Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 21 juin 2022, point 13 de l'ordre du jour

Texte déposé

Pays multiculturel soucieux de sa cohésion nationale, la Suisse encourage depuis longtemps l'enseignement des langues, notamment les langues nationales, à l'école obligatoire... avec des retombées plus que positives sur la compétitivité de son économie de service et ses échanges économiques avec plusieurs pays européens. L'Observatoire Économie-Langues-Formationi estime que la plus-value apportée par le plurilinguisme au PIB de la Suisse est d'environ 10%.

 

Selon une récente enquêteii de l'Office Fédéral de la Statistique, la population suisse devient de plus en plus polyglotte : alors que le monolinguisme est la norme chez nos ainés (64% des plus de 75 ans), ce n'est désormais plus qu'une très petite minorité des 15 à 24 ans (13%) qui ne parle qu'une seule langue. Cette évolution est particulièrement réjouissante puisque plus une deuxième langue est apprise tôt, meilleure en est sa maîtrise et plus facile s'avère l’apprentissage ultérieur d'autres langues.

 

Autrefois suspecté d'interférer avec les apprentissages, le plurilinguisme a le vent en poupe. Les recherches en psychologie du développement, en psychologie cognitive, en pédagogie ou encore en neuropsychologie ont démontré que la co-existence de deux langues, voire plus, est bénéfique au fonctionnement cérébral, notamment au moment des apprentissages et lors du vieillissement. Ainsi, non seulement les enfants bilingues réussissent mieux les tests cognitifs impliquant des tâches complexes, mais à l'autre extrémité de la vie, les démences, maladie d'Alzheimer par exemple, débutent plus tardivement chez les personnes parlant régulièrement plusieurs langues.

 

Les grandes lignes de la stratégie d’enseignement des langues ont été définies par la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP); celles-ci, ainsi que les recommandations émises par la CDIP, sont reprises dans le concordat Harmosiii. Les objectifs actuellement visés par l'enseignement des langues à l'école obligatoire sont une solide maîtrise orale et écrite de la langue locale et l'acquisition des "compétences essentielles dans une deuxième langue nationale et dans une autre langue étrangère au moins"

 

En plus d'énoncer les attentes concernant l'enseignement des langues "étrangères" en milieu scolaire, le concordat Harmos, en reconnaissance de l'atout de scolarisation et d'intégration que représente la valorisation de la langue d’origine des élèves allophones, soutient très explicitement les cours de langue et culture d'origine (LCO) organisés à l'intention des élèves des différentes communautés linguistiques (art. 4 al.4).

 

Les cantons confient généralement la responsabilité de faciliter la tenue des cours LCO au département cantonal en charge de la formation. Les cours sont organisés et dispensés par diverses entités : ambassades ou consulats, département de l'éducation, associations privées. Ils débouchent sur des certifications allant d'une simple attestation de participation à un diplôme de scolarisation ou une validation par un certificat européen de connaissance de la langue enseignée (CELI pour l'Italien, DELE pour l'Espagnol, par exemple).

 

Il s'avère que l'accueil réservé à ces cours et, donc, leur accompagnement varient fortement d'un canton à l'autre. Dans certains cantons, il arrive que les cours LCO soient organisés sur le temps d'école ou que les appréciations des enseignant.e.s LCO soient prises en considération dans l'évaluation annuelle ou l'orientation de l'élève. Ils bénéficient parfois même d'une reconnaissance officielle, pour autant qu'ils remplissent des critères définis par le département cantonal de la formation.

 

Dans le canton de Vaud, la LEOiv prévoit que l'école apporte son soutien aux cours LCO par "des mesures d’organisation" (art.8). La responsabilité d'informer les "parents concernés" et de faciliter l'accès aux locaux scolaires incombe à la direction des établissements scolaires; et les évaluations d'un.e élève par son enseignant.e LCO peuvent être inscrites dans son agenda (RLEO art. 6)v. Il est également à relever que plusieurs cantons romands ont choisi de centraliser l'information relative aux cours LCO, garantissant ainsi aux familles concernées l'accessibilité à l'information au delà du simple bouche-à-oreille. Les informations vaudoises les plus aisées à obtenir concernent  (uniquement) les cours LCO dispensés à Lausanne. Ces données, centralisées par les autorités lausannoises, sont disponibles sur le site internet de la villevi.

 

En 2015, dans sa réponse à l'interpellation (14_INT_290)viide la députée Romano-Malagrifa, le Conseil d'Etat a annoncé que plusieurs opérations interdépartementales étaient en cours avec le Bureau cantonal d'intégration afin de stabiliser les liens entre l'école vaudoise et les écoles de langue et culture d'origine (ELCO) et de renforcer le dispositif d'accompagnement des enfants allophones ne fréquentant pas encore l'école obligatoire. Cette réponse faisait également état d'une grande disparité qualitative dans les cours offerts et mentionnait qu'aucune information relative aux cours LCO et leur fréquentation par les élèves de l'école obligatoire vaudoise n'était systématiquement récoltée.

 

Au cours des 7 dernières années, les ELCO semblent effectivement avoir bénéficié d'une certaine attention. Ils ont notamment été discutés lors des XVIIe assises de la chambre cantonale consultative des immigrés (CCCI)viii et la Haute École Pédagogique du Canton de Vaud s'est récemment engagé dans un projet de formation destiné aux enseignant·e·s des ELCOix.

 

 

Ce postulat demande au Conseil d’Etat

 

1) D'établir un rapport détaillant l'offre de cours LCO dans le canton de Vaud.

Cet état des lieux comprendra, entre autres, les informations suivantes :
 

  • un recensement des langues enseignées avec le diplôme obtenu (attestation de participation, certification CECR, équivalence d'un titre délivré par le pays d'origine...),
  • une liste des langues fortement présentes pour lesquelles de tels cours ne sont pas offerts
  • la distribution géographique des cours LCO à travers le canton (régions/communes/EPS),
  • une estimation du nombre d'élèves allophones fréquentant ces cours (nombre annuel moyen par exemple),


ainsi qu'une présentation des démarches et des projets de collaboration entrepris depuis 2015 pour "stabiliser" les liens entre l'école vaudoise et les ELCO.


2) D'étudier l'opportunité de mettre en place une procédure de reconnaissance ou d'accréditation des cours LCO existants, notamment ceux ne débouchant pas sur une certification "reconnue" (tels qu'un diplôme de scolarisation ou un test de langue CECR)

 

3) D'envisager, dans un but informatif mais également de promotion du plurilinguisme, une communication plus proactive de l'existence de ces cours auprès des familles, par l'insertion sur le site officiel de l'Etat de Vaud, d'une page centralisant toutes les informations concernant les cours LCO, à l'instar de ce qui se fait dans d'autres cantons romands ou à la ville de Lausanne;
 

et de réfléchir à toute autre mesure qui permettrait aux directions des EPS de remplir efficacement l'obligation de renseigner les familles telle que définie à l'art. 4 RLEO (affiches, circulaires...)

 

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Pierre ZwahlenVER
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Felix StürnerVER
Valérie InduniSOC
Jean-Louis RadiceV'L
Sergei AschwandenPLR
Anne-Sophie BetschartSOC
Yannick MauryVER
Muriel ThalmannSOC
Stéphane MontangeroSOC
Sylvie Pittet BlanchetteSOC
Didier LohriVER
Catherine LabouchèrePLR
Carine CarvalhoSOC
Delphine ProbstSOC
Cédric EchenardSOC
Sébastien CalaSOC
Josephine Byrne GarelliPLR
Léonard Studer
Alexandre DémétriadèsSOC
Vincent KellerEP
Marc VuilleumierEP
Amélie CherbuinSOC
Julien EggenbergerSOC
Olivier GfellerSOC
Séverine EvéquozVER
Claire Attinger DoepperSOC
Blaise VionnetV'L
Jean-Claude GlardonSOC
Salvatore GuarnaSOC
Nathalie JaccardVER
Werner RiesenUDC
Yves PaccaudSOC
Pierre FonjallazVER
Sabine Glauser KrugVER
Elodie LopezEP
Julien CuérelUDC
Sébastien PedroliSOC

Document

22_POS_31-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Sonya Butera (SOC) —

Être bilingue, voire trilingue, est un véritable atout. La Suisse encourage d’ailleurs l’enseignement des langues et notamment des langues nationales, à l’école obligatoire, ainsi que les cours de langue et culture d’origine (couors LCO) qui sont offerts, et auxquels ce postulat fait référence. Ces derniers enseignements figurent en très bonne place dans le Concordat HarmoS, certainement en reconnaissance de l’atout de scolarisation et d’intégration qu’ils représentent pour les élèves allophones. Ces cours permettent aux élèves issus de la migration d’asseoir leurs compétences langagières dans leur langue d’origine et encouragent le plurilinguisme, qui a de nombreux effets bénéfiques sur le fonctionnement cérébral.

Or, il est attendu des cantons signataires du concordat qu’ils soutiennent l’organisation de ces cours sur leur territoire. Force est de constater que la promotion et le soutien organisationnel offert par les autorités cantonales compétentes varient fortement d’un canton à l’autre. Il semblerait également qu’il existe une grande disparité qualitative dans les cours offerts dans le canton de Vaud.

Le but de ce postulat est donc de savoir comment ces cours sont soutenus, dans notre canton ; de quelle promotion et facilitation ils bénéficient ; de quelle manière sont-ils coordonnés avec les enseignements de l’école obligatoire, et notamment s’ils sont pris en considération dans l’orientation de l’élève ainsi que cela se fait dans d’autres cantons romands ; débouchent-ils sur une certification, faudrait-il envisager un meilleur suivi et une éventuelle accréditation de ces cours ? Le présent postulat formule essentiellement trois demandes :

  1. Un recensement de l’offre en cours LCO qui existe à travers le canton, avec des informations quant aux soutiens dont bénéficient les différentes écoles.
  2. Une étude de l’opportunité de mettre en place un système d’accréditation, afin de valoriser plus formellement les cours qui seraient dénués de certification officielle.
  3. Une réflexion sur les moyens d’améliorer la promotion de ces cours auprès des familles allophones.

Je me réjouis d’approfondir ces questions en commission.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Le postulat, cosigné par au moins 20 membres, est renvoyé à l’examen d’une commission.

Retour à l'ordre du jour

Partager la page

Partager sur :