Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 10 mai 2022, point 6 de l'ordre du jour

Texte déposé

 

 

A la suite de la présentation par le Conseil d'Etat des comptes 2020 affichant un bénéfice pour la seizième année consécutive ainsi que des importantes réserves accumulées, Il est nécessaire et justifié que les contribuables vaudois bénéficient d’une baisse d’impôt. 

 

Si la fiscalité des entreprises vient d’être réformée, celle des personnes physiques n’a pas évolué depuis près de vingt ans ! Pire, à l’aune d’une comparaison cantonale, le Canton de Vaud est particulièrement peu attrayant. Sans compter qu’à l’heure de la problématique du réchauffement climatique, de nouvelles taxes et prélèvements viennent s’ajouter à la facture finale du contribuable. Adapter la fiscalité des personnes physiques relève donc de l’urgence. Le Canton de Vaud n’en prend malheureusement pas le chemin, bien au contraire ! Dernièrement, le transfert des charges entre communes et canton aurait dû conduire à une baisse d’impôt qui s’est en réalité transformée en une hausse dans les deux tiers des communes. Le contribuable se retrouve ainsi à devoir assumer la facture de cette bisbille provoquée par la spirale endémique de la facture sociale. Les autorités devraient pourtant se rappeler que, sans les contribuables, le Canton n’aurait pas pu assainir ses finances. La prospérité de ce dernier ne peut reposer que sur un bon équilibre entre la fiscalité et les dépenses de l’État. Continuer d’ignorer la nécessité de réformer la fiscalité des personnes physiques – particulièrement lourde dans notre canton serait le plus mauvais des calculs. Augmenter son attractivité favoriserait le développement de notre tissu économique et lui permettrait, notamment, d’attirer davantage de talents.

 

Cette motion demande que le Conseil d'Etat baisse de 5 points le taux d’imposition cantonal sur le revenu des personnes physiques. Cette baisse doit être inscrite au budget 2023 et effective dès le 1er janvier 2023.

 

Selon l'art 125, nous demandons une prise en considération immédiate et fixer un délai particulier pour la réponse.

 

Conclusion

Prise en considération immédiate et renvoi au CE

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Nicolas BolayUDC
Jean-Marc SordetUDC
Cédric WeissertUDC
Sacha SoldiniUDC
Philippe LinigerUDC
Nicolas GlauserUDC
Pierre-André PernoudUDC
Jean-François ThuillardUDC
José DurusselUDC
Denis RubattelUDC
Dylan KarlenUDC
Céline BauxUDC
Fabien DeillonUDC
Julien CuérelUDC
Daniel RuchPLR
Jean-Bernard ChevalleyUDC
Yann GlayreUDC
Sylvain FreymondUDC
Yvan PahudUDC
Claude-Alain GebhardV'L
Aliette Rey-MarionUDC

Documents

RC - 21_MOT_16_MOT (maj) G. Mojon

21_MOT_16_Texte_déposé

RC - 21_MOT_16_(min.)_J. Eggenberger

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

La Commission des finances a traité cet objet lors de sa séance du 2 décembre 2021 et vous propose de prendre cette motion en considération. Les différentes réformes de la fiscalité des entreprises, largement soutenues par la population vaudoise, ont permis d’améliorer le positionnement du canton de Vaud et de renforcer sa compétitivité en matière de fiscalité des personnes morales tant au niveau intercantonal qu’international. Le motionnaire regrette que seules quelques actions à l’impact marginal aient été déployées en faveur des contribuables « personnes physiques » de notre canton. Il constate que Vaud figure au troisième rang des impositions les plus lourdes de Suisse sur le revenu, celles-ci pouvant atteindre jusqu’à 41,5 % du revenu imposable, suivant la situation du contribuable. Le motionnaire note que seuls 7,5 % des contribuables vaudois participent à hauteur de 41 % des recettes fiscales de l’impôt sur le revenu. A ses yeux, il est ainsi primordial de garder ce groupe de contribuables, voire d’en attirer de nouveaux, en rendant à notre canton son attractivité en la matière.

Certains commissaires opposés à la motion craignent que cet objet n’entre en concurrence avec d’autres textes déjà déposés allant dans le sens d’une baisse fiscale. Le motionnaire rappelle qu’il appartient au Conseil d’Etat de répondre aux divers dépôts, le cas échéant en proposant des contre-projets. Les opposants rappellent également les importants risques non couverts par le budget 2022 et sont convaincus – la crise sanitaire n’étant pas terminée – qu’un contexte d’incertitude appelle un besoin d’Etat fort. A contrario, les commissaires favorables à la motion sont convaincus que l’énorme effort consenti par les contribuables « personnes physiques » de ce canton, au cours des dernières années, doit aujourd’hui être récompensé en leur rendant leur pouvoir d’achat. De plus, la situation financière du canton permet de le faire sans toucher aux prestations, y compris celles en faveur des communes. Un commissaire rappelle qu’une baisse du coefficient cantonal d’impôt profite significativement à tous les contribuables, y compris les plus modestes, même si cela peut paraître négligeable aux yeux de certains. D’autres craignent qu’une baisse de 5 points d’impôt cantonal ne péjore trop le financement de la transition énergétique et estiment ainsi qu’une baisse de 2, voire 3 points serait plus appropriée, tout en reconnaissant à juste titre l’effort consenti jusqu’ici par les contribuables vaudois et la nécessité de récompense y relative.

Une discussion portant sur le besoin de communication d’éléments factuels s’est finalement engagée au sein de la commission. A la demande de celle-ci, le Service d’analyse et de gestion financières (SAGEFI) a fourni les deux tableaux figurant en fin de rapport de majorité ; ceux-ci font état des modifications fiscales intervenues dans notre canton entre 2010 et 2022 et de l’évolution de quelques grands indicateurs en lien avec la thématique abordée sur la même période. Je vous encourage à vous y référer. Enfin, au vote, la Commission des finances vous recommande de prendre en considération cette motion par 7 voix contre 4 et 1 abstention.

M. Julien Eggenberger (SOC) — Rapporteur-trice de minorité

L’impôt sert principalement à financer les dépenses publiques de manière solidaire, à « produire » les biens publics qui profitent à toutes et à tous, comme l’éducation, la sécurité, la santé ou les transports publics. Il permet aussi une certaine redistribution des richesses par des mécanismes sociaux. L’impôt est au cœur de l’action étatique ; il est donc légitime que les interventions à ce sujet soient l’objet de disputes, dans le sens politique du terme.

De manière générale, la minorité de la commission considère la prise en considération de la motion comme inopportune, car elle occasionnerait une péjoration des ressources de l’Etat à hauteur de 160 millions de francs chaque année, alors que des enjeux importants sont attendus. Cette péjoration serait inéquitablement répartie, car elle bénéficierait principalement aux contribuables aisés et péjorerait les plus modestes qui seraient principalement impactés par les menaces sur les prestations publiques et les mécanismes de redistribution. Par ailleurs, la proposition d’une baisse linéaire du point est la moins efficace pour revoir le système fiscal, car elle ne cible aucun aspect en particulier. A ce titre, la collision entre la réforme de l’imposition du couple marié et de la famille questionne. Finalement, contrairement à ce que prétend le motionnaire, il s’agit aussi de rappeler que de nombreuses mesures allégeant la facture des personnes physiques ont déjà été prises ces dernières années. Permettez-moi de revenir sur certains de ces éléments pour les préciser.

D’abord, contrairement aux affirmations du motionnaire, de nombreuses mesures fiscales ont été prises par le Grand Conseil, depuis 2009, qui ont pour effet d’alléger la facture des personnes physiques pour un coût de plus de 207 millions de francs. Il est par conséquent erroné de prétendre que les personnes physiques ont été oubliées. La revue des différentes mesures prises est mentionnée dans le rapport et montre de manière claire que ce n’est pas le cas.

Ensuite, quant à la collision avec les réformes fédérales, depuis 2018, le Parlement fédéral et le Conseil fédéral travaillent sur une réforme de l’imposition du couple marié et de la famille. En effet, à l’heure actuelle, dans le domaine de l’impôt fédéral direct, de nombreux couples mariés à deux revenus et couples de rentiers mariés paient encore des impôts supérieurs à ceux que paient des couples de concubins dans la même situation économique. Il s’agit d’une rupture d’égalité et un large consensus politique s’est formé pour le corriger. Pour éviter un impact trop fort sur certains ménages, des pertes de recettes fiscales importantes semblent inévitables et la Confédération évoque un chiffre de 1,5 milliard de francs. Par conséquent, il est difficile d’imaginer que cette réforme ne constitue pas elle aussi une baisse de l’imposition, à ceci de différent par rapport à la motion du jour, qu’elle n’arrose pas indifféremment, mais vise à résoudre une inégalité devant l’impôt des personnes physiques. La minorité de la commission estime que cette conjonction de réformes sur la même catégorie de contribuables est inopportune et constitue un argument supplémentaire pour ne pas entrer en matière sur la motion Jobin.

Enfin, la minorité relève l’inconséquence de la majorité de la commission, dont une partie soutient par ailleurs d’autres mesures, dont l’impact sur les finances de l’Etat de Vaud est majeur, par exemple l’initiative « SOS Communes » avec un impact possible d’environ 250 millions ou celle des jeunes Libéraux-Radicaux sur la déduction totale des primes d’assurance-maladie, d’environ 50 millions. Par ailleurs, la réforme nécessaire à la péréquation intercommunale nécessitera l’introduction d’une dimension plus verticale dont le coût se chiffrera en dizaines de millions.

Finalement, les conséquences financières de la motion Jobin sont estimées à plus de 160 millions et mettent en danger le financement des prestations à la population. La contradiction de cette motion consiste dans un principe qui reprend d’une main ce qui est donné de l’autre. Bien entendu, ce raccourci est caricatural, puisqu'agir sur une baisse d’impôts favorise celles et ceux dont le revenu est confortable et paient proportionnellement plus par rapport à celles et ceux qui utilisent des prestations publiques ou bénéficient d’une aide de l’Etat.

Ainsi, la minorité tient à expliciter ses craintes quant aux impacts de cette motion, des craintes très concrètes vu l’accent de la majorité de la commission à mettre en lumière la progression des dépenses via la cohésion sociale. La majorité de la commission présente cette progression comme une justification favorable à une baisse fiscale ; la minorité en tire la conclusion inverse : c’est justement parce que les besoins en prestations publiques et en cohésion sociale sont importants qu’il ne faut pas dilapider les ressources publiques dans des mesures électoralistes et non ciblées. Dans le rapport, plusieurs exemples concrets sont développés – sur lesquels je ne reviens pas – mais il apparaît clairement que, pour la classe moyenne, la poursuite des politiques publiques actuelles s’avère bien plus avantageuse qu’une baisse du point d’impôt.

En conclusion, la minorité de la commission est attachée à doter l’Etat d’une marge de manœuvre financière qui doit permettre de répondre aux défis à venir, dont celui du climat, cette réalité étant d’autant plus aiguë que la minorité souhaite éviter que la nécessaire transition énergétique soit financée par un ensemble de taxes dont l’impact social est avéré.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Monsieur le conseiller d’Etat, je vous remercie, car le canton affiche une santé financière étincelante depuis plusieurs années, raison pour laquelle je ne retirerai pas ma motion. L’exercice 2021 présente un revenu de 11,89 milliards et un excédent brut de 688 millions. Il n’en continue pas moins de faire peser sur les contribuables une pression fiscale particulièrement lourde. En comparaison intercantonale, les Vaudoises et les Vaudois sont clairement défavorisés. Depuis 20 ans, le canton n’a pas – en tout cas à mes yeux – suffisamment réformé la fiscalité des particuliers. Il l’avait fait à leur détriment lorsqu’il se battait contre une grave crise financière. Depuis, les efforts des assujettis et des communes ont heureusement porté leurs fruits. Ces 15 dernières années, les recettes de l’Etat ont doublé. Il est grand temps que les citoyens bénéficient d’un juste retour pour leurs efforts.

Il ressort des chiffres tirés de la publication « Charges fiscales en Suisse » de l’Administration fédérale des contributions que la classe moyenne vaudoise est lourdement frappée par l’impôt sur le revenu en comparaison des autres cantons. Pour illustrer mes propos, je m’appuie sur un cas qui me paraît assez intéressant, celui du taux d’imposition d’un couple zurichois marié avec deux enfants, dont le revenu brut équivaut à 125’000 francs. Ce taux s’élève à 5,89 %. Pour le même revenu et une situation identique, dans le canton de Vaud, celui-ci équivaut à 10,96% ; c’est-à-dire pratiquement le double. Ainsi, même la catégorie de contribuables que l’on croit épargner dans le canton de Vaud grâce au quotient familial paie deux fois plus qu’à Zurich. La situation se ternit davantage dès que le revenu s’accroît et la main du fisc est parfois particulièrement indélicate pour les célibataires.

Ainsi, pour le canton, il est indispensable d’assouplir cette politique fiscale. Nous devons améliorer notre attractivité fiscale, ce qui permettrait de soulager les travailleurs, les indépendants, les responsables de PME, qui font la richesse de notre région. Sans compter que, pour innover, nous avons besoin de faire venir des talents d’autres cantons et aussi d’autres pays. Ces talents ne sont pas insensibles à une imposition attractive. Toutes les hypothèses montrent que nous sommes sur le podium des cantons connaissant le taux et l’imposition la plus lourde.

Ainsi, le but de cette motion tend à nous aligner sur les autres cantons, ni plus ni moins. Chaque pas dans ce sens est dans l’intérêt des contribuables, du canton et de l’économie. A mes yeux, il est urgent de rappeler un principe de justice fiscale ; il est indispensable de payer des impôts pour financer des dépenses : je rejoins en cela le rapporteur de minorité. En revanche, en cas d’excédent, l’argent doit revenir aux contribuables – cela me paraît normal et logique. Sinon, cela signifie que l’Etat s’arroge un droit sur nos revenus. Or, l’argent des citoyennes et des citoyens ne nous appartient pas. En effet, il nous est confié pour mener à bien des politiques publiques et non pour se constituer un confortable trésor. Les excédents structurels que nous connaissons depuis plus de 10 ans doivent revenir à leur juste propriétaire, c’est-à-dire le contribuable. Le canton de Vaud, si vous acceptez cette motion, ne deviendra de loin pas un paradis fiscal, mais sera un peu moins un enfer du même nom. Il faut avoir le courage et la détermination de nous attaquer à ce chantier, car il est urgent de l’empoigner ; il s’agit de notre responsabilité.

In fine, ma motion demande que le Conseil d’Etat baisse de 5 points le coefficient cantonal de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, ce qui n’aura aucun impact pour nos communes. Je vous remercie de votre soutien à ce texte et pour son renvoi au Conseil d’Etat.

Mme Florence Gross (PLR) —

Le groupe PLR soutiendra unanimement ce texte que nous nous réjouissons de voir enfin figurer à l’ordre du jour. Rappelons que j’avais déposé, au nom du groupe PLR, un texte similaire retiré au profit de la motion Jobin, après accord sur la date d’entrée en vigueur de la baisse proposée. Le canton a les moyens de mettre en place cette baisse fiscale : les résultats des comptes 2021 nous l’ont démontré. De plus, elle vient à point nommé, en cette période de hausse importante du coût de la vie. Rendre du pouvoir d’achat aux contribuables vaudois constitue un geste de reconnaissance relatif à leur forte implication menant à la saine santé financière de notre canton.

La réforme fiscale des entreprises a montré que l’impôt amène de l’impôt. Il est maintenant temps de soulager les personnes physiques en allégeant leur fiscalité. Rappelons que cette baisse bénéficiera à l’ensemble des contribuables. Dès lors, le groupe PLR refusera d’entendre des arguments l’accusant de ne privilégier qu’une certaine classe de la population. L’impôt étant proportionnel à la capacité contributive, cette motion bénéficiera aux contribuables proportionnellement à cette capacité.

Depuis la crise des années 90, la population vaudoise a fait d’importants efforts pour que le canton retrouve la prospérité. Entre 2005 et 2020, les revenus d’impôts ont augmenté de 69 %. La situation financière a changé et, pourtant, le canton de Vaud figure encore parmi les trois cantons qui imposent le plus les personnes physiques. Je le répète, le canton a les moyens d’effectuer cette baisse fiscale sans mettre en péril le tissu social conséquent et nécessaire afin de soutenir les personnes qui en ont besoin. La fiscalité des contribuables modestes a d’ailleurs été allégée lors de l’étude du budget 2022. Ainsi, plan climat, initiative Venizelos et d’autres projets ne seront pas remis en question, car ils ont d’ores et déjà été votés et se sont vus, de plus, confirmés par le Conseil d’Etat lors de la conférence de presse sur les comptes 2021.

En conclusion, je ne m’attarderai pas sur les propositions de politiques publiques ni les divers arguments du rapport de minorité qui ne reflètent aucunement les travaux et débats de commission, mais qui justifient certainement le retard pris dans le dépôt de ce rapport, afin d’étudier la mise en place de politiques publiques sans aucun lien avec la motion. Au nom du groupe PLR, je vous remercie de prendre en considération cette motion et de la renvoyer au Conseil d’Etat.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Le groupe Ensemble à Gauche et POP n’a pas modifié sa position depuis le débat sur la prise en considération immédiate, je me montrerai donc bref. Aujourd’hui, nous nous opposons toujours à cette motion, car la baisse d’impôt proposée profiterait avant tout aux revenus les plus élevés et creuserait les inégalités au sein de la population, comme l’a expliqué dans le détail le rapporteur de minorité. Nous souhaiterions que l’excédent important réalisé par le canton, ces dernières années, lors de chaque bouclement de comptes, soit plutôt utilisé pour renforcer le service public ainsi que pour développer les politiques sociales et liées à la transition écologique. Le financement de la gratuité des transports publics régionaux que nous avons récemment proposée par le biais d’une initiative populaire serait une manière beaucoup plus juste et écologiquement opportune de redistribuer cet excédent financier. La pandémie de Covid a aussi mis en lumière que de nombreux services de l’Etat, notamment dans le secteur de la santé, sont sous pression, travaillant à flux tendu, et ont besoin de renforts budgétaires, tout comme certaines communes qui sont sous pression. Le soutien à ces dernières est un objectif qu’il s’agit de prioriser.

Comme l’indique le rapport de minorité, les plus hauts revenus ont déjà bénéficié ces dernières années de plusieurs allégements fiscaux, le dernier en date étant celui introduit en 2022 sur les retraits de capitaux des 2e et 3e pilier. Le rapport de minorité énumère les allégements introduits depuis le début des années 2010, mais, en réalité, la liste aurait pu remonter jusqu’aux années 80, car depuis cette décennie, des allégements fiscaux ont été introduits qui profitent avant tout aux revenus les plus élevés, les autorités suisses et vaudoises de l’époque ayant emboîté le pas aux politiques mises en œuvre par Margaret Thatcher, en Grande-Bretagne, et d’autres. Ces politiques ont été poursuivies durant toutes les années 90 et 2000, jusqu’à nos jours. Nous avons assisté à une vraie dégringolade des taux sur les revenus les plus élevés.

Or, les urgences actuelles devraient nous inciter à revoir les priorités, car de très importants investissements sont nécessaires pour développer les énergies renouvelables, favoriser la sobriété énergétique, mais aussi, plus récemment, pour atténuer les effets de l’inflation sur les ménages modestes ; des défis qui sont étroitement liés, car l’inflation est provoquée en particulier par la hausse du prix des énergies fossiles dont il s’agit de sortir au plus vite. Ces défis requièrent le développement de nouvelles politiques publiques qui doivent être priorisées par rapport à des baisses d’impôts. Par conséquent, nous jugeons que cette motion est en contradiction avec les problématiques posées aujourd’hui à la population, raison pour laquelle nous vous proposons de la rejeter.

M. Maurice Mischler —

Au nom du groupe des Verts, j’ai l’honneur de vous enjoindre à refuser cette motion que je qualifierais de bassement populiste et flagorneuse. En effet, ces baisses d’impôt profitent aux super riches plutôt qu’à la classe moyenne, soit-elle supérieure ou inférieure. De plus, elles n’arrangeront absolument pas les relations canton-communes, au contraire. L’Etat doit redistribuer aux communes et non baisser ses revenus. On entend dire que la fiscalité du canton de Vaud est insupportable et que notre canton n’est pas attractif : la belle blague ! D’abord, les contribuables ne cherchent pas forcément des baisses fiscales, mais plutôt une stabilité dans ce domaine et des infrastructures performantes.

Je déclare mes intérêts comme membre du Conseil d’administration de Biopôle SA. Je peux observer que les bâtiments construits sont pleins même avant d’être construits. Ainsi, nous sommes plutôt au bord de la surchauffe que d’un marasme ou d’une fuite des capitaux. En outre, on parle des super riches. Une étude a montré que leur fortune a presque doublé pendant le Covid, par exemple, en France. Dans le canton de Vaud, je n’ai pas trouvé les chiffres exacts, mais la tendance est à l’avenant. De plus, ces super riches ont un impact écologique allant jusqu’à 50 fois celui d’un contribuable modeste. Il est donc normal qu’ils paient notablement plus, pour que nous puissions par exemple financer notre transition énergétique. Allez demander aux Indiens et aux Pakistanais qui subissent des températures allant jusqu’à 65 degrés… ! Ce n’est pas en baissant les impôts que les pouvoirs locaux pourront mettre en place des infrastructures permettant de s’adapter aux fortes modifications climatiques et liées à la biodiversité. En ces temps instables, il serait avisé d’investir massivement dans les énergies locales pour éviter des black out prévus ou du manque de carburant dont nous savons qu’il va augmenter de manière massive et pour lequel certains d’entre vous voudraient supprimer la taxe. On le sait, baisser les impôts équivaut à augmenter les inégalités, dont même vous, de l’UDC et du PLR, allez souffrir tôt au tard. Ainsi, pour toutes ces raisons, opposez-vous à cette aberration !

M. Jean Tschopp (SOC) —

On pourra penser ce qu’on veut de cette motion UDC, assez attendue, qui demande une baisse d’impôt de 5 points sur le revenu pour les personnes physiques – buiseness as usual. L’UDC demande une baisse d’impôt sur le revenu dont seuls les riches verraient réellement la différence, alors que la gauche veut investir et s’assurer que les aides atterrissent dans les poches de celles et ceux qui ont en besoin. Rien de nouveau sous le soleil ! A l’évidence, la tentation existe, car les comptes de l’Etat de Vaud présentent l’excédent que l’on connaît ; toutefois, le contexte des défis environnementaux s’impose à nous. Nous savons que la dynamique qui sera enclenchée pour la législature à venir et ses 5 prochaines années sera à cet égard déterminante. Le temps file ; nous ne le rattraperons pas ! Dans ce contexte, nous avons besoin d’un peu moins d’idéologie et d’un peu plus de faits.

Pour la première fois, un rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) – celui du mois d’avril 2022 – attribue sans équivoque « le réchauffement climatique aux activités humaines ». En 2030, déjà, la hausse de températures moyennes devrait être de 1,5 degré, avec 10 ans d’avance sur la précédente prévision. Nous sommes nombreux à avoir des enfants, et nous nous posons tous la même question, y compris ceux qui n’en ont pas : dans quel état se trouvera la planète que nous leur laisserons ? Le dernier rapport du GIEC met l’emphase sur la nécessité de remplacer les énergies fossiles – charbon, pétrole et gaz – par des sources d’énergie bas carbone ou neutres, l’hydraulique, l’hydroélectricité, le photovoltaïque, etc. Une dépendance aux énergies fossiles et au gaz russe, dont la guerre en Ukraine nous rappelle à quel point elle est une faiblesse, d’abord pour celles et ceux qui n’arrivent pas à boucler leur fin de mois.

La mauvaise isolation de nos bâtiments représente 26 % des émissions, à terme, de CO2. Notre parc immobilier – peu ou pas assaini – date à 75 % d’avant les années nonante. Nous avons un puissant retard à rattraper qui nécessitera des investissements considérables pour éviter que cet assainissement se fasse au détriment des locataires. La reconversion vers les métiers de la transition énergétique est centrale, tout comme des investissements à la hauteur des défis qui s’imposent à nous pour les énergies renouvelables. Sur tous ces thèmes, nous avons besoin d’un deuxième volet plus ambitieux du Plan climat. Quel que soit son bord politique, qui peut soutenir aujourd’hui que nous prenons le chemin de la neutralité carbone ? Nous avons besoin de plus de faits et de moins d’idéologie. En effet, la reconversion à opérer engage bien plus que notre rapport à l’environnement. Nous avons à nous assurer que vivre dans un environnement sain n’est pas le privilège d’une minorité. Nous devons nous assurer que nos transports publics sont attractifs, accessibles financièrement, forts d’une bonne desserte. Quant au tournant énergétique, empruntons-le sans arrière-pensée pour l’ensemble de la population. Ces enjeux sont éminemment sociaux. Si nous ne consentons pas aux investissements nécessaires pour que chacun soit en mesure de réduire ses émissions de CO2, c’est l’ensemble de la population qui en fera les frais : les riches comme les pauvres. L’expérience montre qu’une fois qu’on baisse les impôts, on ne les relève que rarement ensuite. Ne nous privons pas d’un bras de levier indispensable pour les défis environnementaux, politiques, sociaux et économiques qui s’imposent avec une acuité que peu de générations ont connue auparavant. En conclusion, refusons cette motion à courte vue !

Mme Graziella Schaller (V'L) —

En août 2015, lors des discussions sur la troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE III), qui fixait les taux d’impôt pour 2016, 2017, 2018 et 2019, les Vert’libéraux avaient déposé 4 amendements – 1 pour chaque année et pour chaque loi – pour diminuer le taux d’impôt d’un point par an, sans succès. Ces discussions sur les taux d’impôt avaient eu lieu lors du projet de loi et non pas lors du budget. Les Vert’libéraux estimaient qu’il était alors temps d’alléger de façon progressive la charge d’impôt sur la classe moyenne. Nous ne sommes par conséquent pas opposés à une baisse d’impôt. Toutefois, cette baisse n’avait pas été acceptée par le Grand Conseil. Or, aujourd’hui, l’UDC demande une baisse de 5 points d’impôts d’un seul coup. Il est vrai que les comptes de l’Etat affichent une santé insolente, depuis plus de 10 ans, avec des excédents effectifs bien plus élevés que ce qui est annoncé officiellement, et ceci même lors des années Covid que nous venons de traverser.

Cependant, il faut aussi admettre que des défis importants nous attendent, et qu’il faudra trouver de quoi les financer : ceux liés à l’urgence climatique, les questions récurrentes d’assainissement des bâtiments, de développement des énergies renouvelables, le financement des plans climat. A cela s’ajoutent les problèmes de la facture sociale. Les communes ne veulent plus de ce modèle, et demandent une reprise de cette dernière par le canton, afin d’assurer leur autonomie financière et pouvoir exercer des politiques de proximité. L’aboutissement de l’initiative « SOS Communes » devrait amener une révision du système. La péréquation telle qu’on la connait est également à revoir. A cela s’additionne la guerre en Ukraine, avec des impacts encore inconnus sur les finances publiques et les ménages.

Ceci amène nombre d’entre nous à penser que ce n’est pas le moment de toucher à la fiscalité des personnes physiques. Nous estimons qu’une baisse de 5 points d’impôt est excessive, privant le canton de 160 millions, alors qu’il aura besoin de moyens pour faire face aux défis climatiques. Ainsi, aurions-nous pu accepter une baisse d’impôt de 2, voire 2,5 points, ce qui n’aurait pas mis en péril la péréquation ni la révision de la facture sociale. Or, un autre élément a fondamentalement changé depuis le dépôt de cette motion : les élections. En effet, nous possédons un nouveau Conseil d’Etat, dont ce fut le cheval de bataille pendant la campagne. Ainsi, nous proposons d’accorder notre confiance à ce nouveau Conseil d’Etat pour qu’il assume les responsabilités et les engagements pris. Laissons-le travailler, et revenir vers nous avec des propositions, un contre-projet qu’il jugera raisonnable pour soutenir la classe moyenne tout comme les défis auxquels il sera confronté et qu’il s’agira de financer. Forte de ces éléments, une majorité des Vert’ibéraux, en principe, s’abstiendra.

Mme Valérie Induni (SOC) —

La proposition soumise de baisser les impôts de 5 points entraînera une diminution de revenu de 160 millions, au moins, pour l’Etat de Vaud. Sans revenir trop longuement sur les effets produits sur les contribuables – qui seront très divers en regard de la progressivité de l’impôt, et donc quasi imperceptibles en termes de facture d’impôt pour une partie importante de notre population – je souhaite revenir sur l’impact de cette baisse importante de revenu pour notre canton.

Du côté des communes, on peut craindre une baisse du budget de l’Etat, alors que dans le cadre des négociations canton-communes, nous avons obtenu des reprises de financement pour le maintien à domicile, la prise en charge par le canton des coûts de l’Association vaudoise d’aide et de soins à domicile (AVASAD) ou du financement des agences d’assurances sociales. Dans ce contexte, j’annonce mes intérêts comme syndique d’une commune vaudoise. Par ailleurs, j’ai travaillé durant une dizaine d’années dans un CMS. L’offre en matière de maintien à domicile avec des prestations de soins infirmiers, de soins de base, d’ergothérapie, de prestations sociales, d’aide au ménage, de repas à domicile, entre autres, ne va pas diminuer, mais au contraire se développer avec le vieillissement de la population. Souvent, on ne se rend pas compte de l’importance de cette population dans nos villes et villages. Il s’agit de personnes très âgées qui ne sortent plus beaucoup de chez elles et finissent par devenir presque invisibles. Or, nous nous devons de mettre tout en œuvre pour les accompagner dans leur maintien à domicile, afin qu’elles puissent vivre dignement.

Il serait par conséquent problématique qu’après avoir repris ces entités, le canton doive commencer à réduire la voilure par manque de moyens. Au contraire, on peut espérer que celui-ci puisse être à la hauteur des défis du vieillissement et qu’il soit possible d’adapter les moyens de l’AVASAD en fonction de la population concernée. Nous avons tous des parents, des grands-parents, des voisins concernés par les soins à domicile. Nous aurons aussi, peut-être, un jour, besoin de ce type de soutien. Les agences d’assurances sociales sont au plus près de la population de nos communes avec un déploiement à large échelle au sein des districts. Elles dispensent des prestations et des conseils en matière d’assurances sociales, préparent les demandes de prestations complémentaires, les changements de caisse maladie, orientent les demandeurs dans les diverses prestations sociales, notamment. Or, une baisse du revenu du canton pourrait pousser à revoir le déploiement de ces agences dans le territoire et à en diminuer le nombre, ce qui constituerait une péjoration pour les habitantes et habitants de notre canton, notamment dans les régions les plus décentrées. Quant à la facture sociale, elle finance largement les séjours de longue durée en EMS que peu de personnes peuvent assumer par leur propre revenu, ainsi que les prestations complémentaires à domicile pour celles et ceux qui n’ont pas ou peu de caisse de pensions, ou qui voient leur future caisse de pensions diminuer et ne pourront donc pas vivre comme il faut avec leur rente AVS.

Ainsi, d’une part, parce que la baisse du taux d’impôt rate sa cible vis-à-vis des contribuables qui en ont le plus besoin, dont la fameuse classe moyenne dont tout le monde parle – et nous pouvons à ce sujet nous référer aux quelques exemples du rapport de minorité – et, d’autre part, parce qu’elle risque de compliquer un peu plus les rapports canton-communes et les futures négociations autour de la facture sociale, parce qu’elle pourrait mettre en danger les politiques publiques reprises par le canton dans le domaine du maintien à domicile ainsi que dans le domaine des agences d’assurances sociales, je vous invite à refuser la motion Jobin.

M. Pierre Dessemontet (SOC) —

J’aimerais élargir quelque peu le cadre du débat et l’amener à sortir de la proposition stricte dont il est question, la replacer dans un cadre un peu plus large : celui de la répartition des moyens « excédentaires » du ménage commun vaudois. On le sait, le canton dispose d’un bénéfice structurel ou d’exploitation – dont on peut débattre de l’ampleur – mais qui est de taille substantielle. Pendant plus d’une décennie, cet excédent a été consacré à la réduction de la dette et, depuis, souvent à une politique d’amortissement anticipée ou de préfinancements divers et variés ; une politique suivie pendant un certain temps ; les choses se sont ainsi passées jusqu’à aujourd’hui.

A la vérité, nous devons constater que des moyens sont à disposition. Mais nous devons aussi constater que des demandes multiples existent. Quant à la demande amenée via la motion, cette dernière pèse entre 160 et 170 millions de francs par année ; une somme considérable qui représente une part tout à fait importante de ce fameux excédent. Or, cette demande entre en concurrence avec d’autres, dans le domaine des réformes fiscales qui sont d’ailleurs souvent reprises par le Conseil d’Etat – ce qui sera probablement indiqué par la suite – dans le domaine des relations canton-communes. Telle qu’écrite et sans mesures d’accompagnement, l’application de l’initiative « SOS Communes », pendante devant le Grand Conseil et le peuple, coûtera pratiquement 300 millions de francs par année au canton.

Dans le cadre de la réforme de la péréquation, il est aussi question d’introduire une part de péréquation verticale. Or, la péréquation actuelle représente 720 millions de francs. Pour en voir l’impact – si cette péréquation verticale devait se mettre en place – elle ne pourrait pas s’effectuer à la marge, et il faudra lui consacrer des moyens relativement importants, estimables à au moins 100 millions de francs par année, un montant équivalant à l’initiative « Vive le sport » qui est en voie de récolte de signatures, à l’heure actuelle. Nous pouvons encore aborder la question de l’assainissement énergétique dont on sait qu’il coûtera extrêmement cher dans les prochaines décennies à notre canton. Une politique de subventionnement devra être mise en place ; elle consommera des moyens, sans même mentionner toutes les autres propositions d’allocation de cette somme à différents projets.

Si nous additionnons tout cela, nous nous retrouverons très largement au-dessus de ce qui est théoriquement disponible et dont le montant peut être débattu. De fait, il existe une concurrence entre tous ces projets, questions et besoins. Dans ce cadre, je ne considère pas que le Grand Conseil doive aborder la concurrence entre les projets par le principe du « premier arrivé, premier servi ». La question de l’attribution des moyens de l’Etat à tel ou tel projet ou besoin devrait être débattue différemment que par une foire d’empoigne où chaque acteur cherche à forcer la main du Conseil d’Etat plutôt que de discuter les arbitrages nécessaires qu’il faudra effectuer entre toutes ces demandes, idées et besoins.

Pour cette raison, et parce que cette motion vient finalement bousculer cette nécessaire discussion et d’autorité prendre fatalement la place d’autres sujets mentionnés plus haut, ce sans discussion et en compartimentant les problématiques, je vous propose évidemment de la refuser en prenant acte que l’abstention vaut malheureusement pour acceptation.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Depuis le début de ce débat, j’ai tout entendu : la guerre en Ukraine, le climat, les personnes âgées, l’AVS, les communes, la péréquation… Je citerais encore la justice et la police. Il s’agit d’une véritable discussion budgétaire pour déterminer comment utiliser les deniers publics. Finalement, une seule catégorie n’a pas été mentionnée par mes préopinants : nos concitoyens et la population vaudoise. Peut-être s’agirait-il aussi de leur poser la question, avant de mener de grands projets, de prononcer de grands discours souvent peu concrets sur ce que nous pourrions entreprendre avec leur argent, pour savoir où se situe le seuil d’effort. M. Tschopp nous disait tout à l’heure que lorsqu’on baisse les impôts, on ne les relève jamais. Historiquement, c’est évidemment faux. A fortiori, cela m’interpelle sur le déficit démocratique. Cela signifie-t-il qu’il faut tordre le bras à la population vaudoise, parce que nous savons d’avance qu’un jour, si nous devions augmenter les impôts, elle ne serait pas d’accord… ? Voilà un propos fort aimable vis-à-vis de nos concitoyens et de la démocratie ! Qui décide ? Il nous a déjà été dit que le taux unique communal équivalait à se « ficher » de la vie du citoyen et que ce dernier pouvait payer la même chose partout dans le canton et que s’il n’avait plus rien à dire, ce ne serait pas grave… Or, cela ne constitue pas une bonne raison pour répéter cela à l’échelon cantonal.

Pour ma part, j’ai la conviction ferme et absolue qu’on ne mènera pas une politique énergétique, sans la collaboration de la population, c’est-à-dire des individus, ou des individualités elles-mêmes. C’est la tâche de chacun et de chacune, quotidiennement, dans ses habitudes, ce n’est pas seulement celle de l’Etat ; en tous les cas, voilà la conviction du PRL. Comme le dit souvent le Secrétaire général des Nations unies, M. Guterres, on peut faire de la politique climatique, imposer des taxes, mais cela doit se traduire par une révision de la fiscalité et par une baisse de l’imposition globale, sinon, nous n’y parviendrons pas. Nous n’y arriverons en tout cas pas dans ce canton et dans ce pays où nous avons l’habitude de déposer des référendums lorsque les choses ne nous plaisent pas… nous en avons vu le résultat ! Les gens sont très sensibles à la cause climatique, mais lorsqu’on parle de taxe CO2, cela devient beaucoup plus compliqué, et le peuple s’oppose, comme cela est arrivé avec la vignette autoroutière, même si le montant de l’élévation était quand même relativement plus haut.

En outre, j’aimerais m’inscrire en faux contre l’idée qui consiste à dire qu’on va prendre de l’argent quelque part pour ne pas le redistribuer autre part. C’est complètement faux ! Je siège depuis 15 ans au Grand Conseil et j’ai procédé à une estimation. Ainsi, en 2017, le budget du canton équivalait à 7 milliards ; aujourd’hui, on frôle les 12 milliards. Que je sache, la population vaudoise n’a pas proportionnellement augmenté de la même manière. A l’évidence, les besoins ont augmenté. Mais on peut tout de même dire qu’une marge existe. Grâce à la politique prudente, raisonnée, équilibrée et forte de nombreux compromis dynamiques, en particulier dans le cadre des subsides à l’assurance-maladie, menée par M. Pascal Broulis – que je salue, remercie et félicite d’ores et déjà –, nous possédons un volet de disponibilités pour permettre simplement à la population vaudoise de souffler un peu. Je suis convaincu que c’est en laissant un peu de marge à cette dernière versus la marge que nous constatons année après année dans le budget et les comptes que nous parviendrons aussi à faire comprendre à la population que si la transition climatique et la biodiversité coûtent plus cher et font augmenter le panier de la ménagère, leur pouvoir d’achat est amélioré.

Pour en finir avec l’actualité, je vous rappelle que l’inflation commence déjà à se manifester, qu’il existe des tensions sur les produits énergétiques, les produits de base, alimentaires. C’est dire à quel point cette baisse d’impôt est désormais bienvenue. Comme l’a dit Mme Schaller tout à l’heure, j’accorde ma pleine confiance au Conseil d’Etat élu – y compris au Conseil d’Etat sortant – pour mettre en œuvre cette baisse d’impôts sans que cela ne soit préjudiciable de quelque manière que ce soit aux politiques sociales, économiques et climatiques engagées par le canton.

M. Marc Vuilleumier (EP) —

Nous vivons dans un Parlement merveilleux qui a déjà décidé ces dernières années de baisser massivement l’impôt sur les entreprises, de baisser l’impôt sur les personnes physiques. Aujourd’hui, les milieux UDC et radicaux remettent la compresse en demandant une baisse de 5 points du taux d’impôt, bénéficiant, comme cela a été dit à plusieurs reprises, essentiellement aux personnes aisées et très aisées. Ces mêmes milieux, l’an passé, n’ont pas hésité à lutter contre toutes les propositions que nous avons amenées pour que les bénéficiaires de prestations complémentaires – plusieurs dizaines de milliers dans le canton – ne paient pas davantage d’impôts. Avec la mesure proposée par la motion Jobin, cela leur offrira peut-être deux ou trois cafés, alors que les milieux aisés y gagneraient plusieurs milliers de francs. Ainsi, cette politique, voulue par la droite, entraînerait que les plus pauvres paieraient plus d’impôts ; cela est inique, cynique. Nous refuserons cette motion.

M. Jean-François Chapuisat (V'L) —

Pour ma part, je souscris aux arguments qu’a donnés le rapporteur de majorité tout comme aux arguments de notre collègue Jobin, car je suis clairement favorable à une baisse de la pression fiscale. Je ne peux par conséquent pas m’opposer à cette motion. Monsieur Buffat, vous l’avez dit très justement, il faudrait demander l’avis à la population. Cela a été fait lors de récentes votations, et la majorité a basculé au niveau du Conseil d’Etat. L’un des arguments de la part de l’alliance – et nous l’avons bien entendu – consiste justement à faire baisser la pression fiscale. Elle va entrer en fonction dans quelques semaines. Ainsi, renvoyer cette motion telle quelle au Conseil d’Etat revient à lui donner une injonction et lui rappeler qu’il a pris un engagement. Je considère qu’il faut laisser le Conseil d’Etat amener ses propositions plutôt que de lui dire comment faire. En conclusion, je m’abstiendrai.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) —

Accepter d’accorder 5 points de réduction d’impôt équivaut à une façon pour la droite de dire que nous avons trop d’argent dans les caisses. Pourtant, simultanément, cette même droite estime que cela coûterait trop cher de mettre par exemple en place des prestations cantonales, pour les personnes âgées, qui complèteraient leur revenu et les rentes AVS : résultats des débats qui ont eu lieu lors du postulat que j’avais déposé en la matière.

Nous avons trop d’argent dans les caisses, mais augmenter les dotations en personnel soignant coûte trop cher ; nous avons trop d’argent dans les caisses, mais il est impossible d’accepter de mettre à niveau les salaires des enseignants spécialisés employés dans des écoles privées ; nous avons trop d’argent dans les caisses, mais le canton procrastine au lieu de prendre des décisions au sujet de la péréquation et de l’aide aux communes. Alors, à l’évidence, nous avons trop d’argent dans les caisses, si toute redistribution est systématiquement refusée par la droite.

Non, mesdames et messieurs, nous n’avons pas trop d’argent et de nombreux défis nous attendent : la prise en charge des réfugiés ukrainiens – dont les montants accordés par la Confédération sont insuffisants pour couvrir les frais – l’aide à la transition énergétique ; la lutte contre l’inflation à venir, mais plutôt par une distribution de bons à la consommation aux différents ménages en difficulté. Vous l’aurez compris : le moment n’est pas opportun pour renoncer à des ressources financières indispensables. Et, même si notre Conseil d’Etat va changer de majorité, il est nécessaire de permettre à tout notre exécutif d’avoir les moyens d’une politique ambitieuse en faveur de nos concitoyens. Par conséquent, je vous demande de refuser cette motion qui s’inscrit en totale anachronie avec l’actualité, avec les projets en cours et les besoins du canton.

M. Jean Tschopp (SOC) —

Ce sont les propos de notre collègue Buffat qui me font réagir… (réactions) et je suis content que cela vous mette en joie ! Je voudrais d’abord vous dire, cher collègue, de m’écouter lorsque je m’exprime et de ne pas déformer mes propos, car ce que j’ai dit est rigoureusement vrai. En effet, l’expérience montre que lorsqu’on baisse les impôts, on ne les relève ensuite que rarement. Vous le savez. On peut citer un certain nombre de communes, notamment sur la Côte, qui ont diminué leur point d’impôt, à la suite de l’installation d’une ou l’autre multinationale ou d’un contribuable fortuné et qui se voient aujourd’hui dans l’impossibilité, ou font face à de très grandes difficultés, au moment où elles souhaitent le relever. Cela est démontré.

J’entends également que l’environnement n’est manifestement pas une priorité pour vous. Plusieurs collègues qui se sont exprimés, y compris parmi les Vert’libéraux, – mais aussi M. Dessemontet – ont souligné l’importance éminente d’accélérer l’assainissement énergétique des bâtiments. Nous savons qu’un effort énorme doit être consenti, pour les locataires, propriétaires et que cela ne se fera pas tout seul.

Non, monsieur Buffat, même s’il faut encourager le changement des comportements individuels, et réduire notre consommation, cela ne suffira pas… Qui peut soutenir ici que nous relèverons les défis environnementaux sans l’engagement des collectivités publiques ? Laisser croire ou entendre le contraire relève de l’ineptie. Les investissements considérables que nous avons à entreprendre nécessitent impérieusement, sans réserve, l’engagement des collectivités publiques. Nous avons constamment en tête l’intérêt des citoyens ; les défis en termes de « tsunami gris » – un terme qu’on emploie régulièrement pour désigner l’évolution démographique. Les enjeux de santé sont évidemment aussi considérables, dans les soins à domicile, dans les EMS. Il faudra là aussi – et il est question de personnes, d’individus, de familles – savoir se montrer à la hauteur. Cependant, nous combattons une baisse d’impôt ciblée qui profiterait uniquement aux plus riches.

Enfin, en référence à l’intervention de Mme Schaller, présidente de groupe des Vert’libéraux, j’aimerais dire que nous la rejoignons sans réserve sur l’entier de son développement. J’ai entendu les mêmes préoccupations en lien avec l’assainissement énergétique des bâtiments, avec les attentes très élevées autour du deuxième volet cantonal du Plan climat. Toutefois, chère collègue et chers collègues vert’libéraux, soyez conséquents, car une abstention de votre groupe suffira – un principe mathématique – pour faire passer la motion UDC.

Si vous vous montrez conséquents, si vous souhaitez que le nouveau gouvernement élu prenne ses responsabilités – nous avons aussi beaucoup entendu le Centre droit nous dire à longueur de campagne qu’il respecterait les minorités, qu’il ne remettrait pas en cause les grands équilibres, si vous leur faites confiance pour trouver des moyens d’agir plus ciblés – je crois que cela passe très clairement et sans détour par le refus de cette motion UDC.

M. Nicolas Glauser (UDC) —

Lorsqu’on boucle les comptes, en fin d’année, tout le monde semble d’accord sur le fait que nous encaissons trop, et tout le monde rediscute les différentes opérations comptables. Je ne peux que vous encourager à soutenir cette baisse d’impôts – ces 160 millions. Ce qui sera économisé par le citoyen sera réinjecté dans l’économie ; les gens ne vont pas le capitaliser. Certains, parmi les nombreux contribuables qui ne bénéficient que de peu d’aide sociale, ont besoin de ces quelques dizaines, voire centaines de francs d’économies d’impôt. Il est vrai que l’on répète que la droite veut baisser les impôts. Or, aujourd’hui, nous n’avons que très peu abordé le fait que les prestations sociales ont été augmentées. Cette baisse d’impôt n’entraînera pas une politique qui mettra en danger les prestations sociales. J’ai le sentiment que lorsque la droite propose une économie d’impôt ou d’argent, la valeur de l’argent n’est pas la même que si la proposition provenait de la gauche. Je vous encourage à soutenir cette baisse d’impôts.

Enfin, monsieur Tchopp, je crois que les Vert’libéraux ont compris comment fonctionne le Parlement… il faut les laisser voter le mieux qu’ils peuvent et qu’ils pensent ! (Rires.)

Mme Céline Misiego (EP) —

Je vais moi-même aussi m’adresser au groupe des Vert’libéraux, comme l’a fait M. Tschopp, et préciser que nous n’essayons pas de leur apprendre comment voter, mais simplement comment faire de l’écologie !

M. Julien Eggenberger (SOC) — Rapporteur-trice de minorité

Ce débat présente des orientations politiques importantes, des choix stratégiques qui appartiennent à chacune et chacun. J’ai écouté très attentivement le débat du jour et celui qui a eu lieu pendant la campagne électorale. La question de l’imposition des personnes physiques y fut abondamment mentionnée, en particulier par l’alliance de droite. Plusieurs manières d’agir sur l’imposition des personnes physiques existent. On peut constater que certains aspects sont objectivement problématiques, par exemple l’inégalité de traitement entre les couples mariés et ceux qui ne le sont pas. Un certain nombre d’éléments sur lesquels un probable consensus politique est nécessaire pour agir.

La motion dont il est question aujourd’hui consiste à ne rien discuter, mais à abaisser le taux de manière linéaire. Cela équivaut à n’opérer aucun choix stratégique et politique ; l’aspect le plus problématique. En effet, si nous menions une discussion sur les évolutions nécessaires de l’imposition des personnes physiques, un peu dans le sens de certains des candidats de droite que j’ai entendus pendant la campagne, le débat serait peut-être un peu différent. Ces arbitrages peuvent difficilement être effectués lors du débat sur une motion qui se limite à un seul point.

J’aimerais également revenir sur les éléments mentionnés par M. Buffat sur la question des taxes écologiques. Il est tout de même difficile de soutenir que parce que nous allons devoir introduire des taxes écologiques, qui sont par nature antisociales, nous pouvons préventivement baisser l’imposition des personnes physiques. J’estime qu’il s’agit d’un argument qui résiste au bon sens – pour reprendre une expression qui devrait vous plaire. Cela est objectivement injuste, posera des problèmes d’application politique. En effet, le rejet de la loi CO2 a rendu évident le fait que la population n’est pas forcément favorable à l’idée de taxe écologique. En revanche, nous pouvons aussi partir du principe que la population est favorable à des investissements, à de l’action publique massive destinée à la transition énergétique. Enormément de bons arguments prévalent pour rejeter la motion Jobin, mais sans éteindre la nécessité d’une discussion sur l’imposition des personnes physiques.

M. Pascal Broulis — Conseiller-ère d’Etat

J’aimerais vous donner quelques éclairages plus larges que le canton. En matière de fiscalité tout d’abord, des réformes se préparent au niveau fédéral, que l’actuel Conseil d’Etat et le suivant combattront – du moins je le présume. Il s’agit de la réforme sur la valeur locative : c’est une drôle d’idée que de vouloir réformer la valeur locative en l’abrogeant ! Nous voyons d’ailleurs les difficultés que les Chambres rencontrent aujourd’hui avec ce dossier, en voulant maintenir des déductions, qu’elles soient environnementales ou économiques, au niveau du taux d’intérêt payé aux banques. Nous entrons dans une période où les taux d’intérêt sont de nouveau en train d’augmenter et je rappelle que le projet est né d’une mésalliance entre l’ASLOCA et les milieux immobiliers. Maintenant, peut-être que certains sont revenus à bonne fortune ? En tout cas, le gouvernement n’entrera pas dans un schéma d’abrogation de la valeur locative, qui présente des avantages, mais aussi quelques inconvénients du fait de son indexation annuelle, ce qui peut parfois poser des problèmes à un retraité ou un propriétaire de longue date.

Revenons à la proposition qui nous est faite ici. Tout d’abord, je remercie la Commission des finances qui, par la voix de son président, a présenté beaucoup d’informations. Je suis d’ailleurs surpris qu’elles n’aient pas été utilisées aujourd’hui, comme pour la croissance du soutien social – je me réfère à la gauche de l’hémicycle – alors que ces vingt dernières années, nous avons beaucoup soutenu la cohésion sociale de ce canton grâce à la diversification du tissu économique. Le rapport de M. Mojon présente clairement ce soutien massif – nous sommes le seul canton suisse à avoir un modèle plafonné à 10 % pour l’assurance maladie ! Il y aura prochainement un débat sur ce sujet, mais je ne suis pas sûr que d’autres souhaitent s’engouffrer dans une telle proposition. L’initiative socialiste au niveau suisse est fortement combattue par différents secteurs. Nous sommes donc un canton qui a totalement et pleinement assumé la cohésion sociale.

Ensuite, à ma connaissance, il n’y a pas de raréfaction ou de diminution de la prise en charge sociale, au niveau du canton. Au contraire, elle a même été renforcée, avec par exemple les PC-familles et différents modèles. Le volet fiscal, lui aussi – pour ceux qui considèrent que c’est l’autre partie des deux mains que je représente – est soutenu par des baisses. Sur les vingt dernières années, il n’y a eu aucune hausse – alors que je lis tellement de choses fausses – si ce n’est les hausses causées par une croissance de 200’000 habitants, qui se sont installés chez nous et dont on espère qu’ils sont de bons contribuables. Et oui, c’est le cas ; il y a même de très bons contribuables, puisque nous avons diversifié notre tissu économique par une politique fiscale claire d’exonérations à des entreprises qui paient des impôts et créent des postes à très haute valeur ajoutée, d’une valeur moyenne de deux à trois fois les paiements d’impôts consentis par le contribuable vaudois moyen.

En ce qui concerne les baisses, que M. Mojon a aussi présentées et je l’en remercie, il y a les baisses des coefficients, les baisses ciblées pour les familles, ainsi que des déductions particulières qui ont été réfléchies. Maintenant, dans le cadre de sa présentation des Comptes 2021, le Conseil d’Etat a déjà annoncé différents axes que la droite comme la gauche de cet hémicycle ont cités et que je vais reprendre. Tout d’abord, il y a la politique anticyclique et je remercie M. Dessemontet de l’avoir rappelée. Quand nous accélérons un amortissement, quels moyens nous donnons-nous ? C’est de la marge pour les prochains exercices. Comme vous le savez, du fait des multiples blocages que nous avons eus, dans ce canton, de la part des milieux environnementaux ou d’autres, nous n’avons pas dépensé les enveloppes. Ainsi donc, pour les cinq prochaines années, l’enveloppe dépassera les 4 milliards d’investissements à venir, si on le veut bien. Quand on amortit des objets de manière accélérée, cela crée de l’espace pour que les 4 milliards d’investissements ne viennent pas péjorer ou perturber la politique de soutien. Nous tombons là dans ce que mentionnait M. Dessemontet : une politique anticyclique et amortissement accéléré, mais après laquelle, il faut réinvestir. C’est ce que nous souhaitons faire par un soutien à notre tissu économique, aux entrepreneurs et aux petits artisans qui, ensuite, réinjectent de l’argent dans le modèle, qui est principalement de la construction.

Cela a été dit et j’espère que vous avez bien compris que nous avons débloqué 200 millions pour répondre au texte de M. Venizelos. Cela figurera au budget 2023, comme on l’a fait avec les motions Cala et Buffat auxquelles nous avons répondu dans le cadre du budget 2022, en décembre dernier. Pour le texte Venizelos qui soutient la transition énergétique, ce seront 200 millions. Que vont-ils amener à l’échelle du canton ? Je pense qu’ils dégageront entre 1 et 1,2 milliard pour la transition énergétique. Ce n’est pas le rôle de l’Etat de donner 100 % d’une subvention. Non, l’Etat vient en appui, et du fait de l’effet de levier, cela générera de 1 à 1,2 milliard, à peu près. Les 100 millions que nous avions débloqués ont généré la même fourchette d’investissements. Par conséquent, si vous validez les 200 millions à la fin de l’année dans le cadre du projet de budget 2023 – ils sont mis de côté et ils existent – ils vont générer une dynamique positive dans le dossier du réchauffement et de la transition énergétique en matière d’installations d’infrastructures particulières et de soutiens à des projets particuliers au niveau des hautes écoles, etc.

Ensuite, il y a le dossier qui touche les communes, qui encaissent beaucoup d’impôts, comme l’Etat. Ce dernier est venu en appui massivement, ainsi que cela figure dans le rapport de la Commission des finances de l’année dernière et de l’année précédente. Il montre que, depuis 2016, nous avons modifié la clé de la facture sociale : deux tiers à charge de l’Etat et un tiers pour les communes. Il s’agit de sommes colossales et nous sommes revenus à la clé de répartition d’il y a plus de vingt ans, qui était déjà de deux tiers et un tiers. Le canton l’a reprise à partir de 2016, soit pour la septième année consécutive pour le budget 2023. Cela signifie que l’Etat assume pleinement le rôle qui lui est assigné, avec les impôts qu’il encaisse. Nous attendons la même logique du côté des communes.

Quant au budget et comptes 2021, qu’est-ce que le Conseil d’Etat a présenté ? Il y avait 125 millions de plus pour les communes. C’est un peu le syndrome de la plaque de chocolat, c’est vrai : si vous la donnez en une seule fois, elle est mangée et on passe déjà à l’ordre du jour ; et chaque fois que l’on donne, on oublie ce que l’on a donné. Je vous rappelle juste que, dans le cadre du débat que nous aurons en juin prochain, le canton met à disposition 125 millions de plus pour le dossier des communes.

Venons-en maintenant à la proposition concrète de M. Jobin : il faut élargir le périmètre. Le Conseil d’Etat a précisément eu cette approche, que vous avez partagée ; nous sommes venus à plusieurs reprises présenter un pacte gouvernemental, soit un pacte fiscal ou une feuille de route fiscale. Nous l’avons fait pour éviter un « effet yoyo », car si vous baissez les impôts de dix points d’un côté et que vous les augmentez de dix points de l’autre, le contribuable lambda n’y verra rien s’il ne demande pas de correction de ses acomptes, autant à la hausse qu’à la baisse. Et c’est seulement trois ans plus tard qu’il verra soit une baisse soit une hausse. C’est d’ailleurs le gros problème de perception que nous avons, car que ce soit à la hausse ou à la baisse, il y a toujours au minimum 18 mois d’écart entre la perception et la taxation. Le Conseil d’Etat avait donc présenté une feuille de route, validée à deux reprises ces dernières années et ainsi, jusqu’à la fin 2023, nous sommes toujours sous le couvert de l’actuelle feuille de route fiscale.

Où le Conseil d’Etat a-t-il déjà annoncé qu’il fallait continuer la réflexion sur la fiscalité ? Il l’a fait tout d’abord en 2022 avec la fiscalité de l’entrepreneur, que je crois très saluée par les milieux économiques, mais pas beaucoup encensée. Ce n’est pas grave et je n’attends pas de remerciements de certains milieux. Tout comme pour les deuxième et troisième piliers, quelques fiduciaires ont fait un très bon travail de vulgarisation, mais très peu de choses des milieux économiques. Sur ce dossier, nous sommes redevenus non pas ultra-concurrentiels, mais corrects et dans la moyenne suisse. Ces corrections nous semblaient importantes pour que le canton soit attractif et qu’il permette à l’entrepreneur de s’épanouir dans sa fiscalité et sur la fortune, et pour les salariés, sur les deuxième et troisième piliers. Cela a été mis en place par votre Parlement, c’est sous toit et c’est effectif depuis le 1er janvier 2022.

Mais avant cela, il y a eu des baisses fiscales. Il y a eu la baisse d’un point d’impôt, l’année d’avant, en pleine pandémie. Nous avons été le seul canton, avec celui de Zoug, à baisser les impôts en pleine pandémie pour continuer à soutenir le pouvoir d’achat.

Pour la suite, dans sa présentation des Comptes 2021, le canton a déjà présenté trois réformes qu’il a annoncées haut et fort :

Premièrement, il nous semble logique de soutenir le pouvoir d’achat dans une période de problèmes, avec l’augmentation du panier de la ménagère, de certains produits et de l’accès à certains matériaux du domaine de la construction, par exemple, pour certains propriétaires. Soutenir le pouvoir d’achat, c’est par exemple mettre en œuvre l’initiative qui touche aux déductions pour l’assurance-maladie, qui a été déposée et sera examinée. Pour nous, c’est clairement une priorité, annoncée noir sur blanc à la planche 21 des Comptes 2021.

Deuxièmement, il nous semblait aussi logique d’encourager le développement du nombre de places d’accueil scolaires et parascolaires, afin de continuer à insérer la cellule familiale, homme ou femme, dans le monde du travail. D’un autre côté, il s’agit aussi de pouvoir déduire une partie des frais de garde engendrés. Là également, le Conseil d’Etat a annoncé examiner la question dans le cadre de son projet de budget 2023.

La troisième réforme concerne implicitement tout ce qui touche à la fortune et c’est assez compliqué. En effet, je voudrais revenir sur les propos de M. Mischler. Les super-riches ne sont pas concernés par la réforme de 5 points de baisse présentée aujourd’hui. Le canton de Vaud n’est pas un canton qui compte beaucoup de super-riches – ils se trouvent ailleurs. Il y a beaucoup d’erreurs, au niveau des magazines. Ce n’est pas grave, car en raison du secret fiscal, nous ne pouvons rien dire. Par exemple, on localise souvent des gens, alors qu’ils ne se trouvent pas forcément dans ce lieu, mais la personne concernée est la seule à pouvoir corriger ces informations. Pour prendre un indicateur, dans le domaine de la réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons (RPT), vous voyez que, dans le canton de Vaud, avec l’impôt sur la fortune qui concerne la fortune brute, nous sommes en dessous de la moyenne suisse ! Par contre, nous sommes au-dessus de la moyenne suisse pour l’impôt sur le revenu, car depuis une vingtaine d’années, nous avons engrangé beaucoup de contribuables avec de très bons salaires et c’est là où le canton de Vaud trouve ensuite l’équilibre au niveau de la moyenne. Pour revenir à l’impôt sur la fortune, c’est une réforme que nous devrons entreprendre, mais avec des pincettes.

Revenons aux priorités cantonales et aux propositions de M. Jobin. Si son texte nous est renvoyé, le Conseil d’Etat l’examinera, bien sûr, avec une force impérative. En même temps, s’agissant d’un taux annuel, il change chaque année. Et comme je l’ai expliqué, des changements à la hausse ou là la baisse sont possibles pour un ou deux points, mais on ne peut pas faire d’excès. Or, ces dernières années, nous avons baissé l’impôt de plusieurs points. Si le Conseil d’Etat vient avec une feuille de route et une série d’objets qui permettent de garantir le pouvoir d’achat, votre objet entrera dans cette logique, comme pour la question de la fortune ou comme les deuxième et troisième piliers que vous avez très bien compris l’année dernière, et c’est identique pour le dossier concernant la fortune de l’entrepreneur.

Nous avons besoin de réformer certains profils d’impôt pour rester dans la course. C’est pourquoi nous examinerons votre texte et essaierons de l’inscrire une nouvelle fois dans une feuille de route. Nous devons surtout éviter les fluctuations, parce que la pire chose que l’on puisse avoir, en matière de fiscalité, est l’insécurité de la fiscalité et de la manière de la pratiquer. Le contribuable souhaite savoir à quelle sauce il sera mangé, comment cela va se passer, pour pouvoir lui aussi planifier ses sorties fiscales, à la hausse ou à la baisse. De toute façon, le gouvernement l’a déjà fait et il le refera, et réexaminera votre texte. Je ne ferai plus partie de l’équipe gouvernementale à partir du 1er juillet, mais je présume que vous avez bien ressenti le fait d’avoir une stratégie, autant dans le domaine des charges et planifications des investissements, que dans celui des revenus, pour que nous ayons une certaine stabilité, avec des réformes qui touchent les différents secteurs. Il faut que le canton de Vaud reste concurrentiel et attractif, mais surtout pas agressif ! Je crois que ce fut une des solutions trouvées par canton et que nous pourrons la remettre en place. Je n’ai rien de plus à dire sur ce texte. De toute façon, le gouvernement fera des pesées d’intérêts de ses priorités et ce sujet s’inscrit aussi dans cette logique.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend la motion en considération par 71 voix contre 54 et 7 abstentions.

Mme Valérie Induni (SOC) —

Je demande le vote nominal pour visualiser qui a voté quoi.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui souhaitent la prise en considération de la motion votent oui ; celles et ceux qui souhaitent le classement votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil prend la motion en considération par 72 voix contre 53 et 7 abstentions.

*Insérer vote nominal.

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