Point séance

Séance du Grand Conseil le mercredi 15 juin 2022, point 10 de l'ordre du jour

Texte déposé

 

 

Lorsque l’Etat de Vaud était en difficulté, les communes ont été sollicitées pour lui venir en aide par des transferts de charges. Depuis de l’eau a coulé sous les ponts. Grâce un long et patient travail minutieux du Conseil d’Etat et en particulier du chef du département des finances, la barre a été redressée, mais aujourd’hui ce sont les communes qui sont en difficulté.

 

Selon l’Union des communes vaudoises, les communes doivent soutenir une dette 9.9 fois plus élevée que celle du canton, avec la même marge d’autofinancement. Les communes doivent faire face à des investissements 3.5 fois plus élevés que ceux du canton, avec la même marge d’autofinancement. Les dépenses nettes d’investissement sont plus importantes que la marge d’autofinancement dans les communes, ce qui implique le recours à la dette. Ce n’est pas le cas de l’Etat de Vaud. Et pourtant on ne pas dire que toutes ces communes, de manière générale soient plus mal gérées que l’Etat de Vaud.

 

En 2020, le bénéfice réel des comptes de l’Etat de Vaud était de 788 millions de francs sans les dépenses Covid, 267 millions si l’on déduit les dépenses Covid et si l’on exclu les préfinancements et réserves (accord cantons-communes, plan climat, risques fiscaux).

 

Dans cette période difficile pour les communes qui ont du combler les lacunes des aides fédérales et cantonales durant la période de pandémie, et compte tenu des charges liées auxquelles elles doivent faire face en raison de décisions cantonales, quoi de plus normal que l’Etat de Vaud leur vienne aide de manière concrète par un soutien financier.

 

Le moyen le plus simple de venir en aide aux communes a déjà été évoqué au Grand Conseil : une bascule d’impôts en faveur des communes sans contrepartie. On objectera que ce soutien bénéficierait autant aux communes qui se portent bien que celles qui se portent mal. Qu’il n’est pas judicieux de venir en aide à des communes (peut-être) plus dépensières que d’autres. Et que la mesure, même sur une courte période pourrait affaiblir les finances de l’Etat surtout si elle n’est pas limitée dans le temps.

 

Il existe donc un moyen plus juste de venir en aide aux communes : un partage du bénéfice qui présente le gros avantage de ne pas compromettre les finances de l’Etat de Vaud. Pour que cette répartition vise juste et profite aux plus mal lotis, elle devrait être fonction de la valeur du point d’impôt. Ainsi les communes qui ont les recettes fiscales les plus faibles et qui pour cette raison, sont en difficulté, seraient les principales bénéficiaires.

 

La présente motion demande donc que le Conseil d’Etat présente un projet de décret permettant à l’Etat de Vaud de venir en aide aux communes en partageant avec elles la moitié de son bénéfice après amortissements (mais avant pré-financement et autres réserves) durant 10 ans. La répartition de cette manne entre communes se fait en proportion inversée de la valeur de leur point d’impôt de l’exercice comptable précédent.

 

Vevey, le 19 septembre 2021                                             Au non du groupe des Libres

                                                                                                         Jérôme Christen

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Cloé PointetV'L
Blaise VionnetV'L
Laurent MiévilleV'L
Elodie LopezEP
Céline MisiegoEP
Circé Barbezat-FuchsV'L
Jean-Christophe BirchlerV'L
Didier LohriVER
Pierre ZwahlenVER
Hadrien BuclinEP
Andreas WüthrichV'L
Isabelle FreymondSOC
Marc VuilleumierEP
Jean-François ChapuisatV'L
Cédric EchenardSOC
Graziella SchallerV'L
Jean-Louis RadiceV'L
Vincent KellerEP
Serge MellyLIBRE
Claude-Alain GebhardV'L
Taraneh AminianEP

Documents

RC - 21_MOT_21

21_MOT_21-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

Cet objet a été confié à l’étude de la Commission des finances qui vous propose de ne pas prendre en considération la motion, même transformée en postulat par son auteur. Le motionnaire demande le partage du bénéfice de l’Etat avec les communes après amortissement, mais avant affectation aux préfinancements et autres réserves. La répartition des fonds ainsi à disposition devrait se faire en proportion inverse de la valeur du point d’impôt, garantissant ainsi aux communes qui ont les recettes fiscales les plus faibles d’en être les principales bénéficiaires. Le conseiller d’Etat en charge du Département des finances et des relations extérieures a rappelé d’entrée de jeu que l’Etat ne fait pas de bénéfices, mais enregistre un résultat comptable, le cas échéant, positif. Pour ce dernier, il faut en rester à une relation ordinaire où les recettes de l’Etat doivent servir à financer les prestations publiques. Pour la conseillère d’Etat en charge du Département des institutions et du territoire, également présente lors de la séance, les attentes en matière de péréquation sont fortes et proviennent de toutes parts, mais son département est clairement défavorable à ne traiter que des questions financières sans avoir trouvé de solutions pérennes dans l’intérêt de toutes les communes. Celles-ci doivent être durables et ne pas être influencées par des solutions ponctuelles qui déséquilibrent encore plus le système. Tout comme son collègue, elle invite la commission à ne pas entrer en matière sur cette motion.

Cet objet a provoqué une discussion nourrie au sein de la Commission des finances, puisque chacun s’accorde à reconnaître la nécessité et l’urgence d’une réforme de la péréquation. Dans ce sens, plusieurs députés ont rappelé le rôle proactif de la commission en la matière et estiment au vu de la situation que le dépôt d’une feuille de route concrète et crédible présentant un agenda clair est maintenant impératif pour que ce dossier avance. Plusieurs s’accordent également sur le fait que l’un des problèmes majeurs en la matière est la répartition des charges dans la facture sociale, et que la réponse à la question de la péréquation passe nécessairement par la résolution des effets pervers de ladite facture sociale avec en contrepartie un renforcement de la solidarité intercommunale. Plusieurs voix d’accordent également à dire qu’il faut éviter du fait de la péréquation qu’une collectivité locale en difficulté doive augmenter ses impôts. Un député qui peine accepter le texte en l’état tient à préciser que même si la motion n’est pas soutenue, le rapport du président pourrait évoquer le fait que ce refus n’épuise pas le sujet de la péréquation verticale – voilà qui est donc fait ! Finalement, un député rappelle que la mise en place d’un système péréquatif ne peut se concevoir sans une comparabilité intercommunale solide et qu’ainsi la motion déposée par la Commission des finances pour l’implantation dans les collectivités locales du modèle comptable harmonisé MCH2 garde toute son urgence.

Au vu des discussions, le motionnaire a transformé sa motion en postulat et a modifié la dernière phrase de son texte de la manière suivante : « La répartition de cette manne entre communes se fait en proportion inversée de la valeur de leur point d’impôttient compte de la valeur du point d’impôt de l’exercice comptable précédent. » Pas vraiment convaincue même par ce changement, la Commission des finances vous recommande de ne pas prendre en considération cette motion transformée en postulat, modifiée par son auteur, par 9 voix contre 2 et 2 abstentions.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Jérôme Christen (LIBRE) —

L’immobilisme est en marche, rien ne l’arrêtera ! Êtes-vous prêt à démentir cet aphorisme d’Edgar Faure ? Le groupe des Libres est intervenu plusieurs fois depuis le début de la législature pour venir en aide aux communes dont les finances deviennent toujours plus exsangues en raison des aspirations financières de l’Etat de Vaud. Souvent, avec le soutien de l’UDC, parfois avec celui des Verts ou des Vert’libéraux ou de quelques PRL ou socialistes courageux, le plus souvent sans trouver de majorité, nous avons soutenu toutes les initiatives, au sens large du terme, quelle que soit leur couleur politique. Pourtant, rien n’y fait, rien ne se passe, même lorsque nous trouvons des majorités, les accords signés ne sont pas respectés. L’an dernier, mon estimé collègue Didier Lohri l’a dit, « le canton de Vaud se fout de nous ! »  « Il se moque de nous » a nuancé Claudine Wyssa, alors présidente de l’Union des communes vaudoises (UCV), « ce n’est pas un partenaire fiable » a surenchéri Robert Middleton, syndic de Crans, tandis que Grégoire Junod, syndic de Lausanne, déclarait que tout était permis pour ne pas tenir ses engagements.

Nous nous livrons donc à une nouvelle tentative qu’il nous paraît utile d’étudier pour mettre la pression. Il s’agit de demander à l’Etat de Vaud qu’il se montre solidaire des communes comme les communes l’ont été de l’Etat, lorsque celui-ci était en difficulté. Nous vous proposons donc un partage du bénéfice de l’Etat de Vaud avec les communes durant dix ans. Cette proposition semble acceptable dans la mesure où elle ne met pas en péril l’Etat qui ne débourserait qu’en cas de beau temps. Contrairement à ce qui a été dit en commission, l’Etat n’a aucun intérêt à vouloir renoncer à continuer à faire du bénéfice – on l’appellera comme on voudra, mais il s’agit quand même de bénéfice – dès lors qu’il en conservera la moitié. Cette aide est d’autant plus justifiée, comme nous l’évoquons dans notre texte, que le Conseil d'Etat a proposé récemment des allégements fiscaux sous forme de déductions dont une partie s’opère au détriment des communes. Il importe de répéter que l’Etat ne se contente plus de donner d’une main ce qu’il reprend de l’autre, mais fait des cadeaux que les communes paient. Reste la question de la répartition de ce soutien entre communes.

Ainsi, ce texte vise les communes qui en ont le plus besoin, soit celles qui ont une valeur du point d’impôt faible, défavorisées fiscalement. Toutefois, les informations données en séance de commission, et notre collègue Gérard Mojon l’a évoqué, démontrent qu’une répartition totalement orthodoxe en proportion inversée de la valeur du point d’impôt de l’exercice comptable précédent n’est pas adaptée. Raison pour laquelle j’ai proposé en commission un texte qui vise désormais à ce que le mode de répartition de cette manne tienne compte de la valeur du point d’impôt de l’exercice comptable précédent. Cela signifie que d’autres critères de pondération pourraient être introduits pour corriger les excès induits et pour ouvrir le champ des adaptations, j’ai également proposé de transformer la motion en postulat.

Si nous entendons bien la conseillère d’Etat en charge du Département des institutions et du territoire, dont les propos figurent dans le rapport, sur la nécessité de trouver une solution pérenne, cela fait de nombreuses années qu’on nous promet « la lune et qu’on ne voit toujours pas la thune ! », si vous me permettez ce langage familier. Par conséquent, ce que nous proposons consiste en une solution transitoire, un partage pendant dix ans qui pourrait s’avérer caduc, dès le moment où le Conseil d'Etat et le Grand Conseil auront trouvé une solution pérenne, a fortiori si nous sommes sûrs qu’elle sera trouvée si rapidement, alors elle sera de courte durée. Elle est d’autant plus justifiée que nous attendons depuis de nombreuses années la fameuse solution pérenne… que nous ne voyons toujours pas venir… ! « Même pas le soleil qui poudroie ou l’herbe qui verdoie », pour reprendre la formule de Charles Perrault. Le Conseil d'Etat contribue ainsi petit à petit à l’affaiblissement des communes, prises à la gorge. Comme dit le rapport qui cite un membre de la commission, le temps passe et les difficultés ne diminuent pas. Le Tribunal cantonal l’a même indiqué récemment, le système en place viole l’autonomie communale – c’est le moins que l’on puisse dire. Comme le relevait récemment mon collègue Didier Lohri, sur 60 points d’impôt collectés, les communes n’en gèrent que 5, le reste part pour la péréquation, la facture sociale, les pompiers et autres associations intercommunales. Il y a quelques jours, Pierre-Gabriel Bieri du Centre patronal écrivait même dans l’AGEFI que de nombreuses communes sont asphyxiées et qu’une réforme de la péréquation est urgente. Des Verts au Centre patronal, nous sommes tous d’accord : il faut agir.

C’est l’un de mes testaments politiques auquel je vous demande de réserver bon accueil et dont la portée symbolique et politique forte dépasse les simples aspects financiers. En effet, les communes sont le premier maillon de la démocratie de proximité dont l’aide – non seulement aux citoyens, mais aussi aux entreprises et à divers acteurs sociaux – est directe et ciblée. Alors, la question ainsi se pose : voulez-vous cesser de mettre en péril le rôle vital que jouent les communes dans le fonctionnement de notre société ? Voulez-vous introduire dans la future péréquation la notion de valeur du point d’impôt pour corriger les inégalités fiscales ? Voulez-vous maintenir la pression pour espérer voir enfin avancer ce dossier ? Si vous répondez par l’affirmative à au moins l’une de ces trois questions, vous avez une raison majeure d’accepter ce postulat.

Mme Florence Gross (PLR) —

Nous allons aborder deux textes liés à la péréquation, sujet qui implique souvent un réel engouement dans ce Parlement. Le groupe PLR suivra les conclusions de la commission et votera en faveur du classement de ce texte. Contrairement à ce que vient d’affirmer le motionnaire, l’accord signé entre l’Etat et les communes amène déjà un soutien non négligeable aux communes, d’autant plus que celui-ci a pu être anticipé. Non, monsieur Christen, il n’a absolument pas été non respecté.

Concernant le fond du texte proposé, soit le partage du bénéfice de l’Etat avec les communes, le président de la Commission des finances l’a dit : que signifie bénéfice ? Mais surtout, quid, si le résultat de l’Etat est déficitaire ? L’effet conjoncturel est trop important pour ne pas être pris en considération. Persuadé que de nombreux élus communaux enrichiront le débat, je me permettrais donc simplement, au nom du groupe PLR, d’insister à nouveau sur l’urgence d’avancer dans le dossier de réforme de la péréquation, dans celle de l’implémentation du modèle comptable harmonisé MCH2. Je rappelle que cette exception vaudoise – sur 2172 communes en Suisse, seules 301, dont 299 dans le canton de Vaud sont impliquées – ne fait que porter préjudice. Il faut par conséquent agir, mais sur la problématique globale et non par couches successives de différentes motions. Le groupe PLR classera donc cette motion.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) —

Par sa motion, M. Christen propose de partager les bénéfices liés aux comptes à raison de 50 % entre les communes et le canton. Le groupe socialiste reconnaît qu’existent des problèmes liés à la péréquation et à la difficulté de certaines communes à assurer leur fonctionnement. Toutefois, il est très partagé sur cette proposition. En effet, cette motion constitue une idée qui s’additionne, supplémentaire, à toutes les autres, mais qui vise à réguler le poids des responsabilités solidaires des uns et des autres sur les dépenses en faveur de la collectivité. Cependant, plus on imagine des solutions toutes faites, plus on réalise qu’elles provoquent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent. Cette intervention, comme toutes les autres sur ce sujet montrent qu’il y a urgence.

Par conséquent, nous appelons de nos vœux que le Conseil d'Etat puisse rapidement prendre ce dossier en main et le faire avancer en proposant un projet concret qui nous permettra enfin de sortir de l’ornière. Ainsi, le Grand Conseil, lors de sa prochaine législature, avec une représentation accrue des communes et des députés-municipaux pourra largement débattre et se positionner sur une proposition réfléchie qui aura évalué la faisabilité des nombreuses interventions parlementaires sur la question.

En conclusion, le groupe socialiste n’adopte pas de position tranchée, mais refusera, s’abstiendra ou votera cette motion transformée en postulat car, au fond, cela ne changera pas grand-chose, puisque nous attendons un concept global sur lequel nous pourrons enfin débattre forts de toutes les cartes et qui permettra de maintenir les prestations à la population tout en assurant un compromis acceptable et accepté de la répartition des charges.  

M. Hadrien Buclin (EP) —

Le groupe Ensemble à Gauche et POP soutiendra la prise en compte de ce postulat. Aujourd'hui, selon nous, un déséquilibre financier existe entre les moyens dont dispose le canton et ceux des communes. Il nous paraît sensé d’examiner comment rééquilibrer la situation ainsi que le propose ce texte. Le déséquilibre canton-communes se confirme à nouveau à la lumière des comptes de l’Etat qui dégage un excédent brut de plus 600 millions de francs et une fortune de plus de 4 milliards. Ainsi, le canton bénéficie d’une très importante marge de manœuvre financière. Cela dit, un point demeure crucial : que l’aide du canton priorise les communes à faibles ressources fiscales, soit celles dont les habitantes et habitants disposent de revenus en moyenne plus faibles que la médiane cantonale, ces mêmes communes qui doivent en moyenne assumer davantage de tâches liées à la politique sociale. Il ne nous paraît pas souhaitable de verser davantage d’argent du canton à des communes à forte densité de contribuables aisés, comme le réclament les partisans de l’initiative « SOS Communes », car ces dernières, on le sait déjà, utiliseront ces moyens supplémentaires pour renforcer encore leur politique de sous-enchère fiscale. Comme l’esprit de ce postulat se démarque des objectifs de l’initiative « SOS Communes » en prenant en compte dans son développement le souci d’aider en priorité les communes à faibles ressources fiscales, il mérite d’être étudié, même si l’on peut regretter que l’auteur du texte ait quelque peu atténué cet objectif, sous la pression des élus de la droite. Néanmoins, l’esprit demeure, c’est pourquoi nous le soutiendrons.

M. Didier Lohri (VER) —

Je ne déclare pas mes intérêts relativement à ma fonction de municipal ou de syndic il y a quelque temps et tiens à m’excuser auprès de mes collègues qui sont agacés par mes interventions sur la péréquation. Une fois de plus, je constate que chaque fois que la question de la péréquation est abordée, la Commission des finances, le Conseil d'Etat et les députés dissertent sans s’appuyer sur les chiffres fournis par les services de l’Etat, et qu’aucun tableau ne complète les réponses obtenues au sujet de la péréquation. Je rappelle simplement que le canton prélève 450'000 francs pour cette péréquation, qui tourne depuis de nombreuses années. Je considère d’ailleurs que le coût informatique de cette application Excell s’avère extrêmement bon marché.

Mme Gross affirme que l’accord canton-communes est respecté ; je n’en suis guère certain. Nous le verrons la semaine prochaine. Le Conseil d'Etat déclare, et cela est effrayant, « qu’il ne peut que confirmer que le blocage et le statu quo ne sont pas une option, même si un courant de pensée existe pour miser sur l’immobilisme et continuer à vivre avec le système défaillant actuel. » L’écrire est assez incroyable. Doit-on ajouter un frein à l’immobilisme ? Nous parlons depuis plus de 5 ans de la nouvelle péréquation, 5 ans que le Conseil d'Etat dégage en corner toutes les motions et autres interventions. Ainsi, si « SOS Communes », le taux unique et d’autres sont bloqués, la faute lui incombe ; il a osé écrire qu’un courant de pensée existe pour miser sur l’immobilisme. Alors, je ne crois plus au laïus cantonal.

En outre, dans sa réponse, le Conseil d'Etat nous promène encore plus loin, par des réponses « bateau » sans aucune démonstration chiffrée pour dégager des pistes, dont celle, peut-être, de notre collègue Christen. Nous parvenons même à trouver dans le texte relatant la position du Conseil d'Etat, page 1, « qu’il faut en rester à une relation ordinaire où les recettes de l’Etat doivent servir à financer les prestations publiques. » C’est une phrase extraordinaire ! Même Einstein est un peu léger lorsqu’il disait que la chose la plus difficile à comprendre au monde c’est l’impôt sur le revenu. Cette doctrine résume assez bien ce que devrait être la nouvelle péréquation. Ne pas renvoyer ce postulat au Conseil d'Etat signifie que vous acceptez, de facto, que la cohésion sociale, la gendarmerie, sont des prestations étatiques, qui se basculent au canton sur son prélèvement fiscal. Si ce n’est pas le cas, il faut justement renvoyer le postulat Christen afin que la Commission des finances puisse continuer à étudier le contre-projet du Conseil d'Etat, soit d’établir une relation ordinaire où les recettes de l’Etat doivent servir à financer les prestations publiques.

Sans vouloir m’étendre davantage – car je me suis déjà exprimé deux minutes et je ne voudrais pas me faire détestable –, un autre élément démontre toutefois qu’il faut soutenir le postulat Christen afin que le Conseil d'Etat puisse respecter l’engagement écrit de l’accord canton-communes de 150 millions annuels, quand nous découvrons que le Conseil d'Etat n’est pas capable aujourd'hui de pérenniser ce montant : « L’accord négocié entre le canton et les communes portant sur un montant annuel de 150 millions aborde également ces deux aspects et une solution pérenne ne pourra passer que par une réflexion globale. »

En conclusion, je soutiendrai le postulat Christen non seulement parce que je suis son voisin de droite, mais parce que je considère que le Conseil d'Etat doit prendre en compte toutes les pistes proposées pour débloquer le frein à l’immobilisme de cette péréquation bloquée depuis 5 ans et, surtout, si nous voulons que le nouveau Conseil d'Etat puisse réagir promptement, il faut que nous possédions tous les éléments de réflexion munis de chiffres qui démontreront les incontournables effets de bord dans une répartition financière entre les communes.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d’Etat

Je suis ravie de constater que ce sujet enflamme le Parlement, sans doute à juste titre, puisque cette question institutionnelle doit être résolue très rapidement compte tenu des défis pour la prochaine législature et la suivante. Il est évident que nous ne pourrons pas continuer à discuter des relations canton-communes en oubliant les prestations que nous devons délivrer à la population vaudoise. Pour affronter les différentes crises auxquelles nous sommes confrontés et assumer nos responsabilités collectives vis-à-vis de la population, la relation entre les collectivités publiques doit être saine. En effet, relativement à la péréquation, il est toujours beaucoup question de la responsabilité du Conseil d'Etat. Or, il s’agit aussi de celle du Grand Conseil, des communes concernées et de toutes les personnes de bonne volonté. Par ailleurs, j’ai parlé d’immobilisme parce que toute une série de communes ont tout à fait intérêt à maintenir le système actuel. Ainsi, cette vision n’est pas celle d’une partie du Conseil d'Etat, mais d’une partie des communes qui se montre très heureuse du système péréquatif actuel – il est important d’aussi le souligner.

Par rapport à l’objet en discussion, la nécessité d’action et de réforme est connue. Si vous pensez que nous ne subissons pas de pression quant au système de péréquation, j’aimerais vous signifier l’inverse. En effet, d’une part, sur le principe, il existe un intérêt prépondérant à trouver des solutions pérennes – comme cela fut rappelé lors de la journée des communes vaudoises, samedi dernier. A cette occasion, j’ai beaucoup apprécié le discours de l’Union des communes vaudoises (UCV) portant sur la priorité de se remettre autour de la table pour discuter de ces solutions. Indépendamment de cette volonté présumée de la part des parties prenantes, différents textes nous ont été renvoyés, notamment « SOS Communes » qui fournit un cadre légal contraint. Nous n’allons pas pouvoir passer outre ce délai. Il existe également des questions liées au taux unique. Vous avez également évoqué l’arrêt du Tribunal cantonal qui indique que le système actuel entraîne pour certaines communes des solutions disproportionnées. Des différends entre le canton et les communes existent sur les catégorisations de dépenses thématiques, des dépenses thématiques tout court. Hier, M. Lohri évoquait dans sa question orale toute la difficulté liée aux dépenses/investissements de fonctionnement par rapport aux dépenses thématiques et aux utilisations faites par les communes de ces éléments dans le système péréquatif avec un abus, par ailleurs, du système – que je dénonce à titre personnel –. Il faut également mentionner la question de MCH2 qui n’est pas forcément nécessaire pour la péréquation, mais nécessaire tout court.

Dans ce cadre, je puis vous assurer que la volonté du Conseil d'Etat actuel – et sans aucun doute de celui en place dès le 1er juillet – consiste à rendre cette question prioritaire en début de législature. Rappelons que le Conseil d'Etat n’a pas été immobile ces 5 dernières années dans ce dossier. Peu importe ce qui est dit, il n’en reste pas moins que l’accord trouvé avec l’UCV – malheureusement un accord uniquement financier qui ne règle pas la question péréquative – concerne tout de même 150 millions pérennes.

Si nous avons indiqué dans le cadre des débats en commission qu’aujourd'hui nous ne possédions pas une solution pérenne, c’était à comprendre relativement à la situation globale. Les 150 millions sont pérennes, à moins que nous n’entrions dans une situation économique qui exigerait que nous activions les freins à l’endettement et où d’autres questions se poseraient qu’uniquement celles liées aux relations institutionnelles canton-communes. Cet accord est pérenne et déploie aujourd'hui ses effets, il est respecté. 25 millions supplémentaires sont annoncés lors du budget 2022, mais qui déploient leurs effets sur 2021. Au bouclement des comptes 2021, 100 millions sont placés de manière supplémentaire pour anticiper les effets de l’accord. Ainsi, on ne peut pas dire que le Conseil d'Etat n’est pas actif sur ce plan, premièrement par rapport à l’accord passé, ensuite quant à son respect ou à son anticipation. S’agissant de la solution proposée, j’aimerais vous répéter que le salut ne peut être dissocié d’une solution globale. Il serait faux d’uniquement débloquer des moyens financiers, comme nous l’avons fait dans le cadre de l’accord avec l’UCV, sans lier cet accord financier à une nouvelle solution péréquative. En effet, dans le cadre des solutions péréquatives, il n’existe pas seulement la question des relations verticales canton-communes, mais aussi le fait de trouver une solution qui satisfasse une majorité de communes. Aujourd'hui, si nous déployons des montants supplémentaires sur le plan financier pour les communes – une question qui sera forcément remise sur la table – nous n’aurons pas de position unique de la part des communes par rapport à la manière dont on devrait déployer ces moyens, en particulier sur le système péréquatif en tant que tel. Ainsi, on ne doit pas délier ces questions. Il s’agit de travailler sur les solutions financières canton-communes et sur la péréquation de manière à avoir un accord global et pérenne en la matière, dans un cadre temporel contraint d’ores et déjà par le fait de l’arrêt du Tribunal, de l’initiative « SOS Communes », par le fait que nous souhaitons en faire une priorité. Le Conseil d'Etat souhaite d’ici le premier trimestre 2023 parvenir à un accord avec les faîtières de communes. Si d’aventure, nous ne possédons pas cet accord pour de quelconques raisons, nous ne pourrons certainement pas laisser pourrir cette situation. Le cas échéant, nous devrons passer par le système institutionnel standard. En d’autres termes, sans accord avec les faîtières, nous devrons présenter un avant-projet de loi qui serait ensuite soumis à une très large consultation. Nous allons nous donner les moyens de cette négociation avec les communes, car c’est ce que nous souhaitons. Or, si nous n’y parvenons pas, il faudra quand même amener des propositions, quitte à ce que des alternatives existent, accéder à un vote du Parlement. Nous ne pourrons pas effectivement continuer sur cette voie sans solution.

Enfin, quant à MCH2, et peut-être pour vous rassurer un brin, depuis 2008, nous possédons un manuel comptable. Nous sommes le dernier canton à ne pas l’avoir implémenté. Nous sommes parvenus à une solution à la fois sur le manuel comptable et sur la table de conversion. Nous sommes ainsi prêts pour démarrer le processus. D’ici fin juin, une information sera communiquée à toutes les communes, et l’implémentation de MCH2 se fera entre 2024 et 2027 conformément à ce qui avait été annoncé au Parlement. La situation est « sur les rails ». J’en profite pour remercier les communes qui se sont beaucoup investies dans ce cadre. Pour résumer, nous souhaitons une solution globale avec le financement et la péréquation, que le calendrier soit rapide, que nous puissions mener les réflexions avec les communes d’ici le premier trimestre 2023 et, dans tous les cas, à la suite, présenter un avant-projet de loi sur la péréquation qui nous permette de trouver une solution qui rencontre l’aval du Parlement.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil refuse la prise en considération du postulat par 50 voix contre 39 et 16 abstentions.

M. Jérôme Christen (LIBRE) —

Je demande le vote nominal.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celle et ceux qui soutiennent le classement de la motion transformée en postulat votent oui ; celle est ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil refuse la prise en considération du postulat par 51 voix contre 39 et 15 abstentions.

* insérer vote nominal

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