ou une carte d’assurance-maladie. A la suite de ces articles, j’avais été contacté par deux Vaudois qui se plaignaient de la lenteur incroyable du service : plus de 6 mois pour organiser un mariage et une reconnaissance de paternité qui n’arrivait pas et qui s’est finalement faite à Zürich en sept jours. Pour mémoire, le Covid est également passé par Zürich ; cela questionne donc au sujet de l’Etat civil du canton de Vaud.

Lors de la commission, les réponses apportées par l’administration nous ont paru plutôt convaincantes. J’ai donc décidé de transformer ma motion en postulat. La commission a décidé qu’il fallait désormais assurer un suivi des mesures, de leur concrétisation et de leur efficacité, et que le Conseil d’Etat établisse un rapport sur les mesures d’amélioration prises et de leur efficacité à la suite de ce dépôt. Un peu moins d’un an plus tard, j’ai encore eu des discussions avec d’autres personnes, qui m’ont également parlé des mêmes difficultés. Je peux comprendre que les services ne puissent pas, du jour au lendemain, diminuer les retards de manière drastique et j’ai été persuadé, par le chef de service, M. Maucci, que le département et l’administration font tout leur possible pour amener de nouvelles mesures et améliorer la situation au plus vite. Je suis d’autant plus prêt à le croire que le département a changé de conseiller d’Etat ; c’est maintenant Mme Isabelle Moret qui aura à cœur d’améliorer le fonctionnement de ce service. Je resterai cependant attentif aux retours factuels de la population sur les délais et la qualité offerts.

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Cela fait bien plus de deux ans que les retards de l’Etat civil préoccupent et ont des effets néfastes pour les usagères et usagers. J’avais eu l’occasion de déposer une question orale à ce sujet, mais cela n’a pas suffi. J’ai dû interpeller ensuite et c’est notre collègue Corboz qui a pris le relais au travers de cette motion transformée en postulat. La commission a souhaité, à la fin du mois de janvier, que le rapport contribue à l’information du public sur les mesures prises, mais il n’aura pas fallu moins de huit mois pour que le rapport soit publié ! C’est regrettable pour celles et ceux qui ont enduré des retards conséquents.

Les documents de l’Etat civil ont leur importance, par exemple quand il s’agit d’obtenir des allocations familiales. Notre collègue Corboz l’a rappelé : il faut obtenir un acte de naissance pour obtenir ces allocations. Les retards se sont multipliés sur les reconnaissances en paternité, sur les actes de naissance et sur d’autres documents. Or, ces retards existent encore. Pour ma part, je me réjouis d’apprendre quelle est l’évaluation que fait la nouvelle conseillère d’Etat en charge de l’Etat civil et de savoir si les retards se sont complètement résorbés. Il y a eu l’engagement de personnel ; c’est bien, mais ce personnel doit être formé et il faut compter au moins six mois pour que cela porte effet. J’espère vraiment que la situation est désormais régularisée dans tous les domaines, mais je ne peux que regretter que la situation perturbée ait duré aussi longtemps. Je vous invite à transmettre ce postulat au Conseil d’Etat.

M. Jean-Daniel Carrard (PLR) —

Je déclare mes intérêts : je faisais partie de la commission. Comme il est dit dans le rapport, il ne faut pas le prendre comme une attaque contre l’Etat civil, bien évidemment. On s’est rendu compte que beaucoup d’efforts avaient été faits, notamment pour rattraper le retard. Cela va dans le sens de la motion de M. Corboz. Ce travail important de rattrapage est visiblement méconnu du public. Madame la conseillère d’Etat, nous vous invitons évidemment à continuer à soigner les délais, mais également à soigner l’image. Nous pensons que l’Etat civil mérite de voir son image être améliorée. Cela ne veut pas dire que tout est rose, mais nous avons été convaincus, notamment, par les explications du chef du département, lors de la séance de commission. Celui-ci a d’ailleurs fait une proposition qui a été votée par la commission : « Le postulat demande au Conseil d’Etat un rapport sur les mesures d’amélioration prises et sur leur efficacité, avec le souhait que les mesures fassent l’objet d’une communication large ». Ainsi, le groupe PLR soutiendra le vœu de la commission et vous invite, madame la conseillère d’Etat, à ne pas lâcher le contrôle dans ce secteur et à faire en sorte que les attentes de la population puissent être satisfaites.

Mme Isabelle Moret (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Monsieur Corboz, je vous remercie pour votre confiance, que j’apprécie. En effet, les choses ont évolué dans ce domaine. Vous avez déposé votre motion en 2021 et la commission s’est réunie le 31 janvier 2022, mais entretemps le Conseil d’Etat a rendu son rapport sur le postulat de Mme Attinger-Doepper « Moins de tracas pour les proches confrontés à un deuil », ce qui nous a permis de venir le 5 septembre en commission afin d’exposer les avancements faits depuis, dans le cadre de l’Etat civil. Je vous invite, par simplification, à lire la réponse du Conseil d’Etat à ce postulat. A ma connaissance, le rapport de la commission n’est pas encore sorti. Vous trouverez également dans le rapport des explications supplémentaires sur les améliorations effectuées. De plus, le 7 octobre, une commission de votre Grand Conseil a aussi eu l’occasion de se pencher sur le projet de Loi sur l’Etat civil. Là encore, nous avons eu l’occasion de détailler les améliorations effectuées dans cet office.

C’est très volontiers que nous vous fournirons un rapport final qui vous permettra d’avoir une vue complète de ce qui a été effectué. Il y a encore un rattrapage en matière de mariages : le retard des mariages à cause du Covid se poursuit ; il commence à être résorbé, mais n’oubliez pas que nous sommes l’un des rares cantons à proposer des lieux prestigieux, sympathiques pour effectuer des mariages. Dès lors, des mariages d’autres cantons ont lieu dans notre canton, avec nos officiers d’Etat civil. Cela explique ce retard de plusieurs mois. Je profite de cette occasion pour vous le dire – c’est marqué clairement sur le site Internet de l’Etat de Vaud : lorsqu’il y a un bébé en route, il existe une priorisation pour ce type de mariage. Il est souhaitable de le manifester assez rapidement, afin de prendre le fast track baby.

Le problème est en voie de résorption, mais les choses ne sont pas facilitées par le fait que l’hôpital de Rennaz a la chance de voir naître les bébés de deux cantons, tous inscrits à l’Etat civil par les officiers vaudois ; c’est d’ailleurs un élément dont je souhaite discuter avec nos amis valaisans. En résumé, du point de vue technique, nous vous expliquerons volontiers les améliorations déjà faites et en cours au sein de l’Etat civil. Concernant la communication, en plus du site Internet, nous souhaitons profiter de suivre votre proposition de communication très large lors de l’inauguration des nouveaux bureaux de l’Etat civil qui auront normalement lieu fin janvier début février 2023. Ce sera pour nous l’occasion d’inaugurer et de communiquer vastement à ce sujet.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération partiellement par 114 voix et 2 abstentions.

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