Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 21 novembre 2023, point 16 de l'ordre du jour

Texte déposé

L’énergie, tou le monde en parle, mais, surtout, tout le monde la paie indistinctement de ses revenus. Électricité, gaz, pétrole ont pris l’ascenseur et vont continuer à le prendre. Que pour l’électricité, les distributeurs vaudois ont annoncé des hausses massives pour 2023 : 49% pour Romande Énergie, 35% pour le SEVJ, 54% pour le SIE, 44% pour les SI de Belmont, 26% pour les SI de Lausanne, 48% pour les SI de Lutry, 45% pour les SI de Pully par exemple. Qui dit mieux ?!

En francs, pour un ménage moyen, cela représente des hausses entre fr 100.- et plus de fr 350.- par année. Et ce que pour l’électricité, sans compter les hausses liées au gaz et au mazout.

Si l’on considère que les classes moyennes supérieures et aisées pourront absorber ces hausses, il n’en va pas de même pour les contribuables modestes ou faisant partie de la classe moyenne inférieure. Ce d’autant plus que ces hausses s’inscrivent dans une période d’importante augmentation du coût de la vie.

Pour le groupe EP (Ensemble à Gauche - POP), cette perte de pouvoir d’achat ne doit pas toucher les classes modestes de notre société. Ils ne sont en rien responsables, à l’instar des autres citoyens, des guerres, des spéculations sur les matières premières, du retard dans le développement des énergies renouvelables. Mais, surtout, leur revenu ne leur permet pas d’absorber ces hausses sans pénaliser leur qualité de vie.

Par cette motion, notre groupe demande que l’Etat mette en place, temporairement, un système de paiement des augmentations de l’énergie en faveur des contribuables modestes ou faisant partie de la classe moyenne inférieure. Nous laissons le soin au Conseil d’Etat de déterminer plus précisément les contribuables qui auront le plus besoin de cette aide. Un montant de fr 250.- par ménage, pouvant être modulé par le nombre de personnes vivant dans un même ménage, pourrait être une base de réflexion. Nous demandons, aussi, au Conseil d’Etat de décider du mode de versement de ces aides (directement auprès du contribuable, par diminution de la facture d’électricité ou par tout autre moyen approprié). L’Etat a été très réactif dans le soutien aux entreprises lors de la crise COVID, politique que nous avons soutenue, il doit l’être également pour les contribuables concernés par cette motion dans cette crise de l’énergie.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Alberto CherubiniSOC
Yolanda Müller ChablozVER
Vincent KellerEP
Martine GerberVER
Géraldine DubuisVER
Didier LohriVER
Sabine Glauser KrugVER
Céline MisiegoEP
Rebecca JolyVER
Théophile SchenkerVER
Hadrien BuclinEP
Elodie LopezEP
Claude Nicole GrinVER
Mathilde MarendazEP
Nathalie JaccardVER
Valérie ZoncaVER
Carine CarvalhoSOC
Oriane SarrasinSOC
Joëlle MinacciEP
Yannick MauryVER
Yves PaccaudSOC
Felix StürnerVER

Documents

Rapport de commission- Pour que l'énergie ne devienne pas du désespoir (min.)

Rapport de commission - Pour que l'énergie ne devienne pas du désespoir (maj.)

22_MOT_34-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

La Commission des affaires sociales a tenu séance le 8 décembre 2022. Mme la conseillère d’Etat, Rebecca Ruiz, était accompagnée de M. Fabrice Ghelfi, chef de la Direction générale de la cohésion sociale. M. Florian Ducommun, secrétaire de commission, a tenu les notes de séance et en est vivement remercié.

M. le motionnaire s’inquiète des hausses annoncées du prix de l’énergie électrique et considère que de nombreuses personnes ne pourront pas faire face financièrement à ces augmentations si soudaines. Il propose donc que l’Etat intervienne auprès des plus prétérités par le biais d’une aide financière d’un montant de 250 francs. Il demande également que cette aide soit mise en place de manière temporaire. Pour ce faire, il faut déterminer de manière précise les contribuables qui en auraient le plus besoin, ainsi que trouver le meilleur moyen pour son versement : monnaie sonnante et trébuchante ou réduction de la facture d’électricité.

En primeur, Mme la conseillère d’Etat annonce la décision du jour de hausse de 2,5 % des barèmes sociaux, ceci répondant déjà en partie aux inquiétudes du motionnaire. Ensuite, elle considère que la mise en place d’une aide ponctuelle serait beaucoup trop compliquée, les charges d’électricité des potentiels bénéficiaires n’étant pas connues. Ainsi, il serait extrêmement difficile de cibler les bonnes personnes. Pour une indemnité de 100 francs versée aux bénéficiaires d’un subside partiel LAMal, un rapide calcul laisse apparaître un chiffre de 18,7 millions. Pour 250 francs, cela équivaudrait à environ 47 millions, sans garantie pour l’Etat d’intervenir auprès des bonnes personnes.

Par conséquent, le Conseil d’Etat ne peut accueillir favorablement cette demande. La discussion générale fait ressortir que la mise en place d’une telle usine à gaz coûterait des millions à l’Etat. Il vaut mieux sensibiliser la population à l’économie d’énergie plutôt que de pratiquer un arrosage d’aides mal ciblées et probablement inefficaces. De plus, les augmentations des tarifs électriques touchent plus durement les entreprises et l’industrie que les privés. Ainsi, par souci d’équité, il faudrait également apporter un soutien à ce secteur. En conclusion, la majorité de la commission, par 8 voix contre 7, recommande au Grand Conseil de ne pas prendre en considération cette motion, certes louable sur le fond, mais qui en réalité est extrêmement difficile et coûteuse à mettre en place et qui ne serait qu’un emplâtre sur une jambe de bois. Je vous invite donc à refuser cette motion.

Mme Joëlle Minacci (EP) — Rapporteur-trice de minorité

La minorité de la commission est composée des députés et députées suivants : Claire Attinger Doepper, Carine Carvalho, Géraldine Dubuis, Isabelle Freymond, Félix Stürner, Jean Tchopp et moi-même. Je vais brièvement résumer les arguments principaux qui, selon nous, devraient nous conduire à accepter cette motion. Comme indiqué dans cette dernière, les distributeurs vaudois ont annoncé une hausse massive des coûts de l’énergie pour l’année 2023, hausse toujours d’actualité. Ces augmentations s’inscrivent dans un contexte d’inflation qui se pérennise et qui pénalise le pouvoir d’achat de l’ensemble de la population, plus particulièrement les contribuables modestes. Quelques chiffres du rapport montrent la précarité vécue en particulier par les retraités ou encore les femmes dans le canton. Dans ce contexte, il paraît donc opportun que l’Etat prenne – en tout cas de manière temporaire – un certain nombre de mesures pour contribuer à amenuiser le moins possible le pouvoir d’achat des personnes les plus modestes. En ce sens, la motion propose trois champs d’action.

Comprenant que le Conseil d’Etat a, le jour de la séance de commission, annoncé publiquement l’indexation pérenne des barèmes des régimes sociaux à 2,5 %, à l’instar de la hausse du barème des prestations complémentaires AVS-AI fixée par le Conseil fédéral pour 2023, les commissaires représentant la minorité considèrent toutefois que la motion garde son sens, d’autant qu’une hausse des coûts de l’énergie est prévue pour l’hiver 2023-2024. Face aux arguments du Conseil d’Etat, le motionnaire et la minorité de la commission considèrent que les problèmes énergétiques s’inscrivent en parallèle de la problématique de l’inflation. Précisons que la motion ne demande pas que cette aide – qui pourrait par exemple s’élever à 250 francs – soit versée à l’ensemble des personnes subsidiées, mais qu’un montant puisse être articulé en fonction du nombre de personnes vivant dans un même ménage. Cela laisse ainsi le soin au Conseil d’Etat de déterminer plus précisément les contribuables qui auront le plus besoin de cette aide. Par conséquent, il est tout à fait possible de réfléchir à un forfait sans créer une usine à gaz. Il s’agit d’une proposition ciblée, bien loin d’une politique dite de l’arrosoir, une proposition qui permettrait de prévenir des situations de précarisation. En conclusion, la minorité de la commission propose au Grand Conseil de prendre en considération la présente motion et de la renvoyer au Conseil d’Etat. ra

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Marc Vuilleumier (EP) —

Avec le rapport de majorité, nous avons eu tout de suite droit aux deux leitmotivs : l’usine à gaz et l’arrosage, alors qu’il ne s’agit ni de l’un ni de l’autre. En effet, cette mesure touche essentiellement les personnes de condition modeste. Nous demandons que ce chèque énergie soit octroyé à des gens de condition modeste, notamment les bénéficiaires de prestations complémentaires. Ces derniers sont identifiés ; il ne s’agit nullement d’une usine à gaz… mais nous sommes habitués aux leitmotivs.

Ces dernières années et spécialement ces dernières semaines, la droite s’est largement servie en matière d’impôts. Ainsi, nous le savons tous : les contribuables aisés paieront sensiblement moins d’impôts, plusieurs centaines de francs, voire des millions, alors que les classes modestes et moyennes inférieures n’en profiteront quasiment pas. Les premiers absorberont facilement l’inflation, la hausse de l’énergie, les hausses des cotisations de l’assurance-maladie, la hausse des loyers. Quant aux deuxièmes, leur pouvoir d’achat va s’éroder : une situation à notre sens injuste, inique, irresponsable.

Cette motion s’avère excessivement simple. Nous demandons que temporairement un coup de pouce soit donné aux citoyens de condition modeste pour le paiement des coûts de l’énergie en hausse dont ils ne sont nullement responsables. Nous laissons entière liberté au Conseil d’Etat d’identifier quels sont les contribuables qui auront le plus besoin de ce coup de pouce et d’en déterminer le mode de versement.

Après les baisses d’impôts profitant essentiellement aux classes aisées, il serait indécent de refuser un coup de pouce temporaire au milieu des classes populaires. Ce serait aussi un moyen de compenser très partiellement ce à quoi nous luttons depuis un moment : la hausse des impôts qu’ont subi les bénéficiaires de prestations complémentaires depuis maintenant deux ans. Ceux et celles pour qui le maintien du pouvoir d’achat des classes populaires ne se limite pas à un slogan électoral renverront cette motion au Conseil d’Etat.

Mme Anne-Lise Rime (PLR) —

En regard des mesures prises par le Conseil d’Etat et annoncées dans le cadre de la séance de commission, comme relevé par M. le rapporteur de majorité, ainsi que de l’attention toute particulière que le Conseil d’Etat porte aux plus faibles, c’est à l’unanimité que le groupe PLR soutiendra le rapport de majorité et vous invite à ne pas prendre cette motion en considération.

M. Felix Stürner (VER) —

Evidemment, au nom du groupe des Verts, je vous appelle à nouveau à soutenir le rapport de minorité. En effet, nous sommes face à une mesure très concrète qui aidera très ponctuellement nombre de personnes. A l’époque où de nombreux partis, notamment de droite, parlent du pouvoir d’achat, il s’agit de mesures tout à fait pertinentes et applicables sur le terrain. A ce titre, je ne peux que vous appeler à soutenir le rapport de minorité.

M. Denis Dumartheray (UDC) —

 Le groupe UDC recommande de suivre les conclusions du rapport de majorité de la Commission, dont j’étais membre. La crise de l’énergie touche l’ensemble des acteurs économiques de notre pays et de notre canton, ainsi que ses citoyens et citoyennes. Le groupe UDC a déjà déposé des propositions d’allègement de la facture d’électricité, de toutes et tous : sans succès. La proposition du motionnaire sera difficile, voire impossible à mettre en place. Enfin, des adaptations – entre autres – des barèmes des régimes sociaux opérées début 2023 et en mars derniers contribueront à l’allègement de la facture des personnes à revenus modestes. Nous recommandons de ne pas prendre en considération cette motion.

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) —

La hausse massive des coûts de l’énergie pour cette année va évoluer : plus 26 % pour les Services industriels lausannois (SIL), jusqu’à 54 % pour les autres. C’est dire si cela va toucher les ménages les moins aisés, ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts, ceux pour qui d’ailleurs la droite de cet hémicycle se bat, souvent, comme nous d’ailleurs, mais en utilisant d’autres moyens. Nous ne sommes pas favorables à la baisse d’impôts, mais plutôt à des mesures plus ciblées. Ainsi, le texte de M. Vuilleumier, proche de celui déposé par Mme Jessica Jaccoud, demande de mettre temporairement en place un système de paiement pour couvrir les augmentations de l’énergie adressées aux contribuables modestes ou faisant partie de la classe moyenne inférieure. Concrètement, il faut préciser que cette motion et l’aide financière à octroyer ne s’adressent pas à l’ensemble des personnes subsidiées, mais que d’autres déclinaisons d’accès pourraient être prises en compte, par exemple en fonction du nombre de personnes vivant dans un même ménage – cela reste un exemple. Soin est laissé au Conseil d’Etat de déterminer plus précisément les contribuables qui pourraient bénéficier de cette aide et vérifier que celle-ci soit bien distribuée. Il nous paraît aussi intéressant de réfléchir à un montant forfaitaire, simple d’accès et facile à mettre en œuvre, sans créer, bien entendu, d’usine à gaz. Il s’agit d’une proposition ciblée et temporaire, bien loin d’une politique dite de l’arrosoir. Enfin, cette motion permet d’anticiper des drames humains, tels que des arriérés avec des risques d’expulsion, ce qui fragilise les familles déjà bien touchées par l’inflation galopante qui les met à terre. En conclusion, le parti socialiste propose au Grand Conseil de prendre en considération cette motion.

M. Guy Gaudard (PLR) —

Je déclare mes intérêts comme installateur électricien diplômé. Le sujet est particulièrement intéressant. Or, il ne concerne pas seulement les revenus modestes. En effet, le prix de l’électricité est en passe de devenir un très gros problème pour de utilisateurs, de nombreuses PME et industries. En outre, depuis le 1er janvier, la TVA va augmenter de 7,7 % à 8,1 %, une augmentation plus que substantielle. L’acheminement d’un kWh est de 4,82 centimes à Morges, mais de 8,3 centimes à Lausanne. Notre collègue Pahud avait proposé une suspension de cette taxe d’acheminement malheureusement refusée par ce Grand Conseil.

L’exemple du tarif simple est aussi à connaître : par kWh, le Valais facture environ 30,11 centimes ; Morges, 34,95 centimes. Quant à Lausanne, elle détient la palme ; il ne s’agit pas d’une augmentation de 23 % : le kWh s’achètera à 41,26 centimes. Par conséquent, il faut intervenir auprès des Gestionnaires de réseau de distribution d’énergie (GRD). Je ne considère pas qu’il faille s’adresser au Conseil d’Etat, bien que ce dernier soit actionnaire de nombreux distributeurs d’énergie électrique. Peut-être que le Conseil d’Etat peut faire pression et exiger des GRD des adaptations de leur taxe d’acheminement, du prix de vente du kWh.

Enfin, le postulat de notre collègue Vuilleumier est intéressant. Toutefois, j’estime que le périmètre d’application doit être élargi, comme précisé par plusieurs de mes collègues, à d’autres acteurs que la population modeste, qui effectivement va subir de plein fouet cette hausse du prix du kWh. Enfin, cela passe également par des économies d’énergie qu’il faut assimiler et mettre en pratique.

Mme Isabelle Freymond (SOC) —

Je me permets de prendre la parole pour réagir aux propos du rapporteur de majorité. Un emplâtre sur une jambe de bois ? Ce que vous appelez un emplâtre, pour de nombreuses familles comme la mienne, soit les familles monoparentales – j’annonce mes intérêts – représente une aide salutaire. En effet, l’année dernière, les gérances, dont l’Etat de Vaud fait partie, ne proposaient comme seule solution que d’augmenter les charges. Malheureusement, les revenus des familles monoparentales, eux, n’ont pas augmenté drastiquement. Ainsi, augmenter les charges par un simple coup de baguette magique n’était pas vraiment possible. Aujourd’hui, le couteau sous la gorge, il ne reste comme solution que de se serrer la ceinture pour éviter une résiliation du bail. En effet, toutes les gérances n’acceptent pas des arrangements.

Aujourd’hui, il incombe au Grand Conseil de soutenir les familles. Au moment du vote, nous pourrons observer si notre assemblée met autant de volonté et de ferveur à aider les plus précaires qu’à soutenir les mieux lotis en leur offrant des baisses d’impôts. En effet, il y a quelques semaines, le budget de l’Etat le permettait, comme nous l’avons entendu au débat précédent… Mais, par magie, quelques semaines plus tard, lorsqu’il s’agit d’aider les moins bien lotis, apparemment, le budget devient un poil plus serré. Ainsi, pour soutenir ceux qui en ont réellement besoin, qui ne sont pas propriétaires, mais qui doivent assumer des frais vis-à-vis des propriétaires, je vous demande de soutenir le rapport de minorité.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil refuse la prise en considération de la motion par 77 voix contre 51.

Mme Géraldine Dubuis (VER) —

Je demande le vote nominal.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent le rapport de majorité votent oui ; celles et ceux qui soutiennent le rapport de minorité votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil refuse la prise en considération de la motion par 79 voix contre 52.

*insérer vote nominal

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