Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 30 août 2022, point 34 de l'ordre du jour

Texte déposé

Résolution : task force énergie vaudoise

Le Grand Conseil demande au Conseil d’Etat en collaboration avec le Conseil fédéral, de dresser immédiatement un inventaire des ressources énergétiques disponibles en Suisse et en particulier dans le canton de Vaud, y compris des ressources disponibles qui font actuellement l’objet d’une interdiction d’exploitation ainsi que d’informer dans les plus brefs délais le Grand Conseil sur ses choix stratégiques et leurs conséquences pour les entreprises, les citoyens et les collectivités publiques.

Le Grand Conseil souhaite la création d’une task force énergie vaudoise et économies d'énergie et désire être associé aux travaux de celle-ci.

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Nicolas BolayUDC
Marc-Olivier BuffatPLR
Florence GrossPLR
Alexandre BerthoudPLR
Maurice GayPLR
Jean-Daniel CarrardPLR
Céline BauxUDC
Jean-Bernard ChevalleyUDC
Philippe LinigerUDC
Philippe GermainPLR
Guy GaudardPLR
Thierry SchneiterPLR
Monique HofstetterPLR
José DurusselUDC
Jean-Franco PaillardPLR
Mathieu BalsigerPLR
Philippe JobinUDC
Jean-François ThuillardUDC
Nicola Di GiulioUDC
Josephine Byrne GarelliPLR
Denis DumartherayUDC
Stéphane JordanUDC
Nicolas GlauserUDC
Patrick SimoninPLR
Maurice NeyroudPLR
Pierre-André RomanensPLR
Fabrice TannerUDC
Fabien DeillonUDC
Cédric WeissertUDC
Sébastien HumbertV'L

Document

22_RES_13-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Yvan Pahud (UDC) —

Cette résolution, dont j’espère qu’elle dépassera le clivage gauche-droite, demande deux choses :

  • premièrement, la création d’une task force, puisqu’on voit bien que l’énergie et les ressources énergétiques concernent plusieurs départements : le Département de l’économie ainsi que le département géré par le conseiller d’Etat, M. Venizelos, en charge de l’énergie. Nous voyons donc bien que le thème de l’énergie est transversal. Dès lors, il nous paraît important d’avoir une task force dont le Grand Conseil fera partie – ou dans laquelle il sera consulté – pour mener à bien notre politique énergétique.
  • Deuxièmement, la résolution demande un inventaire. En effet, nous voyons bien qu’avec la crise ukrainienne qui nous touche, les énergies deviennent de plus en plus rares et le black-out ou la pénurie d’énergie vont toucher les ménages cet hiver. Dès lors, il nous paraît important d’avoir un inventaire de toutes les ressources énergétiques disponibles, dans ce canton, à court, à moyen ou à long terme. A court terme, nous avons bien entendu le gaz qui est peut-être stocké en France et peut-être l’éolien, avec le premier parc à Sainte-Croix. Néanmoins, à plus long terme, il faudra réfléchir à des solutions – des solutions qui ont peut-être été mises sous le paillasson et que l’on pourrait ressortir – pour pallier la pénurie énergétique.

C’est la raison pour laquelle les groupes UDC et PLR soumettent la présente résolution au vote de ce Grand Conseil, pour donner au Conseil d’Etat une feuille de route afin de créer une task force et qu’il puisse nous communiquer un inventaire de toutes les ressources énergétiques, pour que les Vaudoises et les Vaudois ne passent pas cet hiver ou les prochains à la lumière d’une bougie ou sous une couverture.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Mathilde Marendaz (EP) —

Nous avons pris connaissance du fait que la proposition implicite derrière cette résolution n’est autre que la velléité du PLR, de l’UDC et du Centre Vaud de conduire des projets de forage d’hydrocarbures dans le Léman, soit une source d’énergie fossile motrice du dérèglement climatique, dérèglement qui a notamment déjà beaucoup nui à nos agriculteurs, cet été. D’ailleurs, il est absurde de le proposer, car le démarrage des travaux prendrait bien plus de temps que l’échéance de cet hiver qui nous fait craindre des risques de pénurie d’électricité – et non pas de black-out. Cela est en contradiction avec la décision du Grand Conseil de 2019 de déclarer l’urgence climatique et avec l’adoption du premier Plan climat de 2020. Finalement, c’est une certaine trahison de l’électorat à qui l’Alliance vaudoise avait promis des efforts climatiques ! Le PLR, l’UDC et le Centre Vaud n’ont pas mis long avant de tomber les masques !

Produire des combustibles fossiles dans notre canton est irresponsable et contrevient aux principes comme aux bases législatives en matière climatique. Les énergies fossiles sont une impasse pour le climat, pour la planète, pour la sécurité et pour la paix dans le monde. Pour s’assurer que les énergies fossiles restent dans le sol de ce canton et ne polluent pas l’atmosphère, je propose l’amendement suivant :

« Le Grand Conseil demande au Conseil d’Etat, en collaboration avec le Conseil fédéral, de dresser immédiatement un inventaire des ressources énergétiques renouvelables disponibles en Suisse et en particulier dans le canton de Vaud, y compris des ressources disponibles qui font actuellement l’objet d’une interdiction d’exploitation ainsi que d’informer dans les plus brefs délais le Grand Conseil sur ses choix stratégiques et leurs conséquences pour les entreprises, les citoyens et les collectivités publiques. Le Grand Conseil souhaite la création d’une task force énergie vaudoise et désire être associé aux travaux de celle-ci. »

Je propose cet amendement pour assurer qu’il s’agisse de sources d’énergie propres. Je propose également de supprimer la phrase qui précise : « y compris des ressources disponibles qui font l’objet d’une interdiction d’exploitation. » En effet, on ne peut pas maintenir à court terme l’exploitation d’énergies qui, à long terme, détruisent le climat, ainsi que nos conditions de vie et de souveraineté énergétique. Je pense que si nous avons interdit ce type d’énergie, c’est parce qu’il y avait de bonnes raisons. Dès lors, il est impératif de conserver les interdictions d’exploitation d’énergie fossile.

Mme Rebecca Joly (VER) —

Je ne peux que me rallier aux propos de mon collègue Pahud. En effet, je pense que la question transcende les partis et qu’il faut instaurer une task force interdépartementale sur l’énergie. Je crois d’ailleurs savoir qu’une telle task force existe déjà. Je pense aussi qu’une cartographie ou un inventaire des ressources énergétiques dans le canton serait une bonne chose. Cela pourrait être un bon outil à disposition des pouvoirs publics cantonaux et communaux, comme des particuliers. Je rappelle qu’un certain nombre d’énergies, notamment renouvelables, sont à portée de main de beaucoup d’entre nous.

Néanmoins – et c’est là que le bât blesse, comme l’a rappelé notre collègue Marendaz : l’objet principal de cette résolution est de faire une cartographie du gaz de schiste, notamment dans le canton. Or, il y a peu de temps de cela, notre Grand Conseil a voté une loi qui interdit le recours au gaz de schiste. Nous ne l’avons pas fait parce que nous disposons d’une pléthore d’énergie dont nous ne savons que faire, mais bien parce que cette source d’énergie est dangereuse pour l’environnement, pour les êtres humains, pour le réchauffement climatique et surtout parce qu’elle n’est pas une énergie d’avenir, en plus d’être compliquée à exploiter. Et même s’il y a un obstacle administratif, il y a surtout un obstacle technique : si un projet de forage dans le Léman était lancé demain matin, nous n’aurions quand même pas de gaz pour cet hiver. Il faut être clair avec la population et ne pas lui vendre n’importe quoi ! La technologie du gaz de schiste dans ce canton n’est pas mûre et quand elle le sera, elle sera obsolète.

Aujourd’hui, dire qu’il faut relancer les extractions d’hydrocarbures dans notre canton, c’est aller à l’encontre de la lutte que nous devons mener contre le réchauffement climatique ; c’est aller complètement à l’encontre de tous nos objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Aujourd’hui, parmi les dizaines de développements dont nous avons parlé, j’ai entendu beaucoup de personnes parler de lutter contre le réchauffement climatique et d’accélérer la transition énergétique, mais on nous dit maintenant qu’il faut faire une cartographie du gaz de schiste dans le canton… Il faut être un peu cohérent ! Le gaz est une ressource fossile qui contribue au réchauffement climatique. Il ne faut pas essayer de trouver toutes les ressources possibles, mais il faut au contraire se débarrasser des ressources fossiles. Oui, nous avons besoin d’une meilleure autonomie énergétique, mais elle doit passer par des énergies renouvelables, par des énergies accessibles dont les technologies sont connues et efficaces. C’est là ce que nous devons faire aujourd’hui et si l’amendement de Mme Marendaz est accepté, les Verts pourront soutenir la résolution.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

De quoi parlons-nous ? Nous parlons d’un souhait émis par le Grand Conseil et qui devra être renvoyé au Conseil d’Etat. Ce souhait demande deux choses : une task force et une cartographie. Reprenons les choses par leur commencement, dans le prolongement de la discussion de ce matin, lorsque M. le conseiller d’Etat Vassilis Venizelos nous disait : « Oui, oui, oui, tout est en place. »

Aujourd’hui, la base légale constitutionnelle – l’article 89 de la Constitution fédérale – définit le rôle des cantons et de la Confédération. Que peut-on y lire ? Pas grand-chose, à savoir que les cantons et la Confédération doivent collaborer afin d’assurer un approvisionnement énergétique sûr à la Suisse. La seule chose que l’on sait – et qui résulte aussi de l’article 89 – c’est que la gestion des bâtiments relève de la compétence des cantons – cela fera plaisir à nos deux conseillers d’Etat, en particulier lorsqu’on parle de l’école. Je vous donne un exemple : si l’on décidait de baisser le chauffage des bâtiments de quelques degrés, cela relèverait de la compétence des cantons et non pas de la Confédération. Cela paraît relativement clair.

Ensuite, il y a la Loi fédérale sur l’énergie, mais puisque nous parlions du gaz tout à l’heure : elle ne concerne – pas le gaz. Vous ne trouverez le mot « gaz » ni dans la Constitution ni dans la loi fédérale. Cela pour une simple et bonne raison, qui a été répétée par M. Parmelin : il n’y a pas de loi fédérale sur le gaz. Vous avez une loi fédérale sur l’énergie qui précise à son article 8 : « La Confédération et les cantons collaborent avec la branche énergétique et assurent l’efficacité des opérations et la rapidité des procédures. » Ainsi, nous devons nous assurer des conditions de capacité et de production du réseau et du stockage d’électricité. Dans ce cadre, la résolution qui vous est proposée est parfaitement conforme au dispositif constitutionnel et légal issu du droit suisse et qui s’impose dès lors à nous.

Pourquoi une cartographie ? Aujourd’hui, je pense qu’il faut faire l’inventaire de toutes les ressources. J’ai entendu tout à l’heure – même si cela était en partie contesté – que certains partis faisaient de l’alarmisme alors que, comme le disait le Dr Pangloss :« tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. » De mon côté, j’observe que, à partir du mois prochain, la France imposera 10 à 15 % d’économie énergétique à ses entreprises. Or, ce n’est pas un petit panneau « Veuillez éteindre la lumière avant de partir », mais des compressions extrêmement importantes. J’observe également quelque chose qui déclencherait chez nous des stupeurs invraisemblables : la France subventionnera l’essence à raison de 30 centimes par litre à compter du 1er septembre prochain. Imaginez le tollé des associations et des partis écologistes, en Suisse, si l’on subventionnait l’essence… Or je n’ai pas vu une seule manifestation à Paris ou en France contre ce subventionnement !

Chez nous, on nous parle enfin de sobriété énergétique. Soyons clairs : le terme « sobriété » cache inévitablement un élément sous-jacent, qui consiste à plaider en faveur de la décroissance. On peut être adepte de la décroissance et nous pouvons en débattre, mais il faut arrêter de masquer la réalité ; il faut appeler un chat un chat. Si l’on veut la décroissance et consommer moins, je peux parfaitement l’entendre, mais il faudra nous dire où, quand et comment. Avec les « y a qu’à » et « on peut consommer moins », au bout d’un moment – et les exemples que je viens de donner concernant les entreprises françaises sont parlants – il y a bien quelqu’un qui coupera le courant et donc une consommation d’énergie qui baisse, alors que je rappelé que, depuis 30 ans, la consommation d’électricité est en augmentation constante ! Nous sommes donc très loin de la société à 2000 W dont on parlait il y a une vingtaine d’années.

J’observe également que, en Allemagne, avec un chancelier socialiste qui a fait un virage à 180° et avec une vice-chancelière verte, on ouvre à nouveau le débat sur le nucléaire – je veux bien que la droite vaudoise soit un épouvantail, mais tout de même – et on parle d’ouvrir à nouveau des centrales à charbon. Alors, en Suisse, que voulons-nous ? Voulons-nous continuer à importer du charbon allemand ? Importer du nucléaire français ? Cela tombe mal, alors qu’une vingtaine de centrales sont à l’arrêt ! Chez nous, où tout est beau, tout est joli, on ne veut surtout pas se salir les mains ni avec du charbon ni avec du gaz – que l’on peut importer des Etats-Unis, et dans ce cas-là, personne ne pose la question de la provenance. C’est comme le bœuf américain : il est tellement bon, mais on ne sait pas comment il est élevé. Le gaz américain qui arrive liquéfié à Gênes est formidable ! Nous avons l’impression de revivre l’époque 39-45, avec les Etats-Unis qui viennent sauver l’Europe avec leur gaz, évidemment sans nous soucier le moins du monde de savoir comment il est produit.

Au bout d’un moment, il faut avoir l’honnêteté de ses positions. Il faut parler franchement aux gens et leur dire que nous n’avons pas de ressources. Nous avons du gaz alors pourquoi ne pas l’inventorier ? De là à dire qu’il faut l’exploiter, il y a évidemment une marge considérable. Vous avez rappelé, à juste titre, qu’une loi a été votée en 2018 dans ce canton pour interdire la recherche et l’exploitation. Mais enfin, tout de même, si un pays comme l’Allemagne a réussi à faire un virage aussi spectaculaire, avec des élus des bords politiques que j’ai cités, il faut prendre acte, en Suisse, que le monde a changé en quatre ans – à moins d’avoir le comportement d’une autruche. Rien de ce qui s’est passé n’était prévisible : ni les pandémies, ni les catastrophes, ni la guerre en Europe. Aujourd’hui, nous sommes face à une accumulation de situations qui n’étaient pas forcément prévues.

J’aimerais aussi rappeler qu’à l’époque, le chantre du gaz – à Lausanne, en tout cas – était un dénommé Daniel Brélaz. A l’époque, ce dernier avait été interviewé par la revue « LUX » de 2008, n° 72-73 et il soutenait le recours au gaz pour assurer l’approvisionnement énergétique de notre pays. Il prétendait – à juste titre, à mon avis – qu’en termes de capacité, cela permettait d’être une énergie de transition. J’observe enfin que Mme Sommaruga n’est pas PLR ni membre de l’Alliance vaudoise et qu’elle a elle-même proposé des centrales à gaz en cas d’urgence. D’où viendrait ce gaz ? Il ne va pas tomber du ciel, il viendra bien de quelque part. S’il ne vient pas de Russie, il viendra peut-être des Etats-Unis ? Là encore, on se bouche le nez sur la façon dont il arrivera chez nous.

Finalement – et je me suis d’ailleurs posé la question en relisant la loi et la Constitution – le canton de Vaud pourrait-il vraiment s’opposer à l’exploitation de réserves de gaz stratégiques ? Elles ne se trouvent pas uniquement dans le canton de Vaud, mais aussi à Neuchâtel et à Bâle. Si pour garantir l’approvisionnement énergétique, la Confédération décidait d’exploiter ces réserves de gaz, la question de la constitutionnalité ou de la légalité de la loi votée en 2018 pourrait se poser. Evidemment, je vous ai peint un tableau assez large, mais il me paraît essentiel, à ce stade de la discussion, pour dire qu’une task force vaudoise est absolument indispensable. L’enchevêtrement des compétences résultant de la Constitution et de la loi fédérale n’est absolument pas clair, sous réserve de la question des bâtiments que j’évoquais tout à l’heure. Il faut donc que nous nous prenions rapidement en main, sans attendre que la situation dégénère et que l’on se retrouve de nouveau avec un capharnaüm de compétences, comme nous l’avons vécu avec le Covid.

Enfin, il faudra bien faire un inventaire des solutions. Quelles sont les réserves de gaz, dans ce canton ? Quel est le potentiel ? S’il y a d’autres éléments que l’on pourra utiliser, tant mieux ! Quelles sont les surfaces que l’on pourrait rapidement équiper de photovoltaïque, sur les établissements publics ou dans les espaces publics ? Cela peut aussi faire partie de cet inventaire. A mon avis, cela devrait également le faire. Pour toutes ces excellentes raisons, je vous invite à soutenir cette résolution.

Mme Valérie Induni (SOC) —

Lorsqu’on lit la résolution de M. Pahud, on peut la trouver tout à fait intéressante, de prime abord. Une task force transversale à l’Etat de Vaud et un inventaire, pourquoi pas ? Toutefois, en lisant plus en détail et notamment en allant voir le communiqué de presse de l’alliance PLR-UDC-le Centre, on peut lire : « De plus, sachant que du gaz naturel se trouve en grande quantité dans la commune de Noville, un texte visant à étudier les possibilités d’extraction de cette ressource afin de garantir un approvisionnement sûr et autonome a été adopté par les députés PLR et UDC. » On se rend alors compte qu’il y a l’image extérieure – la vitrine task force et inventaire – et que, derrière la vitrine, il y a le produit que l’on essaye de nous vendre aujourd’hui, à savoir une reprise de l’exploration et pourquoi pas de l’exploitation du gaz. Je relève tout de même un certain nombre d’écueils :

  • tout d’abord, il me semble y avoir un écueil politique, puisque la Loi vaudoise sur les ressources naturelles du sous-sol date de 2018. Cela fait quatre ans que nous avons accepté d’interdire la recherche et l’exploitation de tout type de gaz. Il a d’ailleurs été précisé, dans un article de cette loi, que même en cas de trouvaille fortuite de gaz, par exemple dans une recherche de géothermie, on ne pourrait pas exploiter tout gaz dit non conventionnel.
  • Il y a un deuxième écueil politique : il faut se rappeler que, à l’époque, l’initiative contre l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures avait été retirée suite au résultat de la loi. Il faut bien imaginer que, si l’on devait revenir en arrière, on reviendrait aussi en arrière sur cette initiative en la relançant une nouvelle fois.
  • Il y a ensuite un écueil technique concernant le type de gaz qui existe à Noville. On nous donne l’impression qu’il y a, sous le lac, un immense réservoir et qu’il n’y a plus qu’à aller le chercher avec un petit tuyau, installer un robinet, et que le gaz va sortir comme par magie. Il n’en est rien ! Cela ressort d’ailleurs du rapport de majorité de la commission qui a traité de la loi sur le sous-sol. A la fin de ce rapport se trouvent certains résumés des discussions et des entretiens que nous avons menés avec un certain nombre d’interlocuteurs. Il y avait notamment M. Petitpierre qui était venu nous parler. Nous avions alors appris qu’il y a bien du gaz dit naturel dans la roche, mais que Noville se situe dans des réservoirs non conventionnels, qui nécessitent une stimulation de la roche pour extraire le gaz. Autant vous dire que cela s’appelle fracturation hydraulique et que, pour le moment, je pense que la population n’est pas près de recourir à ce type de gaz.
  • Il y a encore un écueil temporel : on nous parle des difficultés d’approvisionnement de cet hiver et la recette serait d’aller chercher des solutions qui prendront des années à mettre en place et qui resteront des solutions tournées vers des ressources qui péjorent la situation au niveau du CO2.

Pour toutes ces raisons, je pense que la seule manière d’accepter cette résolution serait d’accepter l’amendement proposé, c’est-à-dire de faire un inventaire de toutes les ressources renouvelables.

M. Nicolas Suter (PLR) —

Je soutiens pleinement la résolution et je trouve qu’il est grand temps… de ne pas l’amender. Je pense en effet que c’est vraiment le moment de présenter un inventaire sans tabou sur ce qu’il est possible de faire dans ce canton. Il est vrai que, suivant quelles lunettes on chausse, on peut, comme le fait la gauche, n’y voir que du gaz – car il y en a certainement dans cet inventaire. Je déclare mes intérêts : je travaille pour l’entreprise au bout du lac qui, en plus de faire marcher le jet d’eau de Genève, est active dans la géothermie, la biomasse, l’hydraulique, l’éolien et le photovoltaïque.

Le hasard du calendrier fait qu’aujourd’hui, l’Office fédéral de l’énergie (OFEN) vient de publier une étude qui montre que, en Suisse, il y a un potentiel de 29,5 térawatts-heures (TWh) d’éolien. Par comparaison, on fait 39 TWh par an d’hydraulique. Si, de manière réaliste, on ne considère qu’un tiers du potentiel total, cela fait 8,9 TWh. Un tiers représente 2 TWh pour le canton de Vaud, dans lequel on consomme 4 TWh d’électricité ! C’est une étude qui vient d’être publiée par l’OFEN. J’espère que dans cet inventaire sans tabou, l’éolien sera aussi évoqué. Ici, nous parlons souvent de photovoltaïque qui est très politiquement correct, alors que l’éolien est plus compliqué à faire accepter. Pourtant, l’éolien produit pendant la nuit, et il produit 64 % pendant les six mois du semestre d’hiver. Je pense qu’il est vraiment important de mener une étude sans tabou sur l’inventaire énergétique de notre canton.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Je déclare mes intérêts : je suis directeur d’une entreprise énergétique et président d’une association de distributeurs d’énergie multifluide. Comme cela a déjà été énoncé à plusieurs reprises, c’est toujours une excellente idée de faire une task force, de faire un état des lieux des ressources et de chercher à les mettre en lien avec les besoins. C’est d’ailleurs ce que nous faisons dans de nombreuses communes de ce canton. C’est ce que le canton a fait lui-même dans la conception cantonale de l’énergie, que l’on appelle aussi une planification énergétique territoriale. Tout cela est à saluer.

Toutefois, quant à faire un inventaire des ressources que nous nous sommes interdit d’utiliser pour des raisons climatiques évidentes, cela me pose question. Pourquoi faire ? Pour être davantage tenté d’y recourir ? Allons-nous aussi inventorier le charbon disponible dans le sous-sol du Lavaux ? Qu’allons-nous dire à nos enfants et petits-enfants ? Qu’en cette année de sécheresse extrême et de fonte des glaciers record, nous ne connaissions pas la problématique ou que nous n’avions pas d’alternative ?

Notre collègue Suter vient de nous donner les résultats de l’étude de la Confédération sur l’éolien, étude qui montre bien que nous avons des alternatives. Si nous développons l’énergie éolienne, parmi tant d’autres, il est tout à fait possible de compenser nos besoins en énergie nucléaire et fossile. C’est simplement une question de volonté. Nous devons agir comme nos aïeux l’ont fait lors de la révolution industrielle, soit investir massivement et prendre le taureau par les cornes. Des solutions existent ; il n’y a pas besoin de les inventer ni de recourir à une énergie qui dévastera encore plus le climat ! Evaluer et prendre des mesures pour développer rapidement les ressources locales et durables, oui, mais laissons de côté celles dont les conséquences nous coûtent aujourd’hui si cher ! Il faudrait aussi chiffrer tous les coûts des sécheresses et autres désastres climatiques que nous connaissons et les ajouter, par le biais de taxes, aux coûts des énergies fossiles. Alors, suivons l’exemple de nos aïeux en misant tout sur le local et le durable. Les générations futures nous en seront très reconnaissantes. Je soutiendrai volontiers cette résolution, pour autant que l’amendement de notre collègue Marendaz soit accepté.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Je regrette le procès d’intention mené par la gauche. Je demande un inventaire sans tabou de toutes les énergies dont notre canton dispose. Nous avons des énergies disponibles à court terme, et des énergies disponibles à moyen et long terme. Nous avons des énergies facilement exploitables et d’autres qui sont plus difficilement exploitables. Et nous avons des énergies disponibles, mais qui demandent des modifications légales. C’est le cas du gaz, sur lequel le Grand Conseil a voté et nous allons respecter ce choix. Mais lorsque l’on établit un inventaire, on se doit de le faire entièrement, car à la fin, des Vaudoises et des Vaudois sont tributaires de cette énergie. Lorsqu’il y aura une coupure de gaz pendant l’hiver et qu’il faudra expliquer à une famille avec enfant qui se trouve dans un appartement à 5° que, par choix idéologique, nous avons préféré ne nous chauffer qu’avec de l’énergie renouvelable et que la famille devra rester dans le froid… C’est là la réalité ! C’est la raison pour laquelle je demande un inventaire complet.

Dans cette résolution, je ne dis pas que l’on va exploiter les ressources en gaz de ce canton. Non, nous voulons simplement les mettre sur le papier. Ensuite, le Conseil d’Etat fera des choix selon l’urgence de la situation. Devrons-nous prélever des énergies difficilement exploitables et qui auront un coût pour le contribuable ? Madame Marendaz, à la fin, ne créons pas une lutte des classes entre le riche qui pourra se chauffer parce qu’il a des moyens et la personne modeste qui n’aura pas les moyens de se chauffer et qui devra rester dans le froid ! Nous devons avoir des ressources énergétiques que les citoyens peuvent s’offrir. C’est pour cela que nous devons établir un inventaire complet de toutes les ressources.

En parlant de tabou, avant la crise ukrainienne, il ne fallait surtout pas évoquer le gaz ou le mazout. Le conseiller national Roger Nordmann, socialiste, a été l’un des premiers à dire qu’il fallait construire des centrales à gaz pour produire de l’électricité. Quelque temps après, c’est le Conseil fédéral qui a dit qu’il fallait construire des centrales à mazout pour produire de l’électricité, parce que nous allions en manquer. Aujourd’hui, le gouvernement a la responsabilité de fournir aux citoyens de l’énergie pour qu’ils n’aient pas froid cet hiver. Je trouve dommage de faire un procès d’intention à une résolution qui demande simplement un inventaire. Madame Induni, ne venez pas dire que nous allons déposer une motion plus tard, alors qu’elle n’est pas déposée ; traitons cet objet pour lui-même. Aujourd’hui, nous demandons simplement de prévoir à la fois un inventaire et une task force.

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Nous aurions entendu beaucoup de sarcasmes si un tel texte avait été déposé de notre côté de l’hémicycle. Le passage de la résolution qui est contesté veut faire plonger le Conseil d’Etat dans l’illégalité. Ses auteurs mettraient la nouvelle majorité du gouvernement en situation plutôt inconfortable : le Conseil d’Etat devrait tout bonnement violer la loi récente sur les ressources du sous-sol ! S’il suivait cette résolution non modifiée, il enfreindrait sans doute la stratégie énergétique 2050 approuvée par le peuple et les cantons ainsi qu’il enfreindrait son propre engagement de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 50 à 60 % d’ici huit ans. Le Grand Conseil lui-même peut-il revenir sur une disposition d’une loi qu’il a adoptée il y a quatre ans à peine, et qui avait fait l’objet d’un large accord entre forces politiques, alors même que le gisement de Noville était déjà connu, c’est-à-dire faire la girouette ? Notre Parlement n’en sortirait pas grandi.

Une task force est utile en elle-même, c’est vrai, mais sa composition nous laisserait songeurs si, dans l’esprit du texte original de la résolution, les lobbys du fossile venaient à l’influencer. Ce passage de la résolution enfreint la loi, réchauffe encore le climat et ne comble en rien les manques en énergie des cinq années à venir. En effet, ce n’est pas dans ce délai que la modification de loi, les travaux exploratoires et l’exploitation de cet éventuel gisement se réaliseraient ! Je vous invite à modifier la résolution en acceptant l’amendement de Mme Marendaz.

M. Alberto Mocchi (VER) —

Je voulais brièvement revenir sur les propos de M. Buffat, et plus particulièrement l’exemple allemand qui est souvent cité par celles et ceux qui souhaitent revenir aux énergies d’avant-hier. Si, en Allemagne, on parle aujourd’hui de revenir brièvement à certaines énergies fossiles, c’est parce que celles-ci existent déjà. Les centrales à charbon et les centrales nucléaires existent déjà en Allemagne et on ne doit pas les créer de toutes pièces. Par ailleurs, on oublie souvent de dire que l’Allemagne a toujours des objectifs – qu’elle va tenir – de passer complètement aux énergies renouvelables d’ici à 2035. Ces objectifs sont bien plus ambitieux que ceux de notre Confédération ou de notre canton. Prendre l’Allemagne comme un exemple de pays qui reviendrait en arrière sur sa politique énergétique n’est donc pas un très bon exemple.

Par ailleurs, cela a été dit, mais je me permets de le rappeler : ce n’est pas comme si, aujourd’hui, nous pouvions ouvrir une vanne pour utiliser du bon gaz AOC vaudois pour nous chauffer cet hiver ! Comme cela a été dit, y compris par celles et ceux qui souhaitent développer ces infrastructures, il faudra des années pour y arriver. Or, ces années peuvent peut-être être mises à contribution de manière plus constructive, en développant les énergies renouvelables. Monsieur Suter, je pense que l’éolien fait aussi partie du mix énergétique qu’il nous faut dans le futur. C’est une énergie renouvelable, et ne contrevient donc en rien à l’amendement proposé par Mme Marendaz.

Quant aux citations de M. Brélaz, je suis sûr de pouvoir vous trouver une citation de Victor Ruffy ou de Louis Ruchonnet se réjouissant du développement de l’Etat social. Ce n’est pas pour autant la position défendue encore aujourd’hui par celles et ceux qui se réclament de leur héritage ! Il faut toujours contextualiser, comme vous l’avez dit, monsieur Buffat. En l’occurrence, les propos de Daniel Brélaz en 2008 ne sont pas ceux que tiendraient des écologistes en 2022.

Il y a une crise énergétique majeure, c’est certain ! Il faut trouver des solutions, c’est certain ! Depuis ces dernières années, il y a une volonté d’avancer ensemble pour un certain nombre de développements des énergies renouvelables alors, de grâce, ne revenons pas en arrière ! Profitons du seul aspect positif de cette crise : nous donner l’opportunité de fermer la porte aux énergies fossiles et de développer massivement les énergies renouvelables.

M. Didier Lohri (VER) —

Avant de voter sur cette résolution, j’aimerais que l’on m’explique à quoi sert la Commission thématique de l’énergie, alors que nous avons tergiversé pendant des mois et des mois sur les commissions thématiques. Aujourd’hui, cette résolution me fait chaud au cœur, parce qu’il y a une semaine, notre collègue Romanens parlait de l’hydrogène et que je m’étais alors exprimé en disant qu’il s’agissait d’un problème polyénergétique. S’il s’agit de faire monter la mayonnaise pour que la presse mentionne que nous sommes dans un état de crise, ce ne sont pas les politiciens qui doivent se montrer fébriles ; nous devons rassurer la population. Il ne s’agit pas de remonter à 1950 ou à des propos de Daniel Brélaz en 2008 ! Nous devons, avec les outils que nous avons, aller dans le sens le plus utile à notre population.

Selon moi, cette résolution ne devrait pas s’adresser au Conseil d’Etat, mais à la Commission de l’environnement et de l’énergie, pour que le travail d’inventaire regroupe toutes les énergies, y compris l’hydrogène. Je ne trouve pas raisonnable de tenir une théorie comme celle qui est tenue maintenant, alors que la population doit avoir une certaine confiance envers ses élus. Nous devons montrer que nous avons compris qu’il faut faire face à une crise et que nous devons prendre des mesures. Mais je vous parie que lors des premiers frimas d’octobre, nous n’aurons pas beaucoup avancé dans cette résolution.

Enfin, je veux bien voter une résolution, mais premièrement – j’ai une pensée pour Jérôme Christen – j’estime que nous devrions plutôt parler d’un détachement spécial que d’une task force ! Deuxièmement, nous devrions charger la Commission thématique de l’énergie de faire ce travail. Je m’étonne que les élus municipaux tolèrent que le Grand Conseil soit associé au travail du Conseil d’Etat : où est l’autonomie communale si chèrement défendue par nos élus ?

Je m’excuse d’avoir pris la parole, mais sincèrement, cette résolution me semble être un moyen de faire monter la pression inutilement. Si nous voulons rassurer notre population, il faut transmettre le dossier à la Commission de l’énergie pour qu’elle nous tienne au courant, par un rapport sur les tâches et sur l’inventaire fait au niveau vaudois. Il faudra beaucoup de temps pour que nous puissions avoir un inventaire complet. Personnellement, je ne voterai pas cette résolution.

M. Jean Tschopp (SOC) —

Petit retour en arrière : il y a cinq ans, en mai 2017, lors de la votation populaire, le PLR soutenait la stratégie énergétique qui décidait de nous engager pleinement sur la voie des énergies renouvelables. Et nous voilà cinq ans plus tard, alors que nous parlons d’une stratégie qui doit nous engager pendant 33 ans, soit un horizon rarement vu auparavant. Il aura suffi de cinq petites années pour que l’alliance de droite nous propose de revenir aux bonnes vieilles recettes. Or, ce sont ces recettes qui nous ont précipités dans l’été suffocant que nous avons traversé.

Parmi les constats alarmants, il faut retenir un seul chiffre : en six ans, soit pendant l’intervalle depuis le début de la stratégie énergétique, la fonte des glaciers en Suisse a augmenté de 12 % ! Alors que la situation est à ce point préoccupante, comment pouvez-vous revenir avec les mêmes recettes d’énergies fossiles qui nous ont précipités dans cette impasse ? Je m’étonne que votre alliance, qui clame à chaque tribune qu’elle peut faire preuve d’innovation et de résilience, soit déjà prête à abandonner après si peu de temps, pour revenir en arrière avec les recettes du XXe siècle qui n’ont pas fonctionné.

La seule option est de corriger le texte afin de l’associer aux énergies renouvelables qui est la seule voie possible. Bien évidemment, monsieur Pahud, il n’y a aucune perspective pour la famille que vous avez décrite, qui aura bien du mal à payer ses factures avec l’étude que vous proposez pour voir si l’interdiction est réellement pertinente. Nous pouvons vous répondre : oui, elle est pertinente. Et c’est bien la raison pour laquelle nos alliés Verts avaient retiré leur initiative populaire sur l’interdiction d’exploitation du gaz de schiste. Ce n’est pas la voie que nous voulons suivre, car c’est une impasse qui n’offre pas de perspective. Ayons le courage de regarder la réalité en face, d’assumer et de prendre nos responsabilités, c’est-à-dire suivre cette stratégie énergétique qui nous engage en tant qu’élus.

S’agissant du pouvoir d’achat, nous savons que la classe moyenne et les personnes qui ont des difficultés à payer leurs factures seront directement impactées par des hausses massives du coût de l’énergie. Nous reviendrons avec des demandes sur le pouvoir d’achat, comme nous l’avons déjà fait avec notre motion sur les rabais d’impôt, et comme nous le ferons encore à l’endroit des locataires. Nous sommes aussi prêts à discuter des aides pour celles et ceux qui sont prêts à investir dans l’énergie, mais pas de cette manière, pas avec les énergies fossiles. Une task force, pourquoi pas, mais sur les énergies renouvelables et non pas sur le gaz, comme vous le demandez de manière très explicite de votre communiqué de presse.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Les arguments principaux me semblent avoir été avancés, de part et d’autre. Sans être trop long, j’aimerais tout de même insister sur le côté profondément contre-productif de la campagne actuelle du PLR et de ses alliés en faveur de l’extraction de gaz ! Lorsqu’on sait que, du côté de Noville, il y a des projets liés à la géothermie ainsi qu’à de potentielles exploitations d’énergie renouvelable et sans émission de CO2, venir semer la confusion quelques années seulement après l’interdiction claire d’exploiter des énergies fossiles dans notre canton et alors que des entreprises réfléchissent sérieusement à des projets de géothermie, c’est contre-productif.

Par ailleurs, du point de vue de la défense de l’environnement et au sortir de la terrible sécheresse que plusieurs d’entre vous ont soulignée, il me semble assez préoccupant de venir nous parler d’une technique de fracturation hydraulique, qui impose des dangers majeurs pour les nappes phréatiques et pour l’eau potable, dangers que Mme Induni a bien soulignés. A l’heure où l’eau s’avère être une ressource de plus en plus essentielle, revenir à la charge avec la fracturation hydraulique, avec des produits chimiques injectés dans la roche et potentiellement dans les nappes phréatiques, semble très peu opportun.

Enfin, il me semble important de mobiliser toutes les ressources de l’Etat en direction du développement des énergies renouvelables et des économies d’énergie, dont le potentiel est énorme. Les annonces récentes de la ville de Lausanne montrent que l’on peut accélérer. Le canton ainsi que d’autres communes pourraient suivre – ou initier – l’accélération du tempo. Vouloir disperser les ressources de l’administration dans des inventaires d’énergies fossiles ne me semble pas être ce dont nous avons besoin. Le PLR réclame souvent plus d’efficience administrative et moins de bureaucratie. A ce titre, demander un inventaire sur une énergie interdite est une démarche étonnante ! Pour toutes ces raisons, je vous invite à soutenir l’amendement de notre collègue Marendaz qui propose de recentrer la résolution sur les énergies renouvelables.

Mme Graziella Schaller (V'L) —

J’aimerais rebondir sur ce qu’a dit M. Mocchi : il a parlé d’une crise énergétique majeure, alors que j’aurais plutôt parlé d’une crise climatique majeure, car je crois que c’est là ce qu’il ne faut pas perdre de vue. Je partage la plupart des considérations qui ont été faites sur la question de l’utilisation du gaz et ne les répéterai donc pas.

Ceux qui ont parcouru la presse ce matin, avant de venir, auront peut-être vu les grands titres. En les lisant, je me suis dit que nous marchons vraiment sur la tête. Lorsqu’on voit les catastrophes qui s’accumulent – et ce ne sont que celles dont nous avons connaissance, car je pense qu’il y en a encore d’autres en Chine, en Inde ou au Pakistan, et qui résultent d’un comportement aberrant dans le domaine de notre consommation d’énergie – cela doit vraiment nous pousser à modifier notre mode de consommation de l’énergie. Nous devons mener une réflexion sur notre consommation d’énergie et la solution n’est pas d’aller chercher à tout prix de nouvelles sources d’énergie. Vous avez certainement lu que le « jour du dépassement » tombait cette année le 28 juillet. Cela franchement peur de réaliser que, peu après la moitié de l’année, nous avons déjà consommé tout ce que notre planète peut nous donner pour une année. Comme beaucoup parmi vous, j’estime que nous devrions nous demander si nous consommons de manière correcte et surtout chercher à consommer mieux.

Au début, j’ai éprouvé beaucoup de sympathie pour la proposition de M. Pahud, mais en lisant son texte, je ne peux pas y souscrire. Avec l’amendement de Mme Marendaz, c’est à mon avis une bonne proposition pour faire un inventaire de nos ressources, mais il faut y ajouter quelque chose. Si le texte tel qu’amendé peut me convenir, j’estime que nous devons absolument y ajouter une task force qui se pencherait sur les économies d’énergie que nous devons absolument faire pour répondre aux problèmes posés. Cette question doit être examinée en parallèle avec la motion qui porte sur les questions de sobriété énergétique, et avec le point suivant de l’ordre du jour – la proposition de notre collègue Balsiger – dont nous allons encore discuter. Pour l’heure, je vous propose d’accepter l’amendement proposé par Mme Marendaz, ainsi que l’amendement suivant :

« (…) Le Grand Conseil souhaite la création d’une task force énergie vaudoise et économies d’énergie et désire être associé aux travaux de celle-ci. »

Comme cela a été dit par notre collègue Joly, cette task force existe probablement déjà. Je pense en tout cas que le département y travaille déjà et qu’il a mobilisé toutes les ressources, de manière transversale, pour répondre à cette problématique. En plus de la task force sur l’énergie, je souhaiterais une task force sur les économies d’énergie.

Mme Mathilde Marendaz (EP) —

Je remercie Mme Schaller pour sa proposition d’amendement à laquelle je peux me rallier. Par ailleurs, je souhaitais revenir sur quelques éléments. Monsieur Suter, il ne s’agit pas de tabou concernant le gaz, mais de réels dangers qui ont été présentés par certains collègues. Vous avez parlé du potentiel éolien qui pourrait être creusé par cette task force. C’est en cela que cet amendement, avec la modification de Mme Schaller, permettrait de sortir de ce débat, puisqu’il mentionne les ressources énergétiques renouvelables. Cela va donc dans le sens de votre argumentation sur les potentiels d’optimisation des énergies renouvelables et je vous propose donc de soutenir l’amendement.

Monsieur Pahud, vous dites que nous devons établir un inventaire neutre, et que si l’on fait uniquement un inventaire, ce n’est pas grave et qu’il ne s’agit pas de choisir entre la peste et le choléra. Mais ce n’est pas comme s’il s’agissait d’un inventaire neutre : comme nous l’avons dit, le gaz est une source fossile motrice de l’accélération du changement climatique. A maintes reprises, ce plénum a évoqué les conséquences du dérèglement climatique, ici et ailleurs, sur nos concitoyens et sur les paysans de notre pays. Mme Schaller a parlé du jour du dépassement, mais vous proposez tout simplement d’accélérer ce dérèglement climatique ! Monsieur Pahud, la situation ne vous paraît pas suffisamment inquiétante ? Avec les chiffres évoqués par mes collègues et la situation que nous connaissons, proposer d’émettre davantage de CO2 dans l’atmosphère va générer d’autres crises et d’autres pénuries, d’électricité ou d’autres ressources. C’est une solution court-termiste qui générera davantage de problèmes à long terme. Nous devons définitivement exclure cette possibilité de votre résolution. C’est la raison pour laquelle je vous propose d’accepter mon amendement ainsi que la proposition de Mme Schaller.

M. Pierre-Alain Favrod (UDC) —

Je déclare mes intérêts : j’habite et je travaille dans la commune de Noville, mais je n’ai rien à voir avec le gaz. Heureux pays riche qu’est la Suisse : nous avons des ressources en énergie, mais nous nous interdisons de les exploiter. Heureusement que nous n’avons pas de pétrole, ce serait la même histoire... Si nous pouvons nous passer de plus de 25 ans de gaz pour toute la Suisse, cela veut dire que nous avons encore beaucoup trop d’argent. L’histoire peut changer très vite : certains disaient qu’il n’y aurait plus jamais de guerre en Europe, mais tout change et l’histoire et là pour nous le rappeler. Je vous demande de soutenir cette résolution.

M. Jean-Daniel Carrard (PLR) —

Dans le débat actuel, il y a une forme de position dogmatique. Je vais essayer de reprendre notre proposition. Cette dernière demande d’établir un inventaire des ressources énergétiques disponibles en Suisse et en particulier dans le canton de Vaud, y compris – et non exclusivement – les ressources qui font l’objet d’une interdiction. Nous demandons simplement de dresser un inventaire pour savoir s’il est possible de trouver des solutions de secours. Cela ne me semble pas impossible à imaginer…

J’ai entendu M. Mocchi dire que cela prendrait beaucoup de temps. J’imagine que les études sur les énergies renouvelables seront faites tout de suite ? Bien sûr que non ! Il est important de connaître les possibilités. Ensuite, il appartiendra notamment au Conseil d’Etat de donner une direction : il peut s’agir de solutions de secours provisoires. Nous sommes tous d’accord d’essayer de tendre vers une meilleure pratique de la consommation énergétique et de l’économie d’énergie, mais je crois qu’il ne faut pas se priver des possibilités qui nous sont données. Encore une fois, nous parlons simplement d’établir un inventaire.

Accessoirement, j’ai aussi entendu M. Buclin, qui attaque régulièrement le PLR ; cela lui fait peut-être plaisir, mais ça ne fait pas avancer le débat. Ce n’est ni très malin ni au niveau de ce que nous sommes censés obtenir ici.

En conclusion, je vous invite à soutenir cette demande d’inventaire.

M. Grégory Devaud (PLR) —

Je déclare mes intérêts comme représentant de la commune d’Aigle à la société de gaz de la plaine du Rhône, et à ce titre, doté d’un certain nombre d’informations, notamment pour un des éléments cités aujourd’hui dans le débat en ce qui concerne Noville ; un projet historique vieux de plus de 30 ans. En effet, nous n’en sommes pas à démarrer les investigations, et certaines études ou analyses tout à fait précises identifient une possibilité – j’y reviendrai dans un instant. Cela représente pour ma commune et pour demain la possibilité d’investissements massifs dans un chauffage à distance d’une usine de valorisation. En outre, nous restons d’avis qu’il ne s’agit pas d’opposer une source d’énergie à une autre. Il en va aussi de soutiens massifs aux assainissements énergétiques des bâtiments, à la pose de pompes à chaleur, de rénovation de façades, de pose de panneaux solaires, etc. Mon collègue ici présent voit passer toutes ces demandes de subventions ; elles sont nombreuses d’autant plus ces temps. Il s’agit aussi d’un investissement massif dans tout ce qui concerne d’autres réductions en termes d’énergie, Plan lumière, rénovations de nos propres bâtiments, etc.

Par ailleurs, je suis d’accord avec Mme Schaller pour dire que nous devons tendre à changer nos habitudes de consommation, à les adapter, à viser de nouvelles énergies. A titre personnel, je soutenais la stratégie Energie 2050, même celle sur le CO2. Aujourd’hui, clairement, nous ne faisons pas un pas en arrière, mais exprimons plutôt une volonté – et nous l’avons souvent entendue que ce soit ici, à Yverdon ou à l’EPFL – de distinguer le monde d’avant de celui d’après. Ainsi, force est de constater que nous nous trouvons un peu dans le monde d’après qui est peut-être riche d’une forme de rééquilibrage, je vous le concède, par rapport au prix de l’énergie. Nous avons souvent émis l’idée qu’il n’était pas très normal que des ressources hydrauliques telles que les barrages ne soient pas rentables. Par conséquent, il apparaît comme assez judicieux que l’énergie puisse être nantie d’un prix normal relativement à sa valeur. Il s’agit donc, en quelque sorte, du monde d’après. Ainsi, dans ce dernier, cette résolution comme toute autre intervention tombe à point nommé, puisqu’il s’agit de ne pas se priver d’une solution ou d’une autre. Ce matin, comme vous, je lisais la presse, on y parle même de centrales à mazout, de nouvelles centrales nucléaires.

Aujourd’hui, nous avons la nécessité de pouvoir répondre à un besoin : la définition même du développement durable ; répondre aux besoins du présent sans compromettre les capacités des générations futures à répondre aux leurs. Par conséquent, il ne s’agit pas de se priver de nouvelles sources renouvelables d’énergie, mais simplement de vivre mieux. Madame Marendaz, quant à l’expression « énergie du désespoir », je combats cette forme d’écoanxiété au quotidien, puisque l’essentiel – et il en va de notre responsabilité – ne consiste pas à promouvoir la peur ou l’écoanxiété, mais précisément à apporter des solutions, car en effet, il en faut à court, moyen et long terme. C’est précisément ce que demande la résolution Pahud : identifier des solutions. Et, si poursuivre l’exploitation de Noville n’est pas une solution, alors cela ne le sera pas. Néanmoins, nous ne devons pas simplement fermer les yeux et constater l’impossible. Il y a 16 ans, quand je suis entré au Grand Conseil, mon prédécesseur M. Cadosch me demandait ce que je pensais du moratoire sur les OGM. Je lui répondais alors que, fondamentalement, je n’étais pas favorable à ces derniers, mais qu’il était important de pouvoir continuer à les étudier, pour savoir si, peut-être, éventuellement, une technologie ou une autre – aujourd’hui connue – permettrait de nourrir une population. Il est essentiel de pouvoir se donner la possibilité d’étudier ces possibilités et d’avancer.

Enfin, les objectifs 2035 ou 2050 ont besoin de financement. Vous me direz que nous avons trouvé des ressources, que nous sommes dans le canton de Vaud, en Suisse, que nous avons toujours trouvé des aides pour secourir les plus nécessiteux, dans les cas de période Covid, ou par rapport à ce qui se passe ailleurs dans le monde, mais il s’agira de le financer. Lorsque vous avez une exploitation, par exemple gazière, tel le groupe Holdigaz, il s’agit de plus de 160 millions d’investissement par année dans les énergies renouvelables. Ce ne sont pas des certificats de gaz naturel, mais 100 % de gaz naturel sont obtenus par différentes méthodes que ce soit par le biais de l’agriculture ou par d’autres méthodes de digestion de certains déchets organiques. Financer cette transition énergétique exige de pouvoir générer un peu d’argent ; je ne vous fais pas l’affront de parler des autorisations à obtenir, des oppositions qui adviennent chaque fois, que cela soit sur des projets éoliens ou « au fil du Rhône » par exemple. Si demain une énergie vaudoise peut générer des taxes, je m’en réjouirais. Et, notre nouvelle argentière se fera un doux plaisir de percevoir cette taxe puis la réinjecter uniquement – selon la volonté d’un ancien député, aujourd’hui conseiller d’Etat – dans les énergies renouvelables.

En conclusion, je vous remercie de donner à tout le moins une chance à ces énergies d’exister à court, moyen et long terme et de soutenir la résolution Pahud telle que déposée.

M. Fabrice Moscheni (UDC) —

J’aimerais ramener le débat à cette question : voulons-nous ou non dresser un inventaire ? J’ai entendu nombre de mes collègues m’expliquer la manière dont on exploite le gaz, notamment. Je n’estime pas que cela soit le centre du débat, mais qu’il est plutôt question de savoir, en personnes responsables, en bons pères de famille, ce qu’il est possible de faire dans le cadre de ce canton et, en termes d’énergie, de devenir peut-être un peu plus indépendants vis-à-vis de sources externes. Aujourd’hui, mais peut-être l’ignorez-vous, nous exploitons du gaz, des énergies qui nous permettent d’avoir un niveau de vie assez élevé, mais qui viennent de l’extérieur, de pays qui sont aujourd’hui en guerre. Par conséquent, la question centrale est la suivante : souhaitons-nous davantage d’autonomie et les moyens de savoir où cette autonomie pourrait être acquise ? Pour revenir sur les propos de l’un de mes préopinants relatifs au fait qu’il y a 5 ans, nous avions pris une décision et qu’il était impossible de revenir sur cette dernière, j’aimerais simplement signaler qu’il y a quelques années nous avons voté sur l’interdiction de l’énergie nucléaire. Or, un sondage établi récemment montre que la plus grande partie des Suisses et des Suissesses seraient d’accord de revenir sur cette interdiction : seuls les imbéciles ne changent pas d’opinion ! Par rapport à ce changement de paradigme, qui aurait cru que l’énergie électrique deviendrait à tel point onéreuse ? Nous pouvons aussi imaginer qu’il y ait une adaptation. S’adapter est toujours un signe d’intelligence.

Monsieur Buclin, malgré toute la sympathie que j’ai pour vous, et pour revenir sur le gaz, lorsque vous citez la ville de Lausanne, vous me faites sourire, car vous évoquez ce que cette dernière met en œuvre au niveau des panneaux solaires. A ce sujet, j’aimerais vous susurrer qu’elle les finance avec les 30 millions de bénéfice qu’elle génère sur le gaz fourni aux Lausannoises et aux Lausannois. 120 millions de chiffre d’affaires et 30 millions de bénéfice utilisés pour mener des actions éclatantes comme celles annoncées récemment. Monsieur Buclin, que cela soit clair, la ville de Lausanne chauffe ses habitants grâce à du gaz sur lequel, de surcroît, elle réalise beaucoup d’argent.

M. Aurélien Demaurex (V'L) —

Comme nouveau député, je trouve intéressant le débat que nous menons cet après-midi. Néanmoins, vous me voyez quelque peu étonné du type de texte que nous traitons : une résolution. Diviser le Parlement n’amènera pas une forte majorité à cette résolution. Ainsi, même si je ne connais pas parfaitement les outils à notre disposition, il me semble que la résolution représente peu de contraintes pour le Conseil d’Etat. Par conséquent, finalement, nous parvenons à une discussion qui me semble un peu stérile, clivante, et qui transmettra un message complètement dilué. A mon sens, la proposition consistant à renvoyer cette résolution à la commission qui s’occupe de l’énergie est opportune. J’ai le sentiment que nous perdons un peu de temps sur la question de la résolution.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Je précise que dans le cas d’une résolution un renvoi en commission n’est pas possible.

Mme Joëlle Minacci (EP) —

Je profite de la présence de M. Venizelos pour lui demander quelques éclaircissements relativement aux propos tenus par le président de Gaznat, Philippe Petipierre dans le journal Le Temps du 24 juin dernier. En effet, ce dernier a indiqué que les autorités lui auraient demandé d’ouvrir à nouveau le dossier du gaz. Serait-il possible d’en savoir plus sur l’état des échanges entre le Conseil d’Etat et Gaznat ?

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

L’intervention de notre collègue Didier Lohri – avec qui je ne suis pas toujours d’accord – me paraît tout à fait opportune et sensée. Que la task force soit constituée par le Conseil d’Etat de concert avec la Commission de l’énergie ou non relève d’un souhait. Il serait bon d’utiliser ce qui existe déjà. Je ne vois nulle objection de principe à refuser de voter le texte qui vous est soumis. En revanche, j’ai le sentiment qu’on ne peut quand même pas dire n’importe quoi sur le renouvelable. Demain après-midi, le Conseil fédéral annoncera un certain nombre de mesures en particulier relativement au gaz. Nous verrons à ce moment dans quel sens nous allons, quelles sont les mesures proposées et nous en aurons alors fini de discutailler ! Nous entrerons dans la réalité, dans le concret, et cela ne fera pas plaisir, comme ce fut le cas, par exemple, dans le domaine du Covid.

Je me suis exprimé tout à l’heure pour rappeler d’où venait le gaz, en particulier celui qui alimente la centrale à gaz de chauffage à distance dont parlait Fabrice Moscheni à l’instant. Personne parmi ceux qui trouvent toutes les solutions à tous les problèmes n’a contredit le fait que le gaz qu’on utilise pour chauffer à peu près le tiers de la ville de Lausanne provient probablement de gaz liquéfié arrivant à Gênes ou à Amsterdam en provenance des Etats-Unis, mais tout le monde dans cet hémicycle se fiche de savoir comment il est produit. Toutefois, on va dire que, chez nous, le gaz est un produit illicite et interdit. M. Mocchi disait tout à l’heure que le recours à l’Allemagne était provisoire… Or, le recours au charbon allemand est massif ! Il s’agit de 32 % de la production d’énergie, certains disent même qu’il entraîne la mort de 200’000 personnes par année. J’imagine assez bien le dialogue entre l’Allemagne et la Suisse : « Ecoutez, nous avons besoin d’énergie, nous n’avons plus de gaz ni d’électricité, nous aimerions bien que vous nous en donniez, mais nous n’aimerions surtout pas utiliser les réserves qui sont chez nous, car dans le canton de Vaud il s’agit de quelque chose d’illicite. » Je vous laisse imaginer le caractère complètement surréaliste de cette discussion.

Vous devriez relire les propos de M. Brélaz. En effet, déjà en 2008, il disait que les dogmatiques comme vous qui sont opposés au gaz par principe sont les meilleurs alliés du nucléaire. L’article de 24heures aujourd’hui en est l’illustration parfaite. J’ai pris note que vous vouliez tuer le père, mais vous devriez quand même vous en inspirer, car quelques leçons peuvent être tirées, puisqu’il annonçait – et à mon avis à juste titre – des problèmes d’approvisionnement. L’éolien ? Nous tournons en boucle … « bloqué de chez bloqué » ! Nous en possédons 48, alors que l’Autriche en a 1400 ; le commentateur de la TSR disait à juste titre qu’avant 2030-2035, il ne se passerait rien. Quant aux barrages, c’est identique ! « Bloqué de chez bloqué ! » et, pour le photovoltaïque, cela a de la peine à avancer. Je me souviens du moment où j’ai demandé l’accélération des procédures pour les travaux énergétiques et de minime importance. Toute la gauche de ce Parlement était vent debout ! Nous allions déstructurer la procédure et les oppositions, la porte ouverte à tous les abus des promoteurs immobiliers. Puis, « patatras et badaboum ! », aujourd’hui, un municipal vert à Lausanne – que je salue, excellent confrère – a la même idée, considérant que si nous voulons faire progresser le photovoltaïque, il faut se passer d’enquêtes publiques. J’applaudis deux fois, bien qu’il ait fallu deux ans et demi pour comprendre que ce n’était peut-être pas si idiot d’aller dans le sens de la simplification des procédures. Je vous rappelle tout de même qu’à l’époque, vous étiez farouchement opposés à cette proposition.

Finalement, aujourd’hui, vous êtes vent debout face à l’évocation de la possibilité d’utiliser le mot gaz dans cet hémicycle. Nous en prenons acte. Pour ma part, ce texte existe sous la forme d’un souhait qui permettra au Conseil d’Etat, représenté par nos deux conseillers d’Etat ici présents, d’arriver avec des propositions pour dresser cet inventaire. De toute façon, il faudra bien consentir à en faire un sous la pression de la Confédération – il faut s’y attendre. Si la Confédération décide un jour d’utiliser les réserves de gaz indigènes, que cela vous plaise ou non… J’ai le sentiment que, de toute façon, nous allons essayer de les utiliser.

Mme Valérie Induni (SOC) —

Tout à l’heure, le député Pahud nous a carrément fendu le cœur avec son exemple de famille pauvre avec un enfant grelottant dans un appartement à 5 degrés en raison du manque de gaz… ! J’aimerais le rassurer en vous lisant le chapeau d’un communiqué de presse de l’Association suisse de l’industrie gazière, sorti le 23 août 2022 : « L’industrie gazière suisse a travaillé d’arrache-pied ces derniers mois et semaines pour constituer une réserve de gaz en prévision de l’hiver. Elle a atteint les objectifs fixés aussi bien au niveau des stockages de gaz que des options d’achat. » J’espère que cela rassure M. Pahud, en tout cas à court terme. Je vous invite, comme indiqué précédemment, à accepter la résolution Pahud, telle qu’amendée par les députées Mathilde Marendaz et Graziella Schaller.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

J’aimerais préciser que je me fixe pour objectif de passer au vote relativement à cette résolution et de traiter également la résolution de M. Balsiger.

M. Vassilis Venizelos (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Je vous remercie pour ce débat, tout comme je me réjouis de ceux qui animeront la révision de la Loi sur l’énergie (LEne) qui vont probablement s’avérer très vifs et créatifs. Comme M. Buffat l’a rappelé, cette résolution amène un vœu, un souhait. J’ignore si la forme de l’intervention a été choisie à dessein. En vous écoutant, je me suis permis d’aller chercher un propos d’un penseur africain que je ne connaissais pas ; il dit ceci : « Ce que le vœu a de mauvais c’est sa capacité à engager la volonté au-delà de ses limites. » Ainsi, pour différentes raisons, j’ai le sentiment que cette pensée illustre cette résolution. Les limites physiques et temporelles ont été thématisées tout à l’heure, et nous avons évoqué l’aspect légal, puisque l’extraction et la recherche de gaz et d’hydrocarbures sont interdites sur le territoire vaudois. Le débat a constamment oscillé entre la pénurie de gaz qui nous attend en octobre, là, demain – Noville ou pas – et celle qui concerne l’électricité, ce printemps. Le texte de la résolution nous a invités à slalomer dans ce débat instillant une confusion entre le court terme, demain, la pénurie, et le moyen, voire le long terme, la nécessité de s’affranchir du gaz, des énergies fossiles de façon générale.

La résolution Pahud demande qu’un inventaire soit dressé. Commençons par une note positive, ne fuyez pas monsieur Pahud, le message est apaisant ! En effet, vous souhaitez un inventaire des ressources disponibles et l’information à la population : nous allons pouvoir exaucer votre vœu, car cet inventaire existe. Il s’agit de la Conception cantonale de l’énergie (CoCEn), une stratégie énergétique vaudoise qui comprend les différents potentiels à l’horizon 2030, 2035 ou 2050 que vous trouvez en page 24. Pour le solaire, il est question de 1,9 térawattheure, l’éolien de 750 gigawatts, état avant la future révision de la LEne, avant la crise ukrainienne. Je compte à l’évidence sur ce Parlement pour voter des crédits et des lois ambitieuses pour que nous allions au-delà de ces différents potentiels. L’inventaire actuel que vous demandez pour les énergies renouvelables existe donc bel et bien. Néanmoins, vous avez raison de dire que cela demeure insuffisant. Les débats portant sur la LEne vont probablement nous permettre de renforcer ce dispositif, tant il est vrai que les potentiels énergétiques ne sont pas identiques à Morges qu’aux Diablerets. Il s’agit de l’un des axes portés par cette révision de la LEne, c’est-à-dire la bonne ressource au bon endroit pour le bon usage. Voilà pour le vœu que j’espère avoir déjà exaucé indépendamment du travail qui restera encore à faire pour vous satisfaire.

La résolution appelle aussi le Conseil d’Etat à prendre en compte toutes les ressources disponibles, même celles qui font actuellement l’objet d’une interdiction d’exploitation. Sur ce point, je vais être obligé de vous décevoir, car la loi nous interdit non seulement d’exploiter les hydrocarbures, mais aussi de les rechercher. Si prévaut une interdiction de rechercher et donc d’inventorier un potentiel énergétique, il va être difficile de répondre à votre requête. Notamment sur Noville, les gaziers ont amené des chiffres portant sur les potentiels, quand d’autres milieux ont contesté ces chiffres. Je ne vais pas les dévoiler ne possédant pas les certitudes des potentiels exacts à Noville, puisque même les gaziers et les scientifiques sont incapables de s’engager à 100 % sur leur exactitude. Pour répondre à Mme la députée, il n’y a pas eu de contacts officiels avec des gaziers sur le potentiel de Noville, ni avec mes services, ni avec mon département, ni avec le Conseil d’Etat. J’ignore si des contacts ont été pris avec des députés.

Il y a 4 ans, les arguments qui ont amené la majorité de ce Parlement à interdire l’extraction d’hydrocarbures restent valables, et il existe effectivement des contraintes techniques, des risques, puisqu’il est question de tight gas, donc de gaz de schiste, qui présente des risques de pollution des eaux. L’urgence climatique a été largement thématisée tout comme la nécessité impérieuse de s’affranchir des énergies fossiles, comme cet été nous l’a encore rappelé de façon très pressante. Nous pouvons à nouveau ouvrir le débat sur le gaz de Noville, mais je tiens à le préciser d’entrée de jeu, ce n’est pas par le biais de cette résolution que nous réglerons cette question. Si ce Parlement souhaite que la loi soit modifiée, vous possédez les outils parlementaires – motion ou initiative – pour vous y employer. Quant à la résolution, je veux bien vous donner toutes les informations à ma disposition sur la possibilité d’exploiter du gaz, mais, en revanche, je ne possède pas les moyens légaux, vous ne me les avez pas donnés, d’aller rechercher ces différentes ressources sur le territoire, puisque la recherche d’hydrocarbures dans le canton de Vaud est interdite. Par conséquent, quant à votre deuxième vœu, nous ferons au mieux, si vous nous renvoyez cette résolution – amendée ou non – pour vous répondre.

Enfin, quant au changement temporel, je m’attendais à un débat sur la pénurie, alors que j’ai plutôt le sentiment que nous menons un débat sur la stratégie énergétique. Bien que cela me réjouisse, nous mènerons ce débat prochainement relativement à la LEne. Toutefois, le débat sur la résolution qui nous attend, portée par la résolution Balsiger que nous aurons l’occasion de traiter tout à l’heure, demande de créer une task force et d’y associer le Grand Conseil. Sur ce point, monsieur Pahud, je vais à nouveau vous contenter, car nous avons même anticipé votre souhait. En effet, cette task force existe depuis plusieurs mois, ayant été créée avant que la crise ukrainienne ne soit si forte et importante. Un groupe de pilotage interdépartemental a été mis en place au niveau de l’administration pour envisager les pénuries à venir, puisque la situation que nous allons rencontrer cet hiver va probablement se répéter ces prochaines années. Le mandat de ce groupe de pilotage a été réorienté sur la gestion de cet hiver. Cette task force existe ; c’est une bonne nouvelle.

Cependant, nous ne savons pas si pénurie il y aura. Il ne s’agit pas d’affoler la population en agitant le chiffon rouge, bien qu’il soit vrai que la probabilité d’une pénurie cet hiver n’a jamais été aussi haute, mais dépend de plusieurs facteurs : aurons-nous un hiver rigoureux ? Est-ce que les centrales nucléaires pourront être relancées ? Y aura-t-il suffisamment de précipitations pour remplir nos barrages ? Ce sont des facteurs, des incertitudes que nous ne maitrisons pas. Cependant, nous maitrisons un élément. Nous savons qu’il nous manquera probablement pour l’électricité 3 térawattheures. Le Conseil fédéral, par son fameux Plan OSTRAL, prévoit différentes étapes pour affronter une éventuelle pénurie. Il prévoit un appel aux économies d’énergie volontaires et considère que ce simple appel, sans aucune mesure incitative ni restriction, nous permettrait d’économiser ces 3 térawattheures. Pour le moment, le message que nous pourrions transmettre à ceux qui nous écoutent et nous regardent est le suivant : prenez toutes les mesures possibles et imaginables pour économiser de l’énergie, car c’est possible, sans nécessairement s’éclairer à la bougie, en gardant un certain niveau de confort. Des économies d’énergie pourraient nous permettre d’affronter cette potentielle casse.

Quant aux différentes actions mises en place par le canton, comme cela a été soulevé par plusieurs députés, le Conseil d’Etat a pris ses responsabilités, déjà ce printemps ; il a renforcé le dispositif mis en place pour minimiser l’impact sur la société et l’économie d’un approvisionnement déficitaire en électricité et en gaz. Sur la base de ses travaux, le Conseil d’Etat a pris différentes mesures : des plans de continuité ont été établis pour garantir le bon fonctionnement des administrations publiques, qu’elles soient cantonales ou communales ; des échanges ont lieu avec les communes pour s’assurer qu’elles aussi ont mis en place des plans de continuité, puisque sans électricité il n’y a plus d’eau potable, on ne peut plus gérer les eaux usées. Les communes ont par conséquent une responsabilité forte dans la gestion d’une potentielle pénurie. Comme indiqué tout à l’heure, économiser de l’énergie peut nous permettre de passer cette potentielle pénurie. Ainsi, il faut agir où cela est possible, ne pas partir en ordre dispersé.

La gestion de cette crise relèvera de la compétence de la Confédération. Il sera important que cette dernière fixe le cadre avant que les cantons n’amènent chacun leur propre recette. Toutefois, un élément est maitrisable : celui de l’exemplarité pour laquelle un appel a déjà été lancé. Le canton travaille depuis plusieurs mois pour réaliser cette exemplarité dans la gestion de son énergie, dans le chauffage de ses bâtiments. Une coordination étroite est en cours avec les différents cantons pour éviter qu’à Moudon, une classe soit chauffée à 17 degrés quand elle l’est à 22 à Bümpliz. Les mesures doivent être cohérentes et coordonnées. Des actions concrètes d’accompagnement des ménages ont été renforcées, je pense notamment au programme écologement avec des conseils à domicile pour les propriétaires et les locataires afin d’économiser l’énergie – je reviens aux 3 térawattheures évoqués tout à l’heure. En effet, et ce n’est pas moi qui le dis, mais les spécialistes de la Confédération et le Plan OSTRAL, ces petites mesures qui n’ont l’air de rien permettent d’économiser ces 3 térawattheures. Enfin, une formation gratuite pour les concierges visant à optimiser la consommation d’énergie et le chauffage des bâtiments a été lancée en partenariat avec l’Union suisse des promoteurs immobiliers.

Enfin, nous sommes en train d’évaluer la possibilité d’intervenir au niveau cantonal sur l’éclairage public, des vitrines, des enseignes. On touche ici à une compétence communale, au cercle privé aussi. Des bases légales seront nécessaires pour permettre ces différentes actions. A l’évidence, le comité de pilotage – la task force – s’appuie sur les différents professionnels, sur les gestionnaires de réseaux. Des contacts étroits existent avec les cantons et la Confédération. Nous attendons les annonces de demain qui nous en apprendront un peu plus sur le cadre fixé par la Confédération. Il est important de se préparer. Le canton de Vaud est prêt, il a mis tout ce qu’il pouvait mettre en place pour affronter une potentielle crise. Toutefois, il est important de ne pas partir avant les autres, de faire en sorte que les différentes actions dans les cantons soient coordonnées et alignées sur le trend qui sera proposé et fixé par la Confédération.

Cette résolution me permet de vous annoncer que les diverses mesures et décisions ont été prises par le Conseil d’Etat, que ce dernier prend très au sérieux les risques de pénurie, tout comme s’y emploient la Confédération et les cantons. Nous attendons des décisions plus fortes et plus claires de la part du Conseil fédéral sur la façon dont cette pénurie sera gérée et accompagnée, sur les rôles et les responsabilités. S’agissant de l’inventaire, nous avons les informations via la stratégie vaudoise, nous pouvons éventuellement les compléter et les mettre à jour lors de la révision de la LEne, un élément qui nous permettra d’alimenter les différentes réflexions. En revanche, quant à l’inventaire portant sur les énergies dont la recherche est interdite, je ne puis rien vous promettre, car nous ne possédons pas les éléments à disposition et le Conseil d’Etat va bien entendu respecter la loi et ne pas rechercher des ressources énergétiques aujourd’hui interdites.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

L’amendement Mathilde Marendaz est refusé par 69 voix contre 64 et 2 abstentions.

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) —

Je demande le vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Mathilde Marendaz votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Mathilde Marendaz est refusé par 69 voix contre 65 et 2 abstentions.

*insérer vote nominal.

Au vote, 68 députés se prononcent en faveur de l'amendement Graziella Schaller et 68 s'y opposent.
L’amendement Graziella Schaller est adopté, la présidente ayant tranché en sa faveur.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je demande le vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Graziella Schaller votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Du moment que nous venons de refuser l’amendement Marendaz, l’amendement de Mme Schaller qui inclut les économies d’énergie dans la task force rencontre mon soutien.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Au vote nominal, l’amendement Graziella Schaller est accepté par 68 voix contre 63 et 3 abstentions.

*insérer vote nominal.

La résolution, amendée, est adoptée par 70 voix contre 68.

M. Alexandre Démétriadès (SOC) —

Je demande le vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent la résolution amendée votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, la résolution amendée est adoptée par 70 voix contre 65 et 2 abstentions.

*insérer vote nominal.

Retour à l'ordre du jour

Partager la page

Partager sur :