Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 12 septembre 2023, point 6 de l'ordre du jour

Texte déposé

 

 

Transport de personnes et émissions de CO2 : le Conseil d’Etat accepte-il que des entreprises vaudoises soient discriminées ?

 

 

De nombreuses entreprises actives dans le transport professionnel de personnes sont aujourd’hui menacées dans leur existence en raison d’une application stricte par la Police cantonale du commerce d’une disposition dont la conformité fait débat. Plusieurs des entreprises concernées se sont récemment adressées par écrit, par le biais de leur conseil, au chef de la Police cantonale du commerce, afin de tirer la sonnette d’alarme.

 

En effet, l’art. 20 al. 2 du Règlement sur le transport de personnes à titre professionnel (RTTP) prévoit que les titulaires d’autorisations d’entreprises de transport de personnes à titre professionnel doivent démontrer dès le 1er janvier 2023 que tous leurs véhicules respectent les conditions fixées par le Conseil fédéral dans l’Ordonnance sur la réduction des émissions de CO2 (Ordonnance sur le CO2). Or, quand bien même une telle entreprise bénéficie déjà d’une telle autorisation, la Police cantonale du commerce limite les autorisations/macarons des véhicules au 31 décembre 2023 si d’aventures ceux-ci dépassent les « valeurs cibles » de 118 g/km d’émission de CO2 recommandées par l’Ordonnance sur le CO2.

 

Pour rappel, cette disposition du RTTP a été introduite sur la base de la Loi fédérale sur la réduction des émissions de CO2 (Loi sur le CO2). Pourtant, les valeurs cibles de cette dernière s’appliquent exclusivement aux importateurs et constructeurs de véhicules. A aucun moment les détenteurs de véhicules quels qu’ils soient, à l’instar des entreprises de transport professionnel de personnes, ne sont cités par la Loi sur le CO2 et son ordonnance, puisqu’ils ne sont pas visés par celles-ci.De plus, le respect de ces valeurs est tout simplement impossible au vu de l’état de la technologie actuelle pour certains types de véhicules, comme les vans ou mini bus. Aucun véhicule de ce type existant sur le marché ne permet aujourd’hui de respecter ces limites d’émission tout en disposant d’une autonomie suffisante pour une activité sur toute la Suisse.

 

A suivre la logique de l’Etat, les entreprises concernées devraient remplacer immédiatement l’entier de leur parc actuel par des véhicules électriques. Or, cette obligation, et les limites d’émission y relatives, s’appliqueraient uniquement aux véhicules des entreprises de transport de personnes, lesquels représentent moins de 0,1% du parc automobile suisse. Il s’agit donc d’une inégalité de traitement crasse. Au vu des coûts engendrés et de ce qui précède, il ne fait aucun doute que les décisions rendues par la Police cantonale du commerce à l’égard de ces entreprises de transport sont disproportionnées et qu’elles constituent une mise en danger de leur existence, particulièrement pour les entreprises disposant d’un parc important de véhicules.

 

Il convient également de noter que le canton de Genève dispose d’une disposition équivalente, mais que celle-ci prévoit une limite d’émission à partir du 1er janvier 2027 seulement. De plus, l’introduction de cet article a été attaquée devant les autorités judiciaires genevoises, un recours étant actuellement pendant devant le Tribunal fédéral. Pour cette raison, le Conseil d’Etat genevois a décidé de suspendre l’application de cette disposition. Quant aux autres cantons romands, aucun ne dispose d’une législation équivalente. Il en ressort une grave distorsion de concurrence au détriment des entreprises vaudoises.

 

Dans le cadre du recours contre la disposition genevoise, le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) a par ailleurs précisé dans des déterminations, concernant les exigences applicables au transport de personnes, que « les cantons ne peuvent imposer aucune autre condition relative aux véhicules pour ce qui est de leur admission à la circulation ». Outre les griefs quant à la liberté économique et à l’égalité de traitement, il est donc incertain que les dispositions cantonales, qu’elles soient genevoises ou vaudoises, soient conformes au droit fédéral en l’absence de compétences cantonales.

 

Plusieurs des décisions concernées de la Police cantonale du commerce font aujourd’hui l’objet d’un recours devant la Cour de droit public et administratif du Tribunal cantonal. Cependant, au vu de l’urgence pour la survie de ces entreprises, une solution pragmatique doit être trouvée immédiatement pour adoucir et/ou étaler dans le temps l’impact financier de l’application de l’art. 20 al. 2 RTTPpour les entreprises vaudoises de transport professionnel de personnes.

 

Au vu de ce qui précède, nous souhaitons poser les questions suivantes au Conseil d’Etat :

  • Le Conseil d’Etat est-il au courant de cette situation ?
  • Comment le Conseil d’Etat se détermine-t-il par rapport à l’impact économique de l’art. 20 al. 2 RTTP sur les entreprises concernées et la mise en danger de leur existence?
  • Comment le Conseil d’Etat se détermine-t-il par rapport aux griefs invoqués par les entreprises concernées, à savoir que la disposition susmentionnée violerait la primauté du droit fédéral (art. 49 Cst), la liberté économique (art. 27 Cst) et l’égalité de traitement (art. 8 Cst)?
  • En complément de la question précédente, comment le Conseil d’Etat se détermine-t-il par rapport aux déterminations du DETEC du 31 mai 2023 adressées au Tribunal fédéral dans le cadre de la procédure de recours contre la disposition genevoise, dans lesquelles le DETEC estime concernant le transport professionnel de personnes que « les cantons ne peuvent imposer aucune autre condition relative aux véhicules pour ce qui est de leur admission à la circulation » ?
  • Le Conseil d’Etat genevois ayant suspendu l’application de la disposition genevoise jusqu’à droit connu, le Conseil d’Etat ne juge-t-il pas nécessaire de suspendre lui aussi l’application de l’art. 20 al. 2 RTTP mis en cause dans l’attente d’une décision de justice définitive et exécutoire ?
  • Indépendamment de la conformité de l’art. 20 al. 2 RTTP au droit fédéral, le Conseil d’Etat ne juge-t-il pas nécessaire que des mesures d’aménagement soient proposées par l’Etat aux entreprises les plus impactées, par exemple en convenant avec elles d’un plan de remplacement des véhicules étalé dans le temps ?
  • Plus largement, quelles mesures le Conseil d’Etat entend-il prendre pour éviter la discrimination et une éventuelle faillite de ces entreprises vaudoises ?

 

 

 

Conclusion

Souhaite développer

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Josephine Byrne GarelliPLR
Denis DumartherayUDC
Pierre-Alain FavrodUDC
Sylvain FreymondUDC
Oscar CherbuinV'L
Nicolas BolayUDC
Cédric WeissertUDC
Gérard MojonPLR
Stéphane JordanUDC
Yvan PahudUDC
Nicola Di GiulioUDC
Jean-Daniel CarrardPLR
John DesmeulesPLR
Romain BelottiUDC
Thierry SchneiterPLR
Pierre-André PernoudUDC
Fabrice TannerUDC
Jean-François ThuillardUDC

Document

23_INT_143-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Philippe Jobin (UDC) —

J’ai déposé cette interpellation parce que, dans notre canton, plusieurs entreprises professionnelles de transport de personnes sont confrontées à une menace imminente en raison d’une disposition stricte faisant référence à l’Ordonnance fédérale sur la réduction des émissions de CO2. Cette règle exige que les entreprises prouvent la conformité de leurs véhicules aux normes, à partir du 1er janvier 2023. Le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) a précisé : « Aucune autre condition relative aux véhicules ne peut être imposée par les cantons pour leur admission à la circulation. » Cependant, les dispositions cantonales, qu’elles soient genevoises ou vaudoises, pourraient ne pas être conformes au droit fédéral, en l’absence de compétences cantonales.

Bien que certaines décisions de la Police cantonale du commerce fassent l’objet de recours devant la Cour de droit public et administratif du Tribunal cantonal, une solution pragmatique doit être trouvée d’urgence pour atténuer l’impact financier de l’application de l’article 20, alinéa 2, du Règlement sur le transport de personnes à titre professionnel (RTTP) pour les entreprises vaudoises de transports professionnels. Je prie le Conseil d’Etat de répondre le plus rapidement possible aux différentes questions posées afin de dégager une piste viable pour cette profession.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’interpellation est renvoyée au Conseil d’Etat qui y répondra dans un délai de trois mois.

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