Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 22 novembre 2022, point 16 de l'ordre du jour

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TM_loi_travaux comm-1er débat GC_LEG_684664_chauffages électriques

TM_décret_travaux comm-1er débat GC_LEG_684664_chauffages électriques

RC n°2_EMPD 248 Gérard Mojon avec annexe

RC_EMPD_248

EMPL-D et préavis_ texte adopté par CE_248_VF

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Projet de loi modifiant la loi vaudoise sur l'énergie du 16 mai 2006 (contre-projet du Conseil d'Etat)

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en deuxième débat.

Article premier. –

Art. 30a. –

M. David Vogel (V'L) —

J’ai déposé à cet article un amendement qui consiste à rejeter l’amendement Gaudard et à revenir à la proposition du Conseil d'Etat.

« Art. 30a. – Al. 1 : Le montage et le renouvellement de chauffages électriques à résistance pour le chauffage :

a. des bâtiments ; sauf pour les chauffages décentralisés. »

Mon amendement a pour but de rejeter une proposition qui a eu le mérite de faire prendre conscience que des gens ont été encouragés à passer à l’électrique puis ont été stigmatisés, tout comme du fait que nous devrons probablement subventionner les propriétaires qui n’ont pas les moyens d’opérer ce changement. Cependant, pourquoi abolir cet amendement et revenir au projet du Conseil d'Etat ? Selon moi, le problème réside dans le fait que nous nous basons sur des exceptions pour fixer une règle. Or, la loi consiste à fixer une règle et à aménager des exceptions. Ensuite, l’amendement Gaudard encourage le statu quo et l’immobilisme. Or, sur les questions environnementales, cela n’est pas une option car constitue plutôt une reddition. Les faits sont têtus – quoi qu’en disent certains – et les chauffages électriques ne sont pas efficients. Par conséquent, nous nous devons de les remplacer, ou à tout le moins les compenser par des panneaux photovoltaïques. Or, l’amendement Gaudard équivaut à l’inaction totale, alors qu’il faut la quitter et se diriger vers la transition. En outre, d’un point de vue économique, il me semble que la proposition Gaudard admette une contradiction qui consiste à dire que nous allons aider les petits propriétaires en ne changeant pas les chauffages électriques peu efficients, un peu comme si, finalement, vous proposiez à un skieur d’économiser sur les gants ! En effet, se passer de gants occasionne d’abord une économie financière, mais qui plus tard s’avérera absurde, voire douloureuse. Ce qui arrivera avec les factures économiques qui seront payées par les petits propriétaires qu’on dit vouloir défendre. En d’autres termes, le statu quo propose de fait une augmentation des frais de fonctionnement.

Enfin, en termes de politique, je constate un magnifique grand écart difficilement compréhensible. En effet, d’aucuns se réjouissent d’avoir un Conseil d'Etat de droite et une présidente, Mme Luisier Brodard – à ma connaissance pas une zadiste ! – qui s’engage dans la transition énergétique avec énergie. Or, dès qu’il s’agit de passer aux actes, on tire le frein à main ! Il est opportun d’afficher des convictions durables lors des campagnes électorales, mais il s’agit aussi de les transformer sans se cacher derrière le petit doigt des exceptions. En d’autres termes, s’il est beau de respirer les bonnes intentions, encore faut-il ne pas avoir le souffle court.

M. Sébastien Humbert (V'L) —

Les urgences climatiques et énergétiques ne sont plus à démontrer. Ainsi, aller de l’avant avec l’assainissement des bâtiments dont la consommation est trop élevée est impératif. Afin de prendre en compte la question des propriétaires avec des moyens financiers limités ainsi que les personnes qui seraient affectées dans leur santé par un assainissement lourd qui les forcerait à quitter le logement, je vais proposer un amendement à l’article 5 sur les dérogations qui prennent en compte cette problématique. J’espère que ce dernier, qui traite donc des exceptions, répondra aux préoccupations soulevées et permettra de trouver un compromis acceptable pour toutes les parties afin de n’exclure aucune fraction du parc immobilier de ce décret et soutenir l’amendement de mon collègue David Vogel.

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Nous nous déchirons mardi après-midi sur le sort des chauffages électriques, non pas pour maintenant, mais pour dans une bonne dizaine d’années. Vote après vote, deux blocs de force presque égale s’affrontent. Il y a dix ans et plus longtemps encore, nous étions déjà dans l’impasse. Nous espérons échapper cet hiver aux mesures les plus drastiques réduisant la pénurie d’énergie. Mais, on nous annonce ensuite des hivers bien plus rigoureux avec des contingents qui paralyseraient en partie des entreprises grosses consommatrices de gaz ou électricité. + 26 % : la hausse du tarif électrique annoncée par les Services industriels lausannois et applicables en janvier. De son côté, la Romande Energie augmentera son tarif de 49 % dans une quarantaine de jours. Les propriétaires, s’ils sont raisonnables, remplaceront bientôt leur chauffage électrique, dont la facture devient difficilement supportable. Ils et elles seront heureux de bénéficier des aides qui sont prévues par le décret pour une installation fondée sur une énergie renouvelable. Soutenu-e-s par ces aides, elles et ils participeront à diminuer vraiment la consommation électrique à laquelle ce type de chauffage contribue pour plus de 10 % encore aujourd'hui sur l’ensemble de la consommation électrique du pays. Pour réduire au mieux les déperditions d’électricité en regard de la pénurie à venir, je vous invite à revenir au texte du Conseil d'Etat et à approuver l’amendement Vogel.  

M. Théophile Schenker (VER) —

La décision que nous allons prendre sur cet amendement va déterminer si ce décret, dans son ensemble, sert à quelque chose, ou s'il est juste une coquille vide, où 80 % de l'objectif a été exclu d'office, sans compter toutes les exceptions supplémentaires. A l'heure de l'urgence climatique, il faut rappeler que nous devons nous passer rapidement des énergies fossiles, c'est-à-dire, en Suisse, d'environ 60 % de notre énergie, sans encore parler du nucléaire. Nous ne pourrons pas atteindre cet objectif par des décrets vides, mais bien avec des mesures fortes, en combinant accélération de la production d'énergies renouvelables, mesures d'efficience et de sobriété.

Aujourd'hui, la discussion porte sur une mesure d'efficience énergétique, c'est-à-dire minimiser la consommation d'énergie pour un service identique. Toutefois, tant je peux entendre que des mesures de sobriété soient sujets à de grands affrontements politiques, tant j'ai du mal à comprendre à quel point on s'écharpe sur une mesure d'efficience des plus évidentes.

En effet, nous le savons – et cela figure dans le rapport de la commission – parmi tous les usages d'électricité, la plus grande source d’inefficacité ou d’une mauvaise utilisation de l’électricité est le chauffage électrique direct. L'électricité est une énergie de grande qualité qu'il faut chérir, car elle peut rendre une multitude de services énergétiques. Dans de nombreux cas, elle est précieuse pour remplacer des technologies à énergie fossile, permettant souvent également de diminuer la consommation globale d'énergie.

Quant à eux, les besoins de chauffage peuvent être assurés en fonction des situations directement par des énergies renouvelables ou via les pompes à chaleur avec beaucoup moins d’électricité. Dans une perspective de bonne allocation des ressources, les chauffages électriques sont par conséquent à éviter absolument.

J'aimerais encore rappeler que les chauffages électriques – sans compter les chauffe-eaux – consomment 8 à 9 % de l'électricité du canton sur l'année, mais près de 15 % en hiver, des chiffres qui sont donnés en page 3 du préavis sur l'initiative Pidoux et qu’on peut retrouver à partir des données de l’Office fédéral de la statistique (OFS) et de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN), exercice que je me suis amusé à faire. En effet, 15 % de l’électricité durant la saison froide ? Ce n’est vraiment pas rien ; de surcroît, précisément au moment où on produit le moins d’énergie on en consomme le plus.

Aujourd'hui, si nous donnons un sursis supplémentaire aux chauffages électriques, si nous ne parvenons pas à nous entendre sur une des mesures les plus faciles pour diminuer la consommation d'énergie, si nous décidons qu'il n'est pas nécessaire de mettre fin à ce gaspillage sensible d'énergie, alors je ne vois pas comment nous réussirons à nous passer des énergies fossiles.

En conclusion, je vous invite fortement à accepter l’amendement du député Vogel pour réintégrer les chauffages électriques décentralisés, afin d’éviter d’aboutir à un décret sans objet.

M. Guy Gaudard (PLR) —

Je dépose un amendement qui allège celui que j’ai déposé précédemment, ce qui implique que le montage et le renouvellement sont exclus. J’aimerais également intervenir au sujet du déroulement des débats. En entamant ce débat, je pense aux 15'000 Vaudois concernés par ce projet de décret, et j’aimerais rappeler que l’ensemble du processus a été fragilisé par son traitement par deux conseillers d’Etat successifs. Cette fragilité a ensuite été confirmée, puisqu’il a fallu convoquer une seconde commission. En effet, tous secteurs confondus, les chiffres étaient erronés : nombre de logements chauffés électriquement, pourcentages, etc. Si ce premier projet de loi et préavis sur l’initiative Pidoux avait été correctement établi avec professionnalisme, soin, compétence et connaissance approfondie du sujet, nous n’aurions pas dû tenir une seconde commission avec des chiffres différents et contredire ainsi l’administration. Les chiffres qui nous sont rapportés aujourd'hui sont-ils corrects ? Qui nous dit qu’ils ne sont pas à nouveau erronés ? L’ancien chef de la Direction de l’énergie (DIREN), aujourd'hui député, ne cesse de défendre un projet de loi qu’il a lui-même écrit, ce qui occasionne un gros problème de séparation des pouvoirs, car ce député intervient comme auteur du rapport qu’il a rédigé, se faisant ainsi juge et partie, influençant ses collègues, alors même qu’il n’était pas présent lors du premier débat. Ainsi, défend-il l’administration ou le serment prêté de garantir et de représenter les intérêts de tous les Vaudois ? En effet, il nous entretient de black out et de pénurie d’énergie, alors même qu’il est directeur de la Société électrique des forces de l’Aubonne (SEFA). Il ignore si le black out aura lieu, quand le Conseil fédéral, lui, se veut plus rassurant. Pourquoi la séparation des pouvoirs indispensable au fonctionnement de notre démocratie n’est-elle pas comprise par ce collègue ? Il produit un rapport qui a un impact sur des milliers de Vaudois avec des chiffres faux, puisque la deuxième séance de commission a permis la présence d’un expert qui nous a confirmé cela. Or, il se présente dans ce plénum pour affirmer qu’il a raison. Lors de la deuxième séance de commission, nous avons aussi eu l’occasion d’entendre M. Mérot, spécialisé dans le chauffage électrique, qui a créé Choc Electrique depuis plus de 30 ans.

Les résultats des votes portant sur les amendements sont tellement ténus qu’ils traduisent sans doute un gros problème de compréhension du législatif, car ils se sont joués à chaque occasion à la décision de la présidente du Grand Conseil – ce fut aussi le cas pour mon amendement. Je rappelle que des milliers de Vaudois, qui se chauffent électriquement, seront touchés par notre décision et ne vont pas comprendre une décision qui les obligerait à remplacer leur chauffage électrique, puisqu’à l’époque de leur installation, il s’agissait d’une charge au permis de construire.

Par ailleurs, l’amendement accepté le 8 novembre concernant l’interdiction du montage et le renouvellement de radiateurs électriques a été supprimé. Certains, dont le conseiller d’Etat, ont interprété cela comme signifiant que nous pourrions construire des bâtiments neufs chauffés électriquement. Or, cela est inexact. En effet, les services industriels des communes vaudoises le refuseraient et vous retourneraient l’avis d’installation mentionnant l’interdiction d’un tel dispositif. Pour votre information, chaque nouvelle installation électrique de plus de 3600 watts doit être annoncée aux services industriels. Vous pouvez aisément imaginer un immeuble de 50 appartements chauffés électriquement – inconcevable. Je précise encore que l’amendement de l’article 30a, accepté, faisait part du montage et du renouvellement et ne signifiait pas installation nouvelle. En tant que professionnel de la branche, il n’est pas question de créer de nouvelles installations électriques composées de radiateurs électriques. Dès lors, pour cet amendement, nous démontons le convecteur décentralisé et procédons au montage du nouveau, même puissance et qualité du jour.

Finalement, beaucoup d’incertitudes encombrent ce dossier et aucune majorité claire ne se dégage, aucun chiffre garanti, si ce ne sont ceux de l’ancien chef de la DIREN qui prêtent à réflexion.

« Art. 30a. – Al. 1 : (…) sont interdits.,sauf pour les chauffages décentralisés. »

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

J’aimerais rappeler que nous pouvons mener un débat sans recourir à des attaques personnelles ; je vous remercie d’en rester à des arguments factuels. Il nous reste 30 minutes pour avancer relativement à cet article de loi.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Je déclare mes intérêts – même si visiblement ils sont bien connus – comme directeur d’un distributeur d’énergie (SEFA), président de l’association Multidis et ancien directeur de l’énergie du canton, comme cela fut rappelé par notre collègue Gaudard. Comme directeur de la SEFA, mes positions s’opposent aux intérêts à court terme de ma société, puisque cette dernière vendra moins d’électricité si ce décret est accepté – ce que j’espère vivement. Je n’ai plus de lien avec l’administration et me sens ainsi très à l’aise de défendre les mêmes positions qu’en tant que directeur de l’énergie, n’y voyant d’ailleurs aucun conflit d’intérêts. En revanche, je ne pourrais pas tout à fait en dire autant de vous, monsieur Gaudard, puisqu’il me semble que vous vendez des chauffages électriques ; vous en avez d’ailleurs amené un exemplaire lors d’un précédent mardi. Je considère que l’amendement que vous déposez va clairement en faveur de vos intérêts personnels.

Pour revenir au fond du débat, monsieur Gaudard, vous avancez qu’on peint le diable sur la muraille avec les risques de pénurie, c’est-à-dire de manque d’électricité ou de gaz ; je vous rappelle comme professionnel qu’il ne s’agit pas de black out. Ce manque a d’ailleurs été confirmé ce week-end par RTE, le gestionnaire du réseau français de très haute tension, qui suite à de nouveaux arrêts de centrales nucléaires françaises annonce de probables pénuries pour janvier avec de potentiels délestages dans certaines régions françaises. Cet appel a été très largement publié dans les différents médias français et doit nous alerter aussi, car si la France prend des mesures, vous comprendrez aisément que nous qui achetons du courant nucléaire français serons concernés. Ainsi, le décret dont nous parlons est pertinent et urgent. Dans notre canton, les chauffages électriques représentent 15 % de la consommation hivernale, c’est-à-dire 400 gigawattheures, ce qui équivaut à la consommation de 100'000 ménages, soit plus que la ville de Lausanne qui en compte 80'000, ou la production de 50 éoliennes ou encore 10 ouvrages hydroélectriques comme Lavey ou MBR sur le Rhône. Il s’agit donc de beaucoup d’énergie.

Au regard de l’importance de cet objet, pour le bien du plus grand nombre, nous nous devons de trouver une solution acceptable par la majorité d’entre nous. Après avoir entendu les arguments de ceux qui peinent à soutenir ce décret essentiellement pour des raisons liées aux situations particulières, notamment financières ou de santé de quelques propriétaires concernés, un projet pertinent d’amendement – celui de M. Humbert – a vu le jour. J’espère qu’il trouvera grâce à vos yeux et permettra à une forte majorité de ce Parlement de soutenir ce décret si important pour la sécurité énergétique de notre canton ainsi que pour la mise en œuvre de la transition énergétique. En effet, cette énergie ainsi économisée permettra d’en avoir assez pour décarboner les chauffages fossiles et la mobilité. Par ailleurs, pour rassurer le Grand Conseil, j’ai invité la Commission de gestion à investiguer les questions de demandes de dérogation en lien avec la Loi sur l’énergie qui sont adressées à la DIREN et la manière dont il y est répondu. Comme cela a été rappelé tout à l’heure lors du débat sur le plan climat agricole, nous devons tous faire des efforts et trouver des mesures d’accompagnement. Je vous remercie de soutenir avec énergie ce décret et les amendements proposés par nos collègues Humbert, Vogel et consorts.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Il semble que gauche et droit soient à égalité maintenant ; je vous remercie d’éviter les attaques directes et personnelles.

M. Alberto Mocchi (VER) —

Comme tout a été dit ou presque, j’aimerais simplement rappeler deux éléments. D’abord, qu’il ne s’agit pas de lutter contre un quelconque black out qui surviendrait d’ici quelques mois, mais de mesures beaucoup plus vastes qui s’inscrivent dans un temps long. En effet, pour une véritable transition énergétique, il nous faut non seulement développer des énergies renouvelables, ce dont nous discutons abondamment dans cet hémicycle, mais aussi réduire notre consommation d’énergie, ce qui est proposé ici avec les chauffages électriques qui sont de très gros consommateurs. Si nous voulons aller dans ce sens, il faut prendre des mesures courageuses. Pourtant, cela ne signifie pas que nous manquons de respect à des Vaudoises et des Vaudois qui, en toute bonne foi, ont installé des chauffages électriques dans les années 80 et 90. Ces personnes méritent le respect ; toutefois, il s’agit de les accompagner dans la transition vers des modes de chauffage plus durables, ce qui s’opère par le biais de subventions, d’éventuelles exonérations dans des cas particuliers. Ne jetons pas tout ce décret par peur de froisser d’aucuns. Il est important que tous les Vaudois et les Vaudoises puissent être accompagnés comme il se doit dans cette transition énergétique, mais aussi d’avoir parfois le courage de ses ambitions.

Mme Mathilde Marendaz (EP) —

Pour des raisons climatiques évidentes, le groupe Ensemble à Gauche et POP soutient l’amendement de M. Vogel et s’oppose à l’amendement Gaudard. Nous voulons également apporter notre soutien à l’amendement Humbert à l’article 5, car ce dernier permet de préciser les conditions d’une dérogation en tenant compte des questions qui préoccupaient la semaine dernière la droite de cet hémicycle et en mettant en avant la différence entre propriétaires, leur situation financière, âge et de soulager leurs préoccupations et, surtout, d’apaiser les rumeurs et de taire le bruit stérile invoqué la semaine dernière. Entre le nouvel amendement Humbert et les subventions prévues aujourd'hui par le Programme fédéral des bâtiments qui sera prochainement considérablement renforcé aux Chambres fédérales et qui prévoit des subventions importantes pour l’assainissement des bâtiments, il nous semble que toutes les conditions sont réunies pour démontrer que les arguments de certains de la droite de cet hémicycle ne s’appuient plus que sur du vent pour torpiller un décret important et proportionné. En outre l’amendement proposé à l’article 5 ajouté à celui de M. Vogel nous permet de voter ce décret en toute tranquillité. Ainsi, à la droite de l’hémicycle nous pouvons dire que vous n’avez plus de raisons vivables pour torpiller ce décret et notre avenir climatique dans la foulée. En conclusion, je vous invite à soutenir les amendements Vogel et Humbert et à vous opposer à l’amendement Gaudard.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Je précise que nous nous occupons pour l’instant de l’article 30a de la loi et des amendements Gaudard et Vogel. Quant à l’amendement portant sur l’article 5, il sera discuté au moment du décret.

M. Yann Glayre (UDC) —

J’aimerais adresser une question à M. le conseiller d’Etat. Il est de notoriété publique que le remplacement des chauffe-eaux centralisés 100 % électriques est interdit, ce qui est déjà le cas depuis de nombreuses années pour les chauffages électriques décentralisés. Dans quelle mesure une interdiction telle que proposée par notre collègue Vogel est-elle vraiment applicable ?

M. Hadrien Buclin (EP) —

Puisque l’essentiel a été dit, j’aimerais simplement rappeler que si le Grand Conseil ne revient pas en arrière sur l’amendement Gaudard qui a vidé le décret de sa substance lors du premier débat, le canton de Vaud deviendra une lanterne rouge à l’échelle suisse du point de vue de l’objectif d’assainissement des chauffages électriques. Comme le rappelle le Conseil d'Etat dans son projet, de nombreux autres cantons ont fixé des délais d’assainissement assez proches. A l’heure où les risques de pénurie sont réels, cela constituerait un bien mauvais signal, voire un risque pour la réputation du canton que de vider le décret de sa substance. Je vous invite à revenir au texte de loi initial qui, je vous le rappelle, a été soutenu par plusieurs députés de la droite au sein de la commission, et paraissait dans un premier temps bénéficier d’un assez large consensus.

M. Jean Tschopp (SOC) —

Comme président de groupe, je suis obligé de me prononcer brièvement sur l’intervention de M. Gaudard pour ensuite me réjouir de pouvoir à nouveau parler du fond. Monsieur Gaudard, je m’étonne que lors du premier débat vous soyez venu avec un chauffage électrique sous le bras et que vous fassiez aujourd'hui des leçons de liens d’intérêts.

S’agissant de l’amendement qui nous occupe, nous avons un Conseil d'Etat d’une nouvelle majorité qui vient il y a deux semaines avec l’envie affichée de rendre le climat un enjeu prioritaire et qui, finalement, deux semaines après, lorsque nous en sommes à l’épreuve des faits et qu’il s’agit de passer des déclarations d’intention aux actes concrets, aussi vite et aussi tôt dans la législature, le côté droit de l’hémicycle, particulièrement, se crispe pour refuser au fond ce qui paraît pourtant assez évident, c’est-à-dire le passage aux énergies renouvelables. M. Mocchi l’a bien dit, personne n’est à stigmatiser, il faut plutôt accompagner les propriétaires dans cette voie.

Toutefois, nous devons dire les choses. En tant que responsable conseil à la Fédération romande des consommateurs, poursuivre sur la voie de chauffages électriques d’appoint, de chauffages décentralisés équivaut aussi à tolérer une hausse de prix qui est en réalité inacceptable. Nous voyons déjà que les prix prennent l’ascenseur. Il faut dire à celles et ceux qui nous écoutent et qui nous suivent que cela ne va pas aller en s’arrangeant. Ainsi, l’investissement dans les énergies renouvelables pour les propriétaires qui s’y emploient constitue aussi un pari sur l’avenir et un moyen de maîtriser et de stabiliser les prix ; un élément qu’il s’agit de souligner. Pour cela, nous devons viser un horizon qui permette de passer à des énergies plus propres. Les amendements des Vert’libéraux permettent d’identifier quels sont les éléments dérogatoires possibles en balisant les cas de figure exceptionnels qui justifient une aide et des dérogations. Toutefois, comme indiqué par M. Vogel en introduction, ne faisons pas de l’exception la règle, au risque de dénaturer cette loi. Je vous invite à soutenir l’amendement Vogel.

M. Grégory Bovay (PLR) —

A l’instar de mon groupe politique, je soutiens pleinement les politiques en faveur du climat, lorsque ces dernières sont incitatives. Dans le cas d’espèce, si nous ne prenons pas en considération l’amendement Gaudard à l’article 30a, le projet est clairement punitif, injuste et nullement incitatif. Des Vaudoises et des Vaudois, souvent petits propriétaires, sont punis d’avoir scrupuleusement suivi les règles et les recommandations applicables de l’époque. Pour avoir rencontré plusieurs de ces personnes, ces dernières se sentent aujourd'hui punies, montrées du doigt comme de mauvais écocitoyens. Ayant eu l’occasion de visiter certaines de leurs maisons, j’ai pu me rendre compte des efforts que ces personnes ont d’ores et déjà engagés afin de baisser leur impact énergétique, ce souvent pour plusieurs dizaines de milliers de francs. Ces visites ont également permis d’apprécier les travaux nécessaires et les coûts considérables qu’il faudrait entamer pour changer leur système de chauffage décentralisé. Face à leur réalité, plusieurs se sont dit atterrés par les propos de certains collègues et par les « faut qu’on, y a qu’à, c’est facile, etc. ». Soyons guidés par le principe d’équité, d’égalité de traitement et de réalité ! Fort de ce constat, je vous appelle à soutenir l’amendement de notre collègue Gaudard et à penser ainsi à la situation de plusieurs centaines de ménages vaudois.

M. Didier Lohri (VER) —

Cela fait bientôt 30 ans que nous parlons de ce problème, et l’urgence climatique se manifeste maintenant. Je constate que de semaine en semaine, personne n’a téléphoné à l’Office fédéral de l’énergie pour savoir comment ils ont obtenu leurs chiffres sur les chauffe-eaux, chauffages électriques, etc. Nos débats sont émotionnels. L’amendement de M. Gaudard était jusqu’à présent plus ou moins compréhensible pour les propriétaires des maisons anciennes, à la retraite. En revanche, je crois qu’il est en train de dépasser la ligne rouge en proposant son nouvel amendement pour les terrasses et les chauffe-eaux des installations. Par conséquent, plutôt que de recommencer à s’invectiver de gauche et de droite, je propose une motion d’ordre pour que nous puissions passer au vote avant 17 heures.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La motion d’ordre est appuyée par au moins 20 membres.

La discussion sur la motion d’ordre est ouverte.

M. Vassilis Venizelos (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

J’ai bien compris que ce Parlement souhaitait se prononcer sur ce décret. Comme j’ai eu l’occasion de le dire la semaine passée, vous êtes le cinquième Parlement à débattre des chauffages électriques, passionnément. La commission qui a traité de ce dossier s’est réunie à plusieurs reprises, a auditionné un certain nombre d’acteurs, a pesé les avantages et inconvénients du décret proposé par le Conseil d'Etat et, spécifiquement sur cet article, ce sont 7 commissaires qui ont soutenu l’amendement proposé avec 2 abstentions. Cette discussion a donc été menée, et la grande majorité de la commission, indépendamment des clivages gauche-droite, a décidé d’aller dans le sens souhaité par le Conseil d'Etat.

Il s’agit d’un débat légitime qui fut entamé sous l’ancienne législature forte d’un Parlement différent. Par conséquent, il est justifié que ce nouveau Parlement souhaite se réapproprier ce décret nanti de la préoccupation tout aussi légitime de l’impact du dispositif sur les propriétaires. En effet, certains estiment que ce dispositif mettra le couteau sous la gorge des propriétaires ; on peut aussi considérer que le marché s’en chargera avant que ce dispositif n’entre en vigueur, compte tenu des coûts de l’électricité. Il y a par conséquent un intérêt à s’affranchir de certains coûts de l’électricité, tout comme il est favorable de profiter du dispositif de soutien proposé par le Conseil d'Etat pour changer son système de chauffage. Le Conseil d'Etat n’a nul intérêt à mettre le couteau sous la gorge des propriétaires, mais exprime plutôt une volonté de les accompagner pour leur permettre de changer leur dispositif de chauffage.

Il existe un intérêt collectif à réduire notre consommation électrique. En effet, utiliser de l’électricité pour se chauffer est inefficient, et cette dernière doit être utilisée pour d’autres usages et fonctions. Or, l’hiver, les chauffages électriques représentent entre 10 et 18 % de la consommation électrique globale dans le canton, ce qui équivaut tout de même à cinq barrages hydroélectriques, tel que celui de Bex-Massongex qui va enfin pouvoir être développé. Par conséquent, il existe un intérêt collectif à réduire notre consommation électrique de chauffage, mais sans mettre le couteau sous la gorge des propriétaires. L’esprit de ce décret est riche d’un soutien financier, d’une part, mais aussi, d’autre part, des exceptions qui ont été évoquées.

Par ailleurs, pour répondre à une question sur la capacité de l’Etat à contrôler l’interdiction qui existe déjà relativement aux chauffages électriques, j’aimerais rappeler que ce dernier relève de la compétence communale et qu’il existe une obligation d’annonce de la part du propriétaire qui souhaite poser un chauffe-eau électrique. Pour ceux qui estiment que les dérogations actuelles ne sont pas suffisantes, je tiens à rappeler que des dérogations ont permis dans certaines situations de poser malgré tout des chauffe-eaux électriques.

Enfin, j’aimerais encore préciser que le nouvel amendement Gaudard revient au même que celui qui avait été déposé mardi passé, c’est-à-dire qu’il autorisera la pose de chauffages électriques dans les nouveaux immeubles. Par conséquent, je ne peux que vous inviter à revenir au texte du Conseil d'Etat et vous rappeler la volonté de ce dernier de ne pas étouffer les petits propriétaires mais de les accompagner dans cette indispensable et inéluctable transition, non seulement pour ceux concernés par des raisons économiques, mais aussi pour servir l’intérêt collectif.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

La motion d’ordre Didier Lohri est acceptée par 134 voix et 5 abstentions.

L’amendement Guy Gaudard, opposé à celui de David Vogel, est choisi par 71 voix contre 70.

M. Jean-François Chapuisat (V'L) —

Je demande le vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui privilégient l’amendement David Vogel votent oui ; celles et ceux qui préfèrent l’amendement Guy Gaudard votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, 71 membres se prononcent en faveur de l’amendement Guy Gaudard et 71 en faveur de l’amendement David Vogel.

* insérer vote nominal.

L’amendement David Vogel est choisi, la présidente ayant tranché en sa faveur. (Applaudissements.)

Au vote, 71 membres acceptent l’amendement David Vogel et 71 s’y opposent.

L’amendement David Vogel est accepté, la présidente ayant tranché en sa faveur.

Au vote, 71 membres acceptent l’article 30a, amendé, et 71 s’y opposent.

L’article 30a, amendé, est accepté, la présidente ayant tranché en sa faveur.

L’article 2 est accepté.

Le débat est interrompu.

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