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Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 18 mai 2021, point 15 de l'ordre du jour

Texte déposé

Le plus souvent, les établissements publics proposent des toilettes pour femmes et des toilettes pour hommes. À titre d’exemple, le règlement d'exécution de la loi vaudoise sur les auberges et les débits de boissons dispose que « (…) Tout nouvel établissement ou faisant l'objet d'importantes transformations, (…) accueillant plus de 20 personnes, doit être pourvu de deux sanitaires séparés au moins, l'un pour les femmes et l'autre pour les hommes, l'un des deux devant être accessible aux personnes handicapées. La municipalité́ peut prévoir des normes plus strictes » (article 38, alinéa 1bis RLADB).

 

Aujourd’hui, les établissements sont donc tenus de prévoir des locaux distincts, de les gérer séparément et de s’assurer qu'ils soient bien utilisés par les personnes du sexe concerné.

Les toilettes non genrées sont pourtant une réalité vécue dans plusieurs lieux connus, comme les trains, les avions ou les établissements publics de certains cantons (Lucerne). Ce modèle présente d’ailleurs plusieurs avantages :

 

-       Les mêmes toilettes pour toutes et tous réduisent les files d’attente interminables devant les toilettes pour femmes. Ce modèle permet de prendre en compte les différences physiques et de rétablir l’égalité en multipliant les possibilités de se soulager pour les personnes qui ne peuvent pas le faire debout.

-       Les toilettes non genrées sont plus inclusives. Un tel modèle permet de faciliter la vie des personnes intersexes et transgenres et de leur éviter des situations gênantes ou dangereuses. Les toilettes genrées peuvent en effet être le théâtre de violences verbales ou physiques transphobes, renvoyant les personnes trans à leur sexe assigné à leur naissance.

-       Elles évitent aux parents qui accompagnent un enfant du sexe opposé d'avoir à se demander quels W.C. choisir.

-       Elles permettent de mettre fin à certains stéréotypes de genre. Par exemple, les tables à langer se trouvent généralement dans les toilettes pour femmes. Les établissements qui le souhaitent pourraient ainsi proposer indistinctement préservatifs (généralement fournies dans les toilettes pour hommes) et produits menstruels à disposition de toutes et tous.

-       Contrairement à une idée reçue, par leur conception et leur accessibilité, les toilettes non genrées n’entraînent pas un risque plus marqué de harcèlement sexuel que les toilettes séparées. Les violences sexistes et sexuelles ne sauraient être – et ne sont pas – endiguées par la séparation des hommes et des femmes.

-       Les mêmes toilettes offrent une marge de manœuvre aux responsables d’établissement en termes d’occupation de l’espace. On pourrait imaginer que la seule contrainte soit de mettre à disposition des sanitaires aménagés de façon à garantir le respect de la sphère privée. De simples cabinets d'aisance munis d'une porte fermant à clé suffiraient ainsi à garantir l’intimité des utilisateurs. L’obligation, pour tout nouvel établissement, de disposer de deux toilettes séparées paraît excessive et inutilement contraignante. Un assouplissement de la réglementation en vigueur serait sans doute un geste bienvenu pour les cafetiers restaurateurs et les autres établissements potentiellement concernés.

 

Ainsi, par cette motion, nous demandons au Conseil d’État de modifier les dispositions légales et réglementaires existantes, de façon à ce qu'il ne soit plus obligatoire d'aménager des toilettes séparées pour les hommes et les femmes dans les établissements du canton.

 

Vassilis VENIZELOS

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
David RaedlerVER
Rebecca JolyVER
Felix StürnerVER
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Sylvie PodioVER
Jean-Marc Nicolet
Yves PaccaudSOC
Céline BauxUDC
Cloé PointetV'L
Vincent KellerEP
Hadrien BuclinEP
Graziella SchallerV'L
Carine CarvalhoSOC
Julien EggenbergerSOC
Claire Attinger DoepperSOC
Jessica JaccoudSOC
Claire RichardV'L
Alice GenoudVER
Taraneh AminianEP
Pierre ZwahlenVER
Pierre FonjallazVER
Olivier Epars

Document

RC - 20_MOT_10

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Muriel Thalmann (SOC) — Rapporteur-trice

Le motionnaire propose d’offrir des assouplissements techniques en autorisant les établissements publics à aménager uniquement des toilettes non genrées ; cette mesure permettrait de plus de répondre au vécu des personnes intersexes et transgenres qui peuvent vivre des situations gênantes, et parfois être victimes de violences verbales ou physiques transphobes en fréquentant des toilettes réservées aux hommes ou aux femmes. Il précise que la mise en place de toilettes non genrées doit se faire sur une base volontaire et qu’il est bien conscient que cet aménagement peut nécessiter des connaissances approfondies lorsqu’il s’agit de les installer dans certains établissements, comme les boîtes de nuit.

Le conseiller d’Etat relève :

-        qu’il n’a enregistré aucune plainte émanant des restauratrices et restaurateurs quant au dispositif actuel et que ce dernier ne connait pas de problèmes significatifs comme des files d’attente devant les toilettes femmes, problématique plutôt connue dans le cadre de manifestations ;

-        qu’il convient de maintenir l’obligation de mettre des toilettes à disposition des personnes en situation de handicap ;

-        que la motion cible les établissements publics soumis à la Loi sur les auberges et les débits de boissons (LADB) d’une capacité de plus de 20 clients avec l’exigence d’aménager des toilettes séparées pour les hommes et les femmes.

Les membres de la commission relèvent notamment :

-        que la motion soutient une revendication formulée par les associations représentant les communautés LGBTIQ+ ;

-        qu’un assouplissement de la LADB faciliterait surtout la vie dans les domaines non couverts par la LADB, comme les musées ou les manifestations ;

-        que la mise en place de toilettes non genrées ne permet pas nécessairement de résoudre les problèmes relevés par le motionnaire, comme des files d’attente démesurées ou de réduire les coûts ;

-        que la mise en place de toilettes non genrées exige des connaissances spécifiques et doit faire l’objet de mesures d’accompagnement, afin de garantir la sécurité et d’éviter d’introduire de nouvelles inégalités en supprimant les toilettes séparées femmes et hommes.

Le conseiller d’Etat estime que cette motion mérite d’être étudiée et propose :

-        d’aller vers un assouplissement du dispositif, ce qui nécessite de travailler avec les autorités communales qui délivrent le permis de construire ou l’autorisation d’effectuer les travaux et qui recevraient donc la compétence d’assouplir le dispositif ;

-        d’étendre cette motion aux types d’établissements qui ne sont pas soumis à la LADB ;

-        de permettre aux municipalités de déroger à ce dispositif ;

-        de maintenir au moins une toilette accessible aux personnes en situation de handicap.

Le motionnaire a donc transformé son texte en postulat afin de laisser une marge de manœuvre au Conseil d’Etat pour intégrer dans ses réflexions la coordination des démarches avec les municipalités, le Bureau pour l’égalité entre femmes et hommes (BEFH) et pour envisager un élargissement des domaines couverts.

La commission recommande au Grand Conseil de renvoyer au Conseil d’Etat la motion transformée en postulat à l’unanimité des membres présents.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Vassilis Venizelos —

Hier, lors de la Journée internationale contre l’homophobie et la transphobie, plusieurs villes suisses et le canton, à travers la voix du Conseil d’Etat, ont affiché leur engagement pour lutter contre les discriminations et les violences dont font l’objet les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres, intersexes et en questionnement ou queer (LGBTIQ+). Ce texte contribue à lutter contre ce fléau. C’est l’un des aspects développés par cette motion transformée en postulat. A travers cette proposition, on permet aussi d’offrir un assouplissement réglementaire aux cafetiers-restaurateurs qui sont contraints aujourd’hui d’offrir des toilettes séparées pour les hommes et les femmes. Cette requête avait été portée, dans le canton de Lucerne, par les milieux de la restauration eux-mêmes. Il semblerait que, dans le canton de Vaud — c’est en tout cas les échos que j’ai pu obtenir de quelques cafetiers-restaurateurs, notamment du Nord vaudois — il y a un intérêt de pouvoir disposer de cet assouplissement. On gère ici deux thématiques et deux problématiques à travers la même proposition d’assouplissement : la problématique des discriminations et des violences faites aux personnes LGBTIQ+.

J’ai accepté de transformer ma motion en postulat, car j’étais sensible aux arguments du chef du département qui propose d’étendre la réflexion à d’autres lieux publics. Cette proposition me semble tout à fait adéquate. Il a également proposé de coordonner la réflexion avec les communes qui ont évidemment des compétences en matière de police des constructions qui sont importantes. Enfin, il a proposé d’intégrer le BEFH pour s’assurer que les solutions retenues proposent des toilettes sûres, sécurisantes et accueillantes pour toutes et tous. Pour toutes ces raisons, je vous invite à suivre l’avis de la commission et à renvoyer ce postulat au Conseil d’Etat.

M. François Cardinaux (PLR) —

Je faisais partie de cette commission et j’aimerais relever que l’important, dans cette motion transformée en postulat, c’est le fait que le Conseil d’Etat va pouvoir se coordonner avec les municipalités. En effet, si certains endroits se prêtent facilement à des toilettes non genrées, il faut aussi se méfier et ne pas être angélique quand on pense à des discothèques ou à des grands lieux de rassemblement. C’est pour cela que cette motion transformée en postulat a trouvé un écho favorable, y compris auprès de moi qui pense réellement que c’est la concertation avec ceux qui connaissent le terrain qui doit être privilégiée. Je vous encourage à suivre la recommandation de la commission.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération avec 6 avis contraires et 4 abstentions.

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