24_INT_69 - Interpellation Yann Glayre et consorts au nom du groupe UDC - Un sauvetage historique pour une débâcle catastrophique (Développement).

Séance du Grand Conseil du mardi 23 avril 2024, point 6 de l'ordre du jour

Texte déposé

En préambule, nous saluons le travail acharné des pompiers, des collaborateurs de la CGN, des forces de police et de l’ECA qui ont passé une nuit entière à lutter avec succès contre les éléments, dans des conditions difficiles et inédites. Leur travail a permis ni plus ni moins de sauver le Simplon d'un naufrage, nous leur en serons éternellement reconnaissant.

 

Bien conscient que Groupe CGN SA est une société anonyme, la présente interpellation s’adresse au Conseil d’État en tenant compte que le Canton est actionnaire de l'entreprise à hauteur de 37%.

 

Rappel des faits : jeudi 27 mars 2024 le S/S Simplon, 78 mètres de long, fleuron de la flotte Belle Époque de la CGN, s'est retrouvé dans l’impossibilité de rentrer d'une sortie d'essai sur le lac Léman, suite à un dysfonctionnement.

 

Décision a été prise de l'amarrer à Cully en attendant des meilleures conditions permettant un remorquage. 364 jours par an sur 365, l'histoire se serait arrêtée là. La réalité des conditions météorologiques en aura décidé autrement.

 

Jeudi 28 mars à 15h, Le Matin, par la plume de Laurent Siebenmann, publie un premier article informant innocemment que le Simplon passera le weekend à Cully, en concluant "qu'il créera possiblement une petite animation durant les jours à venir à Cully" le journaliste ne croyait pas si bien dire.

 

Jeudi 28 mars à 20h, Nicolas Borgognon, météorologue à MeteoNews, publie un message très alarmant sur X et Facebook. Extrêmement détaillé avec des cartes météorologiques, le message indique :

- Une tempête de vaudaire est très probable vendredi soir 29 mars et se prolongera dans la nuit de vendredi à samedi.

- Elle pourrait être intense et durable et par conséquent lever des vagues assez importantes perpendiculairement au débarcadère.

- Ces coups de vaudaire au printemps peuvent être redoutables.

- Dans la situation météo prévue, laisser amarrer un bateau au débarcadère de Cully, c'est un peu comme vouloir entreprendre une randonnée en haute-montagne entre Zermatt et Arolla par situation de fœhn : ce n'est ni recommandé, ni intelligent.

 

Le météorologue est même allé jusqu'à comparer les cartes à celles du 17 au 18 avril 1967, une nuit où la vaudaire à occasionné de graves dégâts aux bateaux amarrés dans le port d'Ouchy et a détruit le débarcadère de Rivaz.

 

C'est donc dès jeudi soir que l'alerte est donnée sur le grave risque qu'encourt le Simplon à Cully. En plus d’être donnée sur les réseaux, l'alerte est également donnée par téléphone (apparement sans succès) et par e-Mail.

 

Vendredi 29 mars à 8h, le service client de la CGN accuse réception par e-Mail d'une copie du message de M. Borgognon. 14h, Le Matin publie un article reprenant l'argumentaire complet du météorologue. Parvenant à joindre le directeur général de la CGN dans la matinée, celui-ci aurait

indiqué: "la CGN suit l'évolution des conditions météorologiques régulièrement et que d'après les évaluations qui ont été faites, il n'est pour l'heure pas prévu que le Simplon bouge de Cully d'ici à ce soir."

 

Le bâtiment ne bougera donc pas, avec les conséquences que l'on connait.

Accompagnant la tempête de vaudaire, c'est dorénavant une tempête de problèmes de communications et d'approximations qui suivront.

 

Samedi 30 mars 3h du matin, le journaliste du 24 heures Erwan Le Bec couvre l'événement en direct. Il écrit: "La CGN envoie la directrice marketing faire le point avec la presse"

 

Mais où se trouve donc le directeur général ? Comment est-ce possible que pour un évènement aussi majeur dans l'histoire de la CGN, son directeur n'ait pas daigné rejoindre le site, ne serait-ce que pour montrer sa solidarité envers les secours et les remercier pour leur travail ?

En l’absence du directeur général, le conseil d’administration, par son président, aurait dû assurer une représentation sur les lieux de la catastrophe, ne serait-ce que pour s’adresser aux médias.


Ces absences, conduisant à envoyer au charbon la directrice marketing (dont il faut saluer le courage et la responsabilité dont elle a fait preuve) sont tout bonnement inacceptable et pose de nombreuses questions quant à la manière de nommer, en règle générale, les membres de conseils d’administration.

 

Rappelons qu'à ce moment là, des collaborateurs de la CGN travaillent au fond de la cale du Simplon, qu'il y a deux voies d'eau, que les vagues et la vaudaire secouent le bateau en le faisant heurter le débarcadère et les rochers. Ces personnes là ont probablement vécu l'enfer. Par ces quelques lignes, qu'ils soient à nouveau grandement remerciés pour leur travail.

 

Un point presse sera tenu samedi 31 mars, je relève les incohérences suivantes :

 

Dans son communiqué de presse, la CGN affirme que :

- Les conditions météo se sont avérées plus extrêmes que prévu.

Les conditions se sont pourtant révélées conformes aux prévisions de MeteoNews.

 

- Il n'a pas été possible de mobiliser les ressources pour effectuer un rapatriement.

Pourtant, Lionel Simonin (président du syndicat SEV CGN) a indiqué le 5 avril dans un interview RTS que « Le personnel est intervenu dès qu’il a été appelé » « Tout le monde était prêt à quitter ce qu’il était en train de faire » et suggéré que « cela faisait mal de lire dans les journaux que les collaborateurs de la CGN ont préféré leurs vacances et leurs congés »

 

- Il a également été indiqué aux médias que les conditions météo extrêmes n'ont pas pu être anticipées.

Meteosuisse, service météorologique national mandaté par la Confédération et prestataire de la CGN, s'est dite surprise de cette posture, indiquant avoir émis des avis dès vendredi matin pour avertir de la situation, par un premier bulletin publié à 6h.

 

Les faits sont graves. Des personnes ont risqué leur vie pour sauver le Simplon. Les coûts de l'opération de sauvetage et des réparations se monteront probablement à plusieurs millions de francs. Cerise sur le gâteau, la communication de la direction était absurde, quand elle n’était pas inexistante et met la faute sur l’absence des collaborateurs de la CGN, ce qui est inacceptable.

 

Afin d'obtenir de précieuses réponses quant à la gestion de cette crise, nous adressons au Conseil d'Etat les questions suivantes :

 

1. Quels ont été les échanges d'informations entre la CGN, Météosuisse et M. Borgognon de Meteonews qui a tout tenté pour alerter la CGN et son directeur général ?

 

2. Après son amarrage au débarcadère de Cully, quelles ont été les actions et mesures prises par la CGN pour remorquer le Simplon avant l’arrivée de la tempête de vaudaire ?

 

3. Afin de pouvoir effectuer un remorquage vendredi matin si les conditions le permettaient, pourquoi le personnel à la manoeuvre le jeudi n'a-t-il pas été sollicité en réserve, voir immédiatement remplacé ?

 

4. Sur les lieux de l'opération de sauvetage, la directrice marketing a semblé la seule à s’adresser aux médias. Comment justifier l'absence de tout représentant des gestionnaires de l'entreprise ?

 

5. Compte tenu du manque de professionnalisme en matière de communication, du narratif pour le moins absurde concernant les alertes météo puis la disponibilité des collaborateurs de la CGN, la confiance envers la direction et le conseil d’administration peut-elle être maintenue ?

 

6. Est-ce que la nomination d’un haut fonctionnaire cantonal dépourvu de toute compétence dans la navigation au poste de directeur de la CGN n’est-elle pas une erreur de première grandeur ?

 

7. La direction prévoit-elle de montrer sa reconnaissance envers les collaborateurs qui ont contribué au sauvetage du Simplon en leur en confiant la réparation ? Par opposition à la sous-traitance des travaux à des entreprises externes.

 

Nous remercions d'avance le Conseil d'Etat pour ses réponses.

Conclusion

Souhaite développer

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Cédric WeissertUDC
Nicolas BolayUDC
Olivier AgassisUDC
Stéphane JordanUDC
Pierre-Alain FavrodUDC
Romain BelottiUDC
Denis DumartherayUDC
Jean-Bernard ChevalleyUDC
Nicolas GlauserUDC
Alain CornamusazUDC
Aurélien DemaurexV'L
Nicola Di GiulioUDC
Graziella SchallerV'L
Michael DemontUDC
Fabrice TannerUDC
Fabien DeillonUDC

Document

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Yann Glayre (UDC) —

Mon interpellation revient sur la catastrophe du SS Simplon, méchamment endommagé dans la nuit du 29 au 30 mars derniers. Je précise que le présent dépôt s’adresse au Conseil d’Etat, considérant que le canton de Vaud est actionnaire de la Compagnie générale de navigation (CGN) à hauteur de 37 %. Au vu des fonds publics et privés attribués à l’entretien de la flotte Belle Epoque, les citoyens de ce canton sont en droit d’obtenir des réponses venant d’un échelon plus élevé que celui de l’enquête interne. Il convient de saluer le travail acharné des pompiers, des collaborateurs de la CGN, des forces de police et de l’Etablissement cantonal d’assurance-incendie (ECA), sans lesquels le Simplon aurait coulé ni plus ni moins. Leurs efforts ont permis d’éviter un naufrage et nous leur en serons éternellement reconnaissants, mais ce sauvetage historique a été précédé et suivi par une débâcle catastrophique, autant en matière opérationnelle qu’en matière de communication.

Mon texte étant largement documenté, je ne reviendrai que sur quelques points clés. Jeudi 28 mars, à 20 heures, Nicolas Borgognon, météorologue à Météo News, s’alarme sur réseaux sociaux. Il publie des messages très détaillés, avec des cartes météo indiquant : « Une tempête de vaudaire est très probable vendredi soir 29 mars et se prolongera dans la nuit de vendredi à samedi. Elle pourrait être intense et durable et par conséquent lever des vagues assez importantes perpendiculairement aux débarcadères. » Les coups de vaudaire au printemps peuvent être redoutables. Dans la situation météo prévue, laisser amarrer un bateau au débarcadère de Cully, c’est comparable à entreprendre une randonnée en haute montagne entre Zermatt et Arolla par situation de föhn : ce n’est ni recommandé ni intelligent ! Le météorologue a même comparé ses cartes à celles des 17 et 18 avril 1967, une nuit où la vaudaire a occasionné de graves dégâts aux bateaux amarrés dans le port d’Ouchy et a détruit le débarcadère de Rivaz. Malgré ces alertes, le bâtiment ne bougera pas, avec les conséquences que l’on connaît.

Les trois premières questions de l’interpellation concernent l’échange d’informations entre la CGN et les services météo, puis les actions et mesures prises pour remorquer le Simplon avant la tempête de vaudaire. La quatrième question concerne une situation pour le moins absurde : durant l’intervention des secours, le journaliste de 24heures, Erwan Le Bec, couvre l’événement en direct. Aux environs de 3 heures du matin, il écrit : « La CGN envoie la directrice marketing faire le point avec la presse ». Je rappelle le contexte : la coque du fleuron de la flotte Belle Epoque est trouée en plusieurs endroits et il prend l’eau, des employés de la CGN sont au fond de la cale et la vaudaire secoue le bateau en le faisant heurter le débarcadère et les rochers. Ces personnes sont en train de vivre l’enfer pour sauver le bateau, et ni le directeur général ni le président du conseil d’administration ne sont présents pour répondre aux médias, montrer leur solidarité envers les secours et les remercier pour leur travail. Je n’ai pas d’autre qualificatif qu’absurde pour décrire cette situation. Je me contenterai de dire que si un enfant vous demande ce que signifie « abandonner ses responsabilités », vous avez là un exemple parfait.

La question 5 porte sur la confiance apportée à la direction et au conseil d’administration face aux changements de narratifs qui ont suivi la catastrophe. D’abord : « la météo n’était pas prévisible », alors que Météo News et Météo Suisse avaient annoncé la tempête ! Ensuite : « les ressources n’étaient pas disponibles pour effectuer un rapatriement. » Or, le 5 avril, ce point sur les ressources en personnel a été démenti par Lionel Simonin, président du Syndicat du personnel des transports (SEV), qui répondait à la RTS : « Tout le monde était prêt à quitter ce qu’il était en train de faire. Cela fait vraiment mal de lire dans les journaux que les collaborateurs de la CGN ont préféré leurs vacances et leurs congés. » Mes deux dernières questions sont d’ordre un peu plus général. Question N° 6 : la nomination d’un haut fonctionnaire cantonal dépourvu de toute compétence en navigation au poste de Directeur de la CGN n’est-elle pas une erreur de première grandeur ? Question N° 7 : la direction prévoit-elle de montrer sa reconnaissance envers les collaborateurs qui ont contribué au sauvetage du Simplon en leur en confiant la réparation plutôt que de sous-traiter ces travaux à des entreprises externes ?

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’interpellation est renvoyée au Conseil d’Etat qui y répondra dans un délai de trois mois.

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