Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 8 février 2022, point 5 de l'ordre du jour

Texte déposé

Il y a maintenant bientôt 10 ans, en 2012, le Conseil d’Etat adoptait une nouvelle circulaire sur les exonérations fiscales temporaires des entreprises selon les art. 17 et 91 de la loi sur impôts directs cantonaux (LI). Cette direcitve visait à préciser les conditions d’octroi et constituait à l’époque une solution alternative à une base légale plus détaillée sur l’octroi de ces exonérations, à laquelle le Grand Conseil a finalement renoncé.

 

La directive prévoit quelques définitions des entreprises éligibles à ces exonérations, précise les modalités d’exonération comprenant des critères ou des conditions à leur octroi ou/et à leur renouvellement. Certaines dispositions visaient prétendûment à modérer ou limiter l’attrait des exonérations pour certains types d’entreprises comme les quartiers généraux. Une procédure de suivi d’exonération a été consolidé sous la forme d’un reporting et d’un contrôle ; des clauses de rétrocession (claw-back) ont été prévues lorsque des critères n’ont pas été respectés. Les entreprises demandeuses sont en outre tenues de confirmer qu’elles respectent les conditions de travail ou les usages de la branche en vigueur.

 

En dehors du nombre d’exonérations octroyées, il n’existe toutefois pas de rapport régulier et public sur le volume des exonérations, leur typologie et leur suivi. La commission de gestion a pu examiné ponctuellement des exemples de suivi par le passé, mais c’est donc de manière très aléatoire par la presse ou lors de réponse à des interpellations que le législatif cantonal peut se faire une image plus claire des entreprises bénéficiaires de telles exonérations.

 

Alors que les petites et moyennes entreprises vaudoises ne bénéficient pas de tels avantages, l’octroi d’exonération à des multinationales disposant d’énormes capacités financières et aux emplois très volatiles nous paraît indécent, et de moins en moins compréhensible dans un contexte d’harmonisation de la fiscalité des grandes entreprises au niveau international. C’est d’autant plus problématique que des entreprises bénéficiant d’exonérations,10 ans après la directive, continue semble-t-il d’être de correspondre au profil de quartiers généraux d’entreprises.

 

Compte tenu de ce qui précède, nous avons l'honneur de poser au Conseil d'Etat les questions suivantes :

 

  1. Le Conseil d’Etat partage-t-il notre appréciation sur le fait que des aides financières / prêts et cautionnement sont globalement plus efficaces que les exonérations pour aider les entreprises qui en ont le plus besoin, favoriser la création d’emplois durables et diversifiés ? Si oui, quelles mesures le Conseil d’Etat est-il prêt à prendre pour favoriser cette politique ? Une modification légale telle que la suppression ou la modification des articles 17 et 91 est-elle envisagée à court ou moyen terme ?
     
  2. Au-delà de la position du Conseil d’Etat, quel est l’impact de l’accord fiscal de l’OCDE sur l’octroi d’exonérations fiscales à des multinationales ?
     
  3. Dans une perspective de maintien du tissu industriel voire de réindustrialisation, le Conseil d’Etat est-il prêt à brève échéance à revoir, respectivement durcir, les critères d’octroi d’exonérations ?
     
  4. Le Conseil d’Etat est-il prêt à fournir chaque année un rapport détaillé et public, effectué par un organe indépendant, sur les exonérations octroyées et leurs suivis comprenant les emplois créés, le type d’emploi, les retombées économiques, les conditions de travail y relatives tout en anonymisant au besoin certaines données ?
     
  5. Quels sont les contrôles systématiques en vigueur sur le respect des conditions de travail prévues par les CCT ou les usages en vigueur dans les entreprises bénéficiant d’exonérations ?

Conclusion

Souhaite développer

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Amélie CherbuinSOC
Alexandre DémétriadèsSOC
Sébastien CalaSOC
Jean-Claude GlardonSOC
Valérie InduniSOC
Pierre FonjallazVER
Carine CarvalhoSOC
Yannick MauryVER
Delphine ProbstSOC
Stéphane BaletSOC
Cendrine CachemailleSOC
Vincent JaquesSOC
Muriel ThalmannSOC
Eliane DesarzensSOC
Sonya ButeraSOC
Julien EggenbergerSOC
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Sylvie Pittet BlanchetteSOC
Cédric EchenardSOC
Felix StürnerVER
Vincent KellerEP
Hadrien BuclinEP
Monique RyfSOC

Document

22_INT_15-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Arnaud Bouverat (SOC) —

J’interviendrai sur trois points principaux. Tout d’abord, il nous paraît nécessaire d’examiner – ou plutôt de réexaminer – l’opportunité des allégements fiscaux temporaires présentés, en lien avec l’efficacité économique qu’ils sont censés avoir. Vous savez que ces instruments aident particulièrement les entreprises qui peuvent avoir des allégements d’impôt, c’est-à-dire qu’elles doivent engranger des exercices positifs, voire très positifs, pour que l’aide soit d’un appui notable. Et personne n’ignore que cette aide-là n’aidera pas les entreprises qui seraient en réelles difficultés. Il faut quand même se demander si notre canton ne devrait pas davantage investir dans le soutien à la création d’emplois pour des entreprises qui n’en ont pas les moyens, plutôt que de célébrer ou d’attirer celles qui n’ont pas besoin d’aide.

La deuxième inquiétude est la question des modifications au niveau international avec les mesures de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), mais j’ai vu que mon collègue Venizelos avait aussi fait un dépôt en la matière, alors je ne m’allonge pas sur cette question. Par ailleurs, nous fêtons cette année les dix ans de la directive sur les exonérations, publiée par le Conseil d’Etat dans une nouvelle formule, avec des critères qui nous vendaient l’attrait d’entreprises moins concentrées sur des quartiers généraux et sièges sociaux, dans la volonté d’avoir davantage d’emplois. On voit pourtant toujours aujourd’hui, dans les médias, des entreprises dont la principale activité semble bel et bien être des sièges centraux, qui bénéficient d’exonérations. Dès lors, nous sommes en droit de nous demander si cette directive est bien systématiquement appliquée et si elle ne mérite pas encore un durcissement supplémentaire, pour autant qu’on souhaite préserver cet instrument, qui comme nous l’avons dit, n’est pas des plus efficaces.

Notre troisième point est celui du suivi des exonérations et des contrôles y afférents. Les autorités de surveillance de milice, que nous sommes, n’ont pas les capacités d’examiner chaque année l’ensemble des critères et des entreprises bénéficiaires des allégements fiscaux. Il nous paraît important qu’une autorité indépendante puisse le faire, cela tout simplement pour la confiance que l’ensemble du tissu économique vaudois doit avoir dans la fiscalité des entreprises. Par ailleurs, il faut assurer une transparence sur ces contrôles. Le canton de Genève publie de façon annuelle les profils et des informations intéressantes sur les bénéficiaires d’exonérations. Comme trop souvent, le canton de Vaud se réfugie derrière le secret fiscal. On voit pourtant que ce dernier n’est pas absolu, dans le domaine, surtout quand les entreprises sont anonymisées. Cela nous permettrait au moins de vérifier que les directives présentées par le Conseil d’Etat sont bel et bien respectées à la lettre, de manière constante.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’interpellation est renvoyée au Conseil d’Etat qui y répondra dans un délai de trois mois.

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