Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 6 septembre 2022, point 24 de l'ordre du jour

Texte déposé

Dans le cadre des débats de la révision de la loi sur l’exercice des droits politiques, nous avons été nombreux à partager le constat que l’éducation civique devait être renforcée. Ainsi, en étroite collaboration avec les Jeunes Libéraux-Radicaux Vaudois, j’ai le plaisir de déposer ce qui suit.

 

Si des cours de citoyenneté sont prévus durant les années d’enseignement obligatoire, ceux-ci deviennent sporadiques dans la suite des cursus de formation, voire sont tout simplement abandonnés. De plus, de nombreux échos d’étudiants laissent entendre que ces cours sont bien trop souvent axés sur la théorie, comme l’histoire des systèmes politiques, par exemple. Si ces éléments théoriques sont évidemment importants, le manque de pratique (comment voter, débats sur des sujets soumis à votation, etc.) est décrié. En effet, si l’étude sur la démocratie américaine du début du XIXème siècle d’Alexis de Tocqueville est un sujet passionnant à aborder, elle ne permet cependant pas aux élèves d’acquérir les connaissances nécessaires pour participer pleinement à la démocratie suisse et vaudoise du XXIème siècle ! Pourtant, c’est exactement à cette période de la vie que les étudiants et apprentis atteignent l’âge de la majorité et se voient conférer leurs droits civiques. Il convient donc d’assurer une formation complète, neutre et de qualité permettant aux jeunes de participer activement à la vie démocratique de notre pays.

 

Nous demandons au Département d’étudier de nouvelles propositions pour renforcer l’enseignement civique neutre aux personnes en formation post-obligatoire. Cette mesure permettrait aux jeunes de disposer d’outils nécessaires pour entrevoir une pleine participation lors des votations et des élections et d’améliorer le taux de participation dans cette catégorie de population. Cette proposition s’inscrit donc pleinement dans la volonté du Parlement de renforcer l’éducation civique des futures générations. Elle aurait, à terme, un impact sur chaque tranche de la population et permettrait de renfoncer la participation celles-ci.

 

Nous demandons dès lors de renforcer le nombre de périodes enseignées de cours de citoyenneté au secondaire I et d’introduire un tel cours dans les cursus de maturité et au sein de la formation duale.

 

De même un programme plus clair et neutre disponible aux enseignants devrait être mis en place. Ce dernier devrait allier à la fois théorie et actualité concrète, traitée de façon objective avec l’ensemble des opinions politiques, qui intéresse et concerne les jeunes. Il serait nécessaire aux yeux des cosignataires d’aborder en premier lieu des sujets qui intéressent les jeunes afin d’attiser leur curiosité, puis d’avancer vers des sujets plus techniques

 

La journée oser tous les métiers est organisée actuellement de façon annuelle afin de « faire découvrir aux élèves un métier hors des clichés ». Dès lors, nous invitons le Département à introduire une journée « Oser voter ». Cette journée permettrait à l’ensemble des élèves de 10 à 11P de découvrir les tâches politiques et le fonctionnement des institutions. Cette journée mettrait ainsi en contact les élèves avec des élus communaux, cantonaux et fédéraux, dans une volonté de les intégrer aux mieux au monde politique et de les inviter à participer activement à la vie démocratique de notre Canton.

 

Pour résumer, les cosignataires de cette motion demandent au Conseil d’État :

  1. D’étudier de nouvelles propositions pour renforcer l’enseignement civique neutre aux personnes suivant une formation post-obligatoire.
  2. De renforcer le nombre de périodes enseignées de cours de citoyenneté au secondaire I et d’introduire un tel cours dans les cursus de maturité et au sein de la formation duale.
  3. De mettre sur pieds un programme plus clair et neutre pour l’enseignement de la citoyenneté, alliant théorie et actualité concrète.
  4. D’introduire une journée « Oser voter » mettant en relation élus communaux, cantonaux et fédéraux avec les élèves de 10 à 11 P.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Pierre-François MottierPLR
Daniel DeveleyPLR
Sergei AschwandenPLR
Alain BovayPLR
Blaise VionnetV'L
Jean-François CachinPLR
Philippe CornamusazPLR
François CardinauxPLR
Carole DuboisPLR
Josephine Byrne GarelliPLR
Sacha SoldiniUDC
Chantal Weidmann YennyPLR
Julien CuérelUDC
Catherine LabouchèrePLR
Jean-Luc BezençonPLR
Cloé PointetV'L
Claude MatterPLR
Gérard MojonPLR
Guy GaudardPLR
Bernard NicodPLR
Olivier PetermannPLR
Pierre-André RomanensPLR
Maurice NeyroudPLR
Jérôme ChristenLIBRE
Nicolas SuterPLR
Georges ZündPLR
Marion WahlenPLR
Philippe GermainPLR
Marc-Olivier BuffatPLR
Nicolas BolayUDC
Pierre VoletPLR
Aliette Rey-MarionUDC
Yvan PahudUDC
Cédric WeissertUDC
Jean-Marc GentonPLR
Patrick SimoninPLR
Pierre-Alain FavrodUDC
Florence Bettschart-NarbelPLR
Alexandre BerthoudPLR
Jean-Rémy ChevalleyPLR
Jean-Daniel CarrardPLR

Documents

Rapport de commission (21_MOT_28) - Jean-Marc Nicolet

21_MOT_28-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Sabine Glauser Krug (VER) — Rapporteur-trice

La commission qui a traité de cette motion s’est réunie le 28 mars dernier en présence de la cheffe du Département de la formation, de la jeunesse et de la culture, de sa secrétaire générale adjointe, du directeur général de l’enseignement obligatoire et de la pédagogie spécialisée, du directeur général de l’enseignement postobligatoire et de sa directrice générale adjointe. M. Cédric Aeschlimann, secrétaire de commission, a établi les notes de séance et en est chaleureusement remercié, tout comme notre ancien collègue Jean-Marc Nicolet qui a rédigé le présent rapport. Je n’étais pas membre de la commission.

Durant la séance, la motionnaire a relevé qu’elle avait déposé sa motion constatant le fort taux d’abstention des citoyennes et citoyens lors des dernières élections et à la suite des débats sur l’exercice des droits politiques. Son but est de trouver des solutions pour motiver les jeunes à s’intéresser à la politique et aux débats afin qu’ils prennent part aux votations. Ses propositions concernent le cadre de l’école obligatoire et postobligatoire et s’inspirent de la Journée « Oser tous les métiers » (JOM), transposée à cette problématique. Concrètement, la motionnaire demande :

  • d’étudier de nouvelles propositions pour renforcer l’enseignement civique de manière neutre aux jeunes suivant une formation postobligatoire,
  • de renforcer le nombre de périodes de cours de citoyenneté au secondaire I et d’introduire un tel cours dans les cursus de maturité et au sein de la formation duale,
  • de mettre sur pied un programme plus clair et neutre pour l’enseignement de la citoyenneté, alliant théorie et actualité concrète,
  • et d’introduire une Journée « Oser voter » mettant en relation élus communaux, cantonaux et fédéraux avec les élèves de 10e et 11e Harmos.

Mme la conseillère d’Etat affirme partager ces préoccupations et présente la situation actuelle, notamment la dotation horaire de l’école obligatoire de 10 heures par année de la 5e à la 10e et d’une heure par semaine en 11e, spécifiquement dédiées à la citoyenneté, comprenant la connaissance des institutions, la pratique citoyenne à travers des structures participatives et l’étude de problématiques actuelles liées à des enjeux politiques et géopolitiques du moment. La « Semaine de la citoyenneté » a été introduite dans le canton en 2022 dans les niveaux obligatoire et postobligatoire avec plusieurs événements dynamiques, dont le projet « Vote à blanc » qui permet l’exercice du vote dans un contexte proche d’un scrutin ordinaire. La première édition a eu lieu en mai dernier, à savoir après la séance de la commission. La mise en place de cette semaine découle du constat que la citoyenneté était difficilement identifiable dans le programme du postobligatoire, qui relève du niveau fédéral, car elle est intégrée à d’autres domaines dans les cours de culture générale. Les plans d’étude et les ordonnances fédérales ne prévoyant pas d’éducation à la politique institutionnelle et, au vu des grilles horaires, il n’y a pas de possibilité de créer une branche spécifique.

Par ailleurs, un site internet nouvellement créé est dédié à l’enseignement de la citoyenneté et propose des ressources, moyens d’enseignement, expositions et événements. Les représentants de l’Etat relèvent que l’exercice de la démocratie s’apprend également dans l’environnement proche des enfants. En outre, les conseils de classes ou d’élèves sont largement répandus et ils sont efficaces pour apprendre l’exercice des institutions politiques. Ils permettent aux élèves de débattre de sujets qui leur sont chers.

Dans la discussion générale, si les préoccupations au sujet de l’abstention des jeunes sont partagées, les disparités entre établissements concernant l’utilisation de la démocratie en classe interpellent. On note également que l’apprentissage de la citoyenneté est confronté aux problèmes personnels des jeunes qui placent les questions politiques à la fin de leurs préoccupations. La question de la neutralité est également évoquée et il est à noter que l’impartialité des enseignants est surveillée tant par les parents d’élèves que par les élèves eux-mêmes qui les attendent au tournant.

Finalement, concernant la forme de l’objet qui se confronte à une législation fédérale et qui demande une étude de la situation, la motionnaire ne souhaite pas transformer sa motion en postulat, estimant que les mesures mises en place ne rejoignent pas entièrement ses demandes. Enfin, la majorité de la commission recommande au Grand Conseil de ne pas transformer la motion en postulat, par 4 voix contre 5 et 0 abstention. Elle vous recommande néanmoins, par 5 voix et 4 abstentions, de prendre en considération cette motion telle quelle et de la renvoyer au Conseil d’Etat.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Florence Gross (PLR) —

Pour rappel, cette motion a été rédigée en étroite collaboration avec les jeunes radicaux-libéraux vaudois et vise à renforcer ou mettre en place diverses mesures tant à l’école obligatoire que postobligatoire, et ce afin de renforcer l’éducation civique. Durant les débats en commission, nous avons entendu et analysé les mesures déjà mises en place. Etant donné le vote final, cette motion mérite d’être renvoyée au Conseil d’Etat. Nous avons appris l’existence de la « Semaine de la citoyenneté » qui a eu lieu en mai dans l’ensemble des établissements de scolarité obligatoire. Il me semble toutefois que cette semaine n’a pas eu les effets escomptés. Je ne doute pas que certains enseignants aient profité des outils mis à disposition sur la plateforme, mais le dispositif n’a pas été généralisé à l’ensemble du canton. Il est donc important de poursuivre les efforts.

Bien que je salue les éléments déjà mis en place, je considère qu’il y a lieu d’en faire plus et nous – députés, syndics, municipaux, conseillers communaux et conseillers d’Etat – pourrions participer à ces mesures, notamment à la « Journée Oser voter » qui s’inspire de la « Journée oser tous les métiers », organisée annuellement et donc le succès n’est plus à prouver. Nous en avons parlé dans le cadre de la révision de la Loi sur l’exercice des droits politiques (LEDP) et nous sommes nombreux à partager le constat que l’éducation civique doit être renforcée. Cette motion pourrait nous en donner les moyens et je vous invite par conséquent à soutenir les conclusions de la commission, soit le renvoi de cet objet au Conseil d’Etat.

M. Yannick Maury (VER) —

Je déclare mes intérêts : je suis membre de la Société vaudoise des maîtres secondaires (SVMS) – un syndicat d’enseignants – ainsi qu’enseignant de citoyenneté au secondaire I et donc directement concerné par le contenu de la motion. Je suis passablement emprunté face à cette motion qui contient des questions très intéressantes avec toutefois des réponses problématiques. Cette motion soulève d’abord la question du renforcement de l’enseignement de la citoyenneté et de l’outillage des élèves pour cette discipline. Je partage cette préoccupation. En revanche, les demandes extrêmement claires et contraignantes figurant en conclusion de la motion sont pour le moins délicates et je vais les reprendre dans l’ordre.

La première demande est la plus intéressante, car je souscris à la volonté de renforcer l’enseignement civique, même si la notion de « neutralité » est superflue et lourde de sous-entendus, selon moi. Il serait ainsi judicieux, dans le cadre de débats concernant l’école, d’éviter de sous-entendre que l’école est orientée à gauche, comme cela a été le cas tout à l’heure, dans la réponse à l’interpellation Karlen que nous avons traitée. Cela contribuerait à des débats plus sereins. L’écrasante majorité des enseignants fait très bien son travail et, lorsqu’il y a des cas rares, mais avérés de propagande, il ne s’agit pas de l’apanage d’un bord politique. On peut citer, par exemple, le cas récent et médiatisé de Chloé Frammery, égérie de la mouvance conspirationniste, mise sur la touche par le Département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse genevois pour des cours orientés. Cette enseignante est proche de Dieudonné, d’Alain Soral et elle n’a rien d’un profil de gauchiste. Il n’en demeure pas moins que l’enseignement de la citoyenneté doit faire l’objet d’un débat, pour en revenir au cœur du sujet.

La deuxième demande est la plus problématique, puisqu’il est question – nous en avons parlé lors du débat sur l’économie familiale – d’augmenter la dotation horaire de la citoyenneté. En tant qu’enseignant de cette matière et député, je suis évidemment convaincu de la nécessité de renforcer cette discipline. Toutefois, augmenter la dotation horaire de la citoyenneté pose d’immenses problèmes et je vous invite à prendre quelques minutes pour les envisager. Si on augmente le nombre d’heures de citoyenneté, il faudra inévitablement diminuer la dotation horaire d’autres branches et quelles sont les disciplines qui verront leur nombre d’heures baisser ? Il s’agira d’un long et douloureux débat. Par ailleurs, si on procède de la sorte, on ouvre la boîte de Pandore. Chaque corporation de branche ou de discipline va exiger des heures supplémentaires et c’est la porte ouverte à un débat-fleuve et à une foire d’empoigne. On ne peut donc pas offrir à la citoyenneté un traitement de faveur. De plus, avec le Plan d’études romand (PER), la citoyenneté a fait son entrée dans les enseignements du cycle 2, c’est-à-dire de la 5e à la 8e année Harmos, durant lesquelles on aborde la question des droits de l’enfant et de l’organisation politique communale. Durant ces dix dernières années et avec le système Harmos, la citoyenneté a déjà vu sa dotation horaire augmenter sur l’ensemble de la scolarité, répondant ainsi à une demande de la motionnaire.

La troisième demande de la motion est inutile, puisque le PER est clair, neutre et allie déjà des théories, actualités concrètes et applications pratiques par la citoyenneté. Tout cela figure noir sur blanc dans le PER. Si nous souhaitons modifier le PER, nous ne sommes plus dans une compétence strictement cantonale, puisqu’il s’agit d’un Plan d’étude romand. Il pourrait toutefois être pertinent d’avoir du matériel didactique de citoyenneté « PER compatible » qui propose de vraies activités, ce que ne permet pas à l’heure actuelle le Mix & Remix utilisé en classe durant les cours de citoyenneté. Si c’est votre souhait, madame la motionnaire, je peux très bien y souscrire.

Enfin, la dernière demande est également superflue, la « Semaine de citoyenneté » introduite l’année passée et qui doit être pérennisée – je vous accorde que l’on peut se battre sur ce point et que rien n’est acquis – allant plus loin qu’une simple « Journée oser voter ». Je vous propose dès lors que l’on s’assure de la pérennité de la « Semaine de la citoyenneté » – vous bénéficierez de mon soutien sur ce point – plutôt que d’introduire une nouvelle journée obligatoire.

Pour toutes ces raisons, je vous encourage à rejeter cette motion. Les demandes y figurant sont en effet contraignantes, alors même que certaines mesures sont déjà mises en place. En outre, cela entrainerait un débat sans fin sur la grille horaire de l’école, notamment au secondaire I. Afin que nous travaillions en bonne intelligence même en plénum et pour faire un pas en direction de Mme Gross qui aborde malgré tout une question très intéressante via sa motion, je suis prêt à voter en faveur de son texte, pour autant qu’il soit transformé en postulat. C’est une main tendue dans un esprit de compromis d’une part, et pour obtenir un rapport sur la situation de l’enseignement de la citoyenneté dans le canton, d’autre part. Pour toutes ces raisons, je demande formellement une transformation en postulat.

M. Vincent Bonvin (VER) —

La motion a pour objectif de trouver des solutions pour motiver les jeunes à s’intéresser à la politique et aux débats, afin qu’ils prennent part aux votations. Je partage bien évidemment le but de cette motion, ce d’autant plus que j’ai enseigné la citoyenneté pendant de nombreuses années. Toutefois, cette motion telle que développée sous-entend des éléments qui ne me plaisent pas, notamment sur la neutralité du programme et la manière dont se déroulent les cours. Je profite d’ailleurs de cette occasion pour préciser que les cours allient déjà théorie et actualité concrète. De plus, en voulant augmenter la dotation horaire, cette motion est contre-productive. Or, cela me préoccupe beaucoup, car impacter la grille horaire a pour conséquence que d’autres branches seront affectées par ce changement et perdront des heures d’enseignement. De plus, si les cours de citoyenneté figurent dans l’horaire à partir de la 11e année Harmos, il faut savoir que cette thématique est déjà traitée de manière transversale dans les autres cours, comme le français, l’histoire ou encore la géographie.

Dans ce contexte, nous pouvons imaginer que le renforcement de la citoyenneté peut aussi passer par des modules transversaux et interdisciplinaires. Par exemple, dans les cours de français, avec l’art du débat, mais aussi dans les cours d’histoire, de géographie ou de culture générale, tout cela sans impacter la grille horaire, ce qui est très important. Par conséquent, je partage avec la motionnaire la volonté d’améliorer l’enseignement de la citoyenneté au secondaire I et postobligatoire, mais je m’oppose au caractère contraignant de la motion qui ne laisse pas de marge de manœuvre au département pour développer des solutions ciblées, pragmatiques et adaptées au contexte particulier des écoles. Je vous invite donc également à transformer cette motion en postulat.

M. Sébastien Cala (SOC) —

A titre personnel, je rejoins les questionnements et inquiétudes de la motionnaire quant à la faible participation aux votations et élections. Il me semble en effet essentiel de sensibiliser les jeunes aux enjeux liés à la citoyenneté. A travers cette motion, Mme Gross demande notamment la mise en place d’une « Journée oser voter » dans la scolarité obligatoire. Cette demande me semblait très pertinente. Toutefois, lors de la séance de commission et comme l’a rappelé Mme Gross, nous avons appris que, ce printemps, le département avait déjà organisé une semaine consacrée à la thématique de la citoyenneté dans les établissements de scolarité obligatoire et postobligatoire, avec un vote à blanc lié aux votations fédérales. J’encourage à renouveler cette démarche. Il semble de fait que la thématique soulevée par Mme Gross soit déjà prise en considération par le département. Pour le reste et au-delà des questions problématiques liées à la grille horaire et développées par notre collègue Maury, les conclusions de la motion sont très larges et touchent autant le cadre légal cantonal que fédéral, notamment pour tout ce qui concerne la formation duale. J’ai donc soutenu en commission la demande de transformation en postulat, forme qui permettra au Conseil d’Etat d’agir avec une plus grande flexibilité. Je vous encourage donc à soutenir la demande de transformation en postulat de notre collègue Maury.

Mme Valérie Induni (SOC) —

Ce projet visant à développer l’enseignement de la citoyenneté auprès des élèves est fort louable. Pour rappel, il y a un peu plus d’une année, en mai 2021 pour être plus précise, le Grand Conseil a refusé le droit de vote aux jeunes dès l’âge de 16 ans, et ce après un débat très nourri et à une voix près. Dans les discussions, beaucoup de choses ont été dites sur l’incapacité des jeunes à se déterminer. Nous avons entendu par exemple Marc-Olivier Buffat – je le cite, car il est encore présent parmi nous – dire que « vouloir le droit de vote, mais ne pas pouvoir voter pour un jeune de cet âge n’est pas de nature à motiver les jeunes à devenir des citoyens admis ». Quand je repense à ce débat et que j’entends que l’on souhaite désormais organiser une « Journée oser voter », je reste quelque peu dubitative. Nous envoyons aux jeunes des messages différents d’une fois à l’autre : une fois, on leur dit « vous êtes bien trop jeunes pour vous prononcer » et maintenant on leur dit « qu’il faut développer leur citoyenneté ». Les écoles en font déjà beaucoup, nous avons parlé tout à l’heure de la « Semaine de la citoyenneté ». Il faut donc laisser champ libre à ces formes de citoyenneté et, dans cette perspective, la forme de la motion est beaucoup trop rigide. Je vous invite donc tous à soutenir ce texte, mais sous la forme d’un postulat. Je le refuserai toutefois sous forme de motion.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Je déclare mes intérêts : je suis président du Syndicat des services publics (SSP), principal syndicat représentant le corps enseignant et j’enseigne moi-même la géographie et la citoyenneté à l’école secondaire. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt la proposition de Mme Gross. Cette dernière effectue toute une description d’exemples d’enseignement qui ne correspondraient manifestement pas à ce qui est souhaitable. Elle mentionne un enseignement essentiellement théorique – vous trouverez tous ces exemples dans sa motion. Dans ma fonction d’enseignant, je suis allé consulter le PER qui constitue une sorte de bible dans la pratique des différents cantons de Suisse romande.

A sa lecture, on se rend compte que le premier objectif de l’enseignement de la citoyenneté est « la construction de la pratique citoyenne par l’exercice du débat autour de faits d’actualité ; la prise en compte de l’altérité ; une attitude participative et responsable ; l’analyse de questions socialement vives ; la compréhension des autres sociétés ; la définition de l’état ; la présentation des différents niveaux du fédéralisme ; l’organisation de votations et de débats sur les sujets d’actualité ». En gros, ce qui figure dans l’introduction de la motion de Mme Gross figure également dans le PER et c’est intéressant de le relever. Ma question s’adresse dès lors au chef du département : ce dernier estime-t-il réellement que le PER n’est pas mis en œuvre, comme l’indique la motionnaire ; et, cas échéant, que compte-t-il faire ?

La troisième conclusion de la motion est peut-être plus problématique, car elle indique : « mettre sur pied un programme plus clair et neutre pour l’enseignement de la citoyenneté alliant théorie et actualités concrètes ». Je relève ici un procès d’intention envers les nombreuses et nombreux enseignants qui appliquent le PER, utilisent les moyens d’enseignement officiels et font leur travail correctement. Je refuserai par conséquent cette proposition.

Mme Florence Gross (PLR) —

J’ai bien entendu mes préopinants : une bonne problématique, mais de mauvaises solutions. J’ai également entendu les nombreux enseignants répondre à mes diverses interrogations. Je suis consciente que le fait de modifier la grille horaire est problématique. Toutefois, cette motion mentionnait d’autres éléments et, bien que nous le sachions lors de la rédaction de cette motion, ces derniers figurent tous dans le PER. Mais, comme vient de le rappeler M. Eggenberger, cela ne suffit pas. Ce n’est pas parce que des éléments figurent dans le PER qu’ils sont automatiquement appliqués, et cela me dérange beaucoup. La « Semaine de la citoyenneté » est encore jeune, il faut peut-être lui laisser sa chance. Malgré les critiques émises par Mme Induni, la « Journée oser voter » pourrait être l’occasion d’une rencontre entre jeunes et élus, dans une optique de les informer, de les former et surtout de les inciter à la participation politique.

J’ai entendu la gauche de l’hémicycle trouver problématique le fait que ce texte ait la forme d’une motion et soit donc contraignant, et ce même si le Conseil d’Etat a une marge de manœuvre face à un tel texte. J’ai toutefois pris note de l’engagement de la gauche de l’hémicycle d’accepter et de soutenir ce texte s’il était transformé en postulat. Je vais donc accepter cette transformation en espérant réellement, au vu de cette problématique que tous ont reconnue, avoir le soutien de l’ensemble du Parlement.

M. Frédéric Borloz (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Dans le cadre du Parlement vaudois, je vis ce débat pour la troisième fois. Lorsque j’étais député, nous avons discuté à deux reprises et largement de civisme et de citoyenneté. Nous partageons toutes et tous cette problématique, surtout lorsqu’on s’investit dans la vie publique et politique. Dans le fond, nous aimerions tous partager cet investissement et sensibiliser les jeunes à en faire de même. Le lien entre l’enseignement du civisme ou de la citoyenneté et l’augmentation ou la diminution du nombre de votants ne me semble pas aller de soi. Je vous laisse analyser cette situation.

La transformation en postulat nous donnera l’occasion de confirmer certains aspects, notamment que la « Semaine de la citoyenneté » est une bonne opportunité que l’on souhaite reconduire année après année. Nous essayerons de faire en sorte qu’elle se déroule en même temps dans tous les établissements vaudois. C’est un des seuls moyens qui nous permet de jouer un peu sur la grille horaire qui est relativement rigide. Si nous devions augmenter cette dernière par de nouvelles heures de citoyenneté, nous devrions diminuer d’autres heures. Or, qui ferait ce choix ? Vous devez nous laisser faire ces arbitrages, car cela peut entraîner des conséquences importantes sur le PER appliqué dans le canton de Vaud. Il s’agit d’un élément très important.

Nous pourrons vous confirmer les options déjà annoncées et faire quelques pesées d’intérêts sur des propositions faites. Il nous faudra aussi analyser la « Journée oser voter » et la mettre en balance avec la « Semaine de la citoyenneté ». Depuis une quinzaine d’années, tant l’école obligatoire que le postobligatoire connaissent des conseils de classe. C’est une pratique extraordinaire de citoyenneté et de mise en exercices pratiques, de réunion, de prises de position et de votations à l’échelle d’une classe. Personne n’en a parlé, mais c’est un élément très important et qui se déroule dans la plupart des classes du canton de Vaud. Pour conclure, tout ce qui renforce la citoyenneté des élèves va dans le bon sens. Le cadre n’est pas extensible et on doit faire avec ce que l’on a. Ce postulat ouvre de nouveaux horizons pour des réflexions et pistes visant à améliorer la situation et allant ainsi dans le sens de la motionnaire.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil accepte la transformation en postulat par 125 voix et 6 abstentions.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 112 voix contre 9 et 9 abstentions.

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