Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 6 juin 2023, point 36 de l'ordre du jour

Texte déposé

La Suisse se vante depuis des décennies de son système d’apprentissage et le donne même comme l’un des éléments importants de la réussite économique helvétique. Beaucoup de pays qui nous entourent seraient intéressés par ce système qui serait très envié. Mais si la formation duale est un succès que la Suisse se plaît à exporter, la voie apprentissage est moins appréciée par les jeunes en formation, particulièrement en Suisse romande.

Pour le canton de Vaud, c’est moins de 20% des jeunes en fin de scolarité obligatoire qui choisissent la voie de l’apprentissage.[1]

C’est donc un refrain répété par le monde politique – à gauche comme à droite – qui déplore que les élèves vaudois ne s’intéressent que trop peu à l’apprentissage et sont volontiers dirigés vers les études gymnasiales. Ce n’est pas pour rien que le Département a mis en place un plan d’action dévoilé en 2019 sur cette thématique[2].

Si les causes de ce désamour sont multiples (pression sociétale, pression parentale, enseignants peu enclins à envoyer les élèves en apprentissage, influence du système scolaire français, etc.), force est de constater qu’il y a une large marge de progression au sein des pratiques de l’Ecole Vaudoise afin d’encourager la voie professionnelle.

Les élèves en Voie Générale (VG) sont encouragés à faire des stages durant leur scolarité. Certains établissements rendent ces stages obligatoires, d’autres non. Tout dépend de la volonté de l’équipe de direction. Les élèves en Voie Prégymnasiale (VP) font, dans la pratique, très peu de stages et ceux-ci ne sont guère favorisés (ni par les enseignants, ni par les parents). Pour certains élèves de VP, il peut même être difficile d’affirmer son intérêt pour la voie apprentissage.

 

Or, sans la pratique obligatoire des stages - qui font découvrir le monde professionnel à des élèves qui en ignorent tout - il est logique que les élèves (et leurs parents) ne songent pas à envisager un apprentissage.

 

L’aspect obligatoire de ces stages nous parait être la seule manière de rendre cette démarche utile pour, in fine, promouvoir la filière d'apprentissage.

Enfin, cette pratique professionnalisante nous semble également utile aux élèves qui ont un projet d’étude très clair hors apprentissage. En effet, cela leur permettra de les confronter à autre choses qu’au monde estudiantin et pourra les encourager à élargir leur horizon.


Si cette idée semble aller dans le sens des intentions du nouveau chef de Département, elle se doit être clairement ancrée dans la loi.

 

Actuellement, l’article de loi (LEO) qui traite de cette question est le suivant :

 

 

Art. 76

Stages préprofessionnels

1 Dès la 10ème année, les élèves peuvent effectuer des stages en entreprise ou en écoles des métiers.

2 Ces stages sont organisés de préférence durant les vacances en prenant en compte les disponibilités des entreprises.

3 Le département fixe les objectifs et le cadre de ces activités.

 

 

 

Demande de modification de la loi sur l’enseignement obligatoire

Cette motion demande de modifier la loi sur l’enseignement obligatoire dans le but d’obliger les élèves de 10ème et/ou de 11ème année à effectuer au minimum un stage.

 


La loi devrait contenir les points suivants :


1. Le ou les stages sont rendus obligatoires pour tous les élèves de 10ème et/ou 11ème année.

2. Le ou les stages devraient, de manière générale, se dérouler durant les vacances.

3. Le ou les stages sont une condition nécessaire à l’obtention du certificat de fin d’études obligatoires (VP et VG).

4. La durée du ou des stages (5 jours au minimum, au total, par année) devrait également être fixée dans la loi.

5. Tous les enseignants du secondaire I bénéficient d’une information obligatoire sur l’accompagnement de leurs élèves dans cette démarche

6. En accord avec la HEPL[3] et/ou l’OCOSP[4], le Département organise une offre de formations continues pour les enseignantes et enseignants du Secondaire I

 

 

Conclusion : Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

 


Cosignatures :


 

 

 

[1] https://www.vd.ch/toutes-les-actualites/communiques-de-presse/detail/communique/preparer-la-formation-aux-defis-de-demain-1660636975/

[2] https://www.vd.ch/toutes-les-autorites/departements/departement-de-lenseignement-et-de-la-formation-professionnelle-def/rentree-scolaire-2020-2021/deuxieme-partie-les-quatre-chantiers-prioritaires-du-dfjc/la-valorisation-de-la-formation-professionnelle/

[3] Haute Ecole Pédagogique

[4]Office cantonal d'orientation scolaire et professionnelle

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Laurent BalsigerSOC
Josephine Byrne GarelliPLR
Florence Bettschart-NarbelPLR
Patrick SimoninPLR
Cloé PointetV'L
Sébastien HumbertV'L
Jacques-André HauryV'L
Jean-Marc UdriotPLR
Nicolas SuterPLR
Jerome De BenedictisV'L
Fabrice TannerUDC
Jean-Louis RadiceV'L
Graziella SchallerV'L
Pierre WahlenVER
Mathieu BalsigerPLR
Aurélien DemaurexV'L
Didier LohriVER
Blaise VionnetV'L
Oscar CherbuinV'L
Marc VuilleumierEP
John DesmeulesPLR
Circé Barbezat-FuchsV'L
Nathalie VezVER
Laurent MiévilleV'L
Vincent BonvinVER
Jean-François ChapuisatV'L
Pierre-André RomanensPLR

Documents

Rapport de majorité de la commission - 22_MOT_29 - Sylvie Pittet Blanchette

Rapport de minorité de la commission - 22_MOT_29 - David Vogel

22_MOT_29-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Sylvie Pittet Blanchette (SOC) — Rapporteur-trice de majorité

La Commission thématique de la formation s’est réunie le 9 décembre 2022 en présence de M. Frédéric Borloz, Chef du département de l’éducation et de la formation.

Le motionnaire est enseignant au Gymnase. Il a le sentiment qu’un certain nombre d’élèves fréquentent le Gymnase, car ils ne savent pas très bien ce qu’ils pourraient faire d’autre ; quand on les interpelle, on se rend compte qu’ils ne connaissent pas très bien les alternatives au Gymnase. Le but de cette motion est de forcer les élèves à réfléchir à ce qu’ils pourraient faire d’autre que d’aller au Gymnase, y compris dans les domaines nécessitant de faire des études. Cela éviterait d’avoir des élèves qui ne savent pas vraiment pourquoi ils sont là.

Le Conseil d’Etat partage la préoccupation du motionnaire, raison pour laquelle la volonté de valoriser la formation professionnelle a fait l’objet d’une large communication. Durant les deux dernières années de l’école obligatoire, il est important d’amener les élèves à s’intéresser à des métiers, afin de leur permettre de forger un projet professionnel, via la voie académique ou celle de la formation professionnelle, dans un contexte où les passerelles existent tout au long de la formation. Toutefois, la volonté de rendre les stages obligatoires est problématique : d’une part, il n’y a rien de pire qu’un élève qui ne veut pas se rendre à un stage ; d’autre part, l’effet secondaire de cette mesure est d’obliger les entreprises à accueillir des stagiaires ; or, il n’y a rien de pire que forcer un entrepreneur qui ne le souhaite pas à prendre un stagiaire. Le Conseil d’Etat est donc opposé à une telle obligation. N’oublions pas qu’il n’est pas simple de trouver des stages en entreprise correspondant au souhait de l’élève.

Certains commissaires estiment que la motion est difficilement réalisable, dans un contexte où les écoles doivent déjà se battre pour trouver assez de places de stage dans le cadre des formations qu’elles dispensent. Si l’on veut réellement valoriser la filière de l’apprentissage chez les élèves en voie prégymnasiale (VP), il ne faut pas seulement leur dire de faire un stage de préférence pendant les vacances, mais prévoir une ou deux semaines pendant l’année scolaire entièrement dévolue aux stages, aux visites d’entreprises et à l’approche du monde professionnel, sous une forme ou une autre. Mais pour les VP, il n’existe pas de temps dévolu aux stages, dans l’année, et tout est fait pour les pousser à poursuivre leurs études au Gymnase. Les élèves n’ayant ni le goût ni les capacités pour les études n’ont donc pas accès au même soutien que les élèves en voie générale (VG). Pour une question d’équité, cette motion va dans le bon sens, mais l’obligation est excessive.

Par 13 voix contre 1 et 1 abstention, la commission recommande au Grand Conseil de classer la motion.

M. David Vogel (V'L) — Rapporteur-trice de minorité

En préambule, je vous informe que je souhaite transformer cette motion en postulat. A la suite de ce qui vient d’être dit, je précise que ce n’est pas mon sentiment que certains élèves sont au Gymnase sans réelle motivation, mais c’est un fait.

Ma proposition tient en trois points : 1 la réalité des chiffres ; 2 les projections ; 3 les actions. Concernant la réalité des chiffres, à la fin des années 1970, 50 % des jeunes qui finissaient l’école obligatoire se tournaient vers une filière professionnelle et actuellement, ce taux est de 20 %. A la fin des années 1970, 27 % des élèves suivaient la voie prégymnasiale et actuellement, ils sont 50 %. Cela représente une double perte : de temps pour les élèves et d’argent pour l’Etat. En effet, les élèves qui sont au Gymnase sans réelle motivation et qui échouent pour cette raison coûtent de l’argent : les professeurs coûtent cher. Cet argent est donc mal investi, car on aurait pu les orienter plus tôt dans la bonne filière s’ils avaient eu l’occasion de faire un stage.

Deuxièmement, concernant les projections, deux lames de fond vont arriver, dont on n’a pas pris la mesure : il y a premièrement la transition énergétique, car il faudra des personnes pour l’accompagner ; deuxièmement, il y a le développement de l’intelligence artificielle. Concernant la transition énergétique, il y a déjà une pénurie de main-d’œuvre dans une série de métiers avec CFC – cela vient des statistiques, je ne l’invente pas – et ces formations nécessitent des CFC. Pour réussir la transition énergétique, il faudra relocaliser l’industrie, redéployer l’agriculture, développer des infrastructures énergétiques décentralisées et envisager la baisse de l’économie de service en raison de l’intelligence artificielle qui va en prendre une part importante. En conclusion, un changement majeur est nécessaire. Je ne remets pas en cause la volonté d’agir du département. Des mesures sont instaurées, mais elles restent insuffisantes. D’après le Centre patronal, il manque des chauffagistes, des dessinateurs, des contremaîtres et des ferblantiers. Or, nous n’allons pas dans la bonne direction : dans le canton de Vaud, alors que 14'477 personnes sont formées au Gymnase, 72 sont en formation d’installateur en chauffage, 42 de ferblantier, 98 de maçon et 200 d’agriculteur. Il faut changer de braquet !

Troisièmement, concernant l’action face à des défis, il faut avoir le courage d’agir. Je relève deux remarques qui figurent dans le rapport de majorité : « rien de pire » qu’obliger un élève qui ne veut pas aller en stage, ou qu’obliger un entrepreneur qui ne veut pas prendre de stagiaire. Mais il y a une troisième situation sans « rien de pire » : ne rien changer, en pensant qu’un changement s’opèrera tout seul. Certes, il est complexe pour les entreprises d’accueillir des stagiaires, surtout des élèves qui ne sont pas motivés. Toutefois, dans le cadre scolaire, si l’on décidait d’ôter tous les éléments qui dérangent les élèves parce qu’ils n’en ont pas envie, j’aurais une liste, relativement longue, de cours à supprimer ! Tous les élèves qui ont lu Madame Bovary – 450 pages sans beaucoup d’images – y ont été obligés par leur professeur. Une partie des élèves n’étaient pas motivés, mais après y avoir été obligés, ils ont estimé que le livre n’était pas mal. Comme disait l’autre : foncer sur un malentendu, cela peut fonctionner. En l’occurrence, obliger les élèves à faire des stages – soit faire quelque chose dont ils n’ont pas envie – peut les faire apprécier quelque chose. Si vous y voyez un problème, j’y vois plutôt une opportunité.

Enfin, sur le plan économique, former des jeunes dans les bons métiers du futur, c’est étendre le marché du travail, parce qu’il faudra payer davantage les jeunes qu’on n’aura pas et cela participera à l’inflation. Selon les règles du marché, s’il n’y a pas assez de personnes, il faut augmenter soit les coûts, soit les retards qui participent à une hausse des prix. Selon certains, il est horrible d’obliger les jeunes à faire des stages. Or, je vous mets au défi de faire lire Madame Bovary au moyen de mesures incitatives telles que celles qu’a instaurées le département ; elles sont insuffisantes et vous n’y arriverez jamais ! Pour les autres points, j’entre en matière sur une négociation sur la longueur des stages, par exemple. Pour cette raison, je souhaite transformer ma motion en postulat, et je compte sur la sagesse du Conseil d’Etat pour une amélioration de la situation. Ne me dites pas que ce n’est pas possible ! La loi sur les taxes automobiles est partie de la demande de baisser les taxes, et finalement, on a obtenu autre chose. Par conséquent, je vous fais confiance pour transformer les choses. En l’occurrence, ma proposition consiste à effectuer un test, que deux collèges essaient et l’on observera ce que cela donne. Si cela fonctionne, on continue et pérennise l’idée et sinon, on oublie. Avec tout mon respect pour tout le monde ici, ni vous ni moi ne savons si c’est une bonne idée, mais j’aimerais essayer. Pour refuser les aveux d’échec, je vous demande et vous encourage à accepter ma motion transformée en postulat.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion sur la transformation de la motion en postulat n’est pas utilisée.

Le Grand Conseil accepte la transformation en postulat par 90 voix contre 24 et 12 abstentions.

La discussion est ouverte.

M. Yannick Maury (VER) —

Je déclare mes intérêts, en tant qu’enseignant. Je me rallie à la position du Conseil d’Etat, qui figure dans le rapport. Un élément n’a pas été évoqué : dans certaines régions, il y aurait une saturation des places de stages. Même avec toute la bonne volonté du monde, de la part du corps enseignant, des parents et des élèves, il est déjà difficile de trouver des places de stage pour tout le monde. Alors si c’est rendu obligatoire, je vous laisse imaginer le désordre ! Faire de la réussite d’un stage une condition à l’obtention du certificat m’effraie. De très bons élèves échoueraient parce qu’ils n’auraient pas trouvé de place de stage, pour différentes raisons, et cela génèrerait des échecs en cascade en fin de scolarité. Je suis donc surpris.

Vous avez cité l’exemple de la lecture de Mme Bovary, mais à l’inverse, faire lire des classiques à la pelle à des élèves qui n’en ont pas envie leur ôte l’envie de lire ; c’est un fait, monsieur Vogel, et nous en avons parlé avant. Je comprends vos bonnes intentions, mais pour deux ou trois élèves qui liront d’autres classiques avec grand plaisir, dix-huit autres ne liront plus pendant des années ! C’est ce qui risque de se passer si l’on oblige les élèves à faire des stages : ils se détourneront du monde professionnel. Ce n’est donc pas une bonne piste.

Enfin, comparer la voie VP et la voie générale VG dans l’école vaudoise n’est pas pertinent. En VG, la grille horaire est organisée de telle façon qu’il y a des périodes d’approche du monde professionnel, ce qui n’est pas le cas en VP. Alors, avant de changer les règles du jeu, il faudrait réformer la VP, ce à quoi je ne suis pas favorable. Il faudrait faire les choses dans l’ordre. C’est drôle de sortir du chapeau ce postulat ciblé sur les métiers de la transition, aujourd’hui, pour essayer de capter des suffrages verts. Mais les mots « métiers de la transition », « environnement », « climat » ne figurent pas dans le texte. On aurait donc beau accepter le postulat, qu’on n’atteindrait pas la cible que souhaite M. Vogel. Je vous encourage donc à retirer votre postulat et à revenir avec un texte mieux ciblé, que je pourrais peut-être soutenir. Dans le cas contraire, je vous encourage à le balayer.

M. Marc Morandi (PLR) —

De manière résumée, si l’ancienne motion Vogel transformée en postulat part d’une bonne intention, elle reste hors cible. Forcer les entreprises à accueillir des stagiaires ne résoudra pas les problèmes d’orientation et d’intérêt des jeunes pour la formation. Imposer des stages en entreprise à des jeunes qui sont bien orientés et possèdent les qualités pour un parcours professionnel ou académique est un non-sens. Le chef de département a d’ailleurs indiqué en séance de commission qu’il est prévu de renforcer les mesures incitatives.

Mme Carine Carvalho (SOC) —

Le groupe socialiste soutiendra le rapport de majorité. J’adhère aux propos de M. Maury. Par ailleurs, je regrette que la transformation en postulat n’ait pas été demandée lors de la séance de commission, ce qui aurait permis d’orienter le texte vers des éléments plus cohérents avec les efforts de renforcement de l’orientation professionnelle. La discussion en commission aurait été intéressante. Je ne peux qu’inviter notre collègue Vogel à proposer un autre texte, moins contraignant et moins détaillé sur ce qu’il propose. Des stages pendant les vacances qui conditionnent la réussite nous paraissent péjorer la réussite des élèves. Toutefois on pourrait imaginer des manières de renforcer l’orientation professionnelle.

M. Nicolas Bolay (UDC) —

Je faisais partie de la commission et me suis abstenu lors du vote, car le caractère contraignant de la motion me gênait. La promotion des stages est une bonne idée, raison pour laquelle transformer la motion en postulat me semble bénéfique. Le Conseil d’Etat nous l’a annoncé plus d’une fois qu’il va dans ce sens. Soutenir ce postulat montrerait le soutien du Grand Conseil et nous permettrait de recevoir un rapport sur la pratique des stages.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

En préambule, je rappelle mes intérêts : je suis président du syndicat SSP Vaud, un des principaux syndicats représentant le corps enseignant dans le canton de Vaud, et je suis également enseignant.

Monsieur Vogel, vous pouvez traiter cette question avec beaucoup d’humour, mais elle n’en reste pas moins importante et sérieuse. Ce n’est pas avec quelques pirouettes que l’on contournera les problèmes que pose la motion transformée en postulat que vous nous soumettez.

Contrairement à vous qui travaillez avec les élèves du Gymnase, j’ai le plaisir de travailler avec des élèves de toutes les voies, à l’école obligatoire, et de faire partie d’un établissement qui a testé les stages qu’on appelle « obligatoires » − entre guillemets, car il n’y a pas de base légale. Tous les élèves ont été encouragés à faire un stage d’une semaine, mais nous nous sommes vite confrontés au mur de la réalité, à savoir la difficulté de placer plusieurs centaines d’élèves en stage dans des entreprises au même moment.

Cette après-midi, nous avons débattu du rapport sur le postulat Croci-Torti, qui présentait de manière large les difficultés lors de l’orientation des jeunes, avec une approche intéressante et complète. Ce rapport mentionne notamment que le problème actuel de la formation obligatoire n’est pas tant le nombre d’élèves dans les formations générales – 47 % selon le dernier rapport de Numerus – ni le nombre de personnes qui vont en apprentissage directement, que le nombre très important de jeunes – probablement record en Suisse – qui se retrouvent dans des filières de transition non certifiantes à la fin de l’école obligatoire. Les collectivités publiques doivent donc faire une chose, actuellement : faire que les 13 % de jeunes en filière non certifiante à la fin de l’école obligatoire se retrouvent dans des filières certifiantes, probablement professionnelles.

Ce postulat ne parle pas de la promotion des stages, mais de stages obligatoires ; les présupposés qui se trouvent derrière cela nous posent problème. Tout d’abord, on ignore le pourcentage de jeunes qui font des stages, lors de l’école obligatoire. Or, j’ai l’impression que cela représente une majorité importante des élèves. Partir du principe que ce pourcentage est trop faible sans le connaître est problématique. Vous partez aussi du principe que des élèves que vous connaissez, qui sont démotivés dans les formations gymnasiales, seraient forcément motivés dans les formations d’apprentissage. Je ne sais pas quel a priori vous permet de tirer cette conclusion.

Par ailleurs, votre motion transformée en postulat ne précise pas que faire des jeunes qui ne feraient pas de stage. Les inscrirait-on d’office à une 12e année certificative pour compléter leur scolarité et obtenir un diplôme ? Si c’est obligatoire, il doit y avoir une sanction ; cela pose aussi un problème. Et finalement, ce postulat fait complètement abstraction de ce qui se fait déjà dans les établissements et du fait que les stages y sont très largement promus. Il y a deux ou trois ans, les limitations concernant le nombre de jours de stage ont été supprimées et désormais, il est plus facile d’organiser des stages. Je ne crois donc pas que ce soit une priorité, pour l’école vaudoise, que de mettre en œuvre votre proposition. Je vous invite par conséquent à suivre le rapport de majorité.

M. David Vogel (V'L) —

Il faut relire mon texte. Je ne propose pas de faire les stages en même temps, mais pendant les vacances.

A la suite des propos de M. Maury et concernant sa peur du couperet, la tyrannie de l’obligation, etc., j’ai proposé la transformation en postulat pour laisser au Conseil d’Etat, dans sa grande sagesse, le soin de revenir dessus s’il pense qu’il y a de meilleures choses à faire. Sinon, je tiens à dire à M. Maury que je suis très triste qu’il doute de ma sincérité concernant la transition énergétique.

M. Frédéric Borloz (C-DEF) — Conseiller-ère d’Etat

Il s’agirait d’une intrusion gigantesque dans le monde de l’économie. Cela nécessiterait des années voire des décennies de discussions pour se mettre d’accord sur un fonctionnement ; qui rémunérera les stages et comment cela se passera-t-il ? Même sous forme de postulat, il reste les mots « obligatoires », « vacances », « conditions nécessaires », « cinq jours minimum ». Il faut faire exactement le contraire, à savoir ce qu’on est en train de mettre en place, en essayant d’avoir des référents dans les établissements qui créent des réseaux avec des entreprises et des stages souvent de courte durée. En effet, selon les métiers, on voit la difficulté d’occuper un ou une jeune pendant cinq jours. Il faut aussi inciter les entreprises à venir à l’école ; c’est ce que nous faisons, mais auparavant, ce n’était pas dans les plans d’action. On ouvre l’école. Une entreprise qui vient faire part de son expérience et propose plusieurs métiers différents peut concerner plusieurs élèves. On ne pourra pas tout faire, mais en tout cas, il faut faire l’inverse de ce qui est demandé dans le postulat. Je vous invite donc à renoncer à cette proposition et à ne pas créer une usine à gaz, parce qu’il faudrait m’expliquer comment gérer tous ces stages, ces obligations, le plan d’étude, etc. : on se trouve devant une impossibilité pratique. Essayer pour voir ce que cela va donner demanderait une telle énergie qu’il ne sert à rien de perdre plus de temps là-dessus.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil refuse la prise en considération du postulat par 94 voix contre 14 et 10 abstentions.

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