24_LEG_49 - EMPD Exposé des motifs et projets de décrets accordant au Conseil d'Etat CHF 4’675'000 pour financer les mesures environnementales 2025-2029 du Plan d’action Sols et un crédit d’investissement de CHF 1’325'000 pour financer les mesures agricoles 2025-2029 du Plan d’action Sols et Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le postulat Alice Genoud et consort - Redonnons vie à nos terres enterrées sous le bitume (21_POS_25). (1er débat).

Séance du Grand Conseil du mardi 25 mars 2025, point 15 de l'ordre du jour

Documents

Transcriptions

Mme Amélie Cherbuin (SOC) — Rapporteur-trice

La commission s'est réunie le mardi 3 décembre 2024 pour traiter de cet objet. Elle était composée de Mmes les députées Amélie Cherbuin, Cendrine Cachemaille, Carole Dubois, Alice Genoud, Sabine Glauser-Krug, Claire Attinger-Doepper, Carole Schelker et MM. les députés Loïc Bardet, Nicolas Bolay, Bernard Nicod et David Vogel. M. Vassilis Venizelos, chef du Département de la jeunesse, de l'environnement et de la sécurité, a participé à la séance. Il était accompagné par MM. Sébastien Beuchat, Directeur des ressources et du patrimoine naturel (DIRNA), Renaud Marcel-Poix, chef de la Division géologie, sol, déchets et eaux souterraines (GEODES), et Frédéric Brand, directeur de l'agriculture, de la viticulture et des améliorations foncières (DAGRI). M. Rémi Muyldersmans, secrétaire de commission, a tenu les notes de séance, ce dont nous le remercions.

Voici un condensé de ce rapport. Le Plan d'action Sols vaudois constitue l'une des mesures d'impulsion du Plan climat vaudois. Il fait partie de l'enveloppe de 209 millions mis de côté grâce aux excédents aux comptes. Il est novateur et s'inscrit dans une politique menée au niveau fédéral, ambitionnant un objectif de zéro consommation nette de sol pour 2050. Ce plan comporte 80 actions se répartissant dans huit objectifs visant à répondre à différents enjeux. Il met l'accent sur la prévention, sans mesures contraignantes, pour accompagner différentes démarches déjà en cours. Il fait la distinction entre mesures agricoles et environnementales. Les thématiques suivantes sont abordées :

  • Enjeux de l'imperméabilisation et artificialisation des sols. Actuellement, la consommation de sol en Suisse est estimée à un mètre carré par seconde, voire deux mètres carrés à l'échelle du Plateau. En outre, il est attendu qu'un million de mètres cubes soient décapés sur des chantiers dans les 15 ans à venir. Il est ainsi important que les sols soient valorisés de la meilleure manière possible. 
  • Enjeux de compaction et d'érosion et de manière organique des sols agricoles. Cela est important pour toutes les professions qui travaillent sur les sols. En effet, au niveau de la qualité des sols, l'État a pu analyser près de 2000 parcelles agricoles, dont les trois quarts ont des teneurs insuffisantes en matière organique. 
  • Travail effectué en termes de cartographie et de monitoring. Près de 30’000 sondages ont été réalisés dans le canton. Toutefois, ces sondages concernent seulement une partie du territoire, et l'État n'a pas encore une connaissance exhaustive de la qualité des sols dans le canton. Le travail doit être poursuivi. 
  • Objectifs et échéanciers. Le plan d'action définit huit objectifs stratégiques qui devront être atteints en 2050, avec des étapes de mise en œuvre intermédiaires à atteindre pour l'année 2030, et 80 actions à entreprendre sur la période 2025-2030. 

Les huit objectifs sont :

  1. Viser une consommation des sols limités à l'horizon 2050.
  2. Réhabiliter les sols dégradés. 
  3. Valoriser les matériaux terreux décapés sur les chantiers. 
  4. Conserver et améliorer la qualité des sols agricoles. 
  5. Utiliser les sols agricoles, forestiers et sur les chantiers sans compaction irrémédiable ni érosion. 
  6. Connaître les pollutions des sols et les moyens de s'en protéger, limiter les pollutions. 
  7. Préparer les informations pédologiques nécessaires aux utilisateurs et décideurs. 
  8.  Formation, sensibilisation des acteurs du grand public et des élèves. 

Synthèse des financements : 4'675’000 francs seront alloués à la Direction générale de l’environnement (DGE) et 1'325’000 à la Direction générale de l’agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV). Ces sommes incluent trois postes Equivalents en temps plein (ETP), deux à la DGE et un à la DGAV. Dans le cadre de la discussion générale, plusieurs questions ont été posées. Il a été demandé si la somme de 17,75 millions, visant à déployer des mesures d'adaptation fortes pour les systèmes naturels et humains – surligné dans le tableau – est une dépense distincte de ce projet de décret. M. le conseiller d'État répond que ce n'est pas une dépense distincte, que le Plan d'action sol correspond à une partie de cette somme. Le Conseil d'État est simplement tenu de demander un crédit d'investissement au Grand Conseil pour réaliser une dépense. 

Contexte et description du besoin : il a été soulevé la question de l'impact d'un plan de gestion des sols, dépourvu de mesures contraignantes, sur le quotidien des communes, des promoteurs immobiliers, des agriculteurs et d'autres acteurs liés à l'aménagement du territoire. M. le conseiller d'État et ses chefs de services répondent que l'objectif principal de ce plan est de renforcer la connaissance du sol et de mettre à disposition des outils aux différents acteurs sans mesures contraignantes pour protéger le sol. De plus, l'obligation est faite par la Confédération de cartographier les sols à partir de 2029. Le canton prend ainsi de l'avance avant de recevoir les financements fédéraux. En outre, les données recueillies seront publiées et permettront des échanges. Il est demandé si l'objectif n°6 sur la pollution des sols inclut les métaux lourds qui sont utilisés dans l'agriculture biologique, comme le cuivre. M. le conseiller d'État reprécise que le plan d'action n'est pas contraignant et que sur la question des polluants, le but de l'objectif est d'anticiper les impacts potentiels sur la santé et d'éviter les situations où une pollution est découverte a posteriori sur une place de jeu pour enfants ou dans des jardins familiaux. Sur la question des métaux lourds au niveau agricole, il existe des méthodes pour réduire les doses et le but du plan est d'inciter les bonnes pratiques dans ce sens. 

Le débat persiste autour de la crainte que ces mesures évoluent vers des obligations contraignantes. M. le conseiller d'État a pu rassurer la commission sur ce point, même si d'autres membres auraient préféré au contraire qu'elles le soient. En effet, les mesures, pour être contraignantes, nécessitent une base légale qui n'existe pas actuellement. Il a été souligné que le Plan d'action Sols vaudois indique que la Suisse s'engage au niveau international en faveur d'une gestion durable des sols, ce qui est une démarche réjouissante. Notamment, l'industrie minière a un impact colossal par l'épandage de boues minières sur d'énormes terrains et ces questions ne sont pas assez discutées au niveau international. M. le conseiller d'État partage cet avis sur l'impact extraterritorial de l'industrie minière. Toutefois, ce Plan d'action Sols n'a pas l'ambition de régler cette problématique. En outre, il note que les projets de gravières sont souvent contestés dans le canton. Or, l'économie importe 25 % des graviers dont elle a besoin. Le but est de s'affranchir de cette importation en réduisant les graviers nécessaires et en ouvrant de nouvelles gravières. Deux échéances sont prévues pour ce plan Sols. La première en 2027 pour éventuellement décider de réorienter ou d'abandonner certaines mesures. La seconde évaluation aura lieu en 2030 avec la production d'un rapport d'évaluation. La notion zéro consommation nette signifie que l'on ne s'arrêtera pas de construire, mais que l'on pourra compenser ces constructions. L'année de référence est en train d'être discutée au niveau fédéral. La deuxième révision de la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT) porte sur les hors zones à bâtir uniquement. Or, la stratégie de la Confédération sur le zéro net sols concerne l'ensemble du territoire. 

Plusieurs objectifs sont encore discutés, notamment l'objectif n°3 concernant les matériaux terreux décapés qui doivent être intégralement valorisés. La question a été soulevée concernant les acteurs avec lesquels l'État prévoit de collaborer. Il a été répondu que les acteurs n'ont pas encore été identifiés. Concernant l'objectif n°4, la qualité des sols doit être conservée et améliorée. Il a été confirmé que le sol est le parent pauvre de la recherche. Il n'existe d'ailleurs plus de chaire universitaire sur les sols en Suisse. Le sol n'est pas à l'agenda des autres cantons. La société AGRIDEA est néanmoins une plateforme parmi d'autres favorisant les échanges entre cantons et agriculteurs. L'analyse des sols est la mesure phare du volet agricole du Plan climat du Conseil d'Etat. Mais les agriculteurs participent peu aux mesures d'analyse du sol. 

En ce qui concerne les pollutions des sols et les moyens de s'en protéger, il est désormais reconnu que les polluants ne sont plus introduits dans les sols. Il est précisé que la législation actuelle prévoit une série de seuils à partir desquels les cantons doivent prendre des mesures. Le Grand Conseil a adopté un projet de décret de près de 16 millions pour l'investigation, la surveillance et l'assainissement des sites pollués. Il est demandé quelle est l'articulation avec le Plan sol. Il est répondu que le crédit d'investissement porté sur les investigations dans les sites pollués déjà inscrits au cadastre des sites pollués, tandis que le présent crédit d'investissement porte sur les sites pollués dont l'Etat n'a pas encore eu connaissance. Le présent objectif vise à identifier les sols pollués dans le canton, y compris les jardins familiaux et les places de jeux. 

Enfin, en ce qui concerne le mode de conduite du projet et ses conséquences sur l'effectif du personnel, deux députés ont interrogé sur le coût et la justification de l'embauche de trois ETP supplémentaires, ainsi que sur la nécessité de louer de nouveaux locaux pour un montant proche de 437’500 francs. Le dépôt d'un amendement par le second commissaire est annoncé. M. le conseiller d'Etat rappelle que ces contrats financés par le crédit d'investissement sont à durée déterminée, et ces postes sont nécessaires pour déployer ce dispositif. Concernant les locaux, la meilleure solution est de louer des locaux à proximité. Toutefois, si le département trouve des alternatives, il ne dépensera pas cette somme. Ainsi, au regard de ce qui précède, la commission a approuvé l'entrée en matière du décret sur les Mesures environnementales, d'un montant de 4'675'000 francs, par 8 voix contre 4 abstentions, et a également validé l'entrée en matière du décret sur les Mesures agricoles, d'un montant de 1'325'000 francs, par 8 voix contre 3 abstentions.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Je vous propose d'ouvrir d'abord une discussion générale sur les deux décrets, puis nous procéderons à un vote séparé pour chacun d'eux.

M. Nicolas Bolay (UDC) —

En tant que commissaire, je prends la parole concernant ce projet de décret. Le Conseil d'État nous propose une dépense globale de 6 millions pour l'ensemble de ces deux projets. Ce qui suscite une certaine inquiétude parmi certains membres de la commission, c'est l'engagement de trois ETP, à hauteur d'environ 160'000 francs par an, soit un total de 2,4 millions sur cinq ans. À cela s'ajoute la nécessité de louer des locaux en raison du manque d'espace dans les bâtiments de la DGE. Il est important de noter qu'environ 40 % de cette dépense ne sera pas directement allouée à la mise en œuvre des objectifs évoqués ci-après. En ce qui concerne les huit objectifs du Plan d'action Vaudois, j'aimerais particulièrement souligner le point n°1 : il est visé une consommation de sol limitée à l'horizon 2050. Toutefois, ce qui a été évoqué en commission, c'est que cet objectif ne se limite pas à une consommation réduite, mais qu'il s'agit véritablement d'un objectif de zéro consommation nette d'ici 2050.

En ce qui concerne le point n°6, qui traite de la pollution des sols et des moyens de s'en protéger, il est souligné que les polluants ne sont plus introduits dans les sols. Cependant, il est également noté que la plupart des produits phytosanitaires utilisés en agriculture deviennent interdits, étant quasiment tous remplacés par des métaux lourds, tels que le cuivre ou le soufre, comme mentionné dans le rapport. En ce qui concerne le point n°7, qui stipule que les informations pédagogiques nécessaires sont fournies aux utilisateurs des sols et aux décideurs, et le point n°8, qui évoque la formation et la sensibilisation des acteurs du sol aux enjeux de la protection des sols, il est important de souligner que, dans la formation initiale, que ce soit pour les agriculteurs ou les forestiers, les données et l'utilisation des sols sont déjà intégrées dans ces parcours éducatifs. En conclusion, le groupe UDC propose de s'abstenir sur l'entrée en matière, estimant que l'objectif visé par cet exposé des motifs ne sera pas atteint.

Mme Sabine Glauser Krug (VER) —

Le Plan d'action Sols est un projet aussi essentiel que fascinant, car il met en lumière la richesse d'un environnement que nous connaissons si peu, alors qu'il représente pourtant l'un de nos plus grands alliés pour la survie de l'humanité, et plus largement, pour la vie sur Terre. Il n'est d'ailleurs certainement pas anodin que notre planète porte ce nom. Il me semble important de souligner que, bien que les sols de notre canton méritent une attention particulière, ce sont en réalité les sols de l'ensemble de la planète qui en ont besoin. Cet exposé des motifs et projets de décrets n'apportera aucune solution aux terres qui s'épuisent sous le poids de la production alimentaire destinée à nourrir les Vaudois. Il n'aura aucun effet sur les territoires dévastés par les séquelles de l'industrie minière, qui soutient notre soif insatiable de haute technologie. En fin de compte, il appartient à chacun d'entre nous de faire preuve de conscience dans nos actes de consommation.

Mais il faut bien reconnaître que notre sol est maltraité ici également. C’est un constat. Que les agriculteurs ne se sentent pas visés par mes propos. Nous sommes toutes et tous responsables car, à l’inverse des personnes travaillant la terre, nous ne prêtons presque aucune attention à ce sur quoi nous marchons, sur ce que nous installons, ce que nous construisons. Tandis que nous nous élevons, il est essentiel de prendre conscience de la profondeur de notre planète, vivante et porteuse de la santé de nos racines. D’une certaine manière, c’est précisément à cette réflexion que cet exposé des motifs nous invite. Il présente huit objectifs stratégiques à atteindre d’ici 2050. Ces objectifs sont pertinents et nécessaires, mais sans excès. Les mesures proposées ne sont donc pas contraignantes, ce qui, en tant qu'écologiste, me désole.

Nous devrons donc compter sur la responsabilité et l'engagement individuel pour mener activement cette renaturation des sols. J’aimerais que celles et ceux qui jugent que 6 millions sont excessifs prennent bien note que nous, écologistes, pensons que l'on pourrait aller plus loin avec davantage de moyens, au regard de l’importance de nos sols et du lien vital entre leur qualité et la santé des êtres vivants. Toutefois, connaissant les mécanismes politiques, nous savons également qu’investir davantage d’argent dans un décret n’aurait pas d'impact, car il ne serait tout simplement pas utilisé. Une grande partie du montant demandé est en réalité indispensable pour simplement appliquer la législation fédérale, notamment en ce qui concerne les frais relatifs à l'engagement du personnel nécessaire à sa mise en œuvre. Ce montant est essentiel pour garantir à long terme un environnement sain et une alimentation de qualité.

Je vous enjoins donc, au nom du groupe des Verts, à adopter ce projet dans son intégralité et sans réserve. Et je me permets de formuler une simple demande à l’attention du conseiller d’État. Lors de la commission, il nous était impossible d’obtenir des précisions concernant l’année de référence pour l’objectif de zéro consommation de sol d’ici 2050, car cette date était encore en discussion. Pourriez-vous, dès à présent, nous informer de l’avancée sur ce point ?

M. Loïc Bardet (PLR) —

Le PLR reconnaît l'importance de protéger les sols de notre canton et, malgré les restrictions potentielles tant pour l'activité agricole que pour l'aménagement du territoire, il soutient les objectifs généraux de cet exposé des motifs. Par ailleurs, le PLR salue le vœu émanant de la commission d’encourager le Conseil d’État à explorer des alternatives permettant de ne pas louer de locaux supplémentaires. Toutefois, le parti souligne une problématique concernant les coûts de personnel. Mme Glauser Krug vient de nous indiquer que 6 millions ne sont pas excessifs par nature. Effectivement, par principe, ce montant n'est pas nécessairement excessif. Cependant, il convient de noter qu’environ 50 % de ces 6 millions concernent des frais de personnel supplémentaires, ce qui est, du point de vue du PLR, inacceptable. Nous estimons qu’il serait possible de trouver des solutions internes, tant au sein de la Direction générale de l’environnement (DGE) que de la DGAV, afin de remplacer les personnes et de réaliser les tâches mentionnées dans cet exposé des motifs. C’est pourquoi, bien que nous soutenions les objectifs, nous ne pouvons pas approuver le projet de décrets dans son ensemble. En conséquence, la majorité du groupe PLR s'abstiendra lors de l'entrée en matière.

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) —

Ce plan nous est présenté avec l’ambition d'atteindre un objectif de zéro consommation nette de sol d'ici 2050. Il prévoit 80 actions regroupées en huit objectifs, visant à répondre à divers enjeux. Le premier enjeu concerne la teneur insuffisante des sols en matière organique, puisque 75 % des sols du canton présentent une teneur insuffisante en cette matière. Un autre défi est celui des excavations de terres dans le domaine de la construction, où il est crucial d’utiliser ces terres pour revaloriser d’autres terrains affectés par l’érosion. Enfin, l’enjeu lié à la biodiversité est essentiel, car près des deux tiers de la biodiversité se trouvent dans les sols.

Finalement, ce plan d'action fait la distinction entre les mesures agricoles et environnementales, avec l'objectif de garantir la qualité des sols. L'ensemble est plutôt complet, mais les ambitions de mise en œuvre reposent largement sur le volontariat, notamment en ce qui concerne les mesures agricoles, pour lesquelles un soutien financier est prévu, mais toujours sur la base du volontariat et de la prévention, sans mesures contraignantes pour accompagner les démarches déjà en cours. Peut-être aurions-nous souhaité des ambitions un peu plus fortes.

Je me permets de revenir sur l’objectif n°6, relatif aux pollutions des sols et aux moyens de s’en protéger. Cet objectif comprend une série d’actions en réponse à l’engagement pris dans la réponse à un postulat que j’avais déposé. L’objectif est d'identifier les sols potentiellement pollués à l’échelle cantonale. Cependant, il ne s’agit pas d’une cartographie exhaustive ; le canton renonce à une approche totale et se concentre sur les terrains dont les usages et les impacts potentiels sur la santé sont connus. À ce stade, nous insistons sur le fait que ce plan d’action, et notamment cet objectif n°6, doit garantir la protection de la population, des usagers des aires de jeux pour enfants et des jardins familiaux, qui doivent être des priorités pour les mesures préventives mises en place. Quant à la question des ETP nécessaires pour mettre en œuvre et suivre ce plan, elle nous semble adaptée. L’avenir nous dira si les moyens demandés seront suffisants.

À ce stade, le parti socialiste vous recommande donc d’accepter cet exposé des motifs et ce projet de décret.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je m'abstiendrai lors de l’entrée en matière de cet exposé des motifs et projet de décret pour plusieurs raisons. La première concerne la page 9, où il est mentionné : « L'imperméabilisation des sols par la construction de bâtiments et d'infrastructures, ainsi que leur dégradation par les activités agricoles, forestières, etc. » Les activités agricoles… Il est clair que dans l'agriculture, que l'on élève du bétail, que l'on cultive des céréales, des fruits ou de la vigne, tout repose sur le sol. Le sol, il faut en prendre soin. C’est exactement ce que nous faisons depuis plus de 12 ans. J'en prends pour preuve le bilan du projet Sols Vaud et les techniques qui préservent les cultures, ou du moins, les techniques culturales qui préservent le sol.

Alors, monsieur le conseiller d'État, si je suis une certaine logique, cela signifie que le million et quelques que vous nous proposez en supplément représente en réalité une continuité du bilan Sols Vaud. Parce qu'alors, qu'est-ce que cela implique ? Cela veut dire que l'État, à travers ce projet de décret que vous nous présentez, ne sert pratiquement à rien, dans la mesure où des travaux ont déjà été réalisés, ces travaux continuent, et que les techniques culturales qui préservent le sol, nous les appliquons déjà depuis, en tout cas, une quinzaine d'années, et je suis même relativement mesuré dans l'appréciation des efforts qui ont été faits jusqu’à présent. Donc, permettez-moi de soulever un point d'interrogation sur cette page 9, et plus particulièrement sur la présentation des objectifs des décrets. C'est dans ce sens-là que je vais m'abstenir, voire que je refuserai l’entrée en matière.

Mme Carole Schelker (PLR) —

J'ai bien entendu les craintes et réserves exprimées par mes collègues de ce côté de l'hémicycle, notamment en ce qui concerne la rationalisation des coûts de l'État et la limitation de l'engagement d'ETP, préoccupations que je partage, bien évidemment. Cependant, je souhaite ici rappeler quelques éléments qui, à titre personnel, me poussent à vous inviter à accepter ce projet. Le Plan Sols fait partie des mesures du Plan climat vaudois, dont nous avons déjà adopté l'enveloppe globale. La première étape, indispensable pour pouvoir agir efficacement par la suite, consiste à rassembler une grande quantité de données disparates et à créer des outils qui seront utiles à tous : aux agriculteurs, aux acteurs du domaine de la construction, aux communes, ainsi qu’à tous les utilisateurs et décideurs, en somme, à nous tous. Cette démarche, bien que nécessitant un investissement initial, représentera à terme un gain de temps pour tout le monde.

Mais oui, il s'agit aujourd'hui aussi de travail de bureau et de coordination, ce qui nécessite l'engagement de nouvelles personnes. Je n'ai entendu personne remettre en question le fond de cet exposé des motifs et projet de décret, ni l'utilité des prestations prévues. Alors oui, on parle d'engagement de personnel pour cette mission, mais au fond, quelles sont les autres options pour réaliser ces prestations de service si l'on ne souhaite pas engager de personnel ? Est-ce que l’on confie ces tâches à des mandats externes auprès de bureaux privés ? C’est une illusion de penser que cela coûtera moins cher, et je déclare mes intérêts, étant moi-même à la tête d’un bureau d’ingénieur dans ce domaine. Cela a été mentionné, mais j’aimerais rappeler que les mesures proposées dans ce projet ne constituent pas une nouvelle base légale contraignante, mais reposent sur des exigences déjà dictées par le cadre fédéral existant. De plus, le cahier des charges met clairement l’accent sur la prévention, sans introduire de mesures contraignantes pour accompagner les démarches déjà en cours. Je vous invite donc, à titre personnel, à entrer en matière sur ces deux projets de décret et à les accepter.

M. Vassilis Venizelos (C-DJES) — Conseiller-ère d’Etat

Merci pour les différentes interventions et les questions soulevées. L’intervention de Mme Schelker est particulièrement importante. Elle a rappelé qu’il n’y a pas de mesure contraignante dans ce qui est proposé ici à travers le Plan d’action Sols. Nous sommes ici dans une stratégie qui vient accompagner les différents acteurs impliqués dans la gestion des sols. Certes, nous avons parlé des agriculteurs, mais il faut également penser aux milieux de la construction, par exemple. Je rejoins parfaitement M. Jobin : les agriculteurs connaissent bien leur sol. Leur métier, en quelque sorte, c’est de travailler le sol et d’en prendre soin, ce qui est évident. Toutefois, il existe des techniques innovantes qui impliquent aussi une certaine prise de risque. Et qui dit prise de risque, dit parfois échec, mais aussi coûts financiers. L’objectif de cette stratégie est de trouver des agriculteurs et agricultrices prêts à participer à des démarches innovantes, prêts à prendre des risques, et ces risques seront soutenus, notamment par le crédit d’investissement qui leur est proposé. Il n’y a donc aucune volonté, à travers ce plan d’action sols, de donner des leçons à qui que ce soit. Nous sommes bien conscients que ce sont les agriculteurs qui connaissent le mieux les techniques pour prendre soin des sols. Ce dispositif a précisément pour objectif de mettre en réseau les agriculteurs et agricultrices qui testent et innovent avec différentes pratiques, afin que ces bonnes pratiques soient ensuite valorisées et généralisées à d’autres exploitations.

L'objectif de zéro net carbone, pour répondre à la question de Mme Glauser Krug, s'inscrit également dans une stratégie fédérale. Nous nous alignons ici sur cette stratégie fédérale, bien que nous ne sachions pas encore précisément quelle sera l'année de référence. Dans le cadre d'une récente consultation sur la révision de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire, les années 2023-2024 ont été évoquées, mais la date de référence n’a pas encore été fixée. Ce que je peux affirmer ici, c’est que, avec ce plan d'action qui vous est proposé, nous ne venons pas imposer une nouvelle contrainte. Si une nouvelle contrainte devait émerger, elle viendrait de la Confédération. Il n'y a donc aucune volonté de la part du Conseil d'État d’inscrire le zéro net consommation de sol à l’horizon 2050. Toutefois, dans la mesure où ce cadre fédéral existe aujourd'hui et qu'il se précisera au fil des années, il nous semble important de l'intégrer dès à présent dans nos réflexions. Cela permettra, le moment venu, si une stratégie fédérale contraignante devait être mise en place, que le canton de Vaud soit déjà préparé et en mesure de se positionner sur l’opportunité de fixer une telle limite à l’horizon 2050.

Sur la question des postes et des locaux, qui a également été longuement discutée en commission, M. Bardet a rappelé le vœu de la commission. Je m'y engage à nouveau devant vous, Monsieur Bardet. Celui-ci a évoqué les locaux, en soulignant l'opportunité et la nécessité, telle qu'elle a été présentée dans l'exposé des motifs, de louer de nouveaux locaux pour accueillir les futurs collaborateurs et collaboratrices. Je l'ai dit en commission et je le rappelle ici devant vous : nous allons trouver une alternative à ce qui est proposé dans l'exposé des motifs. Nous ferons en sorte de ne pas louer de nouveaux locaux pour accueillir ces collaborateurs. Mais pourquoi ces collaborateurs sont-ils nécessaires ? Aujourd'hui, l'État dispose d'un pédologue pour gérer ces différents projets. Vous l'avez vu, la plupart des mesures, et plus particulièrement les projets incitatifs, sont liés au conseil et à la mise en réseau. Il sera donc nécessaire de disposer de personnes pour accompagner ces démarches. Nous aurons également besoin de personnes pour améliorer la connaissance du sol, car il faut bien le dire, nous connaissons mal nos sols. C’est d’ailleurs l’un des objectifs majeurs de ce Plan d’action Sols : renforcer la cartographie. Et pour ce faire, nous avons besoin de ressources humaines : deux postes à la DGE et un poste à la DGAV pour une durée de 4 ans. Ces ressources nous semblent tout à fait raisonnables pour atteindre les différents objectifs fixés dans le Plan d’action Sols.

Sur la question de la formation, en réponse à la remarque de M. Bolay, je tiens à rappeler encore une fois que l'objectif de la Direction générale de l'environnement et de la Direction générale de l'agriculture n'est absolument pas de donner des leçons aux agriculteurs ni de se substituer aux excellentes filières de formation qui existent déjà dans le secteur agricole. Ce que nous envisagions plutôt, c'est de soutenir la formation de certaines faîtières professionnelles, comme celles des milieux de la construction, par exemple. Sur certains aspects et certaines pratiques innovantes, ces secteurs pourraient probablement monter en compétence sur divers éléments. Cependant, il est important de souligner qu'il n'y a absolument aucune volonté de remettre en question les formations agricoles sur ce volet. 

Nous avons ici un plan d'action, et certains le qualifient de peu ambitieux, mais il faut reconnaître qu'il comporte plusieurs mesures essentielles qui, premièrement, nous permettront de mieux connaître nos sols, car il est évident que nous les connaissons encore trop mal. D'autres mesures, ainsi que des crédits d'investissement, ont déjà été votés et d'autres vous seront soumis dans les mois à venir, notamment pour travailler sur la pollution des sols. Par exemple, des investigations sont en cours, soutenues par un autre crédit d'investissement, pour identifier les sols contenant des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). D'ici la fin de l'année, environ 100 investigations auront été menées, ce qui nous permettra de savoir très précisément où cette pollution est la plus préoccupante. Mais ce n'est pas la seule mesure en place. Ce n'est pas non plus le seul crédit d'investissement qui nous permettra d'adopter une politique ambitieuse en matière de protection des sols. En parallèle, nous avons toute une série d'initiatives qui visent à travailler en collaboration avec les agriculteurs. Nous l’avons vu avec les récentes initiatives populaires en matière de biodiversité : un des principaux reproches qui a été formulé à ces initiatives est qu'elles n'ont pas su inclure adéquatement le monde agricole dans leurs propositions. 

Ce Plan d'action Sols a été élaboré en collaboration avec Prométerre, les faîtières agricoles, ainsi que les faîtières professionnelles. Il s'agit d'un plan d'action mesuré et équilibré qui nous permettra de donner une impulsion forte pour mieux connaître nos sols, mais aussi pour développer des pratiques innovantes visant à préserver et à mieux utiliser cette ressource précieuse. Il est important de rappeler que le sol est une ressource non renouvelable, ce qui renforce la nécessité d’en prendre soin pour l'avenir. Je vous invite donc à entrer en matière sur ce plan d'action. Encore une fois, un bilan sera établi en 2027, ce qui nous offrira la possibilité, le cas échéant, de réorienter certaines mesures si elles venaient à décevoir certains acteurs ou si nous devions ajuster l'accent mis sur certaines actions plutôt que sur d'autres.

M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) —

Il est à la fois louable et essentiel de porter attention à la qualité de nos sols. Toutefois, je constate, notamment dans le secteur agricole, quelques incohérences qui méritent d’être soulignées. Par exemple, il est souvent question du manque de matières organiques dans les sols. Je l’admets, mais aujourd’hui, quelle direction prend la politique agricole ? Elle privilégie l’agriculture sans labour, alors que le labour constitue une méthode particulièrement efficace pour enrichir les sols en matières organiques. Voilà un premier exemple. Concernant le tassement des sols, on impose aujourd’hui l’épandage de purin afin de limiter l’évaporation de l’azote, en utilisant des bossettes à pendillards. Or, ces dernières pèsent deux à trois fois plus lourd qu’une bossette classique à purin. C’est précisément à cause de ces incohérences que je choisis de m’abstenir, car il sera nécessaire, à un moment donné, de se mettre tous sur la même longueur d’onde.

M. Vassilis Venizelos (C-DJES) — Conseiller-ère d’Etat

Encore une fois, ce crédit d'investissement et ce plan d'action n'ont pas pour objectif de moraliser une quelconque pratique, mais bien de souligner, comme vous l'avez mentionné, monsieur le député, les contradictions et incohérences présentes dans les recommandations des différentes législations et règlements. L'objectif précis de cette démarche est d'identifier ces incohérences et de travailler en collaboration avec les agriculteurs et le monde agricole afin de trouver des solutions pour les résoudre, dans le but de préserver la qualité des sols. Mais il est important de souligner qu'il n'y a en aucun cas une volonté de moraliser une pratique à travers ce plan d'action. Vous avez raison de rappeler qu'il existe, à certains moments, des incohérences.

M. José Durussel (UDC) —

Je tiens à exprimer mon plein soutien à l’intervention de mon collègue Jean-Rémy Chevalley et à apporter quelques éléments supplémentaires, en tant qu’éleveur et détenteur de bétail. Dans notre exploitation, qui compte un nombre important de vaches laitières, il est évident qu’au cours des dernières années, il y a eu une véritable chasse aux sorcières des détenteurs de bétail et de la production de viande. Je peux vous assurer que dans certaines régions, particulièrement en plaine, où le labour et d’autres pratiques agricoles sont souvent abordés, l'apport conséquent de fumier de ferme a un impact considérable. Les sols s'améliorent de manière rapide et notable, notamment en réduisant l’érosion et en renforçant la structure du sol jusqu'à 20, voire 25 cm de profondeur. Cette méthode est véritablement efficace.

Je n'aimerais pas que l'on revienne une fois de plus sur cette question de moraliser les pratiques agricoles, car, à mon sens, il s'agit en partie de morale qui nous est imposée à nous, détenteurs de bétail. Je pense à mes parents et à mes grands-parents, qui ont toujours fait un excellent travail. En Suisse, nous avons adopté la production intégrée depuis plus de 30 ans, et je suis convaincu que de nombreuses interventions dans le sol ont évolué avec les nouvelles technologies et le poids des machines. C'est pourquoi il est quelque peu dérangeant de toujours voir de nouvelles couches se rajouter. Quant aux 6 millions évoqués précédemment, cela peut sembler modeste, mais comme un député l’a souligné la semaine dernière, nous perdons souvent la mesure des dépenses. Et je me sens tout à fait en phase avec cette remarque.

M. Alberto Mocchi (VER) —

Très brièvement, je tiens à rassurer mes préopinants. Je comprends bien leurs préoccupations. Je reconnais également que notre canton et notre pays ont la chance de disposer d’une agriculture beaucoup plus mesurée et respectueuse de l’environnement et des sols que dans d’autres pays. Cependant, je vous invite à examiner attentivement le texte sur lequel nous serons amenés à voter. Il ne s’agit en aucun cas de moraliser l’agriculture ni d’imposer des restrictions, mais bien de mettre en place des mesures concrètes pour améliorer la qualité de nos sols, ce qui est également dans l’intérêt de l’agriculture. Il est important de ne pas nous tromper de débat. Personne ne cherche à pointer du doigt l’agriculture, et ce n’est pas l’objectif de cette stratégie. Pour ma part, je la soutiendrai en ce sens.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Projet de décret accordant au Conseil d'Etat un crédit d’investissement de CHF 4’675'000 pour financer les mesures environnementales 2025-2029 du Plan d’action Sols

Premier débat

La discussion sur l’entrée en matière n’est pas utilisée. 

L’entrée en matière est admise par 61 voix contre 39 et 23 abstentions.

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en premier débat. 

Art. 1 à 3.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) — Rapporteur-trice

Pour vous informer, concernant l'article 1, un amendement avait été proposé pour réduire de 87'500 francs la somme du crédit d'investissement, mais cet amendement a finalement été retiré. En conséquence, le vœu dont nous avons parlé tout à l'heure a été adopté, formulé comme suit : « La commission demande au Conseil d'État de tout mettre en œuvre pour trouver une alternative aux dépenses liées à l'allocation de bureaux nécessaires à l'accueil de deux nouveaux collaborateurs à la DGE, afin que cet argent puisse être réaffecté à des actions concrètes. » Ce vœu a été adopté par 7 voix pour et 4 abstentions. Sur cette base, l'article 1 a été accepté par 8 voix et 3 abstentions. L'article 2 a été accepté à l'unanimité, l'article 3 à l'unanimité également, et le vote final a recueilli 8 voix pour et 3 abstentions.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Les articles 1 à 3 sont acceptés par 65 voix contre 51 et 14 abstentions.

Le projet de décret est adopté en premier débat.

Projet de décret accordant au Conseil d'Etat un crédit d’investissement de CHF 1’325'000 pour financer les mesures agricoles 2025-2029 du Plan d’action Sols

Premier débat

La discussion sur l’entrée en matière n’est pas utilisée. 

L’entrée en matière est admise par 65 voix contre 42 et 21 abstentions. 

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en premier débat.

Art. 1 à 3.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) — Rapporteur-trice

Pour votre information, l'article 1 a été accepté par 8 voix pour et 3 abstentions. L'article 2 a été accepté à l'unanimité, l'article 3 également à l'unanimité, et le vote final a été accepté par 8 voix pour et 3 abstentions.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Les articles 1 à 3 sont acceptés par 68 voix contre 43 et 20 abstentions. 

Le projet de décret est adopté en premier débat.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) — Rapporteur-trice

Je demande un deuxième débat immédiat. 

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Le deuxième débat immédiat est refusé, la majorité des trois quarts n’étant pas atteinte (80 voix contre 43 et 11 abstentions).

Le deuxième débat interviendra ultérieurement. 

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