Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 5 avril 2022, point 7 de l'ordre du jour

Texte déposé

Transport de prisonniers, contrôle d'identité à l'entrée des établissements pénitenciers de la plaine de l'Orbe (EPO) avec fouille des voitures ou patrouilles aux abords de la prison de la Croisée, par du personnel armé, flanqué de chiens : toutes ces tâches sont actuellement effectuées par des entreprises de sécurité privées.

 

En effet, il semblerait que le Canton de Vaud recourt de plus en plus fréquemment aux services d'entreprises de sécurité privées, pour remplir une partie des missions sécuritaires qui lui incombent, faute d’effectif. Le Canton délègue ainsi des tâches étatiques essentielles à des employés travaillant pour des entreprises à but lucratif. Ce Grand Conseil s’est déjà inquiété par le passé de voir un recours aux agents de sécurité privée à l’intérieur des établissements pénitentiaire, et plus seulement en périphérie ou à l’entrée.

 

Le monopole de l'usage de la force est un élément constitutif de notre société ; il est lié au devoir de respecter et de protéger les droits fondamentaux des citoyens, raison pour laquelle l'application de la loi est réservée à l'État. Ainsi, la législation réglemente et légitime directement la structure et le déploiement des autorités de police ; les agents ou les employés directement intégrés à l'équipe d'encadrement sont assermentés, ils suivent des ordres et des directives et sont placés sous le contrôle direct de leurs supérieurs. Ils servent enfin exclusivement l’intérêt public, puiqu’ils ont un seul employeur, une collectivité publique, et travaillent uniquement dans leur domaine d'intervention. Cette « courte » distance de contrôle revêt une importance particulière lorsqu'il s'agit d'effectuer un contrôle direct, si nécessaire violent, des droits des personnes.

 

L'accomplissement d'une tâche régalienne, par des personnes privées, est considéré comme constitutionnellement admissible lorsque son exécution peut être supervisée ou contrôlée par l’État ; ceci requiert une formation adéquate, une supervision adéquate et un contrôle par des organismes publics. Les experts en droit s’accordent sur le fait que la délégation d'exécution de tâches sécuritaires par des particuliers dépend notamment de la mesure dans laquelle les droits fondamentaux sont affectés ; elle dépend donc : 

  • de l'intensité de l'interférence;
  • de l’étroitesse du lien existant entre l'activité et l'utilisation potentielle de la coercition;
  • de l'importance de la marge de manœuvre discrétionnaire de la personne qui exécute la tâche et de la manière dont la personne qui exécute la tâche doit s'acquitter de ses tâches;
  • de la protection juridique.

 

Ainsi, ils concluent les missions ci-dessous touchent des zones sensibles, en termes de droits fondamentaux, et ne devraient pas être exécutées par du personnel employé par des entreprises de sécurité privées : 

  • les tâches qui touchent au monopole de la punition, à l'exception de missions auxquelles aucun pouvoir discrétionnaire n'est attaché, comme le contrôle de la zone de stationnement bleue;
  • les expulsions individualisées, comme les expulsions liées aux violences domestiques, les expulsions de personnes marginalisées (drogue (consommateurs de drogues), de squatters ou de manifestants.

 

Selon les auteurs de l’étude référencée en fin de texte, il est admis de confier les tâches suivantes à un personnel employé par des entreprises de sécurité privées:

  • les détentions, dans le cadre d’une manifestation et du code de la route;
  • la garde de prisonniers ou le transfert de prisonniers (transports des prisonniers / gardiennage).

 

Il n’est, par contre, pas admis de confier les tâches suivantes à des entreprises privées :

  • la fouille de personnes et de locaux;
  • les contrôles de police et contrôles de personnes dans les lieux publics;
  • l'interrogatoire et ;
  • d'autres mesures policières standard à caractère coercitif.

 

Préoccupé par l'augmentation du nombre de tâches confiées aux sociétés de sécurité privées dans l'exécution de tâches sécuritaires dans les établissement pénitenciers et considérant que la délégation de tâches sécuritaires à une entreprise privée pose des questions en ce qui concerne notamment la responsabilité des entreprises privées, les compétences de leur personnel et le port d’armes à feu, le groupe socialiste a l'honneur de demander au CE :

  • de faire un état de lieux des tâches sécuritaires confiées à des entreprises privées dans le domaine pénitentiaire, en présentant notamment l'évolution du nombre de mandats et des sommes y affectées durant ces dix dernières années ; 
  • de produire une analyse comparée des formations délivrées effectivement aux agents pénitentiaires et agents de sécurité ;
  • de détailler les mesures de contrôles déployées en vue d'assurer son devoir de contrôle étroit des tâches déléguées à ces entreprises de sécurité ;
  • de se positionner sur le contrôle d’identité, la fouille des voitures et le port d'armes par des personnes travaillant pour des entreprises privées, alors qu’elles effectuent des tâches régaliennes.

 

Le groupe socialiste remercie par avance le CE pour ses réponses circonstanciées.

 

Source : Zwischen Sicherheit und Grundrechteschutz Delegation der Polizeiarbeit an private Sicherheitsfirmen Von Walter Kälin, Andreas Lienhard und Judith Wyttenbach* Neue Zürcher Zeitung vom 18.12.2007

 

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Claire Attinger DoepperSOC
Sébastien CalaSOC
Delphine ProbstSOC
Carine CarvalhoSOC
Eliane DesarzensSOC
Arnaud BouveratSOC
Anne-Sophie BetschartSOC
Cédric EchenardSOC
Alexandre DémétriadèsSOC
Yves PaccaudSOC
Denis CorbozSOC
Olivier GfellerSOC
Alberto CherubiniSOC
Jean-Claude GlardonSOC
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Julien EggenbergerSOC
Cendrine CachemailleSOC
Sébastien PedroliSOC
Stéphane MontangeroSOC
Sylvie Pittet BlanchetteSOC
Valérie InduniSOC
Isabelle FreymondSOC

Documents

Annexe au rapport de commission - Formation agents de sécurité_matières

21_POS_24-Texte déposé

Annexe au rapport de commission - Formation de base agents de détention_matières

RC -POS (21_POS_24) J.-R. Chevalley

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) — Rapporteur-trice

La commission a tenu séance le 4 octobre 2021 pour traiter ce postulat. Le Conseil d’Etat était représenté par Mme Béatrice Métraux, qui était accompagnée de Mme Sylvie Bula, cheffe du Service pénitentiaire (SPEN) et de M. Jacques Antenen, commandant de la Police cantonale vaudoise. Mme Sophie Métraux a pris les notes de séance et est vivement remerciée pour le soin apporté à son travail.

Mme la postulante s’inquiète, au travers de son postulat, de la délégation qui est faite à des entreprises privées pour des tâches sécuritaires. Elle fait également référence à un article de la NZZ qui l’a interpellée. Le postulat pose quatre questions précises au Conseil d’Etat. Mme la cheffe du département, ainsi que Mme Bula et M. Antenen apportent des éléments clairs et précis à chacune des quatre questions, appuyés par des tableaux chiffrés qui se réfèrent aux dix dernières années. Il en ressort que les délégations sécuritaires sont en constante baisse, mais ne peuvent pas descendre en-dessous d’un certain seuil, et que certaines tâches doivent obligatoirement être attribuées à des tiers, comme le transport de détenus hors des frontières cantonales. Le recours à des entreprises privées assure une certaine flexibilité et permet de répondre rapidement à une absence de personnel. Le personnel des entreprises privées est également formé pour certaines tâches spécifiques. La discussion a été ouverte après chacun des quatre points. Les commissaires ont trouvé des réponses claires à chacune des questions posées. Lors de la discussion finale, il est ressorti que les éléments apportés par Mme la conseillère d’Etat et ses collaborateurs étaient exhaustifs et répondaient parfaitement aux questions soulevées par le postulat. Il fut donc suggéré à Mme la postulante de retirer son dépôt. Après une courte interruption de séance, Mme la postulante annonce avoir pris la décision de retirer son postulat, mais souhaite que des documents mentionnés durant la séance soient annexés au rapport, pour autant qu’ils ne tombent pas sous le coup de la confidentialité. Vous trouverez donc deux documents joints au rapport de la commission. L’objet étant retiré, les commissaires ont été exemptés de la prise de position au travers d’un vote. Je remercie Mme la conseillère d’Etat et ses services pour le travail de précision réalisé en amont de la séance de commission.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Muriel Thalmann (SOC) —

Le Conseil d’Etat devrait quand même se positionner par rapport à la problématique des contrôles d’identité, de la fouille des voitures et du port d’armes par des personnes travaillant pour des entreprises privées. Je ne suis pas convaincue de la réponse, mais je retire en effet mon postulat.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est close.

Le postulat est retiré.

 

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