Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 27 octobre 2020, point 19 de l'ordre du jour

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Rapport de la commission (20_LEG_690010) MAJ

Rapport de la commission (20_LEG_690010) MIN

Texte adopté du CE - EMPD - publié

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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Olivier Gfeller (SOC) — Rapporteur-trice de majorité

Parmi les personnes précarisées à cause de la crise engendrée par la Covid-19, on trouve un certain nombre d’étudiantes et d'étudiants. Il s’agit de personnes dont la seule source de revenus est constituée d’activités rémunératrices exercées en dehors de leur temps d’études. Actuellement, ces petits boulots d’étudiants disparaissent. A un élément chiffré, objectif et parlant à ce sujet : le nombre d’emplois mis en ligne sur le portail de l’Université de Lausanne a diminué de 57 % entre mars et avril 2020. Pour les étudiants n'ayant pas d’autres sources de revenus, ce sont autant de possibilités de subvenir à leurs besoins qui disparaissent. Certes, il existe dans chaque institution des fonds sociaux qui peuvent être sollicités, mais ces fonds, qui constituent une solution de tout dernier recours, tendent maintenant à s’épuiser. Le risque à terme est que de nombreux étudiants vont abandonner leur formation en cours d’année, faute de pouvoir continuer à financer leurs études. Ces abandons sont évidemment dommageables pour les personnes qui renoncent à suivre un cursus dans lequel elles se sont investies et qui était à leur portée. Mais il n’y a pas que cela. Il s’agit aussi d’une grande perte pour les collectivités publiques, qui investissent dans ces talents qui jamais ne feront profiter la société de leurs compétences. Ce serait un immense gâchis que ces aptitudes durement acquises soient perdues à cause du coronavirus. Face à cette situation, le Conseil d’Etat nous présente un projet de décret qui apporte des solutions. Ce projet de décret propose de mettre en place un dispositif temporaire visant à apporter une aide de dernier recours aux étudiantes et aux étudiants qui seraient désormais sans possibilité de subvenir eux-mêmes à leurs besoins vitaux. L’objectif est de permettre aux étudiantes et aux étudiants précarisés de bénéficier d’un soutien financier qui leur permettra de poursuivre et de terminer leurs études. Bien entendu, ce dispositif ne s’adresse pas à celles et ceux qui bénéficient déjà d’une bourse d’études. Il s’agit de viser véritablement les personnes qui, jusqu’à la crise, se prenaient elle-même en charge, mais pour qui le défi est désormais trop grand, faute de trouver un travail. La commission est unanime à reconnaître que le projet du Conseil d’Etat est judicieux et adéquat. En soutenant la formation, nous donnons un signal au monde économique. Malgré la crise, le canton de Vaud continue de soutenir une formation de qualité dont les employeurs auront besoin une fois la crise passée.

Les étudiantes et les étudiants qui abandonnent leurs études en cours de route ont coûté à la société souvent des sommes considérables, suivant le cursus choisi. En les soutenant temporairement, nous évitons que ces sommes investies soient bêtement dilapidées. Les montants prévus pour ce dispositif paraissent même modestes par rapport à l’ampleur des sommes investies et gâchées à cause de cursus n’ayant pas aboutis. En fait, il s’agit de faire un investissement ponctuel et modeste par rapport à l’ampleur du gâchis que l’on évite ainsi. L’aide aux étudiantes et étudiants précarisés se fera de trois manières : premièrement, un soutien mensuel en cas de perte d’emploi non compensé par d’autres aides spécifiques à la crise du coronavirus ; deuxièmement, un soutien unique pour l’achat de ressources matériel, afin de suivre les cours en ligne, puisqu’un matériel informatique adéquat est devenu indispensable dans la situation actuelle ; troisièmement, une aide unique pour les factures médicales non remboursées liées à la Covid-19. Grâce à ces mesures, nous espérons éviter que des personnes abandonnent leurs études à cause de la crise actuelle. La commission est unanime, non seulement à reconnaître que ces mesures sont nécessaires, mais aussi à saluer le projet du Conseil d’Etat. Elle a certes été divisée sur la question de la durée dans laquelle ce dispositif devait s’inscrire. Nous y reviendrons lorsque nous aborderons les amendements. En attendant, c’est par 8 voix pour, sans opposition ni abstention, que la commission vous recommande d’entrer en matière.

Mme Catherine Labouchère (PLR) — Rapporteur-trice de minorité 1

Pourquoi faire un rapport de minorité, alors que tous les commissaires étaient d’accord sur l’importance de ce projet de décret ? Il s’agit d’un projet de décret d’urgence non pérenne, comme précisé dans l’exposé des motifs, et destiné à répondre à un problème réel, pour une catégorie d’étudiantes et d’étudiants risquant de tomber dans la précarité. Les commissaires proposent toutefois deux modifications. La première est d’allonger le délai jusqu’à l’année académique, soit au 31 juillet 2021, et de venir avec un financement supplémentaire par crédit. Si on peut comprendre le sens de poursuivre l’aide d’urgence sur l’année académique, car il est peu probable que la situation des jobs d’étudiants s’améliorent d’ici là, le mode de financement pose problème aux minoritaires, car entrer dans la demande par crédit supplémentaire ouvre la porte à toute sorte d’autres requêtes, en raison des multiples urgences découlant de la pandémie, et ce, dans de nombreux secteurs. Plutôt que cette approche, les commissaires minoritaires privilégient la voie d’une proposition renouvelée du Conseil d’Etat au moyen d’un nouveau projet de décret qui pourrait venir rapidement sur cette question, ou une modification légale avec une approche globale pour répondre aux situations d’urgence liées à la pandémie. Une troisième voie serait une approche par dialogue avec les institutions qui ont des réserves et avec les fondations privées, comme cela a été le cas avec la Société académique vaudoise.

Avec l’arrivée de la deuxième vague, il devient indispensable d’avoir cette réflexion globale pour faire face à une situation difficile qui arrive aussi dans de très nombreux autres secteurs et fixer des priorités. Nul doute que la formation relève de sujets prioritaires, mais les commissaires minoritaires estiment que cette réflexion doit avoir lieu au sein du Conseil d’Etat avant toute nouvelle proposition. En conclusion, la minorité de la commission vous recommande d’accepter le projet de décret tel que présenté par le Conseil d’Etat et émet le vœu que ce dernier revienne rapidement avec une solution renouvelée pour répondre à l’urgence dans ce domaine, mais après une réflexion globale.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion d'entrée en matière est ouverte.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Le groupe Ensemble à Gauche et POP soutient la mise sur pied de ce dispositif d’aide d’urgence temporaire aux étudiants. C’est un dispositif que nous jugeons indispensable vu la précarisation de nombreuses personnes suivant des études, suite à la pandémie de covid. La forte augmentation du chômage dans le canton suite au semi-confinement du printemps dernier a conduit à la perte de nombreux petits emplois qui permettaient à des étudiants issus de famille modeste de financer en partie leurs études. Certains parents qui ont basculé dans le chômage partiel, voire complet, ont aussi vu compromises leurs capacités à entretenir leurs enfants qui suivent des études supérieures. Parallèlement à ces pertes de revenus, de nouvelles charges sont venues s’ajouter dans le budget des étudiants, en raison du basculement en ligne de la plupart des cours. Suivre des cours en ligne sur Internet nécessite d’avoir un équipement informatique de qualité et une connexion Internet performante à domicile ainsi qu’un espace de travail idoine. Toutes ces conditions génèrent des frais supplémentaires pour certains étudiants. D’ailleurs, le montant maximal prévu dans le décret pour l’aide à l’acquisition de matériel informatique, de 600 francs, paraît assez modeste quand on connaît le prix d’un ordinateur ou le prix d’une connexion Internet. Face à cette précarisation des étudiants, les fonds d’aide provisionnés par les différentes hautes écoles ont été rapidement épuisés ou, au mieux, seront prochainement épuisés, selon les informations qui nous ont été données en commission. L’Etat doit donc impérativement débloquer une aide supplémentaire, sans quoi des étudiants risquent de devoir abandonner leur formation. Il s’agirait d’un gâchis sur le plan humain, mais aussi sur le plan financier, comme l’a rappelé le rapporteur de majorité.

Nous appuyons le présent projet pour toutes ces raisons, mais la version proposée dans un premier temps par le Conseil d’Etat ne nous paraît pas suffisante, en particulier sur deux aspects. Premièrement, la durée de l’aide : il est assez improbable de penser que les difficultés vont disparaître au 31 décembre 2020, surtout compte tenu de la deuxième vague épidémique qui est en cours. Nous nous félicitons qu’un amendement ait été soutenu par la majorité de la commission pour prolonger l’aide jusqu’à la fin du premier semestre 2021. Mais bien sûr, deuxièmement, cela appelle un besoin de financement supplémentaire pour éviter que le Département de la formation doive dépouiller un autre budget pour financer le prolongement de cette aide. Pour prévenir ce risque, je déposerai un amendement à l’article 4, afin que l’Etat alimente le dispositif d’aide si nécessaire au moyen de crédits supplémentaires non compensés. J’espère que le vote de la commission pourra être compliqué dans ce plénum.

Mme Alice Genoud (VER) —

Le canton a volé au secours de nombreux domaines en difficultés, répondant aux appels des hôteliers, des restaurateurs, des vignerons, des acteurs de la culture, des apprentis — pour ne citer qu’eux. L’Etat peut se targuer d’avoir fait son devoir en matière d’aide d’urgence. La frange précarisée des étudiants — ceux qui devaient jongler entre un ou plusieurs emplois pour mener à bien leurs études — a aussi besoin de notre aide, rapidement. La crise que nous connaissons a fait disparaître de nombreux petits emplois — emplois à temps partiel, emplois dans le domaine dans la culture ou dans la restauration — en ne laissant aux étudiants qu’une dernière bouée de secours pour pouvoir continuer leurs études : les fonds d’aide des institutions d’études du troisième cycle et hautes écoles. Comme les études se mènent sur le long terme, les Verts soutiennent l’amendement qui envisage que ces fonds d’aide soient continus jusqu’à la fin de l’année universitaire, soit l’été prochain. Si on donne une aide jusqu’en décembre, c’est permettre aux étudiants de survivre jusqu’en décembre sans leur donner un horizon clair pour finir l’année universitaire. Nous ne pouvons pas prendre le risque que ces jeunes abandonnent leurs études, alors que nous aurons déjà investi dans leurs études ou par le biais de ces différents fonds. Il s’agit d’une question d’égalité de chance, pour que chacune et chacun puissent avoir accès aux études universitaires, et ce, même en temps de pandémie. Nous pensons aux futurs médecins, aux futurs infirmières et infirmiers, à des futurs membres essentiels de la société, à des futurs fondateurs de start-up, aux acteurs de nos musées et de notre vie culturelle. Ce sont eux dont nous aurons aussi besoin à la fin de cette crise économique et sanitaire. La jeunesse a besoin d’un signal fort de la part du Grand Conseil, en cette période compliquée. Nous pouvons le leur donner en acceptant ce projet de décret tel qu’amendé par la commission.

M. Sergei Aschwanden (PLR) —

Nous sommes tous unanimes sur le fait qu’il faut apporter un soutien à ces étudiants, car certains se retrouvent dans une situation très précaire. Il est important de soutenir ce projet de décret tel qu’il est. Le groupe PLR soutiendra à l’unanimité le rapport de la minorité. Il faut revenir très rapidement avec un deuxième projet qui nous permettra de voir un peu plus clair dans les prochains mois.

Concernant l’amendement et les propos de M. Buclin, demandant des crédits supplémentaires non compensés, il ne faut pas pratiquer la politique de l’arrosoir. Dès lors, je vous invite à suivre le rapport de la minorité de la commission.

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) —

Le groupe socialiste soutient la prolongation à fin juillet 2021 de l’aide qui peut être apportée aux étudiants. Nous devons faire en sorte que tous les étudiants de cette année académique puissent poursuivre leurs études. Il faut absolument éviter les abandons. Le dispositif qui nous est présenté est utile, répond aux situations d’urgence, permet d’être réactif et le principe de subsidiarité est garanti. Il s’agit ici du dernier filet social qui peut sauver des situations en raison de pertes de revenus liées au Covid. On nous annonce environ 500'000 francs pour 2021 — six mois. Ce montant ne mettra pas le budget de l’Etat en péril, sachant que cet argent sera distribué après un suivi et une connaissance de la situation, et selon les trois motifs qui nous ont été présentés. Ce demi-million est déjà largement engagé par l’Etat, lorsqu’il soutient un étudiant ou une étudiante, puisque l’on sait que le montant des études est largement supérieur à ce demi-million. Etre formé permet d’être indépendant financièrement. Si un étudiant, aujourd’hui, abandonne sa formation et se retrouve sans rien, il se retrouvera probablement proche de la précarité et risquera d’être soutenu longtemps par l’Etat ; nous ne souhaitons pas cela. Mme Labouchère nous parle d’une réflexion globale, mais cette réflexion a été menée. Nous avons reçu toutes les informations et même des éléments complémentaires nous indiquant qui était touché, nous démontrant que certains étudiants le sont davantage — ceux de la HEP, qui sont sollicités pour faire des remplacements, ne sont pas forcément ceux qui auront besoin de ce soutien financier, contrairement à ceux qui sont à l’ECAL, à l’Unil, qui travaillaient peut-être comme veilleur de nuit dans un hôtel, comme appui, serveur ou à la plonge dans un restaurant. Ce sont les mêmes domaines qui sont aujourd’hui touchés et reconnus par tous ; c’est la même chose pour les étudiants : ils se retrouvent sans travail, comme les autres secteurs que nous sommes d’accord de soutenir. Remettre à plus tard, c’est prendre le risque d’abandon, et nous espérons que vous ne voulez pas prendre ce risque. Nous vous incitons à soutenir la prolongation de cette aide durant toute l’année académique 2020-2021.

M. Blaise Vionnet (V'L) —

Je vais vous transmettre la position du groupe vert’libéral. Le projet de décret qui nous est proposé est limité dans le temps, ce qui est une bonne chose. Il est limité uniquement pour les étudiants précarisés, en lien avec le covid. Ce n’est pas un arrosoir donné à tous les étudiants. Le projet de décret a été envisagé au printemps 2020, pour la période de septembre à décembre 2020. Au vu de la situation actuelle et du fait que nous sommes déjà fin octobre, plusieurs commissaires ont souhaité une prolongation de cette période jusqu’à la fin de l’année académique, soit jusqu’au 31 juillet 2021. En effet, la situation du covid ne va pas s’améliorer et nous estimons qu’il faut soutenir ces étudiants jusqu’à la fin de leur année académique, en sachant que les quelques centaines de milliers de francs nécessaires pour ce soutien ne seront rien en comparaison de ce que l’Etat investit pour soutenir les études en général. Par conséquent, le groupe vert’libéral soutiendra le projet de décret avec les deux amendements proposés, à savoir la prolongation jusqu’en juillet 2021 et le recours à des crédits supplémentaires non compensés pour l’année 2021.

Mme Cesla Amarelle — Conseiller-ère d'État

Vous allez voter cet après-midi sur un dispositif qui est très utile, car il va faire face à la précarisation claire des étudiants en raison de la pandémie. De plus, il ne représente pas de surcoûts pour l’Etat, parce que les montants engagés ne sont pas élevés et sont souvent déterminants dans la pratique et dans la vie des étudiants. Vous allez voter, aujourd’hui, fin octobre, sur un dispositif qui s’étend jusqu’au 31 décembre 2020, avec heureusement un effet rétroactif. Il est parfois difficile de faire coïncider le temps institutionnel avec le temps de l’urgence. Le projet que le Conseil d’Etat vous soumet aujourd’hui avait été façonné au tout début de l’été. Il était destiné à faire face à une situation que nous espérions alors être la plus temporaire possible. Or, force est de constater que cette situation perdure et qu’elle va probablement perdurer en tous cas les deux prochains semestres. Le mécanisme sur lequel vous allez vous prononcer aura tout son sens au cours des six prochains mois. La commission l’a reconnu : il s’agit d’un dispositif utile qui répond à cette précarisation. Un éventuel nouveau décret, qui devrait être adopté en suivant les procédures usuelles, ne pourrait pas être mis en œuvre avant avril, voire mai 2021. Les retours des services sociaux de l’Université et des Hautes écoles sont clairs : il y a une urgence. La crise touche de manière brutale les plus précaires des étudiants et, sans soutien, ceux-ci risquent d’abandonner leurs études. Une hausse des abandons serait catastrophique, pour les personnes concernées dont le cursus de formation serait brisé, mais aussi pour les collectivités publiques, parce que ces abandons coûtent cher, voire très cher. Une éventuelle prolongation du dispositif dans la réalité de cet automne 2020 si difficile a donc tous son sens. Doit-elle être financée par un crédit compensé ou non ? Je vous laisserai en juger, lorsque vous aborderez le deuxième amendement. Je vous invite à distinguer les deux discussions et à accepter le premier amendement, qui permettra de prolonger un mécanisme très concret de lutte contre la précarisation de nos étudiants sur le moyen terme, dans tous les cas jusqu’à la fin de l’année académique 2020-2021.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

L’entrée en matière est admise avec 2 abstentions.

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en premier débat.

L’article 1 est accepté à l’unanimité.

Art. 2. —

M. Olivier Gfeller (SOC) — Rapporteur-trice de majorité

Un amendement a été déposé à l’article 2 :

« Art. 2. — Le dispositif permet de soutenir les étudiants de l'Université de Lausanne, de la Haute école pédagogique Vaud, de la Haute école de Santé Vaud, de la Haute école d'art et de design de Lausanne, de la Haute école d'ingénierie et de gestion du canton de Vaud, de la Haute école de la santé La Source, de la Haute école de travail social et de la santé Lausanne, de la Haute école de Musique Vaud Valais Fribourg, pour la période comprise entre le 1er septembre 2020 et le 31 décembre 202031 juillet 2021 et indépendamment du lieu de domicile de l'étudiant. »

La majorité de la commission vous demande d’accepter cet amendement. Prolonger la durée d’application d’un principe dont tout le monde salue la pertinence nous semble logique. Il s’agit de faire correspondre ce dispositif avec l’année académique. Mettre en place un dispositif d’aide qui s’arrêterait à la fin de cette année civile ne permettrait pas aux étudiants précarisés d’assurer la poursuite de leurs études jusqu’à la fin de l’année académique, et surtout jusqu’aux examens. Le gâchis que nous tentons d’éviter avec ce projet de décret ne serait que repoussé de quelques semaines.

Nous avons été unanimes à saluer la mesure proposée par le Conseil d’Etat. Nous avons aussi été unanimes à considérer que les mesures proposées permettaient de régler un problème bien réel. Mais pour véritablement résoudre ce problème, il s’agit de ne pas s’arrêter en chemin et d’aller au bout de la démarche. L’aide prévue pour les étudiants précarisés s’arrêterait le 31 décembre 2020 si nous n’acceptons pas l’amendement de la commission. Or, durant les six premiers mois de l’année 2021, les étudiantes et étudiants précarisés se retrouveront dans la même situation difficile. Devant l’absence de solution, ils seront à nouveau tentés de renoncer à leurs études avant leurs examens. Il faut le redire inlassablement : cette aide s’adresse à des jeunes indépendants financièrement jusqu’à aujourd’hui. Ils subvenaient eux-mêmes à leurs besoins en travaillant dur à côté de leurs cours. Mais pour eux, le défi est désormais trop grand. Sans possibilité d’accéder aux petits emplois, ils se retrouveront sans ressources et devront renoncer à leurs études. Le geste que nous aurons fait en 2020 n’aura servi à rien. De plus, il s’agit de personnes ne bénéficiant pas d’autres formes d’aides. Contrairement à ce qu’affirme un de mes préopinants, on est loin de la politique de l’arrosoir. Il s’agit bien d’une aide ciblée. Voilà pourquoi la majorité de la commission vous propose, par cohérence, d’accepter le présent amendement demandant de prolonger ce dispositif. C’est cohérent par rapport au calendrier académique et c’est aussi cohérent par rapport au constat alarmant que nous avons fait. Nous ne savons pas quand la crise du coronavirus va s’arrêter. Si l’épidémie s’arrêtait d’un coup, les conséquences économiques dureraient encore bien plus longtemps. La précarité provoquée par cette crise durera, elle aussi, bien plus longtemps. Nous estimons donc que l’aide apportée aux étudiants fragilisés ne doit pas s’arrêter brutalement à la fin de cette année. C’est par 5 voix contre 4 que la commission vous recommande d’accepter cet amendement.

Mme Catherine Labouchère (PLR) — Rapporteur-trice de minorité 1

Je tiens à rappeler que les minoritaires n’ont jamais été contre l’aide. Il est important d’aider les étudiants les plus précarisés. Toutefois, nous souhaitons que le Conseil d’Etat revienne rapidement avec une vision globale des multiples aides que nous devrons faire suite à cette deuxième vague qui va prolonger la durée de la pandémie — et certains secteurs sont extrêmement précarisés. Il est important de trouver une solution pour ces étudiants jusqu’à la fin de l’année académique. Il serait absurde d’arrêter à la fin de l’année 2020. Mme la conseillère d’Etat vient de nous dire qu’il était impossible d’avoir une réponse du Conseil d’Etat avant le printemps prochain. Alors, qu’est-ce que cela veut dire pour les autres secteurs ? Qu’il n’y aura pas de réponses non plus pour les autres secteurs ? On doit vraiment réfléchir à une approche avec une vue méta, car nous allons être confrontés, ces prochaines semaines, à de multiples demandes et il faudra pouvoir y face. Celle-là est certes prioritaire, mais il faut aussi réfléchir à la manière dont nous le faisons. C’est pourquoi nous avons décidé d’accepter ce projet de décret tel qu’il est présenté et de demander au Conseil d’Etat de revenir très vite avec une solution qui soit plus pérenne.

M. Jérôme Christen (LIBRE) —

Je souhaite proposer un sous-amendement. En effet, autant le groupe des Libres entre en matière sur l’idée que ce soutien doit se poursuivre dès lors que la pandémie se poursuit et que les étudiants ne sont pas sortis de la gonfle. Toutefois, il paraît nécessaire de préciser que le soutien doit continuer pour autant que la crise sanitaire le justifie. Je vous propose donc de compléter l’amendement de la manière suivante :

« Art. 2. — (…) pour la période comprise entre le 1er septembre 2020 et le 31 juillet 2021 pour autant que la crise sanitaire le justifie. »

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) —

Je souhaite répondre à Mme Labouchère, qui demande qu’un nouveau projet nous soit présenté. Le département a travaillé cet été sur ce projet — de juillet à octobre, soit cinq mois entre le moment où le projet est écrit et le moment où il se trouve face à nous. Si on demande aujourd’hui au département de refaire ce travail, alors même que nous avons les garanties que cet argent sera donné selon des critères bien définis, en raison du covid, pour des situations de dernière urgence, etc., on remet cinq mois — soit de novembre à mars. Ce n’est donc pas avant début avril que nous pourrions l’adopter, si le département arrive à retravailler un texte et à nous le présenter selon les différentes exigences. Pour moi, rien ne manque à ce texte. Je fais confiance aux professionnels de l’action sociale et aux assistants sociaux de toutes ces écoles, qui sont à même de dépister, de regarder comment tel étudiant se retrouve dans telle situation, et cas échéant de les aider s’ils remplissent les conditions qui nous sont présentées. Pour moi, les critères sont déjà présents et nous avons une assurance, puisqu’il y a aussi cette question de subsidiarité qui nous a été garantie. Il y a une assurance que les aides qui seront octroyées le seront à bon escient. Je vous prie de soutenir, jusqu’à la fin de l’année académique 2020-2021, un soutien aux étudiants lorsque ceux-ci se retrouvent presque à devoir renoncer à poursuivre leurs études.

M. Sergei Aschwanden (PLR) —

J’aimerais rappeler que, dans ce projet de décret, jamais aucun montant ne nous a été donné. Nous n’avons aucune idée de quels montants seront dépensés pour soutenir ces étudiants. Dans le rapport de minorité, il est expressément stipulé que nous sommes en faveur d’un soutien. Personne ne conteste cela. Il est important de savoir quels seront les montants versés à ces étudiants.

Pour rebondir sur les propos de Mme Attinger, je pense que cela permettra au Conseil d’Etat de ne pas refaire le travail depuis le début. Etant donné qu’on aura l’expérience et qu’on connaîtra les montants précis jusqu’à fin décembre, on pourra s’appuyer là-dessus pour faire des projections précises. C’est pour cette raison que nous demandons au Conseil d’Etat de revenir très rapidement avec un nouveau projet de décret, articulant des montants plus ou moins précis, en tenant compte des projections, et c'est la raison pour laquelle je peux aussi soutenir le sous-amendement de M. Christen, tant que la situation sanitaire perdure. Nous serons dans une position nettement plus claire. Il me semble dangereux de donner une sorte de chèque en blanc et de permettre d’avancer tant qu’on le voudra sans connaître certains montants.

Mme Alice Genoud (VER) —

Je souhaite réagir aux propos de Mme Labouchère. Je comprends l’envie d’avoir une vision d’ensemble. Dans un monde idéal, ce serait extraordinaire. Actuellement, nous ne sommes pas dans un monde idéal, mais dans un contexte d’urgence, avec des besoins urgents pour ce projet de décret étudiant. De nombreuses autres demandes ont été faites et traitées avec beaucoup moins de réticences et d’envie d’avoir une vision d’ensemble. Il s’agit d’un contexte particulier. Cet amendement permettrait de pouvoir répondre à l’urgence, qui dure et qui va durer encore un petit moment.

Concernant la question des montants, nous avons eu des compléments après la commission et des montants ont pu être articulés. On a dit 400'000 francs pour le premier semestre, un peu plus pour le deuxième — 580'000 francs. Il ne faut donc pas dire qu’aucun montant n’a été donné. C’est une situation d’urgence où l’évaluation se fait presque au jour le jour. Pour pouvoir répondre efficacement aux demandes nombreuses qui vont sûrement être faites ces prochains mois, il faut pouvoir avoir une certaine latitude, latitude que l’on peut donner aujourd’hui avec l’amendement proposé par la majorité de la commission. Concernant le sous-amendement Christen, il est très bien de préciser, même si cela me semblait assez clair dans le reste du projet de décret. Je n’y vois aucun inconvénient.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Cette affaire est subtilement jouée. Nous discutons de cela bien avant le budget, pour ne pas prendre le risque d’avoir une discussion interminable au budget et de voir le tout cupesser ; toutefois, ce n’est pas encore une garantie.

Madame Attinger Doepper, je vais vous dire ce qui me manque. Il me manque la phrase suivante : « Bien entendu, cela ne continuera pas à partir du 1er août 2021. » Faisant de la politique depuis un temps certain, j’aime bien mes collègues de gauche, mais on les voit venir à 400 pas, pour remettre la compresse le cas échéant. Pourquoi pas, mais dans ce sens le sous-amendement Christen prend toute sa valeur.

Blaise Vionnet 16.07.45

On aura un vaccin le 1er août de l’année prochaine, donc il est sûr qu’il y aura moins besoin de soutenir les étudiants précarisés en lien avec le covid. Par rapport à Mme Labouchère qui dit qu’il faut réfléchir, je vous encourage à être pragmatique. Les étudiants ont faim et ont besoin de se loger. Il me semble que, dans cette situation, la poursuite du projet de décret jusqu’à fin juillet 2021 est une sage et pragmatique décision. Par rapport au sous-amendement proposé par notre collègue Christen, le projet de décret est très précis. Il ne s’adresse qu’aux étudiants qui sont précarisés en lien avec le covid. Dès lors, le sous-amendement ne me paraît pas nécessaire, puisque les précisions sont suffisamment claires dans le projet de décret : cette aide est liée au covid.

Hadrien Buclin 16.08.57

Je partage les propos de Mme Attinger Doepper lorsqu’elle répond à Mme Labouchère qu’il est impossible d’arriver avec un nouveau projet dans les temps, à savoir avant le 31 décembre. Je m’étonne qu’une députée expérimentée comme Mme Labouchère, qui est dans ce Parlement depuis plusieurs années, puisse penser le contraire.

Pour répondre brièvement à M. Aschwanden qui parle d’un chèque en blanc au Conseil d’Etat sans contrôle parlementaire sur les montants en jeu, j’aimerais rappeler la procédure budgétaire et la Loi sur les finances à son article 11 qui prévoit que tout crédit supplémentaire non compensé dépassant 100'000 francs doit passer par la Commission des finances. Le contrôle parlementaire demeurerait si des montants supplémentaires devaient être débloqués en 2021. Je rappelle que votre parti et la droite est majoritaire dans la Commission des finances et votre parti s’y est même récemment renforcé. Parler d’un chèque en blanc, c’est méconnaître la procédure en matière de crédits supplémentaires non compensés.

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) —

Je voulais réagir aux propos de M. Aschwanden qui parlait d’un chèque en blanc et qui n’avait pas idée des montants dont on parlait. C’est faux, puisque nous avons reçu des compléments d’information à ce sujet. Pour répondre à M. Vuillemin, on espère en effet que ce covid va se terminer et qu’il ne sera pas nécessaire de revenir, à l’issue de cette année académique, avec une demande de prolongation de ce décret.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

La Commission des finances a traité bon nombre de textes en lien avec la pandémie de covid. C’est la première fois que je vois un texte où aucun montant n'est mentionné. On dit seulement que cela représentera le budget ordinaire de 2020. Nous avons maintenant un amendement qui parle de 2021. Il faudra voir comment intégrer ce montant dans le cadre du budget — si le sous-amendement Christen est accepté. Tous les objets sur le covid traités par la Commission des finances ont été montés avec un montant. Il y a parfois des montants qui sont provisionnés et communiqués, on peut parfois faire des dépassements — plus de 100'000 francs est de la compétence de la Commission des finances ; moins de 100'000 francs est de la compétence du Conseil d’Etat. Je vais soutenir ce projet, mais ce Parlement, qui vote les budgets et décide des comptes, devrait au moins avoir un montant ; c’est la moindre des choses à demander au Gouvernement.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Monsieur Vionnet, j’apprends avec plaisir que vous me soutiendrez pour la campagne de vaccination qui sera mise sur pied, quand on sait le goût relativement modéré des étudiants pour se faire vacciner. En son temps, pour la rougeole, le conseiller d’Etat Maillard avait dû menacer en disant : « si vous ne vous faites pas vacciner contre la rougeole, vous ne passerez pas vos examens », ce qui avait créé un incident diplomatique entre la Suisse et le Canada. Je compte donc sur mon compère Vionnet, le moment venu, pour persuader, avec moi, la communauté universitaire qu'il faut vraiment se faire vacciner.

Mme Cesla Amarelle — Conseiller-ère d'État

Premièrement, sur la question de la temporalité, on a constaté que le département et le Conseil d’Etat peuvent décider avant Noël d’un nouveau projet de décret, mais la durée des travaux du Grand Conseil et les délais référendaires feront que je confirme ce qu’on a dit préalablement : avant avril et mai, ce ne sera pas sur la table du Grand Conseil.

Deuxièmement, sur la proposition de sous-amendement Christen, je n’ai pas d’opposition de principe. Toutefois, je vous rends attentifs au fait que l’article 1 indique déjà que les aides octroyées le sont pour des motifs liés au covid. On peut réitérer cet élément dans d’autres dispositions que l’article 1, même si cela fera une petite redite.

Troisièmement, concernant les interventions de MM. Aschwanden et Berthoud, je tiens à préciser que nous n’avions que peu d’informations au moment de la rédaction de ce projet de décret, lorsqu’il a été élaboré à la fin du printemps dernier. On était à la limite du droit d’urgence et on avait loupé cette période. On voulait au moins obtenir ici une base légale. Si les chiffres n’ont pas pu être évoqués directement dans la rédaction du projet de décret, c’est parce que nous ne les avions pas. On avait simplement des appels à l’aide des fonds sociaux de toutes les Hautes écoles, qui nous indiquaient que l’on aurait un problème social majeur. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé d’aller rapidement, sans avoir les éléments. Entretemps, nous avons eu les chiffres, puisque la note complémentaire a été rendue à la commission ; je vous invite à la lire, en particulier M. Aschwanden. Pour la période initiale, nous avons 400'000 francs et ce montant était dans la limite des disponibilités budgétaires de la Direction générale de l’enseignement supérieur. Ensuite, vous avez les deux montants qui ont été chiffrés au plus près de nos informations, c’est-à-dire 580'000 francs pour le semestre de printemps 2021. Cela correspondrait à la durée prévue par l’amendement de prolongation. Sinon, pour l’ensemble de l’année 2021, ce serait 995'000 francs. Voilà ce que l’on peut vous dire en l’état des estimations, mais il est clair qu’au moment où le projet de décret a été rédigé, nous n’avions pas ces éléments. C’est pourquoi ils ne figurent pas expressément dans le projet de décret.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

On parle d’une note. Il arrive très régulièrement que la note soit annexée au rapport de la commission. Voit-on un inconvénient à l’annexer ? Ainsi, nous aurions un montant et ce plénum pourrait s’exprimer. Je comprends que c’était compliqué en février, mais nous sommes en novembre. Je voterai ce projet de décret, mais je pense que l’on doit être au courant des montants. C’est important à mes yeux.

Mme Cesla Amarelle — Conseiller-ère d'État

Il n’y a aucune opposition à ce que ce soit annexé.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Le sous-amendement Jérôme Christen est accepté par 86 voix contre 25 et 12 abstentions.

L’amendement de la majorité de la commission, sous-amendé Jérôme Christen, est accepté par 68 voix contre 64.

M. Nicolas Bolay (UDC) —

Je demande le vote nominal.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 députés.

La présidente : — Celles et ceux qui soutiennent l’amendement de la majorité de la commission, sous-amendé Jérôme Christen, votent oui ; ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement de la majorité de la commission, sous-amendé Jérôme Christen, est accepté par 68 voix contre 64.

(Le vote nominal sera inséré ultérieurement.)*

L’article 2, amendé, est accepté par 69 voix contre 62.

L’article 3 est accepté avec quelques avis contraires et abstentions.

Art. 4. —

M. Olivier Gfeller (SOC) — Rapporteur-trice de majorité

La commission a déposé un amendement à l’article 4, sous la forme d’une adjonction.

« Art. 4. — Al. 1 : L'Etat peut contribuer à alimenter le dispositif dans la mesure de ses moyens budgétaires et si nécessaire au moyen de crédits supplémentaires non compensés. »

Il s’agit, par cohérence avec notre acceptation de l’amendement déposé à l’article 2, d’avoir cette adjonction. Si nous ne le faisons pas, nous n’aurons pas forcément les moyens nécessaires à l’application de ce dispositif. Cet amendement a été accepté en commission par 5 voix contre 3.

Mme Catherine Labouchère (PLR) — Rapporteur-trice de minorité 1

Au vu du premier vote, il est important que l’on puisse avoir des crédits compensés. Ouvrir la porte à des crédits supplémentaires non compensés va nous conduire dans de la multiplicité de demandes de tous les autres secteurs. Nous sommes pour aider les étudiants, mais il faut aussi voir à l’intérieur du département ce qui est possible, avant toute demande externe.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

L’amendement de la majorité de la commission est accepté par 68 voix contre 66.

L’article 4, amendé, est accepté par 66 voix contre 65.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je demande un vote nominal.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 députés.

La présidente : — Celles et ceux qui acceptent l’article 4 amendé votent oui ; ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’article 4, amendé, est accepté par 68 voix contre 65.

(Le vote nominal sera inséré ultérieurement.)*

L’article 5, formule d’exécution, est accepté avec quelques avis contraires et abstentions.

Le projet de décret est adopté en premier débat.

Le deuxième débat interviendra ultérieurement.

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