Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 26 mars 2024, point 31 de l'ordre du jour

Document

Texte adopté par CE - R-CE INT Marendaz 23_INT_24 - publié

Transcriptions

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M. Hadrien Buclin (EP) —

(remplaçant Mme Mathilde Marendaz, absente) Mme Marendaz m'a transmis une réaction par rapport à la réponse à son interpellation ainsi qu'une détermination à soumettre au vote. Je découvre un peu cette réaction avec vous parce que j'étais persuadé que ce point ne serait pas traité aujourd'hui, des motions devant être traitées avant. La réponse concernant les investissements climatiques de la Banque nationale suisse (BNS) et la position en tant qu'actionnaire du Conseil d'Etat n'est pas satisfaisante, selon notre collègue. En effet, malgré les annonces de l'Etat à propos de ses investissements dans les politiques climatiques, l'audit sur le Plan climat vaudois a révélé que celui-ci permet pour l'heure de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 8 % d'ici 2030. On est donc loin de l'objectif de réduction prévu par l'accord de Paris et il est difficile, dans ces conditions, pour l'Etat de plaider l'exemplarité.

Le Conseil d'Etat indique être en faveur d'une plus grande transparence sur les positions d'investissement de la BNS. Reste la question : le Conseil d'Etat a-t-il communiqué cette position dans les instances de la BNS en tant qu'actionnaire qui, comme il est indiqué dans cette réponse, détient une participation historique ? Il est aussi décevant de constater qu'il n'y a pas de soutien à la mise en place d'un comité d'éthique pour la BNS et finalement que le Conseil d'Etat n’intervient que très peu pour poser certaines demandes auprès de la BNS.

Il y a quelques jours, un rapport annuel de la BNS a été publié, dans lequel un rapport de durabilité était intégré en conséquence de l'obligation fédérale de fournir des données sur la durabilité. Si la banque souligne respecter la loi avec un plan visant la neutralité carbone en 2050 pour ses émissions directes, c'est-à-dire celles liées à ses bureaux, à ses employés, les choses sont beaucoup moins bonnes au niveau de ses investissements. Les investissements de la BNS dans les industries polluantes doublent en effet l'empreinte carbone de la Suisse, selon un rapport des artisans de la transition. La Suisse passerait du 70e rang en matière d'émissions de gaz à effet de serre au 7e rang en raison des investissements de la BNS. Cette question des investissements de la BNS péjore fortement le bilan carbone de la Suisse dans son ensemble. Dans ces conditions, ma collègue espérait une intervention plus engagée et déterminée du Conseil d'Etat et vous propose par conséquent la détermination suivante :

« Le Grand Conseil souhaite que le Conseil d'Etat s'engage, en tant qu'actionnaire, à demander dans les plus brefs délais à la BNS un plan de transition afin d'aligner sa politique monétaire et son portefeuille de devises sur l'Accord de Paris sur le climat et sur la Convention sur la biodiversité ».

Je vous remercie de faire bon accueil à cette détermination adressée au Conseil d'Etat.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion sur la détermination est ouverte.

M. François Cardinaux (PLR) —

Si à chaque fois que le Conseil d'Etat nous propose une réponse, on doit voter une détermination qui va à son encontre, je n'arrive plus à suivre. Je remercie le Conseil d'Etat pour sa réponse et je resterai fidèle à ce qu'il a dit.

M. Fabrice Moscheni (UDC) —

Le groupe UDC ne soutiendra pas cette détermination.

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Je vous invite à soutenir cette détermination. Ce n'est pas la première fois que nous abordons ce sujet dans cette salle. En effet, lorsqu'il était député, un actuel conseiller d'État demandait déjà au canton d'intervenir dans les assemblées générales de la BNS. Cette dernière a un levier formidable et c’est essentiel. Comme vous le savez, elle a une capitalisation bien plus élevée que 1000 milliards et elle l’investit notamment dans des actions et des titres. En outre, elle est récemment sortie du charbon, mais pas encore des autres énergies fossiles. Il est donc important qu'elle fasse ce pas, par respect des citoyennes et des citoyens. Suffisamment de scrutins nationaux ont marqué la volonté du peuple d'agir sur le plan climatique. La BNS peut investir ailleurs que dans les énergies fossiles, dans le gaz, dans le pétrole et c'est ce que demande cette détermination. Le groupe des Verts vous recommande de l'approuver.

M. Philippe Miauton (PLR) —

A chaque fois, il y a cette volonté d'intervenir dans des politiques monétaires et dans les portefeuilles de différentes institutions. Or, nous savons pertinemment que c’est complexe. C’est par exemple le cas des caisses de pension, où ceux qui les gèrent entreprennent certaines choses, mais ne vont pas aussi loin que vous le souhaitez. On prête à la BNS des capacités incroyables. Dès qu'il y a une dépense supplémentaire, il faudrait que les fonds viennent de la BNS. C'est un peu la solution miracle. Manque de chance, cela fait quelques années – et cela va encore se poursuivre – que la BNS ne distribue plus d'argent aux cantons, comme nous avons pu le constater dans les comptes présentés aujourd'hui.

Lorsque des politiques et des personnes élues du côté de Berne essayent d'influencer la politique de la BNS, on leur répond qu’il ne s’agit pas de leur devoir et que même le Conseil fédéral, dans un respect des institutions et de la séparation des pouvoirs, ne peut intervenir dans cette politique. Je vois dès lors mal comment le Grand Conseil pourrait souhaiter que le Conseil d'Etat s'engage à recommander quoi que ce soit à la BNS, notamment en ce qui concerne sa politique monétaire et son portefeuille. Nous avons déjà passablement de choses à régler dans nos finances et nos politiques publiques cantonales pour aller donner la leçon du côté de la place fédérale.

M. Sébastien Cala (SOC) —

La présente détermination est un vœu. La BNS est indépendante, mais il s'agit ici d'attirer son attention sur les préoccupations climatiques. Nous avions déjà discuté de ces éléments dans le cadre de l'initiative Venizelos. Il s’agit d’un signal positif à envoyer aux générations futures. Dans ce cadre, le groupe socialiste vous encourage à soutenir cette détermination.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Monsieur Miauton, il n'est pas si incongru que les cantons interpellent la BNS, qui reste effectivement indépendante dans ses choix. On l'a encore vu récemment, pas plus tard qu'en janvier dernier, les cantons sont intervenus pour dire qu'ils voulaient revoir l'accord qui les lie à la BNS quant à la redistribution des bénéfices, avec l'enjeu de lisser et de pérenniser les versements pour éviter ce que l’on a vécu ces deux dernières années, à savoir une interruption brutale des versements aux cantons. Ainsi, les cantons peuvent interpeller la BNS, même si cela ne reste qu'un vœu et qu'il n'y a pas de moyen de la contraindre. Compte tenu des enjeux, ce vœu est légitime. Comme l'a rappelé M. Zwahlen, le volume des placements boursiers de cette institution est très important, et ces placements entraînent des répercussions très concrètes sur la politique climatique de la Suisse dans son ensemble.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Cette détermination est importante et elle est pleinement de la compétence de notre Grand Conseil, la BNS appartenant pour moitié aux cantons et aux banques cantonales. La Confédération n'a pas la possibilité d’agir, et c'est donc bien notre rôle de demander à cette banque de fournir des efforts supplémentaires pour atteindre les objectifs indispensables. C’est d'autant plus indispensable que l'empreinte carbone de cette banque et des autres instituts financiers est plusieurs fois supérieure à la nôtre au niveau suisse. C’est donc très important et nous devons envoyer un signal fort. Je vous invite à soutenir cette détermination.

Mme Séverine Evéquoz (VER) —

Pour rappel, le 18 juin 2023, 62,72 % des Vaudoises et des Vaudois ont accepté une initiative cantonale en faveur du climat et de la biodiversité posant des conditions-cadres ainsi que des principes sur l'action de l'Etat pour l’objectif de neutralité carbone d'ici à 2050, et pour inciter un certain nombre de partenaires, d'entités ainsi que les communes à faire de même. Dans cette logique, la détermination de notre collègue Buclin est cohérente et soutient la volonté des Vaudoises et des Vaudois, mais aussi de notre Grand Conseil et du Conseil d'Etat

Mme Valérie Dittli (C-DFA) — Conseiller-ère d’Etat

Monsieur Buclin, je vous remercie d’avoir transmis les propos de Mme la députée Marendaz. J’ai passablement de sympathie pour ce que vous venez de dire. En revanche, d'un point de vue pragmatique, je vous invite à ne pas voter pour cette détermination, la réponse n° 6 étant selon moi assez pragmatique. On possède 3,4 % des actions de la BNS, je me vois donc mal avec des actions si minimes aller dire à la BNS ce qu'il faudrait faire ou ne pas faire. Je rappelle aussi que l'indépendance de la BNS est primordiale.

En outre, il ne faut pas mélanger quelque chose qu'on peut demander aux actionnaires et une convention qui existe. Vous avez fait ce lien, monsieur le député Buclin, entre la convention qui lie le Département des Finances à la BNS, et qui implique que les cantons peuvent ou non bénéficier d'une distribution, non pas en raison de notre capital en action, mais plutôt en lien avec cette convention. Il ne faudrait pas mélanger ces deux choses. Comme je vous l’ai dit, j'ai beaucoup de sympathie pour les propos échangés, mais je vous renvoie à la réponse n° 6 que je vous prie d'accepter

M. Philippe Miauton (PLR) —

J'ai rapidement consulté la Loi fédérale sur la Banque nationale suisse, et je vous recommande d’en faire de même car elle est passionnante. L'article 6 « Indépendance » indique : « Dans l'accomplissement des tâches de politique monétaire visées à l'article 5, alinéas 1 et 2, la Banque nationale et les membres de ses organes ne peuvent ni solliciter ni accepter d'instructions du Conseil fédéral, de l'Assemblée fédérale ou d'autres organismes ».

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close.

La détermination Mathilde Marendaz est refusée par 68 voix contre 51 et 2 abstentions.

Ce point de l’ordre du jour est traité.

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