Votre identité

Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 24 mai 2022, point 5 de l'ordre du jour

Documents

Tableau miroir à l'issue du 1er débat au Grand Conseil - Lois sur le Conseil de la magistrature - (21_LEG_92)

EMPL-D magistrature - Texte adopté par CE

RC - 21_LEG_92 (maj.)

RC - 21_LEG_92 (min.)

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Projet de loi sur le Conseil de la magistrature

Deuxième débat

L’article 1 est adopté tel qu’admis en premier débat.

Art. 2. –

Mme Pierrette Roulet-Grin (PLR) —

Le premier alinéa de cet article indique que « Le Conseil de la magistrature est une autorité indépendante et exerce sa mission de surveillance de façon autonome. » Or, il existe une contradiction avec un article figurant plus loin dans le projet de loi. En effet, la section IIIbis, « Commission thématique des affaires juridiques », article 59a, premier alinéa, stipule que « La Commission thématique des affaires juridiques est chargée d’exercer pour le Grand Conseil la haute surveillance sur le Tribunal cantonal et le Ministère public, d'une part, et sur le Conseil de la magistrature, d’autre part, (…). » Je pose par conséquent la question suivante : n’est-il pas surprenant que l’on supprime la Commission de haute surveillance du Tribunal cantonal et que l’on confie la haute surveillance du Conseil de la magistrature – dont on dit qu’il est une autorité indépendante – à la Commission thématique des affaires juridiques du Grand Conseil qui compte, je le rappelle, parmi ses 15 membres, 7 avocats et une juriste qualifiée, intervenant au nom d’une association fréquentant régulièrement les tribunaux, soit 8 professionnels qui sont appelés à avoir des contacts réguliers avec des magistrats ou des juges, dont ils pourront ensuite apprécier la surveillance dans leur rôle de commissaires à la surveillance. J’estime que figure ici une contradiction entre ce que nous lisons au chapitre I et le projet de loi modifiant celle du Grand Conseil.  

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

La commission nous a proposé un texte que je qualifierais d’abscons, c’est-à-dire probablement peu compréhensible, hormis par ceux qui l’ont concocté. En revanche, la proposition du Conseil d'Etat a l’avantage d’être simple, compréhensible, formulée dans un langage souvent utilisé dans les projets de loi. Je dépose par conséquent l’amendement suivant :  

« Art. 2. –Al. 1 : retour au texte du Conseil d'Etat. »

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Je prends note de la proposition de notre collègue Vuillemin sur cet article 2. Peut-être les membres de la commission pourront-ils compléter mon propos, car une longue discussion a eu lieu sur la rédaction de cet article et de son alinéa 1. En effet, la tournure du Conseil d'Etat qui consistait à dire que le « Le Conseil de la magistrature est indépendant des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire » impliquait qu’en réalité il s’agissait d’une autorité en tant que telle qui, dans la séparation des pouvoirs, aurait aussi dû avoir son existence propre dans la Constitution. La Commission a ainsi estimé que quelque chose ne convenait pas dans la rédaction initiale du Conseil d'Etat. Nous avons constaté qu’il s’agit d’une autorité indépendante qui peut exercer sa mission de surveillance de façon autonome. Cela a occasionné de longues discussions. La formulation finalement trouvée correspond exactement à ce que sera ce Conseil de la magistrature, mieux – si j’ose – que dans la version du Conseil d'Etat.

M. Stéphane Masson (PLR) —

Je remercie la présidente de la commission pour ses précisions qui reflètent les discussions menées autour de cet article 2 du projet de loi, relatif à l’indépendance. Pour répondre à ma collègue Roulet-Grin, je peux comprendre son impression de contradiction entre haute surveillance et indépendance. Or, en réalité, ce n’est pas le cas. En effet, il faut bien comprendre que le Conseil de la magistrature dispose d’une certaine autonomie et qu’il est indépendant. Toutefois, il ne bénéficie pas d’une indépendance qui entre en conflit avec la notion de haute surveillance. De façon identique, on dit que le Grand Conseil conserve une haute surveillance sur la justice et que les jugements conservent leur indépendance. En ce sens, je ne pense pas que contradiction il y ait. Il faut tout simplement comprendre la notion relative d’indépendance et d’autonomie.

Pour aller dans le sens de l’amendement de mon collègue Vuillemin, l’article 2 du projet du Conseil d'Etat, tel qu’il figure dans le projet, s’avère problématique, car sa lecture pourrait nous amener à croire que le Conseil de la magistrature est un quatrième pouvoir, au-delà des trois listés par l’article 89 de notre Constitution. La notion de séparation des pouvoirs n’est pas un modèle absolu, mais d’une certaine manière, une notion relative. Le Grand Conseil dispose d’un pouvoir qui est de haute surveillance et qu’il exerce sur le Conseil de la magistrature et, à travers celui-ci, sur le Tribunal cantonal et bientôt sur le Ministère public, tout en conservant, comme le prévoit l’article 107 de la Constitution, une haute surveillance sur le Conseil d'Etat.

Le Grand Conseil, autorité suprême de notre canton, est composé d’élus en toute bonne conformité d’une démocratie représentative. Ainsi, je considère que c’est faire fausse route que de croire que nous perdons des pouvoirs en déléguant ceux-ci à un corps constitué, à une entité que serait le Conseil de la magistrature. En effet, le Conseil de la magistrature ne sera pas un électron institutionnel libre, mais un mandataire éclairé qui rapporte au Grand Conseil, lequel nomme ses membres et peut même les révoquer.

En conclusion, gardons à l’esprit qu’il s’agit d’une autorité indépendante qui jouit d’une certaine autonomie, mais comprenons que la notion est relative, puisque la haute surveillance demeure en mains du Grand Conseil. Pour ces raisons, je vous prie de ne pas soutenir l’amendement de mon estimé collègue Philippe Vuillemin.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’amendement Philippe Vuillemin est refusé par 63 voix contre 36 et 14 abstentions.

L’article 2 est accepté tel qu’admis en premier débat avec quelques avis contraires et 1 abstention.

Les articles 3 et 4 sont acceptés tels qu’admis en premier débat.

Art. 5. –

M. Hadrien Buclin (EP) —

Pour cette deuxième lecture, je reviens avec un amendement dont la portée est beaucoup plus réduite que celui que nous avions déposé en première lecture. En effet, nous avons pris acte du vote de la première lecture et ne proposons par conséquent plus de changer le nombre de membres du Conseil de la magistrature, mais seulement de donner une légère impulsion en faveur de la présence dans ce conseil d’une personne spécialisée dans la défense des droits humains. En effet, le respect des droits fondamentaux des justiciables devrait être une préoccupation centrale du futur conseil chargé de la surveillance des tribunaux, raison pour laquelle cette modeste impulsion paraît utile. On lit à la page 22 du projet de loi que le but de la nomination d’une partie des membres du conseil par la Commission de présentation est « d’amener un regard différent sur certaines problématiques plus proche des justiciables » ; je considère que nous sommes tout à fait dans la cible avec cette proposition que –j’espère – vous accueillerez favorablement pour sortir d’une vision purement technique des compétences attendues.

« Art. 5. – Al. 1, lettre e : deux autres personnes proposées par la Commission de présentation du Grand Conseil, disposant de compétences particulières, utiles au fonctionnement du Conseil de la magistrature, par exemple en ressources humaines, en médiation ou dans la défense des droits humains. »

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je dépose également un amendement à l’article 5, alinéa 2. Il me semble nécessaire de pouvoir compter – sans signifier qu’on le doive – sur d’anciens magistrats. Ce qui nous est proposé implique des gens en « pleine action ». Toutefois, nous avons pu constater par le biais des visites de la Commission de haute surveillance à quel point les juges peuvent être surchargés. Mon expérience professionnelle montre que pour un être humain surchargé, fatigué, qui doit encore probablement, en fin de soirée, dans une séance du Conseil de la magistrature, agir avec son complet discernement, ne peut peut-être pas faire preuve du recul nécessaire, ce qui serait permis par d’anciens magistrats, faits au feu, pour apporter un éclairage potentiellement bienvenu. Tel que j’ai pu le constater au sein des organisations professionnelles qui sont les miennes, pouvoir profiter de l’expérience de quelqu’un qui a œuvré et qui a encore suffisamment de présence, tout en pouvant profiter d’une certaine distance par rapport à l’institution qu’il a servie, s’avère au bénéfice de chacun.

« Art. 5. – Al. 2 (nouveau) : Les personne proposées sous lettre a à c peuvent être des magistrats en fonction ou des anciens magistrats ayant appartenu à l’institution qui les propose. »

M. Stéphane Masson (PLR) —

Pour réagir à l’amendement proposé par M. Buclin, qui vient ajouter à la liste énumérative des compétences recherchées par les personnes proposées au sein de la commission celles de compétences dans la défense des droits humains, je peux comprendre sa démarche. Toutefois, il me semble qu’il faille garder à l’esprit que la mission première du Conseil de la magistrature consiste en une surveillance administrative et disciplinaire. En tant que compétence particulière, le respect des droits humains ne me paraît pas être de nature primordiale à mettre en avant dans la loi. S’il s’agissait de compétences juridictionnelles, si nous étions à la recherche d’un juge, le point de vue pourrait être différent. Or, ici, il s’agit davantage de médiation, de ressources humaines et non de défense des droits humains au sens large. Pour cette raison, je vous recommande de ne pas soutenir l’amendement Buclin.

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Pour revenir sur l’amendement proposé par M. Vuillemin, de longues discussions en commission ont eu lieu sur la composition de ce conseil. Il est vrai qu’au départ les avocats et les anciens magistrats étaient exclus de la lettre e). La commission a finalement décidé qu’il était inopportun d’exclure complètement d’anciens magistrats ou des avocats brevetés, mais qui ne pratiquent plus forcément en tant que tels, et ainsi de supprimer cet alinéa. Par conséquent, il me semble que la critique formulée par M. Vuillemin a été corrigée par la commission, puisque ces types de profils sont permis. En outre, les discussions menées avec le Tribunal cantonal et l’Ordre judiciaire ont montré qu’il est important pour eux que le Conseil de la magistrature représente leur profession et soit majoritairement représentée par des membres de l’Ordre judiciaire et du Ministère public en exercice. Par conséquent, l’ajout de cet alinéa me paraît erroné. Au nom de la commission, je vous recommande de le refuser.  

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’amendement Hadrien Buclin est refusé par 60 voix contre 53 et 3 abstentions.

Mme Elodie Lopez (EP) —

Je demande le vote nominal.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Hadrien Buclin votent oui, celles et ceux qui le refusent votent non; les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Hadrien Buclin est refusé par 61 voix contre 60 et 3 abstentions.

*Insérer vote nominal

L’amendement Philippe Vuillemin est accepté par 60 voix contre 54 et 7 abstentions.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je demande le vote nominal.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Philippe Vuillemin votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Philippe Vuillemin est accepté par 67 voix contre 54 et 7 abstentions.

*Insérer vote nominal

L’article 5, amendé, est accepté.

Art. 6. –

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je propose un amendement à l’alinéa 1 qui brassera un peu d’air, ce dont je suis conscient. D’abord, j’assume un vieux réflexe de libéral qui, en son temps, ne supportait pas vraiment qu’on lui remette une liste avec pour consigne de la voter. Il me semble que le Grand Conseil, autorité suprême en dehors du peuple, ne doit pas être lié par les propositions qui lui sont amenées concernant les membres du Conseil de la magistrature. Bien entendu, nous réalisons que neuf fois sur dix, tout se passera très bien. Toutefois, il s’agit de prévoir que le Grand Conseil ne se départisse pas « comme cela » d’un de ses pouvoirs. Par conséquent, « si le Grand Conseil n’élit pas un magistrat prévu par l’article 5, alinéa 1, lettre a à d, il invite la Commission de présentation à lui faire une nouvelle proposition » – texte de mon amendement. L’idée consiste à ce que le Grand Conseil reste constamment maître du jeu, et que cela se sache ; et, que nous n’aboutissions pas à une situation dans laquelle il ne fait que ratifier une liste de candidats proposés par le Conseil de la magistrature. Le cas échéant, je considère qu’il est intéressant d’ouvrir un débat sur comment se positionne le Grand Conseil face à l’élection du Conseil de la magistrature et de prévoir ce qu’il est possible d’envisager si le Grand Conseil ne devait pas être content des candidats qui lui sont proposés. Je serais intéressé à connaître l’avis de la présidente de commission, de la conseillère d’Etat et de vous tous.

« Art. 6. – Al. 1 : Le Grand Conseil élit les membres du Conseil de la magistrature parmi les candidats proposés par les autorités ou institutions indiquées à l’article précédentsans être lié par les propositions qui lui sont faites. Si le Grand Conseil n’élit pas un magistrat prévu par l’art. 5 al1 lettre a à d, il invite la commission de présentation à lui faire une nouvelle proposition. »

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Les préoccupations de M. Vuillemin sont légitimes et ont même été discutées lors de nos travaux en commission, puisque la possibilité – tout à fait inopportune – que le Grand Conseil soit amené par défaut à désigner une personne au sein du Conseil de la magistrature sans estimer que cette personne en ait les compétences ou soit souhaitable à ce poste, a été évoquée. Rappelez vous que cela a également fait l’objet d’un débat lors de la première lecture de ce texte, raison pour laquelle la commission vous a proposé de modifier dans le projet du Conseil d'Etat, l’article 6, alinéa 4, pour passer à une élection des membres du Conseil de la magistrature à un tour de scrutin à la majorité absolue des voix et non une élection à deux tours, qui aurait pu avoir comme conséquence, comme l’a rappelé la conseillère d’Etat lors de la première lecture, qu’une personne qui n’aurait bénéficié que d’un très faible score au premier tour du scrutin, serait quand même finalement élue grâce au système de la majorité relative au deuxième scrutin. Pour que le Grand Conseil conserve une possibilité réelle et concrète de refuser l’élection d’une personne qui lui serait proposée par le collège des procureurs ou par le Tribunal cantonal, par exemple, nous avons modifié le mode de scrutin afin que l’élection ait lieu à un tour de scrutin.

Monsieur Vuillemin, c’est la raison pour laquelle, le système que nous vous proposons, tel qu’issu du premier débat, implique que si l’une ou l’autre des personnes proposées par différentes instances ne plaît pas au Grand Conseil, ce dernier a tout bonnement la possibilité de ne pas l’élire. Cela s’opère en un tour de scrutin ; alors, le processus recommence à zéro avec la possibilité pour les différentes instances de proposer d’autres personnes qui conviendraient mieux au Grand Conseil sur la base de critères qui pourraient être explicitées pendant les débats. C’est la raison pour laquelle je vous invite à refuser l’amendement Vuillemin, puisqu’il ne répond pas de manière complète aux préoccupations que nous avons exprimées en commission et en plénum contrairement à la proposition faite à l’issue de la première lecture.

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Je ne peux que confirmer les paroles de notre collègue Jaccoud. En effet, la solution proposée par la Commission thématique des affaires juridiques répond aux préoccupations de notre collègue Vuillemin. Le fait d’avoir prévu une élection en un tour de scrutin, à la majorité absolue, permet que ne soit pas élue une personne qui ne conviendrait pas au Grand Conseil et que la Commission de présentation doive présenter une nouvelle personne – cela soit-il pour tous les membres du Conseil de la magistrature. Par conséquent, l’amendement de notre collègue Vuillemin est superflu et ne répond pas mieux à que ce qui a été préparé en commission.

M. Stéphane Masson (PLR) —

En prolongement de la problématique « perte ou délégation de pouvoir », je rappellerai qu’il n’y a pas de perte de pouvoir. Elire les membres du Conseil de la magistrature d’une façon quelque peu liée ne va pas porter atteinte au pouvoir ultérieur et subséquent que conserve le Grand Conseil. En effet, l’article 13 du projet de loi parle de la révocation. Pour nous, membres du Grand Conseil, il me semble qu’il s’agisse plutôt d’un garde-fou. En effet, au cas où une personne désignée au Conseil de la magistrature ne conviendrait pas étant donné ses agissements ou poserait un problème sérieux, le Grand Conseil conserve la possibilité de révoquer ce membre. Je pense que cet article vient tempérer le souci – bien que légitime – de M. Vuillemin, mais non au point de mériter d’être soutenu par le biais de son amendement.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je vous remercie pour cet essentiel débat qui fera partie à l’évidence de l’acceptation ou non de ce Conseil de la magistrature. Il faut parfois, aussi, solliciter le débat pour que certaines choses ne s’oublient pas. Ainsi, je vous remercie pour les différentes interprétations données et je retire mon amendement.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’amendement Philippe Vuillemin est retiré.

L’article 6 est accepté tel qu’admis en premier débat avec quelques avis contraires et abstentions.

Les articles 7 à 11 sont acceptés tels qu’admis en premier débat.

Art. 12. –

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Puisque l’amendement portant sur l’article 5 a été accepté, il me semble que la lettre g) de l’article 12, alinéa 1, doit être supprimée.

« Art. 12. — Al. 1, lettre g) : suppression. »

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Vous me voyez quelque peu empruntée. En effet, nous découvrons aujourd’hui ces amendements, dont les implications n’ont pas été discutées, et cela pose un certain nombre de questions. J’ai toutefois envie de répondre que malgré l’acceptation par le plénum de l’amendement portant sur l’article 5, les membres de la magistrature qui seront élus au Conseil de la magistrature – les lettres a, b, c de l’article 5 – devront être proposés par ces institutions, c’est-à-dire que si le Tribunal cantonal veut proposer un de ses anciens juges cantonaux, il lui incombera de proposer cet ancien magistrat et non pas les deux membres externes. L’amendement proposé pose un certain nombre de problèmes, puisque de cette manière la lettre g n’est pas en adéquation. Mais peut-être qu’il faut en effet le supprimer.  

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Bien entendu, il est toujours sain que le débat ait lieu en plénum, ne serait-ce que pour les interprétations futures à donner au texte. Pourtant, comme toujours, créer des amendements à la dernière minute avec 150 députés se révèle un peu plus compliqué. On réalise qu’une loi ne se limite pas à un article, mais qu’il s’agit d’un ensemble qui admet une certaine cohérence travaillée en commission. Dans ces circonstances, il est très difficile de se prononcer sur la suppression ou non de l’article 12, lettre g). Puisque nous sommes pris à la dernière minute avec ces amendements, une solution raisonnable consisterait à placer à la fin de la lettre g), « sous réserve de l’article 5, alinéa 2. » Ainsi, on voit qu’une exception a été créée et qu’elle se voit confirmée par l’article 12. Comme l’a dit la rapportrice de la majorité, je crains fort que si nous supprimions totalement la lettre g), que cela ait des impacts qu’on ne visualise pas encore totalement pour d’autres critères de nomination.

« Art. 12. — Al. 1, lettre g : lorsque le membre quitte l’autorité ou l’institution qui l’a proposé., sousréserve de l’art 5, al. 2. »

Je considérerais raisonnable et élégant qu’au bénéfice de cet amendement, M. Vuillemin se joigne à moi pour soutenir cette modification et retire le sien, car cela me paraît un peu périlleux de supprimer une lettre en plein deuxième débat.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Vous allez voter l’amendement que j’ai proposé – de toute façon un troisième débat aura lieu. Si, lors de ce troisième débat, ce qui fut accepté en deuxième débat viendrait à être refusé, cela rendrait caduque la proposition faite pour l’article 12, lettre g.

Toutefois, on peut aussi se rallier à la proposition de mon collègue Buffat, dans la mesure où cela laisse les choses ouvertes pour le troisième débat. J’aurais besoin de voir le texte exact de mon collègue Buffat pour, le cas échéant, retirer provisoirement cet amendement. Quant au reste, je rappelle que je remercie toutes les commissions du monde et du Grand Conseil de travailler comme elles ont travaillé… puis viennent le plénum et ses débats. J’ai connu un temps où l’on déposait cinq amendements par article et cela prenait deux jours ; pourtant, j’y ai survécu.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Je vous rappelle que lors du troisième débat il n’existe pas de possibilité de nouvel amendement.

M. David Raedler (VER) —

Effectivement, lorsqu’on procède ainsi, on a un peu l’impression d’un bricolage et d’une usine à gaz. J’ajouterai aux paroles sensées de M. Buffat et à l’amendement qu’il a déposé, la chose suivante. Sans me souvenir parfaitement de l’article 6, alinéa 1, amendé, que nous avons voté, j’estime toutefois que ne pas adopter le sous-amendement Buffat représente un risque car nous serions confrontés à une situation où une avocate ou un avocat en exercice qui aurait été nommé par l’Ordre des avocats – article 5, alinéa 1, lettre d – ne quitte pas le conseil lorsqu’il n’est plus en exercice. Ce serait absurde par rapport à l’article 5, alinéa 1, lette d, puisque dans ce dernier, on souhaite un ancien Bâtonnier et un avocat ou une avocate en exercice. Lorsqu’il n’y a pas de logique entre les amendements, alors surgissent ce type de problèmes. En outre, cela nourrit la jurisprudence car cela crée des problèmes particulièrement intéressants pour les avocats et les avocates.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Monsieur Raedler, je vous rappelle que l’amendement à l’article 6 a été retiré.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Je vous invite à faire preuve d’une grande clarté, c’est-à-dire à refuser l’amendement de M. Vuillemin ainsi que le sous-amendement de M. Buffat et de nous en tenir au texte du Conseil d'Etat. Ces amendements bricolés ne sont pas souhaitables au plénum. Si j’exprimais une forme de cynisme, je dirais qu’il aurait été souhaitable que le PLR règle ces questions au sein de son propre groupe avant d’arriver au plénum. Enfin, par souci de clarté, refuser ces amendements et revenir au texte du Conseil d'Etat, qui a le mérite d’être clair, nous permettrait de continuer les débats.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

J’aimerais rassurer la députée Jaccoud : elle connaît mon esprit d’indépendance ! Le PLR n’y est pour rien ; c’est du Vuilllemin tout craché ! Sa vie durant, il n’a pas voulu faire comme on aurait souhaité qu’il fasse… cela ne l’a pas empêché d’être souvent réélu. Je maintiens mon amendement.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Le sous-amendement Marc-Olivier Buffat est refusé par 64 voix contre 50 et 15 abstentions.

L’amendement Philippe Vuillemin est refusé par 69 voix contre 55 et 7 abstentions.

L’article 12 est accepté tel qu’admis en premier débat avec quelques avis contraires et abstentions.

Les articles 13 à 59 et 60, formule d'exécution, sont acceptés tels qu’admis en premier débat.

Le projet de loi est adopté en deuxième débat.

Le troisième débat aura lieu ultérieurement.

Projet de loi modifiant celle du 19 mai 2009 sur la médiation administrative du 26 mai 2021

Deuxième débat

Les articles premier, 14 et 2, formule d'exécution sont acceptés tels qu’admis en premier débat.

Le projet de loi est adopté en deuxième débat.

La discussion générale n’est pas utilisée.

Le projet de loi est adopté définitivement par 91 voix contre 27 et 5 abstentions.

Projet de loi modifiant celle du 8 mai 2007 sur le Grand Conseil

Deuxième débat

Les articles premier, 56a à 58a sont acceptés tels qu’admis en premier débat.

Art. 59a.–

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je dépose un amendement qui va aussi brasser un peu d’air et dont la formulation est la suivante : « La commission thématique des affaires juridiques peut exceptionnellement procéder à des visites. » Tout le monde aura repéré le terme « exceptionnellement ». Les lois sont aussi faites pour les cas de très mauvais temps. Ainsi, votre serviteur pense qu’il est essentiel de réserver cette possibilité à des événements exceptionnels qui doivent quand même permettre à la Commission thématique des affaires juridiques de procéder à des visites.

Pour illustrer ce principe, voici quelques exemples historiques, ou en tous les cas un. Il y a plus de vingt ans, un certain nombre de citoyens se plaignaient non pas des jugements, mais de la façon dont travaillaient certaines Chambres du Tribunal cantonal. Alors, il avait bien fallu trouver des solutions pour que le Grand Conseil puisse s’emparer du problème, et inventer toute une série de choses pour que cela devienne possible ; ce fut pénible pour tout le monde ! J’aimerais qu’on évite cela. Or, les circonstances actuelles… peut-être avez-vous lu l’article dans 24heures concernant le conseiller communal socialiste lausannois. Sans me prononcer sur la teneur des propos de ce monsieur, je constate que cela a pris 4 ans. Il y a sans doute d’excellentes raisons pour que cet éminent conseiller communal ait enfin une réponse au bout de 4 ans, mais cela me paraît quand même assez long, même s’il faut faire des investigations sur Internet. Il s’agit peut-être d’un cas isolé, mais le jour où cela prendra beaucoup trop de temps pour un certain nombre de citoyens, et dans la mesure où ces citoyens n’auront évidemment pas voulu faire durer l’affaire par le biais de leur avocat…  En effet, les visites de la Commission de haute surveillance nous ont aussi permis de comprendre que certaines Cours boucleraient volontiers les affaires plus vite, si de constantes requêtes des avocats de certaines parties, bien que probablement justifiées, n’advenaient pas. Ainsi, certaines situations prennent 9 ou 10 ans pour être jugées. Enfin, dans l’ensemble, sur des choses relativement simples, on doit se demander pourquoi cela peut prendre 4 ans. Si cela devait se répéter, nous nous dirigerions alors vers une judiciarisation de plus en plus importante de notre société – ce que personnellement je regrette – et les gens accepteraient de moins en moins que cela dure si longtemps. Par conséquent, il faudrait pouvoir prévoir que la Commission thématique des affaires juridiques, dans des cas très particuliers, conserve le droit de faire des visites. Je n’ai pour ma part pas compris le véritable psychodrame qui s’est opéré autour de ces visites. A un moment donné, il faut avoir les preuves qui nous permettent de nous déterminer correctement.

Dans un tout autre domaine, j’avais procédé à la même observation quant à un crédit voulu par la Commission thématique des infrastructures, quand un de nos collègues verts avait montré à quel point cela s’était avéré stupide de ne pas se rendre sur place pour réaliser ce qui se passe, sous prétexte qu’une visite n’allait pas être organisée. Cela ne va pas ; raison pour laquelle j’ai ajouté le terme « exceptionnellement ». Si cela doit revêtir un caractère justement exceptionnel, cela doit rester possible, sous peine qu’un jour – peut-être plus vite que l’on ne le croit – le Grand Conseil doive réinventer cette possibilité pour la Commission thématique des affaires juridiques, car ayant décidé qu’aucune autre ne recourrait à des visites.

« Art. 59a. — Al. 1, lettre e (nouvelle)  : La commission thématique des affaires juridiques peut exceptionnellement procéder à des visites. »

Mme Graziella Schaller (V'L) —

Comme le député Vuillemin, je fais partie de la Commission de haute surveillance du Tribunal cantonal qui procède actuellement aux visites des offices. Pour toutes les raisons qui ont été développées par M. Vuillemin, je vous invite à accepter cet amendement. En effet, ces visites permettent aussi de montrer que le Grand Conseil est à l’écoute de certaines préoccupations sans que ces visites soient perçues comme intrusives. Elles permettent des échanges enrichissants tant pour le Grand Conseil que pour l’Ordre judiciaire. C’est l’un des points qui a été qualifié de très problématique, lors de la consultation par la Commission de haute surveillance du Tribunal cantonal. Je vous invite à soutenir cet amendement, afin que cette possibilité de procéder à des visites soit inscrite dans la loi.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Encore une fois, je ne peux que vous inviter à vous montrer très attentifs au texte proposé et à le refuser. Nous avons déjà émis une « spéciale », ce matin, en votant l’article 5, alinéa 2, et en refusant les deux amendements à l’article 12. Nous possédons une loi qui est déjà incohérente en tant que telle, puisqu’il fallait au moins accepter l’un des deux amendements – mais, passons ! Voilà maintenant autre chose : les visites de la commission thématique. Comme cela figure dans le reste de l’article 59a, il s’agit de haute surveillance, ce qui signifie surveiller la surveillance. Dans ce cadre, il faut respecter la séparation des pouvoirs. Rien n’est impossible, puisque l’auteur de l’amendement aime à se targuer de sa longue expérience de député. Or, cela fait 15 ans que je siège à la Commission des affaires juridiques, et nous n’avons jamais eu la moindre nécessité de procéder à de quelconques visites. A nouveau, il ne s’agit pas de susceptibilité plus ou moins bien placées, mais de cohérence d’un texte. Dans ce contexte, l’amendement qui a été accepté ce matin s’avère déjà incohérent. N’ajoutons pas de l’incohérence à l’incohérence ! Le texte admet son propre équilibre et prévoit que les visites ne soient pas effectuées par cette commission. Quant à l’interprétation des adverbes… Je vous rappelle les intéressantes discussions menées sur la Commission d’enquête parlementaire (CEP)… que signifient des situations graves ou exceptionnelles ? Nous avons passé une demi-journée à discuter la sémantique pour identifier s’il s’agissait de circonstances telles qu’à justifier ou non une CEP. Si vous aimez la sémantique et les discussions qui tournent en rond, alors il faut voter cet article…car cela engendrera avec certitude des discussions infinies sur le pourtour de cet amendement qui, je me permets de le dire, tombe du ciel et qui n’est pas coordonnée avec le reste de la loi. Restons cohérents et refusons cet amendement ! 

M. David Raedler (VER) —

Il me faut à nouveau souligner le sens des propos de notre collègue Buffat relativement à la cohérence du texte et des problèmes liées à cet amendement. J’en ajouterai deux autres. D’abord, il s’agit d’observer que les visites sont prévues aux articles 22 et 27 de la Loi sur le Conseil de la magistrature, exercé par le Conseil de la magistrature, tous les éléments qui y ont été placés pour s’assurer que les personnes opérant ces visites soient suffisamment représentatives puisqu’elles doivent provenir de deux institutions différentes. En outre, sur l’aspect sémantique, les articles 22 et 27 de la Loi sur le Conseil de la magistrature traitent de la surveillance, alors que le Grand Conseil dispose, lui, de la haute surveillance qui intègre plusieurs pouvoirs relativement étendus et qui ne doivent pas se mélanger avec la surveillance – toute l’idée de cet organe. Ensuite, le second problème est purement littéraire. Voici l’article 59a, alinéa 1, lettre e, tel que nous allons le voter, en vous rappelant qu’il est impossible, lors du troisième débat d’intégrer des modifications. Cette disposition serait rédigée comme suit : « la Commission thématique des affaires juridiques est chargée : lettre e : La Commission thématique des affaires juridiques peut exceptionnellement procéder à des visites. » Malheureusement, lorsqu’on dépose des amendements de cette façon, au milieu de rien, cela mène à un langage qui dysfonctionne ; un problème qu’il s’agit de relever. En conclusion, je vous invite à refuser cet amendement.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Lors du débat d’entrée en matière, mon groupe Ensemble à Gauche et POP s’est opposé au Conseil de la magistrature, parce que nous craignions une perte du contrôle démocratique exercé par le Parlement et une dérive vers un entre-soi lié à la corporation des juristes, avocats et autres procureurs. Par cohérence, nous allons soutenir cet amendement qui propose de renforcer la surveillance et les moyens de contrôle par le Parlement, puisqu’il contrebalance quelque peu la crainte que nous nourrissions quant à un affaiblissement du contrôle parlementaire.

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

La question des visites a également occasionné un important débat en commission, et l’une des craintes exprimées par les différents auditionnés, notamment par le Tribunal cantonal et le Ministère public, résidait dans le fait d’assister à une multiplication des visites, que ce soit de la part du Conseil de la magistrature ou d’une commission du Grand Conseil, et que finalement le travail demandé soit en quelque sorte phagocyté par ces visites. La haute surveillance sur le Conseil de la magistrature existera et il y sera exercé cette surveillance. Le Conseil de la magistrature exercera, lui, la surveillance administrative. Nous avons décidé de déléguer cette charge au Conseil de la magistrature. Le but de la loi serait en partie vidé de son sens si l’on commençait à ajouter cette compétence à la Commission des affaires juridiques, parce que ce qui est souhaité revient à une simplification du système. Or, cette proposition recomplexifie le système. Il faut refuser cet amendement. Le Tribunal cantonal et le Ministère public seraient sans doute fort insatisfaits de constater qu’une couche supplémentaire a été ajoutée. Ce fut un élément qui est souvent ressorti des auditions : ne pas multiplier les interlocuteurs lors des visites dans les offices, afin de les laisser faire leur travail.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Quittez la Loi sur la magistrature, puisque nous en sommes au projet de Loi modifiant celle du 8 mai 2007 sur le Grand Conseil ! Je ne conçois pas pourquoi nous continuons à parler de l’article 5, alinéa 2, si ce n’est que certains n’ont pas supporté d’avoir perdu ! Laissons donc cela pour le troisième débat, merci !

En effet, le mot « exceptionnel » permet des interprétations infinies. Mais, je vous en prie, le Grand Conseil a toujours su utiliser quelques mots, comme « en principe ». Que signifie cette dernière expression ? C’est pourtant bien commode que dans un projet de loi puisse figurer « en principe ». A ceux qui me suivent, je dirais qu’il faut dès maintenant se montrer aussi très pointus sur ce dernier terme, puisque c’est le cas pour « exceptionnel ». En fait, c’est du grand n’importe quoi !

Pour moi, cet amendement vise à garder une possibilité très éventuelle. Si cela ne plaît pas au Tribunal cantonal, cela m’est complètement égal ! Je ne siège pas au Tribunal cantonal, mais au Grand Conseil du canton de Vaud, qui débat, décide et vote ! Tout le monde parle de séparation des pouvoirs. Or, ne se ferait-il que dans un sens ? Je rêve !

J’estime que l’amendement que je propose peut vous être utile ; si vous ne le considérez pas, vous en faites ce que bon vous semble, et j’espère que vous n’en aurez jamais besoin ! Cela me ferait rire que, dans quelques années, vous deviez réintroduire quelque chose comme la Commission de haute surveillance, parce que les temps auront changé et que les citoyens se plaindront de plus en plus du fonctionnement de la justice. Alors, peut-être serez-vous content de pouvoir vous appuyer sur ce texte ou sur autre chose car vous aurez fini par réfléchir.  Votez comme vous voulez, advienne que pourra ; cela me donnera le plaisir de vous suivre !

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d’Etat

Je vous invite fortement à refuser cet amendement, pour des raisons à la fois institutionnelles et de fonctionnement de la justice – soit les deux arguments évoqués par M. Vuillemin, mais avec des conclusions totalement inverses. Concernant les raisons institutionnelles, il y a deux éléments : la simplification qui a été voulue par rapport au système de surveillance et la cohérence de ce que l’on fait, surtout la confusion des genres que l’on introduirait. Nous sommes toutes et tous attachés à la séparation des pouvoirs et, aujourd’hui, il y a un choix qui est effectué par ce Parlement d’instituer un Conseil supérieur de la magistrature. Dès le moment où ce choix est opéré, il est aussi acté que la surveillance de la justice est faite par ce Conseil supérieur de la magistrature. Dès lors, la haute surveillance, qui sera celle du Grand Conseil, est une surveillance de la surveillance. Vous ne pourrez pas à la fois instituer un Conseil de la magistrature qui effectue cette surveillance et donner les mêmes compétences au Grand Conseil. C’est là où l’on a, d’une part, un millefeuille qui s’épaissit et, d’autre part, une confusion entre les tâches de surveillance, avec un Tribunal cantonal qui serait finalement surveillé à la fois par le Conseil supérieur de la magistrature et par le Grand Conseil, et ce, avec exactement les mêmes moyens. Il y aura donc potentiellement une confusion des genres, avec un office qui pourrait par exemple être visité deux fois la même année – une fois par le Conseil supérieur de la magistrature et une fois par une commission du Grand Conseil – parce que le terme « exceptionnellement » reste juridiquement indéterminé. Vous soumettriez donc l’autorité judiciaire à une double surveillance. Or, c’est exactement ce que ne souhaite pas le Tribunal cantonal, parce que d’un point de vue institutionnel vous devez faire un choix. Dans ce cadre, j’aimerais rappeler que tous les cantons qui ont instauré un Conseil de la magistrature ont dû, en parallèle, remettre des compétences du Grand Conseil qui sont des compétences de haute surveillance. Je parle sous contrôle : il n’y a pas de canton qui prévoit des visites d’offices par des commissions du Grand Conseil, dès le moment où il y a un Conseil supérieur de la magistrature qui est désigné. On aurait donc là une autorité doublement surveillée, avec de potentielles confusions et de potentiels avis divergents entre le Conseil supérieur de la magistrature et la commission du Grand Conseil, et avec de potentiels conflits institutionnels. Or, c’est justement ce que l’on souhaite éviter.

Je suis sensible à ce que dit M. Vuillemin. Ce que l’on veut, c’est garantir le fonctionnement de la justice et s’assurer, notamment sur les questions de délais ou d’autres typologies de fonctionnement, que l’on ait les moyens d’intervention. Le Conseil de la magistrature peut intervenir sur le fonctionnement de la justice, notamment sur les questions de délais ; le Grand Conseil quant à lui va discuter avec le Conseil de la magistrature et il peut aussi auditionner le président du Tribunal cantonal et le Ministère public. Il peut demander des compléments aux rapports qui seraient faits par le Conseil supérieur de la magistrature. Enfin, si un citoyen se plaint du fonctionnement de la justice, il doit pouvoir agir – vous avez raison, monsieur Vuillemin. C’est la raison pour laquelle, à l’article 27, il y a une possibilité de dénonciation. N’importe quel citoyen qui se plaindrait d’une problématique liée au fonctionnement de la justice peut dénoncer le cas au Conseil de la magistrature, qui peut s’en saisir et donc regarder s’il y a un problème de fonctionnement de la justice. Dès lors, à la fois pour les raisons institutionnelles que j’ai évoquées et pour les raisons de fonctionnement de la justice, qui sont à mon sens préservées par les dispositions qu’on a mises, je vous invite à ne pas soutenir cet amendement qui va créer une énorme confusion des rôles.

Mme Pierrette Roulet-Grin (PLR) —

Je crois que c’est le moment de rappeler que le Conseil de la magistrature est composé de neuf membres, dont la majorité sont des acteurs de la justice – des procureurs ou des membres du Tribunal cantonal. Cela veut dire qu’ils exercent deux fois la surveillance : une fois la surveillance dans l’office dans lequel ils travaillent et une autre fois par le biais du Conseil de la magistrature. Pour moi c’est une caricature ! Je vous prie de m’excuser pour le terme, mais on ne peut pas le dire autrement. Si on garde une porte ouverte pour que des députés puissent aller dans des offices, c’est une bonne chose. Je l’ai fait ces 7 ou 8 dernières années et toutes les remarques ou demandes qui ont été faites, tout ce qui a été transmis à l’échelon fédéral, avec l’accord du Tribunal cantonal, se sont bien passées, même si nous ne voyons pas beaucoup d’effets ici, car nous ne sommes pas au même niveau. Je vous en prie : acceptons cela ! Il y a le mot « exceptionnel » et je crois qu’il est possible de le faire. Les membres du Conseil de la magistrature exercent deux fois : la surveillance de leurs offices et la haute surveillance par le Conseil de la magistrature. Plutôt que les raisonnements de juristes, il faut regarder sur le terrain, en y allant chaque année pour voir ce qui se passait. Nous avons rapporté au Tribunal cantonal et ce dernier était très content des remarques que l’on faisait, parce qu’il y a peut-être une ouverture différente selon si ce sont des députés qui viennent ou si c’est le chef direct. Je vous invite à suivre cet amendement.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Madame Roulet-Grin, je crains que vous ne confondiez deux choses : il existe, d’une part, pour les magistrats du Tribunal cantonal, la compétence de contrôle des jugements de première instance. C’est une existence de contrôle juridictionnel qui n’a absolument rien à voir avec la surveillance de la justice. C’est précisément afin de respecter l’indépendance de la justice que ces deux éléments sont séparés et que, lorsque le Grand Conseil, ou un organisme qu’il délègue, exerce la surveillance, respectivement la haute surveillance sur la justice, ces autorités ne procèdent pas à un contrôle en opportunité du caractère juridictionnel de ces autorités. J’ai assez entendu, dans ce Grand Conseil, de théories sur l’indépendance de la justice pour ne pas laisser aujourd’hui dire que le Tribunal cantonal exerce deux fois la surveillance sur la justice ; c’est tout simplement faux. Il ne faut pas confondre les compétences juridictionnelles du Tribunal cantonal, qui est amené à vérifier la conformité au droit des jugements de première instance, et la surveillance sur la justice qui ne va précisément jamais aller toucher sur la qualité des jugements, faute de quoi on serait dans un acte qui serait profondément une infraction à l’indépendance de la justice, puisque ni le Grand Conseil ni un organisme délégué par celui-ci ne pourraient venir juger de l’opportunité ou non, et de la qualité des jugements qui sont rendus par le Tribunal cantonal ou une autorité de première instance. Le débat est extrêmement complexe, mais ne confondons pas des principes qui sont fondamentalement différents. Revenons-en au texte du Conseil d’Etat. Je vous invite donc à refuser l’amendement proposé, non pas parce que la situation actuelle emporterait une sorte de crise de légitimité par le Grand Conseil, mais parce que le Grand Conseil est parfaitement souverain lorsqu’il décide de la création d’un Conseil de la magistrature et qu’il élit – et on l’a vu précédemment avec la possibilité de pouvoir refuser des personnes qui lui sont proposées à l’élection – des membres du Conseil de la magistrature et qu’il confère à celui-ci des compétences pour exercer la surveillance et la haute surveillance sur la justice. Je vous invite donc à refuser cet amendement et à ne pas confondre ce qui s’appelle un contrôle juridictionnel avec une surveillance administrative de la justice.

M. David Raedler (VER) —

En complément à ce qu’a dit Mme Jaccoud, il faut rappeler que le fonctionnement et la composition du Conseil de la magistrature répond aux recommandations de la Convention de Venise, et ce, afin d’assurer une indépendance effective de la surveillance administrative qui est faite – et non la surveillance juridictionnelle. Le dernier élément que je me dois de relever ici est qu’il ne faut pas évoquer l’entregent des avocates et avocats, magistrates, procureurs, etc… Connaître le fonctionnement de la justice est une chose, mais je peux vous assurer que le Ministère public, les juges, les avocates et les avocats ne sont pas copains comme larrons. L’objectif des visites prévues dans la surveillance du Conseil de la magistrature est justement de mettre un pouvoir interne du pouvoir judiciaire en contrôle des autres. C’est cela qui est fait par le Conseil de la magistrature et c’est cela qui est effectif.

Mme Pierrette Roulet-Grin (PLR) —

Je m’étonne de cette attaque frontale concernant la méconnaissance que l’on aurait. Je rappelle que ce qui a été appliqué jusqu’ici est la Loi sur la haute surveillance du Tribunal cantonal, qui était le fait d’une commission. Je rappelle aussi que, dans la Constitution, il est clairement indiqué – et on l’a respecté année après année, visite après visite – que le Grand Conseil exerce la haute surveillance sur l’activité du Conseil d’Etat ainsi que sur la gestion du Tribunal cantonal ; l’indépendance des jugements est réservée. Je vous mets au défi de nous dire où nous avons pêché en confondant les rôles.

M. Stéphane Masson (PLR) —

Madame Roulet-Grin, je ne pense pas que la Commission de haute surveillance du Tribunal cantonal ait pêché par le passé. Elle a peut-être eu des problèmes de fonctionnement dans des cas précis, mais en l’occurrence, on ferait vraiment fausse route en modifiant cette Loi sur le Grand Conseil, puisque cette Loi sur le Conseil de la magistrature est accompagnée d’un certain nombre de lois qui s’articulent entre-elles en cascades et finit en beauté par une modification de la Constitution vaudoise. L’article 107 – dont on va discuter plus tard – exprime clairement, si on l’adopte, le fait que la haute surveillance qu’exerce le Grand Conseil sur le Tribunal cantonal et le Ministère public se fait au travers du Conseil de la magistrature. Constitutionnellement, on a donc la réponse à la question soulevée par Mme Roulet-Grin. Si cela se fait « à travers », cela ne se fait pas « à côté ». C’est aussi simple que cela.  

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d’Etat

Madame Roulet-Grin, le système actuel fonctionne plus ou moins bien avec les constats que l’on a pu faire, déjà dans l’entrée en matière, par rapport à des problématiques de confusions des rôles et de conflits institutionnels que l’on a pu vivre et qui ont amené à cette volonté de créer un Conseil de la magistrature. Je tiens à redire que la Loi sur la haute surveillance du Tribunal cantonal contient déjà aujourd’hui des éléments de surveillance. La visite d’offices est considérée comme de la surveillance et non comme de la haute surveillance, en dépit du titre de la loi. La Commission de haute surveillance du Tribunal cantonal a déjà aujourd’hui des tâches de surveillance qu’elle n’aurait pas forcément dû avoir ou qu’elle a parce que le Grand Conseil a voulu se les attribuer. Toutefois, c’est considéré comme de la surveillance. C’est donc bien cette compétence de surveillance qui est redonnée au Conseil supérieur de la magistrature. Je n’émets pas un jugement sur la Commission de haute surveillance du Tribunal cantonal ou sur le travail qui a été effectué jusqu’à aujourd’hui – d’ailleurs j’ai également été membre de cette commission dans une autre vie. Aujourd’hui, on fait un choix : soit on institue un Conseil supérieur de la magistrature, soit on garde le système actuel, mais on ne peut pas avoir un système hybride. A un moment donné, la surveillance est faite par le Conseil supérieur de la magistrature et la surveillance de la surveillance est donnée au Grand Conseil. Je le rappelle : le Grand Conseil désigne les membres du Conseil de la magistrature ; par la loi, il lui donne des compétences importantes ; à la fin, il surveille le Conseil de la magistrature en parlant avec lui, avec le Tribunal cantonal et avec le Ministère public, tout en ayant les compétences de demander des compléments de rapports au Conseil supérieur de la magistrature. On a donc toute la chaîne qui est respectée par rapport aux compétences du Grand Conseil, avec des compétences non pas identiques, mais complémentaires de haute surveillance sur ce Conseil supérieur de la magistrature. Sinon on a un problème de confusion des genres.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’amendement Philippe Vuillemin est refusé par 83 voix contre 27 et 8 abstentions.

L’article 59a est accepté avec quelques avis contraires et abstentions.

Les articles 59b, 59c, 143 à 156a, 160 à 167a, premier et 2, formule d’exécution, sont acceptés.

Le projet de loi est adopté en deuxième débat.

La discussion générale est ouverte.

Mme Pierrette Roulet-Grin (PLR) —

En date du 22 septembre 2002, près de 45 % des électeurs vaudois sont allés voter. Une nette majorité d’entre eux a décidé de remplacer la Constitution vaudoise de 1885 par une nouvelle charte fondamentale plus adaptée à notre époque. Les 180 articles de notre charte fondamentale ont été adoptés par 56 % des votants. Parmi ces dispositions constitutionnelles, l’article 107 de notre charte fondamentale a textuellement confié au Grand Conseil la haute surveillance sur l’activité du Conseil d’Etat, comme sur la gestion du Tribunal cantonal. Validée par l’autorité fédérale, notre actuelle Constitution est entrée en vigueur le 14 avril 2003, suivie de ses dispositions d’application dans la Loi sur la haute surveillance du Tribunal cantonal adoptées en mars 2011 et appliquées depuis lors.

Aujourd’hui, ce plénum enlève au Grand Conseil, et par conséquent aux représentants de la population, la moitié du bénéfice de l’article 107 de la Constitution, concrétisé par la Loi sur la haute surveillance du Tribunal cantonal que les électeurs et électrices appliquent depuis 2012 par Grand Conseil interposé. Logiquement, suite à la direction prise par la majorité de ce plénum, je pose la question au Conseil d’Etat : quand la suppression complète de cet article 107 de la Constitution interviendra-t-elle ? Les auditeurs super qualifiés et des experts-comptables encore plus avertis remplacent la Commission de gestion, lui évitant ainsi de passer des heures et des jours à procéder à la haute surveillance de l’activité du Conseil d’Etat, ses services pouvant rapporter devant ce plénum. Est-ce la suite du chemin esquissé par le Conseil d’Etat il y a quelques années ? La question est posée !

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je vais finalement refuser ce projet de loi. On ne va pas se cacher : quand il faudra aller devant le peuple, il y aura une discussion intéressante à mener. Il y a des frémissements depuis une année ; même la zone à défendre (ZAD) du Mormont nous rend service. Je ne suis pas sûr que le Grand Conseil perçoive une évolution de la justice, de la manière dont elle est ressentie et rendue. Peut-être que ce débat salutaire devant le peuple permettra de mieux considérer tout l’intérêt qu’il y a à garder une structure qui est l’interface entre les citoyens vaudois et le Grand Conseil, par rapport non pas à la justice dans les jugements rendus, mais dans sa gestion des choses. J’en suis intimement convaincu, alors rendez-vous au mois de septembre pour cet intéressant débat.

Je tiens à rajouter une chose : c’est fou comme Venise est importante. Je ne savais pas qu’il y avait une Venise de la justice ; je savais qu’il y avait une Venise de l’architecture et de la préservation des biens culturels, qui est ancienne. D’ailleurs, que cela vienne de Venise fait rire : eux qui ont longtemps accepté de gros cargos qui ont détérioré la ville. Si on pouvait arrêter de parler de Venise et s’occuper de notre humble canton de Vaud, tout irait bien.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d’Etat

Je ne vais pas revenir sur de nombreux éléments déjà évoqués précédemment, notamment lors du débat d’entrée en matière. Je me réjouis que l’on ait pu aborder ces discussions de manière approfondie, notamment s’agissant des rôles institutionnels de chaque autorité.

J’aimerais répondre à Mme Roulet-Grin, qui interpelle le Conseil d’Etat. Je suis moi-même une ancienne constituante et suis donc très attachée à notre Constitution cantonale et aux fondements juridiques de notre canton. Toutefois, je précise que cette Constitution n’est pas ancrée dans le marbre ; il y a d’ailleurs plusieurs motions qui demandent des changements constitutionnels. Un texte fondateur comme une Constitution est toujours appelé à évoluer en fonction des problématiques de la société et la légitimité-même de ce texte est garantie, puisqu’il s’agit à chaque fois d’un vote populaire.

S’agissant du Conseil supérieur de la magistrature, il nous est reproché de venir avec cette proposition, alors même qu’il y a eu énormément de discussions autour de ce conseil. Or, ces discussions ont eu lieu en particulier avec et par le Grand Conseil, puisque ce conseil a été demandé par un postulat de M. Mahaim. J’aimerais rappeler que, dans ce cadre, ce n’est pas le Conseil d’Etat qui s’est auto-saisi. De plus, cela fait 10 ans que l’on parle de ce Conseil supérieur de la magistrature, et ce, non pas par rapport à de la sculpture sur nuages, mais par rapport à des événements qui sont intervenus à partir de 2010, concernant le fonctionnement même de la surveillance de la justice ; des rapports ont dû être faits, avec des problématiques qui ont eu lieu entre le Tribunal cantonal et le Grand Conseil, avec des soucis de lien institutionnel entre autorités. Suite à cela des rapports ont été faits, notamment le rapport Marty qui a demandé l’institution d’un Conseil supérieur de la magistrature ; il y a eu des échanges de vue avec le Grand Conseil, il y a eu des demandes de faire un conseil de ce type. Il y a également eu une proposition du Conseil d’Etat qui visait simplement à élargir les compétences de la Cour administrative – une proposition qui n’a pas eu l’heur de plaire au Grand Conseil, qui a souhaité réellement un Conseil supérieur de la magistrature. Il y a eu un avant-projet qui a été soumis à consultation, avec un accueil favorable de la majorité des milieux intéressés ; un nouveau projet qui est aujourd’hui soumis au Grand Conseil, qui vote de manière souveraine sur ce sujet ; et un vote populaire. Je trouve donc particulier qu’il y ait une attaque frontale envers le Conseil d’Etat concernant un objet de ce type qui est discuté depuis 10 ans et qui amène un vote de l’ensemble de la population.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je suppose que vous avez ouvert la discussion finale uniquement sur le projet de Loi concernant la Loi sur le Grand Conseil ? Car la discussion finale sur le Conseil de la magistrature viendra à l’issue du troisième débat. Il faut peut-être recentrer l’affaire. Pour le moment, je n’ai rien dit concernant mon vote sur le Conseil de la magistrature, je me suis seulement exprimé sur la LGC. (La présidente confirme).

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est close.

Le projet de loi est adopté définitivement par 83 voix contre 30 et 3 abstentions.

Projet de loi modifiant la loi du 11 septembre 2007 sur la protection des données

Deuxième débat

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 79 voix contre 25 et 6 abstentions.

Projet de loi modifiant la loi du 12 décembre 1979 d’organisation judiciaire

Deuxième débat

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 82 voix contre 26 et 6 abstentions.

Projet de loi modifiant la loi du 19 mai 2009 sur le Ministère public

Deuxième débat

Il est passé à la discussion du projet de loi, article par article, en deuxième débat.

Article premier. –

Les articles 2 à 16a et 17 à 27 sont acceptés tels qu’admis en premier débat.

Art. 33. –

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Je dépose l’amendement suivant :

« Art. 33. – Al. 1 (retour au texte du Conseil d’Etat) : Les Procureurs adjoints sont élus par le Grand Conseil au 1er janvier 2023 pour une durée de deux ans selon la procédure applicable à l’élection du Procureur général jusqu’au 31 janvier 2022. »

Pour rappel, en premier débat, nous avions eu un amendement porté par Mme Labouchère qui modifiait l’alinéa 1. Mon objectif est qu’en deuxième débat, nous revenions au texte initialement proposé par le Conseil d’Etat, afin que les deux Procureurs généraux adjoints soient élus par notre Grand Conseil au 1er janvier 2023. Au contraire, la solution proposée par Mme Labouchère – et acceptée en premier débat – consistait à prolonger la place des Procureurs généraux adjoints pendant deux ans, sans qu’ils soient élus au 1er janvier 2023.

A l’appui de mon amendement, je vais reprendre mes arguments développés en premier débat, mais qui me semblent absolument fondamentaux, d’autant que les débats de ce matin dans le cadre du deuxième débat sur les autres lois ont été centrés autour de la notion de légitimité démocratique de l’institution du Conseil de la magistrature. C’est précisément un enjeu de légitimité démocratique qu’il s’agit ici de régler.

Le Conseil d’Etat, dans sa grande sagesse, avait proposé le texte que je reprends dans mon amendement, afin de garantir une légitimité démocratique au futur collège des procureurs qui sera composé du Procureur général et des Procureurs généraux adjoints, notamment pour que ce collège puisse désigner les procureurs qui seront validés par le Grand Conseil pour siéger au sein du Conseil de la magistrature. A l’opposé de la légitimité démocratique que souhaite le Conseil d’Etat, nous avons la version du premier débat qui penche vers la continuité qui n’est voulue par personne d’autre que le Procureur général sortant, qui craindrait un manque de continuité dans l’institution au vu de son probable départ à la retraite au 31 décembre 2022. Cela m’avait amenée, au premier débat – vous vous en souvenez sans doute – à appeler l’amendement Labouchère la « lex Cottier ».

Par ailleurs, si ce plénum est soucieux de la notion de continuité, rien n’empêche les deux Procureurs généraux actuels de déposer leur candidature pour leur propre poste, de suivre le processus démocratique et d’être ensuite validés par notre Grand Conseil. S’ils procédaient ainsi et si le Grand Conseil les validait, ils auraient une légitimité démocratique nettement plus forte que celle qui consisterait simplement à prolonger leur fonction, sans passer par une élection. Une légitimité plus forte qui confirmerait également leur proposition au sein du collège des procureurs pour désigner celles et ceux qui siègeront au Conseil de la magistrature et qui exerceront les compétences du Grand Conseil déléguées à cette institution. L’exception qui est ressortie des débats d’il y a deux semaines est motivée uniquement par le potentiel départ à la retraite du Procureur général, qui aurait comme conséquence que les deux Procureurs généraux adjoints seraient, au 1er janvier 2023, les seuls magistrats reconnus par nos différentes lois et ne pas être au bénéfice d’une élection par notre Grand Conseil. En effet, a contrario, les magistrats – par exemple, du Tribunal cantonal – qui verraient leur mandat prolongé, bénéficient déjà d’une légitimité démocratique, puisqu’ils sont élus par le Grand Conseil, ce qui n’est pas le cas des Procureurs généraux adjoints actuels.

Si le vote du premier débat devait être confirmé, nous aurions une exception qui perdurerait pendant deux ans et créerait un trou et une entrave à la légitimité démocratique chère à ce Grand Conseil et qui a été voulue par le Conseil d’Etat dans le projet initial. Il est absolument essentiel que le collège des procureurs, qui sera en fonction dès le 1er janvier 2023, bénéficie de cette légitimité que nous, Grand Conseil, pouvons lui accorder en élisant les trois magistrats qui le composeront. Je vous invite à ne pas céder aux sirènes d’un Procureur potentiellement sortant, d’une prétendue absence de continuité au sein d’une institution, mais à vous rappeler qu’il s’agit de conserver une légitimité démocratique forte pour la création d’un organe qui sera chargé d’exécuter des tâches que nous lui déléguons. Je vous invite donc à soutenir mon amendement, à revenir au texte initial du Conseil d’Etat et à voter en faveur de la légitimité démocratique, au détriment d’une soi-disant continuité qui serait supérieure à cette légitimité.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

J’ai besoin d’une précision : vous ne présentez que l’alinéa 1, alors que dans le texte du Conseil d’Etat, l’alinéa 2 dit : « La durée des fonctions des autres magistrats du Ministère public au sens de l’article 8 est prolongée jusqu’au 31 mars 2025. ». L’incluez-vous également ?

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

De mémoire, l’alinéa 2 de l’article 33 n’a pas été modifié par l’amendement Labouchère lors du premier débat.

Le texte issu du premier débat contient des alinéas 1 et 2. Si le texte issu du premier débat contient un alinéa 1, qui est l’amendement de Mme Labouchère, et un alinéa 2 qui est identique au projet du Conseil d’Etat, mon amendement porte uniquement sur l’alinéa 1. Je n’ai aucun grief à formuler contre l’alinéa 2 du projet du Conseil d’Etat, accepté au premier débat.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

En attendant d’être en mesure de vous répondre, nous poursuivons la discussion.

Mme Catherine Labouchère (PLR) —

Ce ne sera pas une surprise pour vous : je vais vous demander de confirmer le vote du premier débat. En effet, il ne s’agit pas d’une affaire personnelle, mais d’une question de continuité de la justice, un principe général. En aucun cas, nous ne visons une personne qui déciderait de partir. Cet amendement est parallèle aux dispositions transitoires prévues à l’article 179a de la Constitution du canton de Vaud. Nous avons eu une longue discussion à cet effet et nous devons confirmer notre vote du premier débat. Cela permettra d’avoir une certaine continuité dans tous les pouvoirs, ce qui relève aussi d’une légitimité démocratique.

M. David Raedler (VER) —

Je confirme que l’alinéa 2 figurait dans le projet du Conseil d’Etat. Ce qu’a déclaré Mme la députée Jaccoud est donc correct.

Je vous invite à soutenir l’amendement déposé maintenant en raison des explications données par Mme Jaccoud, ainsi que du concept plus large qui consiste en la chose suivante : prévoir une « lex Ministère public » ne se justifie pas et, comme a déjà été répété par plusieurs députées et députés, il importe de conserver les pouvoirs du Grand Conseil et reconnaître la compétence de ce dernier dans le choix et les élections. Par cette disposition transitoire, nous nous restreignons, en réalité, dans nos possibilités de choisir et de donner acte à notre pouvoir de représentantes et représentants. Paradoxalement, par ce genre de règles transitoires, on se restreint, ce qui n’était pas la volonté exprimée par plusieurs personnes dans ce plénum. C’est plutôt une question de responsabilité de notre part. Il est essentiel d’assurer une transition des dossiers et la continuité des activités du Ministère public, tout comme il est nécessaire d’assurer la transmission des dossiers et la continuité du travail des autres personnes juges et magistrates. Dans ce contexte, il est de nos compétence et responsabilité de l’assurer. Accepter une disposition transitoire n’est donc pas utile ni nécessaire dans la mesure où ce sera à nous de nous en assurer.

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

J’aimerais apporter quelques précisions quant à l’alinéa 2. A l’issue des travaux de la commission, il n’y avait pas d’article 33. Ce dernier avait été complètement balayé par la commission. Mme Labouchère a redéposé un article 33 avec un alinéa 1 différent du projet du Conseil d’Etat et un alinéa 2 qui correspondait au projet du Conseil d’Etat. L’alinéa 2 est actuellement celui qui a été proposé par Mme Labouchère en premier débat et qui correspond au projet du Conseil d’Etat. C’est l’alinéa 1 qui était différent du projet du Conseil d’Etat.

Concernant les amendements, les dispositions transitoires prévues dans la modification de la Constitution prévoient que les fonctions de juges cantonaux et du Procureur général sont prolongées jusqu’au 31 décembre 2024. Il y a donc une cohérence à avoir un parallélisme pour tous les magistrats en fonction. Il y a du sens à accepter l’amendement de Mme Labouchère.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

J’appuie les propos de Mmes Labouchère et Bettschart-Narbel. C’est l’amendement de Mme Jaccoud qui est une « lex Cottier » et en fait une particularité. En effet, selon le principe général, à la lecture de l’article 33 et l’article 179a des dispositions transitoires constitutionnelles, la durée de fonction des juges cantonaux, ainsi que celle du Procureur général est prolongée jusqu’au 31 décembre 2024. Ainsi, la « lex Cottier » consisterait à prévoir une exception pour que cela ne dure que jusqu’au 31 décembre 2022. Si vous acceptez cet amendement, il faudrait donc modifier l’article 179a de la Constitution, et toute l’architecture du système. Chacun connaît, dans cet hémicycle, la hâte de Mme Jaccoud à voir le Procureur général Cottier quitter ses fonctions, mais nous n’allons pas en faire une spécialité ; nous en avons déjà fait une tout à l’heure. Par cohérence – juges cantonaux, Procureurs généraux, article 33, alinéa 2 qui prolonge les fonctions des adjoints jusqu’en 2024 – il faut mettre tout cela au même niveau. Ce n’est que repousser de deux ans le processus d’élection et accorder une certaine stabilité au système judiciaire en général. Je vous remercie donc de rejeter cet amendement.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Je souhaite rebondir sur quelques éléments mentionnés par celles et ceux qui sont intervenus en soutien au vote du premier débat. Premier élément : l’amendement que je propose n’est rien d’autre que la volonté de revenir du texte initial du Conseil d’Etat, et non une spécialité Jaccoud. Cet amendement revient à ce que le Conseil d’Etat a décidé lorsqu’il a validé le projet de loi. A ma connaissance, le Conseil d’Etat n’est pas revenu sur cette décision depuis. Il s’agit donc de soutenir sa version, à savoir cet amendement.

Deuxième élément : Mme Labouchère explique que ce n’est pas du tout en lien avec une personne de vouloir prolonger les adjoints jusqu’au 31 décembre 2024 sans les élire. Je suis désolée, madame Labouchère, je vous renvoie au rapport de majorité de la commission qui précise expressément le contenu de nos échanges en commission : c’est à la suite de discussions avec le Procureur général concernant les dispositions transitoires – et en lien avec le fait que sa retraite est fixée au 31 décembre 2022 – que cet amendement est intervenu en commission. Ce n’est pas moi qui le dis, madame Labouchère, c’est écrit dans le rapport de majorité de la commission.

Dernier élément : vous estimez qu’il y a une incohérence à ne pas prolonger les Procureurs généraux adjoints, alors que les juges cantonaux et le Procureur général le seraient jusqu’au 31 décembre 2024. Il me semble que mes propos étaient clairs lors de ma première intervention, mais je peux imaginer que ces aspects techniques ont pu disperser l’attention de cette assemble. Je rappelle donc que les Procureurs généraux adjoints, contrairement aux juges cantonaux et au Procureur général, ne sont actuellement pas élus par le Grand Conseil. Pour cette raison, il est nécessaire qu’ils le soient au 1er janvier 2023. Ainsi, ils auront la même légitimité démocratique que les magistrats du Tribunal cantonal et que le Procureur général, qui sont élus par le Grand Conseil. Pour cette raison, pour ceux-ci, nous pouvons prolonger leur mandat jusqu’au 31 décembre 2024 sans qu’ils souffrent d’une absence de légitimité démocratique, puisqu’ils doivent leur position actuelle à une élection au Grand Conseil. Les deux Procureurs généraux adjoints, eux, doivent leur légitimité uniquement à une embauche. Ils sont engagés selon un processus associé à la Loi sur le personnel, qui n’a rien à voir avec une élection au Grand Conseil. Ces deux personnes en fonction actuellement ne bénéficient pas de la légitimité démocratique du vote par le Grand Conseil. Pour cette raison, il convient de pallier ce déficit et de les élire au 1er janvier 2023. L’égalité de traitement, monsieur Buffat, convient de traiter de manière identique des situations identiques et de traiter de manière différente des situations qui le sont. Les magistrats du Tribunal cantonal et les magistrats sont dans des situations différentes de celle des Procureurs généraux adjoints, raison pour laquelle il convient de les traiter différemment et de les soumettre à une élection pour le 1er janvier 2023, afin qu’ils aient la légitimité démocratique nécessaire pour désigner les membres qui siègeront pour le compte des procureurs au sein du Conseil de la magistrature. Pour cette raison, je vous invite à valider mon amendement.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d’Etat

Je ne vais pas intervenir sur les questions de personnes, de « lex Cottier ou de « lex Jaccoud ». Concernant la question d’une affaire de personne ou non, ce sont les deux choses à la fois. Ce n’est pas une affaire de personne au sens de savoir s’il s’agit de M. Cottier ou de M. Tartempion. La question est de savoir si vous voulez une continuité de l’institution ou une réélection en bloc avec tout ce que cela implique en lien avec la démission d’une personne. C’est la véritable question. Pour le Conseil d’Etat, le départ à la retraite du Procureur général – peu importe la personne dont il s’agit – n’a pas été pris en considération dans l’élaboration du projet de loi.

Quand on parle de discussions avec le Procureur général, je vous renvoie au rapport de la commission, qui est totalement transparent, puisqu’il y a eu une audition du Procureur général dont la retranscription très claire explique que le Ministère public estime préférable de procéder de manière différée dans le temps.

Je ne vais pas revenir sur le fond, mais je suis intervenue lors de la première discussion juste avant le vote nominal, parce que, quelle que soit l’option que vous preniez – l’amendement de Mme Labouchère ou la version du Conseil d’Etat – il nous faut une disposition transitoire. J’insiste sur ce point. Lors des votes finaux de la commission, nous nous sommes retrouvés sans disposition transitoire, ce qui est le pire que l’on puisse imaginer. On ne saurait pas comment traiter cette question. Quelle que soit l’issue de vos débats, il nous faut un article. Si un amendement est accepté et qu’il n’y a plus d’article, on ne saura plus quoi faire avec la période transitoire concernant le Ministère public. Vous mettriez le Conseil d’Etat et l’ensemble des institutions dans une problématique dont nous aurions de la peine à nous extirper. Je tenais à vous rappeler cet enjeu institutionnel, car la question s’est posée en commission et nous l’avons presque eue en premier débat.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Mme Labouchère avait déposé l’amendement à l’alinéa 2. Il est dans le tableau miroir.

L’amendement Jaccoud est accepté par 62 voix contre 54 et 13 abstentions.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je demande le vote nominal.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui acceptent l’amendement Jaccoud votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Jaccoud est accepté par 64 voix contre 58 et 8 abstentions.

*introduire le vote nominal

L’article 33, amendé, est accepté.

Les articles premier et 2, formule d’exécution, sont acceptés.

Le projet de loi est adopté en deuxième débat.

Le troisième débat interviendra ultérieurement.

Projet de loi modifiant celle du 19 mai 2009 d’introduction du Code de procédure pénale suisse du 26 mai 2021

Deuxième débat

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 80 voix contre 33 et 4 abstentions.

Projet de loi modifiant celle du 12 mars 2013 sur la Cour des comptes du 26 mai 2021

Deuxième débat

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 77 voix contre 28 et 5 abstentions.

Projet de loi modifiant celle du 12 mars 2013 sur le Contrôle cantonal des finances du 26 mai 2021

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 76 voix contre 25 et 5 abstentions.

Projet de décret abrogeant la loi du 8 mars 2011 sur la haute surveillance du Tribunal cantonal du 26 mai 2021

Deuxième débat

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 74 voix contre 28 et 4 abstentions.

Projet de décret ordonnant la convocation du corps électoral pour se prononcer sur la révision partielle de la Constitution liée à la création du Conseil de la magistrature du 26 mai 2021

Deuxième débat

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 77 voix contre 28 et 4 abstentions.

Projet de révision partielle de la Constitution du 14 avril 2003 du Canton de Vaud

Deuxième débat

Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 76 voix contre 31 et 4 abstentions.

Retour à l'ordre du jour

Partager la page