Former les personnes migrantes allophones, une success story

Sarah Joy Michael et Diana Dawit ont suivi un préapprentissage d’intégration PAI+ au restaurant le Birdhouse à Vernier. Elles sont ici en compagnie de Julie Tapponnier, leur formatrice, et de Steeve Haller, leur coach formation et insertion. Lucien Fortunati

Soutenu par la Confédération et mis en oeuvre dans les cantons, le préapprentissage d’intégration favorise l’insertion des jeunes migrants et migrantes dans le monde du travail.

Le préapprentissage d’intégration PAI+ est un programme de soutien à l’acquisition de la langue locale durant la formation professionnelle. Les préapprentis PAI+ vont à l’école professionnelle deux jours par semaine et suivent un enseignement intensif du français. Les trois autres jours, les jeunes s’initient au métier choisi dans une entreprise formatrice.

Tendre la perche
Le Birdhouse, restaurant d’insertion ouvert en 2019 à Vernier (GE) par la Fondation des apprentis d’Auteuil, tend la perche à ces jeunes dont les difficultés personnelles cumulées à l’allophonie sont souvent un obstacle à l’intégration. «Nous formons des jeunes en cuisine et en restauration. Nous sommes tellement contents de nos premiers préapprentis PAI+ que nous les avons ensuite engagés en apprentissage», relève Julie Tapponnier, formatrice en restauration. Sarah Joy Michael, 24 ans, fait partie de ces jeunes formés au Birdhouse. Arrivée du Nigeria en Suisse en 2014, la jeune fille a passé une année en classe d’intégration, puis elle a fait des stages en entreprise. Mais elle n’a pas réussi à décrocher une place d’apprentissage en raison de sa maîtrise insuffisante du français. L’Hospice général lui a proposé en 2020 d’entrer dans le programme PAI+ et lui a organisé un stage au Birdhouse. «J’ai tout de suite aimé. Ici, c’est comme une famille, c’est une chance!» Engagée comme préapprentie, elle a appris à discuter avec les clients et à rendre l’argent, avant de découvrir le service à table. Les projets de la jeune femme, aujourd’hui en 2e année d’apprentissage d’employée en restauration, reflètent sa reconnaissance envers sa formatrice: «Après, j’aimerais former des jeunes, prendre des responsabilités. » Elle poursuit: «Ou alors ouvrir un restaurant dans mon pays.» Sarah Joy Michael maîtrise parfaitement l’anglais, la langue officielle de son pays d’origine. Dans la Genève internationale, les compétences en langues étrangères sont un atout et les apprentis allophones peuvent les faire valoir avec des clients venus d’ailleurs. «Mais c’est en français que les examens auront lieu», rappelle Julie Tapponnier qui ajoute: «La force de ces jeunes, c’est leur volonté de s’en sortir.»

La PAI+ dans le canton de Vaud
Pour faciliter l’accès des personnes migrantes non francophones à la formation, le Canton de Vaud propose également un dispositif appelé prolongation d’apprentissage pour l’intégration, abrégé lui aussi PAI+. Les personnes concernées signent un contrat d’apprentissage prolongé d’une année. La PAI+ ne s’adresse pas aux primo-arrivants. «Il ne faut pas brûler les étapes, commente Carole Friderich, cheffe de l’Unité de la transition à l’État de Vaud. En général, plusieurs années sont nécessaires pour intégrer la langue.» Les futurs apprentis et apprenties passent d’abord par des structures leur permettant d’acquérir les connaissances de base du français avant de pouvoir se lancer dans une formation PAI+. Les entreprises sont conscientes des difficultés que peuvent rencontrer leur apprenti ou apprentie PAI+ et épaulent celles et ceux qui en ont besoin. En témoigne Hassan Muhudin, qui vient d’entamer sa dernière année d’apprentissage au garage Aux bonnes automobiles à Aubonne. Le jeune Somalien de 27 ans a suivi l’école jusqu’à l’âge de 17 ans dans son pays et voulait étudier à l’université, mais la vie en a décidé autrement. Arrivé en Suisse à l’âge de 22 ans, il a bénéficié d’une année de cours intensifs de français, puis d’une année de transition à l’École de l’accueil avant de commencer sa formation PAI+. «Au début, c’était difficile. Mais je travaille dur, 4 heures le samedi et le dimanche et 2 heures avant le jour de cours.» Ses notes attestent de son assiduité et de sa motivation à apprendre. «Je suis confiant pour le CFC», explique le futur mécanicien en maintenance d’automobiles. «Si j’ai des questions techniques, je peux compter sur l’équipe et sur le chef d’atelier.» Sa formation pratique se déroule à l’entière satisfaction de tous. «On a vu très vite qu’il comprenait la mécanique, se souvient Mathieu Giger, administrateur du garage Aux bonnes automobiles. Bien sûr, au moment de l’engagement, on a toujours des doutes pour la partie scolaire, mais quand on voit les notes de Hassan, on se dit que tout va bien.» À Genève, plus de 200 personnes ont pu bénéficier d’un contrat de préapprentissage PAI+ entre 2018 et 2022. À l’issue de l’année, 104 ont trouvé une place d’apprentissage, la moitié dans la même entreprise. Dans le canton de Vaud, près de 320 contrats AFP ou CFC avec la PAI+ ont été établis dans la même période. Plus de 250 apprentis allophones ayant bénéficié du programme ont réussi leur apprentissage ou poursuivent actuellement leur formation.

Corinne Giroud
Office cantonal d'orientation scolaire et professionnelle

Publié dans le 24 heures du 29 septembre 2022

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