23_MOT_30 - Motion Pierre Zwahlen et consorts au nom de Jerome de Benedictis, Elodie Lopez, Laurent Balsiger, Jean-Louis Radice - Motion pour la protection et la restauration de milieux naturels d’ici 2030.

Séance du Grand Conseil du mardi 1er avril 2025, point 17 de l'ordre du jour

Texte déposé

L’Europe et le monde prennent des engagements pour restaurer la biodiversité, en perdition depuis plusieurs décennies. A Montréal en décembre 2022, plus de 190 Etats se sont accordés pour protéger 30% des zones terrestres et des eaux intérieures, des zones côtières et marines, pour les gérer et conserver efficacement d’ici 2030. Les réseaux d’aires protégées seront reliés étroitement, afin d’éviter la sixième extinction de masse. Aux côtés des autres pays, la Suisse s’engage à restaurer 30% des terres dégradées, à réduire de moitié le risque des pesticides et des produits chimiques néfastes, à éliminer à terme la pollution plastique. Les pays riches libéreront 30 milliards de francs par an pour les Etats du Sud mondial. Des indicateurs permettent de vérifier la réalisation de l’accord, adopté sous l’égide des Nations Unies.

 

Le parlement européen et les Etats de l’UE viennent de s’entendre le 9 novembre pour restaurer un cinquième des écosystèmes, des habitats, des sols et des zones abimées jusqu’en 2030. Favorisant le climat, l’accord a pour objectif de rétablir l’ensemble des milieux naturels d’ici le milieu du siècle.

 

Tant l’Agenda 2030 cantonal que le programme de législature visent des buts analogues. Il importe de réaliser ces derniers en collaboration avec la faîtière des milieux agricoles. En août de l’an dernier, notre Grand Conseil unanime (2 abstentions) a approuvé une loi majeure en faveur du patrimoine naturel et paysager. Le canton dispose désormais d’instruments pertinents pour rétablir les écosystèmes, garantir une infrastructure écologique fonctionnelle et pérenne, conserver et promouvoir les milieux naturels, la flore et la faune indigènes, etc.

 

Les signataires de la présente motion demandent au Conseil d’Etat d’établir, dans le plan d’action biodiversité ou dans la loi, la protection et la restauration de 20 à 30% du territoire jusqu’en 2030, selon l’échéance du pacte de Montréal et de l’accord de nos voisins européens.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Andreas WüthrichV'L
Jerome De BenedictisV'L
Vincent JaquesSOC
David RaedlerVER
Laure JatonSOC
Laurent BalsigerSOC
Aurélien DemaurexV'L
Théophile SchenkerVER
Blaise VionnetV'L
Vincent BonvinVER
Hadrien BuclinEP
Circé FuchsV'L
Oscar CherbuinV'L
David VogelV'L
Cloé PointetV'L
Cendrine CachemailleSOC
Yannick MauryVER
Thanh-My Tran-NhuSOC
Eliane DesarzensSOC
Sébastien HumbertV'L
Valérie ZoncaVER
Monique RyfSOC
Aude BillardSOC
Céline MisiegoEP
Isabelle FreymondIND
Marc VuilleumierEP
Patricia Spack IsenrichSOC
Géraldine DubuisVER
Elodie LopezEP
Muriel ThalmannSOC
Jean-Louis RadiceV'L
Yolanda Müller ChablozVER
Graziella SchallerV'L
Yves PaccaudSOC
Claude Nicole GrinVER
Nathalie VezVER
Sylvie PodioVER
Cédric RotenSOC
Anna PerretVER

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Alberto Mocchi (VER) — Rapporteur-trice de majorité

La commission s'est réunie le vendredi 9 février 2024, à la salle de la Cité. Elle était composée de Mmes Aude Billard, Alice Genoud – que je remplace ici au vu de son absence, en tant que rapporteur – Joëlle Minacci, qui remplaçait Mathilde Marendaz, Carole Schelker et MM. Laurent Balsiger, Loïc Bardet, Grégory Bovay, Pierre Fonjallaz, Sébastien Humbert, Pierre-André Pernoud, Pierre-André Romanens, Alexandre Rydlo, Maurice Treboux, Nicolas Suter et moi-même. Accompagnaient M. Vassilis Venizelos, chef du Département de la jeunesse, de l'environnement et de la sécurité (DJES), M. Sébastien Beuchat et Mme Catherine Strehler Perrin de la Direction générale de l’environnement. M. Cédric Aeschlimann, secrétaire de la commission, a établi les notes de séance, et nous l’en remercions. 

Le motionnaire a rappelé l'importance d'une diversité des espèces végétales et animales pour le maintien des écosystèmes dont l'être humain et les autres espèces ont besoin. Cette biodiversité est nécessaire pour les générations futures et mérite notre attention au vu de sa fragilité. En décembre 2022, 190 pays, dont la Suisse, se sont accordés, à Montréal, pour protéger 30 % des surfaces planétaires d'ici 7 ans. En novembre 2023, le Parlement européen a décidé de restaurer un cinquième des sols, des habitats et des écosystèmes abîmés jusqu'en 2030. 

L'agenda de la durabilité du Conseil d'Etat va dans cette direction, ainsi que le Programme de législature qui stipule par sa mesure 2.10 que le Conseil d'Etat souhaite protéger la biodiversité par la réalisation d'un plan sectoriel et d'infrastructures écologiques en créant un réseau central couvrant 15 à 20 % du territoire cantonal. Les motionnaires demandent donc au Conseil d'Etat d'établir, dans le Plan d'action biodiversité ou dans la loi, la protection et la restauration de 20 à 30 % des territoires jusqu'en 2030. Le conseiller d'Etat a rappelé que la préservation de la biodiversité constitue une volonté politique du Conseil d'Etat et une nécessité vis-à-vis de la Confédération. L’Office fédéral de l’environnement (OFEV) considère que le canton possède 8,8 % de surface de haute qualité. Pour augmenter cette proportion, le Conseil d'Etat s'appuiera sur plusieurs axes : 

  • Le nouveau Plan climat sera alimenté à hauteur de 209 millions, dont 15 millions dédiés à la biodiversité. 
  • La révision des plans d'affectation communaux prévoit des mesures pour lutter contre le surdimensionnement des zones à bâtir. Des zones à la qualité écologique nécessaire sont aujourd'hui en zone à bâtir et ne peuvent être ainsi affectées. 
  • Le Conseil d'Etat va préciser les infrastructures écologiques avec l’OFEV – sur l'amélioration de la qualité des surfaces.
  • Des projets de revitalisation dans des zones forestières, agricoles et près des rivières permettront d'atteindre les objectifs. 

Dans la discussion générale, plusieurs commissaires ont émis des craintes quant à l'impact de cette motion sur l'agriculture. Pour d'autres commissaires, cette motion est importante pour la préservation de la biodiversité au niveau cantonal. Elle est aujourd'hui en danger, et il est important de mettre des moyens financiers et humains pour la préserver. Si ces commissaires comprennent les peurs concernant les terres agricoles, ils pensent que la motion n'aura pas beaucoup d'impact sur ces dernières, vu qu'elle ne stipule pas où devront être prises ces terres utiles à la biodiversité et que l'entier du canton n'est pas constitué que de terres agricoles. 

Le motionnaire a rappelé que cette motion doit s'intégrer dans les outils législatifs déjà présents, comme la Loi sur la protection du patrimoine naturel et paysager (LPrPNP), et le Plan d'action biodiversité 2030. Un commissaire a soulevé des préoccupations en matière d'autosuffisance alimentaire. Il a demandé si, au sein des territoires qui toucheraient les domaines agricoles, les rendements seraient limités. La cheffe de la division biodiversité et paysages a estimé que près de 20 % des surfaces qui sont inscrites actuellement pour la promotion de la biodiversité pourraient convenir à cela et qu'il n'y aurait donc pas de problème en la matière. Ces espaces ne sont, en effet, pas dévolus à la production alimentaire. En outre, des mesures innovantes et reconnues par la Confédération sont développées pour amener des améliorations structurelles et qualitatives sur des surfaces que l'agriculture pourrait mettre à disposition. M. le conseiller d'Etat a complété en indiquant que les mesures préconisées ne traduisent pas une volonté politique de limiter la production agricole. 

Au vote, la commission a recommandé au Grand Conseil de prendre en considération cette motion par 8 voix contre 7 et de la renvoyer au Conseil d'Etat, conformément à la requête de ses auteurs.

M. Loïc Bardet (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

La minorité de la commission, composée de Mme Carole Schelker et de MM. Grégory Bovay, Pierre-André Pernoud, Pierre-André Romanens, Nicolas Suter, Maurice Treboux et votre serviteur, s’oppose à la motion pour quatre raisons principales. La première réside dans le fait qu'on ne sait pas exactement de quoi il s’agit. En effet, la motion parle d'un objectif de 20 à 30 % du territoire cantonal, mais – et c'est rappelé dans le rapport de minorité – nous avons déjà eu l'occasion plusieurs fois de demander ce qui serait concerné. Nous en avons discuté pour la première fois lors du débat en plénum du 29 novembre 2022 sur les biotopes d’importance nationale et, à l'époque, le conseiller d'Etat en charge du dossier avait promis qu'il allait présenter rapidement des chiffres à la Commission de l’environnement et de l’énergie (CENEN), ce qui n’est toujours pas le cas. Ensuite, j'ai moi-même déposé une simple question « Protection de la biodiversité, où en est réellement le canton de Vaud ? », le 26 septembre 2023. Alors que le délai pour une simple question est d'un mois, je n’ai toujours pas obtenu de réponse. En déposant le rapport de minorité, j'ai songé que la Direction générale de l’environnement (DGE) profiterait des trois mois entre le dépôt du rapport et aujourd'hui pour y répondre – cela m'aurait un coupé l'herbe sous le pied ! 

Par conséquent, force est de constater qu’il est ardu de connaître le point de départ, ce qui donne un peu l'impression qu’on nous demande de signer un chèque en blanc, tout en ne sachant pas de quelle devise on parle ! Ensuite, venons-en à la question politique. Cette motion reprend en quelque sorte les objectifs de l'initiative biodiversité soumise au vote populaire au niveau fédéral en septembre de l'année dernière. Pour rappel, cette initiative a été refusée par 60 % du peuple vaudois. A l'époque – et je suis très bien placé pour le savoir, puisque j'étais coordinateur des opposants pour la Suisse romande – les opposants avaient été accusés de brandir le chiffre de 30 % alors que ce n'était pas dans le texte. Or, cette fois, ce sont clairement les objectifs de la motion. Lors de la votation de septembre dernier, trois partis – représentés dans cet hémicycle – avaient appelé à refuser l'initiative biodiversité ; j'espère qu'ils en feront de même aujourd'hui. En outre, la motion mentionne l'accord de Montréal signé par la Suisse. Il est vrai que l'objectif de 30 % y est indiqué et que la Suisse va tenir ses engagements. 

Toutefois, il s'agit de rappeler que ce sont des objectifs globaux, que les règles d'application n'ont pas encore été définies, la dernière Conférence des parties (COP) sur le sujet n'a d'ailleurs pas donné de résultats. Ainsi, 30 % ne s'appliquent pas forcément à tous les échelons inférieurs, que ce soient les pays, les cantons, les districts, voire les communes. En effet, certaines communes auront beaucoup de peine à appliquer ce taux de 30 %. 

Enfin, je me permets de rappeler ce que ce taux de 30 % représente. Si nous devions avoir 30 % du territoire cantonal protégé, cela représente l'addition de la surface des districts de l'Ouest lausannois, de Lausanne, de Lavaux-Oron, de Riviera-Pays-d’Enhaut et du district d'Aigle : une surface conséquente. Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission vous recommande de ne pas suivre le rapport de la majorité et de classer cette motion. 

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est ouverte. 

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Permettez-moi de citer d'emblée Ravi Menon, qui préside le réseau des banques centrales, Network for Greening the Financial System (NGFS) : « Nous érodons la biodiversité à un rythme nuisant aux écosystèmes qui nous fournissent nourriture, eau et air pur, ce qui pourrait causer des risques importants pour la stabilité économique, financière et sociale. » Ce n'est pas un membre des Verts qui le dit, c'est une émanation des banques centrales qui s'exprime ainsi. 

La motion en vue de restaurer les milieux naturels a été co-signée par 39 collègues issus de quatre groupes parlementaires et de six couleurs politiques différentes. Je les remercie en mentionnant particulièrement les députés et députées, Elodie Lopez, Jérôme de Benedictis, Laurent Balsiger et Jean-Louis Radice, au nom desquels la motion est présentée. Je remercie aussi la majorité de la Commission thématique de l’environnement et de l’énergie (CENEN) qui vous recommande de transmettre la motion au Conseil d'Etat. Dans le canton, la motion est d'ailleurs bien moins ambitieuse que l'accord de Montréal dont la Suisse fait partie. Elle vise une part de 20 % des territoires au moins en faveur de la diversité végétale et animale. Cette proportion s'inscrit dans la continuité de l'objectif de 15 à 20 % que le Conseil d'Etat a établi pour 2027 dans son Programme de législature. Par ailleurs, cette part de 20 à 30 % ne s'applique pas de manière uniforme. Le rapporteur de minorité a eu raison de souligner mes propos en commission. Ces cinq prochaines années, on encouragera la diversité biologique plus facilement dans le Jura et les Préalpes que sur le plateau. Le directeur de Prométerre, Martin Pidoux, n'a pas fermé la porte, lorsque nous l'avons rencontré avec mes collègues Sébastien Humbert et Laurent Balsiger pour évoquer cette motion. Proconseil accompagnera les paysannes et paysans qui ont le souci des pollinisateurs, qui savent qu'une nature doit être vive biologiquement pour l'agriculture de demain. C'est d'ailleurs l'une des mesures en faveur de l'infrastructure écologique sur laquelle notre Grand Conseil se prononcera bientôt. 

Parlons clairement : nous ne voulons pas limiter la production agricole. Dans une mesure limitée, la motion entend seulement préserver des écosystèmes, restaurer des habitats et des zones abîmées pour un meilleur équilibre de la nature et, finalement, pour l'espèce humaine. 

M. Pierre-André Pernoud (UDC) —

ALe Pacte de Montréal, ayant pour ambition de restaurer 30 % du territoire jusqu'en 2030 à la biodiversité, est inapplicable au canton de Vaud. Force est de constater que l'évolution de la population suisse, vaudoise, voire mondiale, n'est pas en phase de stabilisation. La révision du Plan directeur cantonal vaudois va dans le sens d’une densification, voire d’une restitution de surfaces à bâtir en zones agricoles. Le canton de Vaud possède actuellement 8,8 % de surfaces de haute qualité biologique. Le but du canton est de concentrer ses efforts dans les zones forestières et près des rivières. Le pourcentage visé par le Pacte de Montréal est difficilement applicable aux surfaces du canton de Vaud, sans pénaliser gravement les affectations des terres arables du canton. Par conséquent, le groupe UDC s'opposera à cette motion. 

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je rejoins les propos de mon collègue Pernoud et souhaiterais souligner quelques éléments. On constate un manque de données claires, d’après ce que j’ai pu lire et observer dans les documents de la Direction générale de l’environnement. Celle-ci n’a pas fourni d’informations précises, ni sur les surfaces concernées, ni sur l’état actuel des lieux, ni sur les mesures déjà engagées à ce jour. Un rapport fait d’ailleurs état de promesses non tenues, notamment celle de fournir des chiffres précis en 2022, ainsi que de questions restées sans réponse, comme les questions 23 et 48. C’est précisément ce que relevait le rapport de minorité.

Concernant l’Accord de Montréal, mon interprétation diffère sensiblement. L’objectif de protéger 30 % des surfaces, tel que défini à Montréal, est un objectif global, non contraignant, et concerne tous les niveaux territoriaux, y compris les océans et les pôles. Ce n’est clairement pas comparable à la situation que nous connaissons ici. Il existe une grande différence entre les cantons ruraux et urbains, disparités qui, selon moi, n’ont pas été suffisamment prises en compte dans cette motion.

Il y a par ailleurs un impact négatif sur l’agriculture. Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut privilégier le local, mais il ne faut pas oublier que les territoires agricoles seront inévitablement touchés. Le local et la production alimentaire régionale risquent donc d’être péjorés, d’une manière ou d’une autre. Quant aux objectifs fixés, ils me semblent inatteignables ; ils relèvent davantage d’un vœu pieux. Si cette motion pouvait être transformée en postulat, cela permettrait peut-être d’obtenir des informations plus solides que celles dont nous disposons actuellement.

Enfin, rappelons que le Conseil d’Etat s’est déjà engagé dans des initiatives telles que la création d’un réseau écologique couvrant entre 15 et 20 % du territoire cantonal. Cela ne doit pas être négligé, d’autant que ces efforts ont déjà un impact sur l’agriculture. Ajouter de nouveaux objectifs serait redondant et non prioritaire. Pour toutes ces raisons, je recommande le classement de la motion et de suivre le rapport de minorité. 

Mme Carole Schelker (PLR) —

Le PLR vous invite aussi à suivre le rapport de minorité pour l'ensemble des arguments qui ont été évoqués, notamment par M. le député Jobin, des arguments que je reprends brièvement. Pour moi, il faut vraiment axer notre énergie sur les mesures qualitatives qui sont déjà prévues, sans manger de nouvelles surfaces. Le pourcentage visé par cette motion touchera inévitablement les territoires agricoles et impactera la production indigène. Comme cela a été dit, il faut déjà commencer par connaître l'état actuel avant de se fixer de nouveaux objectifs. 

En effet, on peut se demander jusqu'à quand allons-nous grignoter nos surfaces agricoles. Les agriculteurs font déjà preuve d’un grand sens de l’équilibre pour trouver les compromis entre production et maintien de la biodiversité. En outre, le Conseil d'Etat s'est engagé, via son Programme de législature, à constituer un réseau écologique qui atteint 15 à 20 % ; ce qui est déjà très conséquent. En fonction des objectifs actuels déjà très ambitieux, le PLR vous invite à refuser cette motion. 

M. Jerome De Benedictis (V'L) —

Aujourd’hui, nous avons deux choix : continuer de mettre la tête dans le sable bien profondément et prendre des décisions sur la seule base d'idéologies politiques, ou alors analyser sereinement la situation. Permettez-moi, dans la forme la plus courte possible, de tenter de vous convaincre que la deuxième solution mérite d'être soutenue. Selon les termes utilisés par l'ONU sur sa page dédiée à la conférence des Nations unies sur la biodiversité de Montréal, « L'enjeu ne pourrait être plus important. La planète connaît un dangereux déclin de la nature dû à l'activité humaine. Il s'agit de la plus grande perte de vie depuis les dinosaures. Un million d'espèces végétales et animales sont aujourd'hui menacées d'extinction, la plupart en quelques décennies. » 190 pays ont adopté conjointement le cadre d'objectifs de Kunming Montréal sur la biodiversité, s'accordant sur les objectifs concrets et reconnaissant l'urgence de la situation ; la Suisse en fait bien évidemment partie. 

La principale critique du rapport de minorité concerne l'état des connaissances et l'impact pour l'agriculture de la présente motion. Sachez que je suis parfaitement d'accord avec vous. Peut-être cette motion aurait-elle dû prendre la forme d'un postulat ? J'ai d'ailleurs tenté d'en discuter avec certains députés de la droite de cet hémicycle et n'ai pas reçu de retour favorable. J'entends avec un grand plaisir aujourd'hui que mon collègue Jobin a ouvert une porte à cette solution. Toutefois, un aspect demeure certain : enfouir ce texte parlementaire sous terre n'améliorera pas la biodiversité – et même avec le papier le plus bio du monde ! En revanche, aller à la rencontre des agriculteurs, qui sont certainement les plus convaincus et qui doivent absolument être soutenus face aux énormes enjeux que leur poseront le changement climatique et l'érosion de la biodiversité, est nécessaire. Ne croyons pas que les autres feront une part supplémentaire du job pour que nous en fassions moins. Ne croyons pas que ce problème va se résoudre de lui-même. Ne croyons pas qu'un vœu pieux du Programme de législature suffira. Donnons aujourd'hui un signal fort. Nous méritons de savoir où nous en sommes en termes de biodiversité, et notre population – travailleurs de la terre compris – mérite d'être intégrés à ces travaux plutôt que d'être mis devant le fait accompli lorsqu'il sera trop tard pour agir. 

M. Pierre-Alain Favrod (UDC) —

La biodiversité dans notre canton n’est de loin pas menacée. Il y a d'énormes couches de protection qui font qu'elle n'est pas en diminution ; elles est même plutôt en augmentation. L'agriculture vaudoise en fait largement assez et en a marre ! Bon nombre de réserves naturelles sont surveillées par la DGE qui sert de chambre d'enregistrement des ordres de l'Office fédéral de l'environnement. En d’autres termes, je vous recommande simplement de suivre le rapport de minorité. 

Mme Elodie Lopez (EP) —

Le groupe Ensemble à Gauche et POP vous invite à soutenir cette motion et le rapport de majorité. L'an dernier, l'Office fédéral de l'environnement nous rappelait que la perte de la biodiversité en Suisse représente un grave danger pour notre prospérité et notre qualité de vie, et elle rappelait aussi que la situation était plus grave en Suisse qu'à l'international. Forts de ces constats et des résultats de ces statistiques et études, je pense que nous devons toutes et tous reconnaître que nous sommes confrontés à un problème lié à la chute de la biodiversité et que nous – tous les acteurs économiques, y compris la production agricole – en paierons le prix. Les objectifs sont ambitieux : il faut pouvoir mettre en place des mesures et des stratégies pour les atteindre. C’est pourquoi je ne partage pas l'analyse de la minorité sur le fait qu'il s'agirait de signer un chèque en blanc. Au contraire, je crois plutôt que c’est prendre des mesures sans avoir d’objectifs qui revient à signer des chèques en blanc ; d'autant quand les risques et les conséquences que l'inaction constitue n’échappent à personne. 

Néanmoins, j'entends aujourd'hui la crainte des acteurs agricoles liée aux propositions et à l'atteinte de ces objectifs en matière de préservation de la biodiversité ; nous en avons déjà discuté la semaine dernière. Je ne peux qu'appeler et espérer que nous puissions un jour nous asseoir autour de la table et discuter des mesures et des objectifs qui sembleraient envisageables ou discutables. En effet, je crois sincèrement que nous aurons besoin de la collaboration de tous les acteurs pour pouvoir avancer sur cette voie, y compris de la voix de celles et ceux qui, aujourd'hui, s'opposent fermement à discuter ou à entrer en matière sur des objets comme ceux-ci. Par conséquent, je lance un appel et j'espère que nous pourrons trouver des pistes pour pouvoir aborder ces questions qui, à mon avis, ne sont pas des non-sujets, comme je viens de l'entendre. Pour toutes ces raisons, je vous invite à soutenir cette motion. 

Mme Martine Gerber (VER) —

Je voudrais simplement apporter une précision en écho aux arguments des signataires du rapport de minorité. J'aimerais vraiment insister sur le fait que les terres qui sont à protéger restent des terres agricoles, que les réseaux écologiques soutiennent les paysans à trouver et à adapter leur mode de travail à l'environnement. Ces mesures ne sont pas opposées à l'agriculture, car la biodiversité est une alliée de l'agriculture. La souveraineté alimentaire est en danger, si nous ne parvenons pas –agriculteurs et consommateurs – à adapter nos pratiques aux nouveaux paradigmes que nous fait vivre la crise écologique. 

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Je déclare mes intérêts comme cosignataire de cette motion et membre de la commission qui l'a traitée, étant directement concerné, comme chacune et chacun de nous, à la fois comme l’une des causes de ces lourds enjeux, mais aussi comme victime de leurs effets. Pour rompre le suspense, le groupe socialiste vous invite de manière unanime à soutenir cette motion qui va à la fois dans le sens du Programme de législature et de l’Accord de Montréal ratifié par la Suisse avec l’engagement de restaurer 30 % des terres dégradées d’ici 2030. Certes, cela demande au Conseil d'Etat de hâter un peu le pas, puisque l’objectif du Programme de législature s’élève à 15 ou 20 %, et celui de la motion de 20 à 30 %, ce qui demeure très raisonnable au vu des enjeux. 

A propos de ces derniers, j'aimerais les rappeler, parce qu'ils sont très clairement mentionnés dans le Plan d'action biodiversité 2019-2030 du Conseil d'Etat. Vous me permettrez de citer quelques propos de Mme l'ancienne conseillère aux Etats, Jacqueline de Quattro, responsable alors de ce dossier. « En 2019, la plateforme intergouvernementale, scientifique et politique de l'ONU a fait le constat alarmant que, sur 8 millions d'espèces végétales et animales présentes sur terre, près d'un million pourraient disparaître dans les prochaines décennies. La Suisse aussi est concernée, car plus d'un tiers des espèces de mammifères présentes dans notre pays sont menacées. Cette proportion atteint près de 80 % pour les reptiles et 60 % pour les batraciens, dont certains sont déjà au bord de l'extinction dans le canton de Vaud. On parle d'une huitantaine d'espèces. » Hélas, contrairement à ce que notre collègue Favrod nous a dit, nous ne sommes pas « au mieux » dans notre canton ; au contraire, nous sommes en plein déclin. Le rapport mentionne aussi une trentaine d'espèces végétales en disparition. Pour reprendre le texte cité, « cette situation nous met face à nos responsabilités au moins autant que le réchauffement climatique. Les causes de cette évolution sont en effet, chez nous comme à l'étranger, toutes d'origine humaine. L'inaction s'avère non seulement catastrophique en raison de l'appauvrissement de nos écosystèmes, mais elle est aussi extrêmement dommageable pour les finances publiques. Dans le domaine de la biodiversité, comme dans beaucoup d'autres, réparer coûte beaucoup plus cher que prévenir. A combien évoluons-nous aujourd'hui le prix du maintien du vivant et quels efforts sommes-nous prêts à faire ? Ces questions ne peuvent être éludées. Selon les experts des pays qui ne prennent pas de mesures suffisantes en faveur de la biodiversité, ils s'exposent à des coûts faramineux, estimés à 4 % de leur produit intérieur brut. Pour la suite, il en coûterait ainsi quelque 25 milliards de francs aux collectivités publiques chaque année. Rappelons-nous, en effet, que la préservation de la biodiversité permet le maintien des services essentiels pour l'économie, notre survie alimentaire, notre sécurité et notre qualité de vie. Face à cette situation, l'heure est maintenant à l'action qui est à décliner dans l'ensemble des différentes politiques publiques. »

J'aimerais aussi relever quelques passages importants du rapport de majorité. J’aimerais d’abord citer la cheffe de division biodiversité et paysages : « Près de 20 % des surfaces aujourd'hui sont inscrites actuellement pour la promotion de la haute biodiversité. » Nous pouvons observer les chiffres reçus lors de la séance de commission. Le rapport ajoute : « Ces espaces ne sont pas dévolus à la production alimentaire des mesures. En outre, des mesures innovantes et reconnues par la Confédération sont développées pour amener des améliorations structurelles et qualitatives sur des surfaces que les agriculteurs et agricultrices mettent volontairement à disposition. » M. le conseiller d'Etat complète : « Les mesures préconisées ne traduisent pas une volonté politique de limiter la production des agriculteurs et agricultrices. » En d’autres termes, on constate, contrairement à ce qui a été évoqué par certains préopinants, que les craintes sont réelles : on assiste bel et bien à un déclin de la biodiversité dans notre canton. Mais les surfaces nécessaires pour atteindre les objectifs mentionnés dans la motion sont possibles et même prévues dans les planifications. Par ailleurs, et c'est important, cela se fera par des surfaces mises volontairement à disposition sans volonté de limiter la production. 

Pour toutes ces raisons, je vous invite, une fois encore, au nom du groupe socialiste, à soutenir cette motion et à la renvoyer au Conseil d'Etat. 

M. Pierre Fonjallaz (VER) —

Je déclare mes intérêts en tant que vigneron en biodynamie qui a toutes ses parcelles classées en haute diversité biologique. Je voulais prendre la parole aujourd'hui pour rappeler que l'opposition entre la préservation de la biodiversité et la production agricole n'a pas de sens, ce que montrent toutes les données suffisamment rappelées ici. Au contraire, il est essentiel et possible de produire des aliments avec une biodiversité préservée, et ce, pour notre environnement et notre qualité de vie. Par conséquent, je vous demande de soutenir cette biodiversité, de faire confiance au Conseil d'Etat pour mettre en place les mesures nécessaires et suffisantes pour la maintenir, la préserver et la régénérer. Pour toutes ces raisons, je vous recommande de soutenir le rapport de majorité afin d'agir et d’inverser l'érosion de cette biodiversité. 

M. Alberto Mocchi (VER) — Rapporteur-trice de majorité

Je souhaitais revenir sur certains propos entendus ici. Monsieur Jobin, vous avez souligné – à juste titre – que les Accords de Montréal sont très différents, notamment en raison de leur portée incluant les pôles et d’autres zones spécifiques. C’est précisément ce que les partisans de l’initiative sur la biodiversité ont tenté d’expliquer tout au long de la campagne, lorsque les opposants affirmaient : « Regardez, c’est 30 %, c’est écrit noir sur blanc dans les Accords de Montréal, on va mettre la Suisse sous cloche ! » Je suis donc ravi de constater que vous vous ralliez à cette argumentation ; c’est de bon augure pour la suite.

Concernant les 20 à 30 % de surfaces évoquées pour le territoire cantonal, M. Bardet mentionnait un cumul de plusieurs districts. Il est utile de rappeler que la surface forestière dans le canton de Vaud représente à elle seule 39 % du territoire. Ce sont des proportions considérables. Bien entendu, toutes ces surfaces ne seront pas nécessairement concernées par des mesures de protection, mais cela illustre bien que l’objectif n’est pas de mettre sous cloche l’entier de la zone agricole du canton de Vaud – loin de là.

C’est peut-être d’ailleurs là que le bât blesse dans ce débat, comme le faisait remarquer Mme Lopez : dès qu’il est question de biodiversité dans ce Grand Conseil, on se retrouve trop rapidement dans un affrontement « pour ou contre » la biodiversité sous l’angle de l’agriculture. Un débat qui devrait être large, idéel, devient artificiellement polarisé, comme s’il s’agissait de choisir entre l’un et l’autre.

Bien que je comprenne tout à fait les inquiétudes exprimées par une partie du monde agricole, et que je reconnaisse volontiers que certaines maladresses ont pu être commises dans le passé par certains milieux de la protection de l’environnement qui ont pu mettre « sur les pattes arrière » les agriculteurs et les agricultrices, il me semble qu’il est largement temps de cesser d’instrumentaliser la question de la biodiversité uniquement à travers le prisme de l’agriculture, comme si, d’une part, elle était fortement touchée par cette motion – quand le mot même n’est pas mentionné dans les conclusions – et, d’autre part, d’imaginer qu’il s’agisse du seul secteur touché par la biodiversité. 

Ce qu’il nous faut aujourd’hui, c’est renouer un dialogue serein. Je fais le pari – je suis prêt à miser une bière à la buvette tout à l’heure – qu’une fois encore, ce débat va se clore sur un vote très serré, avec une division nette entre les deux couleurs de l’hémicycle. Et c’est regrettable, car il ne s’agit ici ni de mesures extrêmes ni d’idées farfelues. Il s’agit simplement de respecter les engagements pris par la Suisse au niveau international – engagements pris par la Confédération, non par Greenpeace ou Pro Natura ; je tiens d’ailleurs à déclarer mes intérêts : vous savez que je travaille pour cette association. Il s’agit ici d’appliquer à l’échelle de notre canton des engagements pris par notre pays à l’échelle internationale. Ce n’est donc vraiment pas demander la lune ! 

Encore une fois, je regrette que le débat tourne autour de l’agriculture, quand la question de la biodiversité est bien plus vaste. Bien pensée et bien menée, la question ne devrait pas inquiéter les milieux agricoles.

M. Loïc Bardet (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

Bien que je représente les milieux agricoles, je suis d'accord avec le rapporteur de majorité : cette motion ne se limite pas à l'agriculture, elle concerne l'ensemble du canton. C'est pourquoi, tout à l'heure, le rapport de majorité a été cité, par l’évocation des 20 % des surfaces réservées à la promotion de la biodiversité. Or, ceci concernait la zone agricole et n'est pas remis en cause. En revanche, quand je disais qu'on manquait de chiffres – cela figure aussi dans le rapport de majorité – la représentante de l'administration parle de 21 % des surfaces du canton, tout en indiquant que la Confédération a souligné que la qualité des surfaces vaudoises n’est pas d’un bon niveau. Par conséquent, ces 21 % ne sont pas consolidés. C'est ce que je m'évertue à rappeler depuis un certain temps. De plus, comme indiqué par notre collègue De Benedictis, nous méritons de savoir où nous en sommes. C’est bien la raison pour laquelle il faut commencer par répondre à cette question avant de se fixer des objectifs irréalistes et d’aller plus loin que ce qui est déjà inscrit dans le Programme de législature. 

Enfin, je me permets encore d'amener un argument supplémentaire. L'initiative biodiversité a été évoquée. Relire le message du Conseil fédéral nous apprend que cette initiative populaire était estimée à des coûts annuels pour la Confédération d'environ 400 millions. Ainsi, si l’on part du principe que le canton de Vaud représente 10 % du territoire fédéral, cela représenterait pour le canton, – si l’on adoptait cette motion – des coûts d'environ 40 millions par année, auxquels il faudrait ajouter les coûts indirects : un élément à ne pas négliger. 

Enfin, M. Mocchi a mentionné le fait que 39 % du territoire cantonal soit de la forêt. En tant qu’habitant du Jorat, je sais très bien ce que représente de vouloir trop protéger la forêt ; c'est pourquoi je vous invite à refuser cette motion. 

Mme Laurence Cretegny (PLR) —

M. Bardet s’étant exprimé sur la majorité des points que je souhaitais relever, je serai brève : j’ai simplement une petite question à poser au vu des chiffres et des compléments que nous a donnés M. le député Bardet. Les cosignataires de la motion peuvent-ils nous dire sur quel territoire ils pensent encore ajouter 20 à 30 % de compensation ? 

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Je regrette aussi que, sur des questions comme celles-là, les points de vue soient aussi polarisés. Je reste persuadé, de concert avec beaucoup de paysannes et de paysans, que les exigences de la pollinisation, la vitalité des terres agricoles sont aussi dépendantes d'une bonne diversité de la nature. Nous l'avons dit, je le répète explicitement, comme indiqué en commission par M. le conseiller d'Etat : nous ne voulons pas limiter la production paysanne. Nous voulons même agir – cela figure dans le développement de la motion – avec la faîtière des milieux agricoles pour la mise en œuvre. 

Madame Cretegny, nous recommandons dans cette motion d'agir d'abord sur des territoires peut-être moins denses comme le Jura ou les Préalpes, pour ensuite étendre les zones restaurées. Restaurées ? Cela ne veut pas dire mettre des surfaces sous cloche. Les activités humaines pourront continuer d'y être développées. Nous voulons qu'au moins un cinquième de ces territoires soit restauré. Un cinquième ? C'est bien dans la continuité du Plan de législature, mais il est vrai que cela nécessite quelques efforts qu'il faudra articuler avec les milieux concernés. Je remercie tous les collègues qui accepteront la transmission de cette motion au Conseil d'Etat. 

M. Maurice Neyroud (PLR) —

Je déclare mes intérêts : je suis aussi vigneron encaveur et j'ai aussi des surfaces en haute diversité biologique. Mais, je suis confronté, comme beaucoup de collègues, à des restrictions de traitement aux abords des ruisseaux. On nous interdit le traitement à moins de 6 mètres des ruisseaux, soit 12 mètres, puisque c'est 6 de chaque côté. Bientôt, il s’agira des chemins. Eviter le traitement signifie qu'il faudra simplement arracher la vigne, parce qu'aujourd'hui, il n'existe pas de cépage totalement résistant. Les cépages soi-disant résistants nécessitent de toute façon un à deux traitements. Par conséquent, il est exclu de pouvoir les planter à moins de 6 mètres des ruisseaux, ou des chemins, ou des propriétés privées. Aujourd'hui, malheureusement, il s’agira de dizaines d'hectares qui vont être sacrifiés à l'aune de la biodiversité. C'est malheureusement un grave problème pour la viticulture, notamment pour celle de Lavaux, puisqu'en Lavaux, la concentration est serrée et que pour les plantations, chaque mètre carré, compte. Ainsi, en va-t-il, aussi, hélas, de la survie des viticulteurs. C’est pourquoi je vous incite à voter en faveur du rapport de minorité. 

M. Pierre-Alain Favrod (UDC) —

La terre est là depuis 4’000 milliards d'années. En effet, de nombreuses espèces ont disparu, les dinosaures entre autres, mais pas par la faute de l'homme. Ce ne sont pas trois éoliennes et des herbes sèches qui vont sauver la planète ni le canton de Vaud. Les vingt plus gros porte-conteneurs qui naviguent sur toutes les mers du globe polluent plus que toutes les voitures de la planète. Et, on en dénombre 60'000. Voilà peut-être où il faut agir, plutôt que sur les terres agricoles des paysans vaudois. 

M. Vassilis Venizelos (C-DJES) — Conseiller-ère d’Etat

Je serai relativement bref, mais souhaite revenir sur différents propos. D’abord, il est faux de dire que la biodiversité se porte bien en Suisse. Que les choses soient claires :  les scientifiques, tout comme l’OFEV et le chef du département en charge de l'environnement, s’accordent sur ce point. Il ne faut pas se mentir, la biodiversité ne va pas bien en Suisse et la situation s'aggrave ; c’est une réalité scientifique qu’on ne peut pas combattre, à moins d'être profondément de mauvaise foi. Je le répète : la biodiversité en Suisse ne va pas bien. C'est un fait !

Le Conseil d'Etat ne reste pas inactif pour lutter contre l'érosion de la biodiversité, car il s’agit du socle du vivant. Il est vrai que cette opposition systématique entre protection de la biodiversité et sécurité alimentaire est absurde. Néanmoins, venir avec des initiatives populaires présentées comme des moyens de museler la production agricole n'est probablement pas le meilleur moyen de faire avancer la protection de la biodiversité dans ce canton et dans ce pays ; sur ce point, je rejoins volontiers certains intervenants. 

Par conséquent, il faut trouver un chemin qui permette de respecter les activités des uns et des autres. C'est ce à quoi s’emploie le Conseil d'Etat avec les différents programmes qu'il a annoncés dans le cadre du Programme de législature qui inclut le plan d'action biodiversité tout comme un objectif chiffré qui a d'ailleurs été rappelé en commission. Monsieur Bardet, cet objectif chiffré figure dans le Programme de législature, mais aussi dans le Plan directeur cantonal et dans le plan d'action biodiversité, une fourchette de l'ordre de 15 à 20 % du territoire qui devrait être considéré comme protégée. 

Ainsi, qu’entend-on par protégé ? Il s’agit de sites qui font l'objet d'une décision de protection en matière d'aménagement du territoire, biotopes, forêts, de zones tampons à proximité de renaturations de cours d'eau, mais aussi, évidemment, de zones agricoles ou de zones qui, aujourd'hui, sont occupées par une activité humaine. Il ne s’agit pas de territoires qui sont complètement mis sous cloche, mais qui font l'objet de garanties de protection d'au moins 8 ans. Les différentes surfaces qui font l'objet d'une protection sur le territoire vaudois sont comptées sur cette base. Aujourd'hui, cela s’élève à 10 à 12 %. A cet égard, si M. Bardet veut le détail de ces chiffres et la localisation des différentes surfaces, je veux bien les lui transmettre. Ces éléments peuvent aussi faire l’objet d’une présentation en Commission de l'environnement. Or, le Conseil d'Etat affiche une ambition de l'ordre de 15 à 20 %. Cela ne va pas être simple d'atteindre cet objectif à l'horizon 2027. Nous serons probablement plus proches du 15 % que du 20 %, mais cela sera possible, et ce, sans grignoter sur notre potentiel de production alimentaire, puisqu’à l’évidence, le Conseil d'Etat a aussi pour ambition de renforcer notre souveraineté et notre sécurité alimentaires. Ainsi, il s’agit d’un équilibre à trouver. 

Précédemment, nous avons discuté du Plan d'action Sols qui s’inscrit parfaitement dans cette logique, dans la volonté de trouver des équilibres entre la production agricole et la protection de la nature. Nous amenons des mesures d'accompagnement, d'encouragement. Bien sûr, dans certaines situations, des solutions ne peuvent pas être trouvées, et alors il faut trancher du côté de la production agricole, certaines fois de celle de la protection de la nature. Ce sont des équilibres relativement fins auxquels il faut parvenir.

Par conséquent, atteindre les 30 % à l'horizon 2027 va s’avérer extrêmement compliqué. Je peux vous le dire clairement : nous n’y parviendrons pas. Nous procéderons de façon graduelle, avec 20 % pour objectif, qui est d'ailleurs le minimum proposé dans cette motion. Nous l'atteindrons en 2030, pour autant, évidemment, qu'il y ait des moyens et des ressources qui soient attribués pour atteindre cet objectif, toujours dans le respect de la production agricole, qui doit rester un enjeu et une priorité importante dans les politiques publiques et dans les pesées d'intérêts qui sont portées par le Conseil d'Etat. 

Par conséquent, j’aimerais transmettre deux messages. J’aimerais rappeler que la biodiversité ne va pas bien en Suisse, qu’elle se porte très mal comme partout dans le monde. Il est souvent question de crise climatique ; or, la crise de la biodiversité est la crise écologique majeure qui devrait nous préoccuper, parce qu’il s’agit du socle du vivant, ce qui nous permet de boire de l'eau potable, de nous nourrir, de respirer de l'air pur. Par conséquent, nous devons à tout prix renforcer nos efforts pour améliorer l'état de la biodiversité. C'est dans ce sens que travaille le Conseil d'Etat. A cet égard, la motion proposée ici s'inscrit dans le sillon tracé par le Conseil d'Etat par le plan d'action biodiversité et celui du Programme de législature ; elle permettrait de donner une impulsion forte aux différentes mesures portées par le Conseil d'Etat et à votre Parlement d'être renseigné de façon un petit peu plus précise sur les chiffres que je viens d'évoquer. 

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est close.

Lors du vote, 70 membres acceptent la prise en considération de la motion et 70 s'y opposent. Le Grand Conseil refuse la prise en considération de la motion, le président ayant voté à son encontre.

M. Alexandre Démétriadès (SOC) —

Je demande un vote nominal.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres. 

Celles et ceux qui soutiennent la prise en considération de la motion votent oui ; celles et ceux qui s'y opposent votent non ; les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil prend la motion en considération par 72 voix contre 71.

*insérer vote nominal

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