Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 16 février 2021, point 6 de l'ordre du jour

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Texte adopté par CE - Empd

Rapport de la commission_CTAE_EMPD 196_E. Räss

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M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice

Deux semaines après le premier débat, à tête reposée, notre Grand Conseil traite à nouveau des trois initiatives cantonales qui demandent à modifier la Loi fédérale sur la surveillance de l’assurance-maladie (LSAMal). Notre Commission thématique des affaires extérieures rappelle qu’il s’agit d’une démarche conjointe menée avec les cantons du Tessin, de Fribourg, de Neuchâtel, du Jura et de Genève, dont les parlements ont déjà approuvé les initiatives à l’intention de l’Assemblée fédérale. A l’origine des trois textes se trouve le conseiller d’Etat De Rosa, du Parti démocrate-chrétien (PDC)- le Centre, en charge du département tessinois de la santé. Il s’agit notamment d’ancrer dans la loi fédérale la volonté du Grand Conseil qui a adopté la résolution de notre collègue Florence Gross « Primes maladies, la population vaudoise ne doit pas être pénalisée pour ses efforts » (19_RES_024). Pour la Commission thématique de santé publique, nos collègues Vassilis Venizelos et Philippe Vuillemin ont signalé le caractère non partisan des trois initiatives et rappelé que l’ex-députée libérale Eliane Rey avait déposé une proposition pour que l’on rembourse aux assurés vaudois ce qu’ils avaient payé en trop.

La première initiative « Plus de force aux cantons » vise à rétablir la transmission des informations aux cantons telle qu’elle existait avant 2014, en particulier les tarifs des primes prévues. Les cantons pourront ainsi s’exprimer de manière pertinente sur la base d’informations complètes quant aux propositions de primes d’assurance sur leur territoire. La commission vous invite à confirmer votre approbation du premier débat.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Projet de décretportant sur le dépôt de l’initiative cantonale « Plus de force aux cantons »

Deuxième débat

Le projet de décret est adopté en deuxième débat et définitivement par 74 contre 58 et 4 abstentions.

Projet de décret portant sur le dépôt de l’initiative cantonale « Pour des réserves justes et adéquates »

Deuxième débat

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en deuxième débat.

Articles 1, 2 et 3. —

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice

La deuxième initiative cantonale « Pour des réserves justes et adéquates » propose un nouvel alinéa 3 à l’article 14 de la LSAMal. Cet alinéa a la teneur suivante : « Les réserves d’un assureur sont considérées comme excessives lorsqu’elles dépassent le 150 % de la limite légale. En présence de réserves excessives, l’assureur est tenu d’opérer une réduction des réserves jusqu’à atteindre ce seuil. »

Quand la commission a examiné les trois objets, il y a un an, les réserves des assureurs maladie atteignaient 9 milliards de francs. Elles ont depuis lors bondi à 11,3 milliards de francs, dépassant ainsi de 7 milliards le minimum exigé. Si les commissaires ont estimé extrêmement généreux que les assureurs accroissent les réserves jusqu’à une fois et demi, soit au-dessus du niveau de 100 % fixé par le Conseil fédéral, la solution proposée par le Conseil d’Etat et par les autres cantons latins a finalement paru raisonnable, en l’état. Je rappelle que la commission s’est prononcée en faveur de cet objet par 12 voix contre 1 et 2 abstentions. La Commission thématique des affaires extérieures vous recommande chaleureusement de confirmer votre vote d’approbation du premier débat.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Cette proposition met le doigt sur un problème intéressant ; il faut le dire, objectivement, dans la mesure où, en l’état et selon la loi au plan fédéral, un assureur peut avoir des réserves « excédentaires » et je l’exprime avec force prudence. Par contre, s’il veut faire baisser des primes d’assurance-maladie, dans tel ou tel canton, car suite à une analyse, il estime que les primes peuvent être baissées, c’est alors le parcours du combattant, car en fonction de la sinistralité de vos portefeuille d’assurés, on peut vous dire que vous n’avez pas assez de réserves pour diminuer les primes. C’est un vrai problème ! Il faut avoir le courage de l’admettre et de le dire haut et fort. Pour autant, il est absurde d’avoir des exigences — on en revient là au principe de précaution — qui paraissent disproportionnées quant aux calculs de risques permettant des baisses. En effet, si on pouvait faire des baisses, ce serait encore la meilleure façon d’éviter des hausses, comme dirait le Dr Pangloss, mais surtout de limiter vers le haut.

Je vois un problème par rapport à la discussion de tout à l’heure sur la cantonalisation et j’aurais bien aimé que Mme la conseillère d’Etat ou le président de la commission nous éclairent sur le sujet. Sachant que les réserves sont nationales, si l’on fixe un plafond, ce qui encore une fois paraît être une idée non dénuée de toute pertinence, comment va-t-on rapporter ce plafond au calcul des primes dans le canton de Vaud, sachant qu’il n’y a pas d’analyse statistique vaudoise particulière sur la répartition des réserves ? Il me semble qu’il y a là une contradiction et je ne vois pas comment nous allons pouvoir diminuer les primes ou les coûts et faire baisser des réserves sur des coûts cantonaux pour des réserves nationales. J’admets très volontiers qu’il y a peut-être un élément qui m’échappe et j’aimerais donc quelques explications sur la manière dont on conçoit ce système, qui me paraît certes souhaitable, mais difficilement praticable du point de vue comptable. Je vous remercie d’avance pour vos explications.

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice

Je réponds volontiers à notre collègue Buffat qu’il s’agit ici d’une initiative cantonale adressée à l’Assemblée fédérale et qu’il est donc bien prévu une restitution des réserves des caisses qui sont généralement nationales. Vous savez que l’exercice a déjà été fait ces années précédentes, avec certaines ristournes aux assurés. Le principe serait bien le même : les réserves excessives seraient remboursées par chaque caisse maladie à ses propres assurés.

Mme Rebecca Ruiz (C-DSAS) — Conseiller-ère d'État

Puisque j’ai la parole, je tiens à rappeler ici qu’il s’agit d’une initiative conjointe de la part de plusieurs collègues issus de différents partis. Mon collègue tessinois est PDC et c’est lui qui a lancé les trois initiatives. Mon collègue du Jura est PLR et à Berne mon collègue UDC Schnegg défend également les initiatives devant le parlement cantonal, alors qu’à Fribourg et à Neuchâtel, ce sont des socialistes comme moi-même ; enfin, à Genève, il s’agit d’un collègue MCG. On voit donc bien ici que la démarche autour de ces initiatives n’est pas partisane, mais a pour but de défendre les intérêts des cantons, que ce soit pour la procédure d’approbation des primes, mais également pour la défense de nos assurés qui, année après année, paient trop de primes. On voit également que la question des réserves devient de plus en plus compliquée à expliquer à notre population et aux payeurs de primes. Ainsi que l’a dit M. Zwahlen, on accumule désormais plus de 11 milliards de primes, soit plus du double du montant minimum requis au 1er janvier 2020, soit un excédent de 6 milliards. Il y a quelques jours encore, le directeur de Cura Futura s’exprimait dans la presse — et d’ailleurs aussi sur la SUVA petite parenthèse en lien avec le débat précédent — en avançant que les réserves pourraient être encore plus importantes que les 11 milliards évoqués. Il se pourrait donc bien qu’en ce moment 12 milliards de réserves soient accumulées.

J’aimerais aussi revenir sur un point évoqué la dernière fois et par des questions, soit le taux de 150 % à partir duquel les réserves sont considérées excessives. Pour vous donner des précisions, je vous avais donné rapidement quelques éléments à la fin du débat précédent. A l’origine, le taux de 150 % avait été proposé par le canton de Vaud et la Conférence des directeurs de la santé (CDS) en 2015, lors de l’introduction de l’Ordonnance sur la surveillance de l’assurance-maladie, dans le cadre de la procédure de consultation. Il a été à nouveau proposé par le canton de Vaud et par la CDS lors de la modification de cette ordonnance, en décembre 2020. Dans une directive, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) autorise déjà les assureurs à rembourser les réserves qui excèdent 150 %, sur une base volontaire, ainsi que nous l’avions déjà évoqué lors du dernier débat. A notre sens, c’est évidemment problématique, car il faudrait maintenant que ce remboursement ou cette compensation se fasse de manière automatique et non pas potestative. Lors de la consultation sur la modification de l’ordonnance, en début de cette année, le taux proposé par l’OFSP à partir duquel un remboursement volontaire est possible est abaissé à 100 % et, par conséquent, le seuil de 150 % qui faisait débat ici, pour définir des réserves trop élevées et qui pourraient être restituées aux assurés, est une limite largement admise et à laquelle adhère également l’OFSP.

Pour répondre maintenant à la question de M. Buffat, également déjà posée lors du premier débat, les réserves sont effectivement nationales et donc, quand un remboursement se fait sur la base volontaire des assureurs, ce qui est problématique à notre sens, on ne procède évidemment pas par canton. Un assureur décide de le faire en fonction de son portefeuille d’assurés et les assurés vaudois en bénéficieront ou non. La question que vous soulevez est juste et je plaide évidemment pour un remboursement par canton, parce que l’on voit que les différences cantonales sont très importantes, on l’a dit. L’année dernière, les Vaudoises et les Vaudois ont payé 150 millions de trop et ce n’est sans doute pas le cas ailleurs en Suisse. Il faudrait donc pouvoir agir là aussi sur un remboursement cantonal. Les initiatives prévues ici ne touchent pas à cet aspect, mais je puis vous dire que des auditions auront lieu, à Berne, menées par la Commission de santé du Conseil des Etats. Certains cantons sont plus avancés que le nôtre autour de ces initiatives et les ont déjà renvoyées à l’Assemblée fédérale. Ainsi, certains de mes collègues seront auditionnés très prochainement par cette commission. J’ai également des contacts avec des assureurs qui soutiennent ces démarches. Pour répondre à votre question, monsieur Buffat, une proposition d’une possibilité de remboursement par canton pourrait être faite, tenant compte des réserves accumulées en raison de primes payées de manière trop importante par les assurés d’un canton. C’est là ce que je puis vous dire, à ce stade.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Les articles 1, 2 et 3 sont adoptés par 75 voix contre 61 et 2 abstentions.

Le projet de décret est adopté en deuxième débat.

La discussion générale n'est pas utilisée.

Le projet de décret est adopté en deuxième débat et définitivement par 74 contre 61 et 3 abstentions.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Je demande un appel nominal.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Cette demande est soutenue par au moins 20 députés.

Au vote nominal,le projet de décret est adopté en deuxième débat et définitivement par 75 contre 61 et 3 abstentions.

**introduire le vote nominal

Projet de décret portant sur le dépôt de l’initiative cantonale « Pour des primes conformes aux coûts »

Deuxième débat

Le projet de décret est adopté en deuxième débat.

La discussion générale est ouverte.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Encore une fois, j’aimerais dire que si l’intention est louable, je ne crois pourtant pas à la solution préconisée. On a dit tout à l’heure que les trois choses étant liées, la question du calcul des réserves et des coûts est essentiellement nationale. Je remercie Mme la conseillère d’Etat pour ses explications, auxquelles j’adhère évidemment. Mais je crois que le problème, et c’est admis aujourd’hui, c’est que l’instrument qui permet de faire ces calculs n’existe pas. Il va donc falloir créer de toutes pièces des instruments actuariels et comptables complexes pour arriver à retrouver une sorte de cantonalisation du système. Quand M. Zwahlen nous a dit tout à l’heure : « On a réussi à le faire lors du fameux remboursement des primes payées en trop par les Vaudoises et les Vaudois » je ne sais si vous vous souvenez des scènes au Conseil national ? C’était le souk ! Car il faut dire les choses comme elles sont ! On a fait des calculs « au doigt mouillé » si j’ose m’exprimer ainsi, pour arriver à rembourser un montant en se disant que Dieu reconnaitra bien les siennes et les siens et que cela doit correspondre à une certaine réalité. Je répète donc ici mon scepticisme et le doute qui m’habite quant à la pertinence des effectifs cantonaux que l’on devra potentiellement mettre à disposition. Je ne suis pas du tout certain que nous disposions aujourd’hui de ces forces. Je sais bien que Mme la conseillère d’Etat nous a dit, lors du dernier débat, « oui, oui, cela a joué, nous savions faire, etc. », mais je répète que je n’en suis pas si convaincu. J’estime que la commission aurait pu se montrer un peu plus curieuse quant aux effectifs nécessaires, car ce sont des problèmes extrêmement complexes. Je retiens ici que nous disposons des ressources humaines nous permettant de faire ce travail, même si j’ai quelques doutes. Mes propos resteront dans le Bulletin du Grand Conseil si d’aventure, d’ici quelques années, on devait nous demander des augmentations d’effectifs.

Je terminerai par une anecdote. Quand on négociait des primes d’assurances, en se disant qu’on n’est pas contrôlés et qu’il faut de la transparence, j’ai eu un rendez-vous avec un représentant de la FINMA auquel j’essayais d’expliquer que nos calculs étaient très sérieux et avaient été vérifiés X fois, alors qu’il s’opposait à des baisses de primes pour certaines catégories d’assurés, et je le dis clairement. Il m’avait répondu (avec un accent alémanique) « Ach, monsieur Buffat, mais vous safez, qu’est-ce qui se passe si tous fos assurés sont malades en même temps ? » C’est bien là la réalité de l’assurance-maladie ! On dit que les réserves sont excédentaires ? Quinze milliards sur huitante milliards de coûts annuels, est-ce beaucoup ou n’est-ce pas assez ? Je pense que les initiatives, qui seront manifestement déposées vu l’équilibre politique au sien de notre Grand Conseil, posent malheureusement plus de problèmes qu’elles ne prétendent en résoudre.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le projet de décret est adopté en deuxième débat et définitivement par 74 contre 62 et 3 abstentions.

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