Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 8 juin 2021, point 14 de l'ordre du jour

Texte déposé

Une étude de l’EPFL parue il y a quelques jours seulement (co-commanditée et co-financée par le Canton [DGMR]) a mis en lumière l’évolution extrêmement marquée des habitudes de mobilité dans notre canton, qui s’inscrit d’ailleurs en droite ligne des développements constatés à l’échelle suisse et internationale : les vaudoises et les vaudois sont de moins en moins dépendants d’une forme de mobilité (par hypothèse le véhicule individuel motorisé), mais privilégient toujours plus la « multimodalité », c’est-à-dire le fait d’utiliser plusieurs modes de transport complémentaires lors d’un seul et même trajet[1]. A titre d’exemple, pour aller à un rendez-vous au siège du CIO à Lausanne, une personne domiciliée à Suchy pourra rejoindre la gare de Chavornay en vélo ou en voiture, y prendre le train et emprunter un vélo en libre-service ou une voiture en partage disponible à la gare de Lausanne. Ceci en gagnant temps et confort, et en réduisant sa sollicitation des infrastructures routières, par rapport à un trajet utilisant exclusivement la voiture.

 

L’EPFL le relève : l’utilisation de la voiture diminue alors que celle des autres moyens de transport (marche comprise) augmente sensiblement. Cette tendance est encore plus nette chez les moins de 35 ans, qui sont de moins en moins nombreux à disposer d’une voiture en tout temps et choisir ce mode de transport comme unique. Plus largement, l’utilisation des transports publics elle-même n’est pas non plus exclusive, mais se voit souvent complétée de façon essentielle par la marche ou le vélo. Dans l’ensemble, 40% des vaudoises et vaudois utilisent régulièrement plusieurs modes de transports et un tiers le font de manière occasionnelle[2].  

 

Cette évolution favorable à toutes et tous a été rendue possible notamment par le très bon développement par le Canton de l’offre en transports publics, ainsi que par les mesures prises dernièrement pour favoriser la mobilité douce – deux points que les soussigné.es relèvent avec satisfaction. Il s’agit maintenant de s’assurer du développement des conditions favorables à accroître la multimodalité dans ce contexte – et ainsi renforcer encore le report modal en faveur d’autres formes de mobilité que la voiture individuelle motorisée. Un point central pour les vaudoises et vaudois résidant ou se rendant dans un lieu plus difficilement connecté aux transports publics – à l’image de l’exemple donné en introduction.

 

On le sait, la multimodalité impose d’agir sur plusieurs plans en même temps – une action unique sur un point particulier n’étant pas suffisante. Il faut aussi se concentrer sur des domaines pour lesquels le Canton dispose d’une compétence claire. Pour ce faire, il est notamment essentiel d’assurer :

  • une desserte en transports publics forte et touchant des « pôles » répartis sur l’ensemble du territoire ;
  • des aménagements routiers sécurisés permettant de favoriser le vélo et le vélo électrique pour rejoindre ces pôles ;
  • des infrastructures permettant d’accueillir, dans ces pôles, les véhicules utilisés pour les rejoindre, notamment par des « P+R » (pour les véhicules motorisés) et des vélostations de grande capacité (pour les vélos et vélos électrique) ;
  • le développement d’une offre forte et granulaire de partages de véhicules, notamment par un réseau de vélos en libre-service et de voiture en partage (car sharing).

 

Les deux derniers éléments sont particulièrement importants à l’heure où les CFF – et d’autres entreprises de transport public – cherchent à limiter le nombre de vélos et vélos électriques embarqués[3]. Une évolution que l’on doit déplorer, mais avec laquelle il faut savoir travailler.

 

Afin de favoriser l’évolution constatée très récemment par l’EPFL, et qui permet de répartir de la façon la plus efficiente la charge sur nos infrastructures de mobilité (routes, rail, etc.), il est impératif que le Canton mette ces développements au centre de sa stratégie. Ceci notamment dans le cadre de sa très attendue stratégie vélo 2030. Et à la suite du financement cantonal déjà adopté par le Grand conseil en 2019 pour les interfaces multimodale de transport public (https://www.vd.ch/fileadmin/user_upload/accueil/fichiers_pdf/EMPD-EMPL/EMPD_123_%C3%A9tudes_et_r%C3%A9alisation_des_interfaces_de_transport_de_voyageurs.pdf).

 

En conséquence, le présent postulat demande au Conseil d’Etat de tirer un bilan des mesures prises en matière de multimodalité dans sa stratégie générale de mobilité et d’intégrer les critères nécessaires pour la favoriser dans les stratégies sectorielles mises en place.

 

***

[1]Dans l’ensemble : Etude du Laboratoire de sociologie urbaine del’EPFL, résumée ici https://actu.epfl.ch/news/mobilite-douce-et-transports-publics-seduisent-les/. Egalement https://www.24heures.ch/en-10-ans-les-vaudois-sont-devenus-multimodaux-131892639253.

[2]Un constat déjà tiré en mars 2020 par le même laboratoire de l’EPFL : https://actu.epfl.ch/news/une-mobilite-multimodale/.

[3]Voir à titre d’exemple la très récente décision des CFF concernant la réservation obligatoire appliquée aux cycles, dès mars 2021 (https://www.nzz.ch/schweiz/die-sbb-fuehren-eine-reservationspflicht-fuer-den-veloverlad-im-fernverkehr-ein-ld.1587750).

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Didier LohriVER
Rebecca JolyVER
Raphaël MahaimVER
Blaise VionnetV'L
Felix StürnerVER
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Valérie InduniSOC
Muriel ThalmannSOC
Anne Baehler Bech
Graziella SchallerV'L
Andreas WüthrichV'L
Sylvie PodioVER
Cloé PointetV'L
Alice GenoudVER
Nathalie JaccardVER
Jean-Louis RadiceV'L
Julien EggenbergerSOC
Stéphane BaletSOC
Jérôme ChristenLIBRE
Léonard Studer
Vincent KellerEP
Cédric EchenardSOC
Cendrine CachemailleSOC
Taraneh AminianEP
Hadrien BuclinEP

Documents

Rapport de majorité de la commission (20_POS_18) - Jean-Francois Thuillard

Rapport de minorité de la commission (20_POS_18) - Cloe Pointet

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Jean-François Thuillard (UDC) — Rapporteur-trice de majorité

Le postulant traite d'un aspect spécifique de la mobilité, celui de la multimodalité qu'il souhaite promouvoir. Il mentionne une étude de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) parue fin 2020 et qui a mis en lumière l'évolution extrêmement marquée des habitudes de mobilité de notre canton. Les Vaudoises et les Vaudois sont de moins en moins dépendants d'une forme de mobilité, par hypothèse de véhicules individuels motorisés, et privilégient toujours plus la multimodalité, c'est-à-dire le fait d'utiliser plusieurs modes de transport complémentaires lors d'un seul et même trajet. Le postulant cite quelques exemples de multimodalité concernant certains trajets dans notre canton. Le présent postulat demande au Conseil d'Etat de tirer un bilan des mesures prises en matière de multimodalité dans sa stratégie générale de mobilité et d'intégrer les critères nécessaires pour la favoriser dans les stratégies sectorielles mises en place.

Ce postulat va dans le sens de la politique générale menée par le Département des infrastructures et des ressources humaines depuis plusieurs années en matière de multimodalité. L'approche vise à développer le bon mode au bon endroit et de sortir d'une approche par mode de transport. Le département est actuellement en train de réviser ses stratégies et notamment la politique des interfaces avec les pôles de multimodalité. Un décret a été adopté pour soutenir les communes qui sont en charge de la réalisation des interfaces de transport avec les entreprises de transport public. Des pôles régionaux ont été identifiés et de nombreux investissements ont été réalisés : des trains, des axes forts de transports publics tels que le RER, le LEB, les trains régionaux, etc.

Lors de la discussion générale, la majorité de la commission salue les efforts du Conseil d'Etat pour le développement des transports publics. Ce postulat est large. Cependant, le rapport demandé sera volumineux, tant les sujets abordés sont nombreux. Les concepts de mobilité envisagés vont certainement se réaliser à terme mais ils coûteront cher aux communes. L'Etat s'est beaucoup investi pour que les transports publics puissent atteindre une cadence au quart d'heure et tout est fait dans ce canton pour arriver aux objectifs du postulat. Pendant que les collaborateurs de la Direction générale de la mobilité et des routes (DGMR) travaillent à répondre à ce postulat, ils ne peuvent consacrer du temps à l'opérationnel, sur le terrain. Les stratégies mises en place par le Conseil d'Etat visent un objectif de transfert modal, de fluidité et de mobilité durable. Il s'agit de développer le bon mode au bon endroit ou encore en fonction des divers besoins. C'est pour les raisons mentionnées que la majorité de la commission vous recommande, par 8 voix contre 7, de ne pas prendre en considération ce postulat.

Mme Cloé Pointet (V'L) — Rapporteur-trice de minorité 1

Notre canton est très diversifié au niveau de la mobilité. Il est plus facile de se déplacer en transport public lorsqu'on habite Lausanne que le Gros-de-Vaud. Lorsqu'on se déplace d'un point A à un point B, certaines parties du trajet peuvent être difficilement faites autrement qu'en voiture, alors que d'autres parties sont pénibles avec ce même moyen de transport, comme les entrées des agglomérations souvent engorgées. La multimodalité, si elle est bien pensée, est une solution à ce problème. Toutefois, elle doit être bien pensée. Des exemples d'infrastructures multimodales qui manquent leur cible existent. Par exemple, des parkings d'échange vides, car mal placés ou mal desservis jusqu'aux gares principales. Pour que de telles infrastructures soient efficaces et utiles aux utilisateurs et aux pendulaires, il faut sortir d'une approche secteur par secteur : on augmente les transports publics ici, on construit un parking là, cette gare n'a pas de parking et n'est donc pas utilisée et vice-versa. Il faut donc opter pour une vision globale.

Le postulat de M. Raedler demande au Conseil d'Etat de tirer un bilan des mesures prises en matière de multimodalité dans sa stratégie générale et d'intégrer les critères nécessaires pour la favoriser dans les stratégies sectorielles mises en place, ce qui permettrait ensuite de placer les bonnes infrastructures aux bons endroits. Développer d'autres façons de se déplacer, c'est donner une alternative à des personnes qui n'en ont pas forcément aujourd'hui. Pour toutes ces différentes raisons, la minorité de la commission vous invite à renvoyer ce postulat au Conseil d'Etat.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. David Raedler (VER) —

Ce postulat s'inscrit dans la suite des discussions que l'on vient d'avoir sur le précédent exposé des motif et projet de décret, lequel visait des éléments couverts par la multimodalité parmi d'autres. Comme cela a été mentionné, la mobilité est l'axe principal qui permet d'agir sur notre environnement. Mme la conseillère d'Etat a indiqué que 40 % des gaz à effet de serre proviennent de la mobilité. Devant l'industrie, il s'agit donc de la première source d'émission de gaz à effet de serre. La mobilité est en outre un axe qui nous permet d'agir sur notre qualité de vie ainsi que sur les coûts et infrastructures qui s'imposent à nous. Le lien est d'ailleurs multidisciplinaire et c'est un point important : la mobilité a des effets sur l'environnement, les surfaces d'assolement (SDA), les micro-plastiques, les déchets, les accidents, les maladies cardiovasculaires, etc.

Je souhaite vous transmettre quelques chiffres. Il faut prendre conscience de l'importance de la mobilité par le fait qu'un tiers des surfaces d'habitat et d'infrastructures de notre pays est consacré à la mobilité. En Suisse, cela représente 83'000 km de réseau routier et 4'658'000 voitures de tourisme en 2020. Je ne pense pas trop m'avancer en indiquant que l'entier des mouvements et partis de ce plénum ne défendrait jamais l'utilisation d'un seul moyen de mobilité. Cela est d'ailleurs indiqué en conclusion des rapports tant de majorité que de minorité : à chaque trajet, son outil. Les Vaudoises et les Vaudois sont devenus multimodaux et c'est la conclusion de l'étude de l'EPFL que vous trouvez en lien dans le postulat. L'utilisation de la voiture diminue, et c'est un fait, alors que la pratique de la marche et du vélo augmente, tout comme celle des transports publics, ce qui est dans l'intérêt de toutes et tous. La tendance est encore plus marquée chez les personnes de moins de 35 ans qui sont de moins en moins nombreuses à disposer d'une voiture en continu.

Globalement, les Vaudois et Vaudoises sont multimodaux, puisque 40 % d'entre eux utilisent régulièrement tous les modes de transport et un tiers le fait de manière occasionnelle. Les critères pour agir sur cette multimodalité et la favoriser sont nombreux et sectoriels. Pour les transports publics, il s'agit d'un meilleur confort d'utilisation, une fréquence plus élevée et une vitesse commerciale plus compétitive. Pour la mobilité douce, on citera la sécurité et la séparation du trafic. Enfin, pour les véhicules à moteur en lien avec les transports publics et la mobilité douce, ce sont les aménagements dans des pôles, des lieux de covoiturage et une très bonne connectivité avec des transports publics.

En tant que telle, pourquoi la multimodalité est-elle si importante ? Car à chaque trajet correspond son outil. Si on prend deux images qui ne sont pas issues de la mobilité : pour la récolte de plantes à graines dans le domaine agricole, vous utilisez une moissonneuse-batteuse et c'est normal ; en revanche, pour un jardin urbain ou des plantes sur un balcon, la moissonneuse-batteuse est moins utile. Pour celles et ceux qui font de la cuisine, le chalumeau de restauration est utile pour finaliser brillamment une crème brûlée, c'est normal. Ils n'utiliseront pas un lance-flamme militaire et c'est normal également, le résultat différant selon l'outil... En termes de mobilité, c'est le même principe : à chaque trajet, son outil adapté. Dans cette perspective, nous devons offrir le meilleur outil à la population, qu'elle se situe dans les centres urbains ou dans la région périurbaine. L'objectif est d'amener le plus de personnes à privilégier, pour chaque partie de son trajet, le moyen de mobilité le plus adapté. Comme l'EPFL le relève, cela passe par un ensemble de mesures qui doivent être considérées en commun et non en silo. Ces éléments doivent d'ailleurs être perçus à l'échelle du canton en général et dans sa diversité. Je l'ai indiqué comme exemple dans le postulat, une personne qui se rendrait de Suchy à Lausanne va facilement utiliser la multimodalité, dans la mesure où ce trajet est bien desservi en transports publics et offre des solutions de multimodalité. Comme contre-exemple, si vous voulez aller de Suchy à Moudon, en l'état et actuellement, nous n'aurez que la voiture individuelle comme solution adaptée, dans la mesure où vous effectuerez ce trajet en 29 minutes en voiture, alors que vous en aurez pour 1 h 30 en transport public, et même moins d'une heure à vélo.

Il est possible d'agir sur ce point avec des développements qui doivent non seulement promouvoir le report modal — j'y reviendrai dans peu de temps — mais aussi pour favoriser la multimodalité et permettre ainsi à plusieurs outils de se combiner dans l'intérêt général. Tout cela dans un but des plus honorables et qui devrait aussi faire l'unanimité dans ce plénum : d'une part réduire l'impact sur l'environnement et la pollution et, d'autre part, réduire la charge sur nos infrastructures et, par ricochet, les coûts. Pourquoi est-ce si important ? Si nous privilégions un seul mode de transport, à titre d'exemple la voiture individuelle, et que celui-ci est surutilisé seulement certaines périodes de la journée, c'est-à-dire le matin et le soir aux heures de pointe, il faudra mettre en place des infrastructures qui répondent à ces maximums. Il s'agira par exemple de routes plus larges, de la création de voies supplémentaires et de parkings à l'arrivée et au départ. C'est ici que réside le problème car, comme je l'ai dit en introduction, tous ces parkings et élargissements impactent directement les éléments composant la société, soit la pollution et l'environnement, mais aussi la pression sur les SDA — pour prendre un exemple tiré d'un discours précédent. En effet, la pression sur les SDA est bien une conséquence des places de parkings que l'on doit cumuler et ajouter en raison d'absence de multimodalité et non pas des pistes cyclables qui seraient créées et dont la taille demeure limitée.

Tous ces éléments s'inscrivent dans la tradition helvétique. Je dois le souligner : nous avons la chance d'être un des seuls pays au monde à disposer d'horaires cadencés en matière de transports publics. Chaque heure, au même créneau horaire, il y a un train qui vous permet d'effectuer un trajet identifié. Introduits dans les années 90, ces horaires cadencés sont une clé de voûte absolument centrale en matière de multimodalité, parce qu'elle vous permet de faire des trajets spontanés, c'est-à-dire un trajet où vous n'avez pas à calculer, réserver et réfléchir à la possibilité de pratiquer de la multimodalité. En effet, vous faites naturellement de la multimodalité et tout un chacun ici en fait de même.

Dans ce contexte et en conclusion, ce postulat vise à étudier et considérer les mesures prises en matière de multimodalité dans leur ensemble, sans silo individuel : transports publics, mobilité active, voiture individuelle lorsque cela est nécessaire. Comme le Conseil d'Etat l'a indiqué, il prend en partie en compte les points évoqués, lesquels font l'objet de plusieurs textes déposés et défendus. Toutefois, l'avantage de ce postulat et de sa vision est d'en montrer la cohérence globale et les buts recherchés par ces politiques. L'objectif de ce postulat est d'éviter des infrastructures qui seraient moins efficaces car non considérées comme un ensemble. La multimodalité est multiple, notre examen doit également l'être et prendre ainsi toutes les formes de mobilité en commun, en les combinant dans le but d'assurer la meilleure efficacité. Je vous remercie de prendre en considération ce postulat et de suivre le rapport de minorité.

M. Pierre Volet (PLR) —

Vous avez bien entendu le postulant : c'est complexe, voire très complexe. Comme je vous l'ai indiqué tout à l'heure au sujet des 50 millions que vous avez acceptés — je ne vais pas me répéter, vous m'avez entendu — la multimodalité demandée dans ce postulat est déjà dans toutes les réflexions du Conseil d'Etat. Dans l'acceptation de ces 50 millions de l'exposé des motifs et projet de décret, vous avez la preuve que tout est réfléchi et que l'on tient déjà compte de la multimodalité. En améliorant l'offre publique au quart d'heure, on favorisera le transport multimodal. Ce postulat enfonce par conséquent des portes ouvertes, la conseillère d'Etat Nuria Gorrite nous ayant toujours démontré la volonté du Conseil d'Etat de tenir compte de cette problématique. Toutefois, la plupart du temps, ce sont les villes, voire les communes qui devront prévoir aux abords des transports publics des parkings pour vélos ou autres et ce seront toujours les mêmes qui s'y opposeront.

Pour la mobilité, le pouvoir public — les communes, le canton et la Confédération — ne doit pas être le seul à faire des efforts. Il faudra des évolutions technologiques et industrielles. Il est donc difficile de répondre aux questions de ce postulat qui nous parait bien trop complexe. En outre, pour répondre à ces défis, la 5G sera nécessaire et qui dit 5G dit oppositions des mêmes personnes... En vue d'être efficient et de toucher tous les domaines, un exposé des motifs et projet de décret, un développement numérique et une somme de 10 millions ont déjà été constitués. En acceptant ce postulat, vous allez enfoncer des portes ouvertes, le canton ayant déjà intégré toutes ces stratégies dans ses réflexions. Il faut refuser ce postulat trop général et laisser l'administration travailler sur des cas concrets et non sur des rapports inutiles. Je refuserai donc ce postulat qui enfonce des portes ouvertes.

M. Jérôme Christen (LIBRE) —

« Les usagers doivent être convaincus et non forcés », c'est une phrase-clé que l'on retrouve aussi bien dans le rapport de minorité que dans celui de majorité. Voilà au moins un point de convergence qui devrait nous permettre de considérer que nous visons, dans ce Parlement, un objectif commun, soit tout entreprendre pour permettre l'usage d'une mobilité qui limite les émissions de gaz à effet de serre. Toutefois, pour convaincre les usagers, il faut proposer une offre efficiente et c'est ce que demande ce postulat. Développer les transports publics par le rail et la route, les pistes cyclables, les véhicules partagés, c'est très bien, mais encore faut-il pouvoir les coordonner. Les parkings-relais (P+R) doivent être développés à des endroits stratégiques et non pas dans des endroits théoriquement parfaits, mais parfaitement théoriques - pour rappeler l'expression favorite d'un de nos anciens collègues. Avec ces propos, je ne peux m'empêcher de penser à un cas concret qui oppose la Riviera à la DGMR, laquelle voudrait un P+R à Chardonne plutôt qu'à Saint-Légier, alors que nos voisins de la Gruyère font avant tout usage de leur autoroute plutôt que de la route cantonale.

Fin de la parenthèse. Plus de mobilité douce et durable, c'est bien, mais il est plus important de favoriser une meilleure mobilité douce et durable qui permettrait de réduire au maximum le recours à une mobilité polluante faisant appel à des énergies renouvelables et que l'on ne pourra pas éradiquer à court ou moyen termes, tant que nous n'aurons pas réalisé des miracles technologiques. La combinaison intelligente des différents moyens de transports passera aussi par la numérisation et la majorité de la commission a raison de relever que cela nécessitera des technologies de type 5G. Pour toutes ces raisons, les Libres vous encouragent à prendre en considération ce texte.

M. Rémy Jaquier (PLR) —

Permettez-moi d'introduire mon propos à l'aide d'une anecdote qui remonte à mon adolescence. Pour aller à l'école de Démoret à Yverdon, j'avais déjà le choix entre deux multimodalités. Par beau temps, j'enfourchais ma bicyclette et j'allais prendre un bus dans le village voisin, pour joindre Yverdon et cela me permettait de me lever plus tard. Par mauvais temps, je devais me lever plus tôt et prendre un des rares bus qui passait dans mon village et joindre Yverdon, via le train passant par Yvonand. L'étendue et les spécificités géographiques et régionales de notre canton — j'en sais quelque chose, venant du Nord vaudois — nous conduisent à devoir étudier encore plus finement chaque cas particulier en termes de multimodalité. Comme mon collègue Christen, je suis sensible à la conclusion du rapport de la minorité qui indique que les usagers doivent pouvoir disposer d'un choix et qu'ils doivent être convaincus et non forcés. Je vous invite donc à suivre le rapport de minorité et à accepter ce postulat.

Mme Alice Genoud (VER) —

Beaucoup de choses ayant été dites, je serai assez brève. La question du territoire qui est le nôtre et qui a déjà été évoquée précédemment, à savoir un territoire dans lequel nous avons des agglomérations denses et bien desservies tant en transports publics qu'en infrastructures de mobilité douce, ainsi que des lieux dits périurbains qui ont bien des atouts, mais pas forcément celui d'avoir une mobilité efficiente, montre qu'il est nécessaire de réfléchir globalement à une multimodalité efficace et qui permette aux personnes de laisser leur voiture à la maison. Il a été indiqué que cela est compliqué ; je pense le contraire, car des solutions existent désormais. D'autres cantons ont mis en place des mesures efficaces. C'est le cas par exemple des cantons suisses allemands qui ont des pôles multimodaux où il est possible de déposer son vélo, prendre le train, faire des abonnements, etc. Il y a encore des choses qui peuvent être réfléchies.

La DGMR a déjà mis beaucoup de choses en place, ce qui ne veut pas dire qu'on ne peut pas aller plus loin, ni réfléchir ou encore qu’il faille mettre ce postulat sur la touche. Nous sommes dans la suite de toutes les questions climatiques abordées auparavant qui, comme l'a indiqué Mme la conseillère d'Etat au précédent point, sont véritablement cruciales au vu de l'importance des émissions produites par la mobilité en général. En outre, les témoignages montrent qu'il est important de renvoyer ce postulat et de réfléchir à cette question de la multimodalité pour, finalement, rendre plus facile et accessible la mobilité aux Vaudoises et Vaudois.

Mme Catherine Labouchère (PLR) —

En lisant les deux rapports et en vous écoutant ce matin, je n'ai pas entendu de propos contre la multimodalité. Bien au contraire, elle paraît être une évidence pour tous, comme nous venons de le montrer en votant précédemment à la quasi-unanimité les 50 millions pour le développement des transports publics. Je ne comprends dès lors pas pourquoi il nous faudrait refuser une étude sur le postulat de notre collègue Raedler. Ce postulat s'inscrit dans cette ligne et, quant à dire qu'il donnera trop de travail à l'administration, il est important de rappeler que beaucoup de choses existent déjà et qu'il s'agit juste de les coordonner. Je suivrai dès lors le rapport de la minorité et je ne répéterai pas tous les arguments, car nous sommes tous d'accord sur le fait que la multimodalité ne doit pas rester un concept, mais qu'elle doit se traduire dans les faits.

Mme Céline Baux (UDC) —

Malgré l'acceptation de l'exposé des motifs et projet de décret précédent, j'estime que ce postulat est intéressant et je le soutiendrai à titre personnel. Il est certes important d'augmenter la capacité et l'offre des transports publics, mais ce postulat pourra donner une image globale de nos infrastructures et permettra de réfléchir aux solutions de multimodalité, et ce, à l'avantage des régions périphériques. Malgré les moyens importants que nous venons de donner au canton pour développer les transports publics, il y aura toujours des régions défavorisées et qui n'auront pas de fréquence toutes les 15 ou 20 minutes. Il est important que ces régions restent attractives, pour maintenir leur population et pour accueillir de nouveaux habitants. Le renvoi de ce postulat permettra d'identifier ces régions et pourra, je l'espère, améliorer et optimiser les possibilités de transport multimodal. Je vous recommande de soutenir le rapport de minorité.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Nous allons poursuivre nos débats, impassibles comme les musiciens sur le Titanic (il s'agit d'une allusion à la météo peu clémente, n.d.l.r).

M. Alexandre Rydlo (SOC) —

Avant que ce bâtiment ne prenne l'eau, je souhaite vous donner la position du parti socialiste. Ce dernier vous invite à soutenir le rapport de la minorité. En effet, ce postulat fait sens, car il permet de prendre du recul pour mieux sauter, et sauter plus loin, pour étudier ce qui peut encore être amélioré dans cette multimodalité et dans le dispositif cantonal. Je laisse la parole aux pompiers pour nous sortir d'ici... (rires de l'assemblée).

M. Jean-Luc Bezençon (PLR) —

Je commencer à m'inquiéter, car nous sommes en train de faucher les foins et lorsque je vois cette pluie, cela me fait peur. Ce postulat vise à développer des outils multiples et nécessaires pour favoriser la multimodalité. Je faisais partie de cette commission qui a largement débattu de cet objet et je suis favorable au développement de solutions pour encourager le report modal. S'opposer à de telles idées n'est pas compatible aux modes actuels. Malheureusement, la plupart des projets identifiés — il suffit de lire le texte — ne sont pas réalisables, car ils se heurtent tant à la Loi sur l'aménagement du territoire (LAT) qu'au mouvement écologique qui très souvent s'oppose aux emprises sur le territoire lorsqu'il s'agit de réaliser ce type d'aménagement. Je suis donc surpris de la mauvaise foi de certains de nos collègues qui prônent la cohérence de ce postulat alors que, quand il s'agit de réaliser des aménagements, vont dans le sens contraire. J'encourage donc toutes et celles et ceux qui souhaiteraient changer les choses - j'en fais partie - à s'adresser directement aux autorités fédérales, de manière à changer la LAT afin que nous puissions réaliser ces aménagements. Tant que cela ne sera pas le cas, je m'opposerai à ce postulat.

M. Alain Bovay (PLR) —

Étant donné qu'il pleut, mes collègues ne seront pas trop fâchés que les débats se prolongent après midi, peu étant équipés de bons parapluies comme certains de ce plénum. J'ai apprécié l'intervention de Jérôme Christen, lequel a parlé de la mobilité de la Riviera. En effet, la situation de cette région est problématique en raison d'une vision unilatérale de la part de la DGMR qui va parfois à l'envers du bon sens du terrain. En l'occurrence, ce postulat permettrait d'ajuster et de combattre une systématique lorsque, pour une région — je parle bien d'une région puisqu'il s'agit de l'ensemble des communes du district — la DGMR propose un P+R à Saint-Légier et ce n'est pas en augmentant le nombre de bus sur le parcours entre Châtel-St-Denis et Vevey que l'on va régler le problème. Actuellement, il faut plus de 40 minutes pour rejoindre en bus le centre de Vevey et 15 à 20 minutes en voiture. Tant que nous n'aurons pas des transports publics efficaces pour se déplacer, nous aurons beaucoup de peine à transférer des gens sur les transports en commun. Avec un potentiel de plus de 500 nouveaux habitants aux Paccots, la commune de Châtel-St-Denis se développe. On peut donc imaginer que ces futurs habitants, qui se trouvent à 20 minutes de Vevey ou à près d'une heure avec le transfert modal en transport commun, continueront à choisir la voiture. Parfois le bon sens doit l'emporter, quitte à prendre des solutions pragmatiques, voire provisoires sur plusieurs années, en attendant d'avoir des solutions performantes.

Sachez encore que la communauté Blonay-St-Légier, qui compte 12'500 habitants, fait plus d'une heure pour rejoindre l'Hôpital Riviera-Chablais (HRC) en bus ou en train alors que ce trajet prend moins de 20 minutes en voiture. Oui, il y a du travail, mais il faut aussi écouter la région, car ce n'est pas en augmentant la cadence que l'on va régler ces problèmes. Un rapport contre la vision unilatérale de la DGMR serait donc le bienvenu. Je vous encourage dès lors à soutenir le rapport de la minorité.

M. Philippe Cornamusaz (PLR) —

Je serai très bref, car l'horloge tourne malgré la pluie. Selon moi, il est inutile de procéder à une telle étude. Nous avons en effet un excellent service à la DGMR et ce dernier ne doit pas perdre son temps à répondre à ce postulat. Il devrait plutôt créer des horaires, négocier avec les communes et s'occuper de projets concrets. Je vous invite donc à soutenir le rapport de la majorité.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 85 voix contre 52.

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