Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 18 mai 2021, point 24 de l'ordre du jour

Texte déposé

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Documents

Rapport de la commission (20_POS_221) - Jean-François Thuillard

Objet et développement

Transcriptions

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M. Jean-François Thuillard (UDC) — Rapporteur-trice

En préambule, un petit rappel : notre commission a siégé le 20 novembre 2020, avant le vote de notre Grand Conseil sur le budget 2021, sur la ratification de l’accord canton-communes et avant d’avoir pris connaissance des résultats financiers 2020 de notre canton et des spécialités de bouclement qui auraient certainement pu influer sur le résultat de ce postulat, ou en tout cas les discussions au sein de la commission.

Mme la postulante a pour objectif de dresser un état des lieux et souhaite obtenir des informations dans le cadre de la nouvelle péréquation vaudoise sur le degré de solidarité actuel et prévu. La part communale de la facture comprend un facteur de solidarité et elle souhaite que ce niveau de solidarité soit équivalent in fine après la mise en place de la nouvelle péréquation intercommunale vaudoise (NPIV), ou au moins égale, voire renforcée. Elle souhaite également un état des lieux des politiques publiques mises en place, avec comme ambition de resserrer les taux d’imposition communaux.

Pour le Conseil d’Etat, il y a deux thématiques : la facture sociale et la péréquation. Je vous ferai grâce de tout le développement que nous avons déjà eu loisir d’entendre lors des débats sur la Loi sur l’organisation et le financement de la politique sociale (LOF) en décembre dernier, lorsque nous la débattions en plénum.

Concernant les deux premiers points du postulat, qui sont l’évolution des coefficients des impôts communaux depuis la bascule d’EtaCom et le montant en matière de recettes fiscales dont dispose chaque commune du canton avant et après les prélèvements péréquatifs, la commission estime que ces deux points ont été traités en séance et que les réponses et développements figurent dans le rapport de la commission.

Avec l’accord de la postulante, la commission n’a retenu que le troisième point, à savoir la manière donc la NPIV via la péréquation des ressources va maintenir, voire renforcer la solidarité intercommunale, après reprise de tout ou partie, par le canton, de la facture sociale, en particulier si elle fixe, comme l’avait fait EtaCom, des objectifs précis en matière de réduction des écarts entre les coefficients des impôts communaux. La commission vous recommande une prise en considération partielle de ce postulat, par 6 voix et 7 abstentions.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Rebecca Joly (VER) —

Je remercie la commission pour ses travaux et Mme la conseillère d’Etat pour l’accueil réservé à ce texte. Je vous prie de m’excuser si je répète ce qu’a dit M. Thuillard, car je n’ai pas bien tout entendu, en raison du bruit. Comme l’a dit M. le rapporteur de la commission, cette dernière propose, avec mon plein accord, une prise en considération partielle de ce postulat. Le but de ce dernier est de demander au Conseil d’Etat, dans le cadre de la nouvelle péréquation intercommunale, qu’une évaluation soit faite sur le degré de solidarité entre les communes qui sortira du nouveau système, que nous puissions en tant que député-e-s avoir ces informations pour adopter les règles qui régiront la péréquation horizontale entre les communes à l’avenir, que l’on puisse décider en tout état de cause, en fonction de ces informations, et que cette évaluation soit faite. Nous avons également discuté en commission du délai de réponse ; le plus pertinent serait qu’il soit répondu à ce postulat dans le cadre du projet de loi sur la nouvelle péréquation intercommunale. Dès lors, le délai d’un an sera probablement trop court. Actuellement, les questions de facture sociale et de péréquation sont toutes imbriquées, mais dans les négociations futures, le but consiste à désimbriquer tout cela. Je vous invite à renvoyer partiellement ce postulat au Conseil d’Etat.  

M. Hadrien Buclin (EP) —

Cette problématique de la solidarité financière entre les communes est l’un des enjeux les plus importants dans une réforme de la péréquation. Dès lors, le postulat Rebecca Joly qui thématise cette question et demande des informations les plus précises possible sur l’impact de cette solidarité financière entre communes en cas de réforme est tout à fait pertinent et mérite d’être soutenu. Ce postulat demande non seulement des informations précises sur les impacts d’une réforme, mais fixe aussi une sorte de ligne rouge bienvenue en demandant qu’une future réforme évite dans tous les cas un affaiblissement de la solidarité entre communes qui conduirait à un accroissement des écarts de taux d’impôts entre les communes. Cette revendication est certes minimale, mais elle n’a rien d’acquis à ce stade, puisque les députés les plus libéraux de ce Grand Conseil, qui proviennent des communes au plus fort rendement fiscal, ont précisément lancé une initiative populaire qui conduirait à un très fort affaiblissement de la solidarité financière entre communes. On a donc des pressions réelles pour que la prochaine réforme de la péréquation aille dans la direction opposée à celle souhaitée par la postulante, ainsi que par mon groupe.

Comme le souligne le rapport de la commission en reprenant les chiffres fournis par le Conseil d’Etat lors de la séance de commission, cette initiative SOS Communes représenterait une véritable saignée fiscale et financière pour les communes qui concentrent une forte proportion de contribuables modestes, à l’image d’Yverdon ou de Renens. En revanche, les communes qui concentrent une forte proportion de contribuables aisés verraient leur effort de solidarité diminuer et pourraient donc baisser encore leurs impôts. On aurait donc un accroissement des écarts de taux. Le vote de ce postulat constituerait donc un signal bienvenu contre la voie très peu souhaitable proposée par l’initiative SOS Communes. Dans ce sens, nous vous invitons à soutenir ce postulat.  

M. Jean-Marc Genton (PLR) —

Pour parler de nouvelle péréquation intercommunale, de renforcement de la solidarité entre les communes, il faudrait peut-être un peu d’argent dans les caisses, ce qui n’est pas le cas actuellement, bien au contraire. Enfin, vouloir que les écarts entre les coefficients des impôts communaux soient réduits est un peu court à mon avis, car quand on parle de solidarité financière entre les communes, il faut également voir les prestations que l’on offre à ses citoyen-ne-s. Je ne suis absolument pas opposé à une nouvelle péréquation intercommunale, mais elle doit être claire, nette et précise, et surtout contrôlée, ce qui ne me semble pas être le cas actuellement. Pour ces raisons, je me suis abstenu en commission. Pour répondre à M. Buclin sur l’initiative SOS Communes, c’est exactement le contraire : l’initiative SOS Communes permettra justement un meilleur soutien entre les communes.  

Mme Josephine Byrne Garelli (PLR) —

Je déclare mes intérêts : je suis membre du comité d’initiative de SOS Communes. Aujourd’hui, j’aimerais souligner quelques informations fausses dans les documents présentés. Il est dit que certains milieux souhaitent un fort affaiblissement de cette solidarité intercommunale, à l’image de l’initiative SOS Communes. C’est absolument faux ! Nous voulons juste une meilleure répartition des charges entre le canton et les communes et nous estimons que l’impôt cantonal doit financer les politiques cantonales.

La postulante confirme que son intention est d’affirmer une valeur importante, à savoir que le niveau de solidarité entre les communes soit au moins le même à l’arrivée qu’au départ et il n’est pas dans son esprit d’avoir un rapport avant la fin des négociations. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’avec l’initiative SOS Communes, l’ensemble des communes aura plus de moyens à disposition ; il serait plus facile de répondre aux besoins des communes qui ont des demandes, tout en préservant les finances des communes qui sont exsangues et qui contribuent fortement.

Il est également observable que le budget du canton est au petit équilibre. En devant absorber 150 millions, on se retrouverait dans des mécanismes de frein à l’endettement. Il suffirait que le Conseil d’Etat publie une fois les vrais bénéfices de l’Etat sans écritures de bouclement, ni préfinancements ; on ne serait jamais, depuis 2011, dans une situation où il faudrait actionner le frein à l’endettement. Les bénéfices du canton, depuis 2011, se situent à plus de 6 milliards cumulés, soit 600 millions par année pendant 10 ans. Dès lors, l’Etat ne sera pas saigné par l’initiative SOS Communes.

M. Buclin dit qu’il y aurait un affaiblissement de la solidarité ; c’est absolument faux ! Avec l’argent qui serait gagné par l’ensemble des communes, on pourrait faire une meilleure distribution et les communes qui demandent aujourd’hui de l’argent en recevraient plus. Il ne faut pas faire un procès d’intention aux initiateurs de SOS Communes. Nous voulons, dans l’intérêt de toutes les communes, améliorer la situation. Pour ceux qui préconisent un taux d’impôt uniforme pour toutes les communes vaudoises, il faut savoir que les recettes fiscales seraient identiques une fois que vous avez passé un taux unique. Une solidarité supplémentaire dans un tel cadre serait donc impossible. Il ne faut pas se tromper de cible. Il y a besoin aujourd’hui d’un rééquilibrage financier entre le canton et les communes, car actuellement le système est à bout de souffle et on ne peut plus le modifier. Je vous garantis qu’il est impossible de rééquilibrer la nouvelle péréquation dans la situation actuelle.  

M. Hadrien Buclin (EP) —

Mes propos concernant l’affaiblissement de la solidarité entre les communes qui résulterait de l’acceptation de cette initiative SOS Communes ne sont pas mon analyse, mais l’analyse faite par le Conseil d’Etat et ses services qui nous a été communiquée en commission. Monsieur Genton, madame Byrne Garelli, soyez clairs : accusez-vous la conseillère d’Etat de votre parti d’avoir désinformé la commission ? J’aimerais rappeler les propos qui sont dans le rapport : « Toute chose étant égale par ailleurs avec le système existant, avec l’initiative, CHF 300 mio seraient injectés par l’Etat et certaines communes perdraient largement, jusqu’à 15 points d’impôts, pour les communes comme Yverdon, Renens, Moudon, Payerne, etc. » Ce ne sont pas mes chiffres et mes affirmations. Plus loin, le rapport dit « L’initiative favorise les communes qui ont plus de capacités financières. Ainsi 40 % de l’allègement en faveur des communes prévu par l’initiative irait en faveur des 94 communes avec la valeur du point d’impôt le plus élevé, et surtout en faveur des communes avec le taux d’imposition le plus bas. » Donc soit on a été désinformé en commission, et il faut donc que vous assumiez vos propos jusqu’au bout, en disant que la conseillère d’Etat de votre parti a désinformé la commission, soit il faut que vous affichiez un peu plus de clarté dans vos intentions et que vous reconnaissiez que c’est une initiative de défense des communes les plus aisées de ce canton et qui aurait de graves conséquences pour les communes à faible rendement fiscal — elles ont été listées dans le rapport : Yverdon, Renens, Moudon, Payerne, etc. 

Mme Rebecca Joly (VER) —

Je voudrais recadrer un peu le débat. Non pas que le débat sur SOS Communes soit inintéressant, mais on l’aura dans un autre cadre. Ce postulat n’est pas le meilleur moment pour avoir un débat sur SOS Communes, puisqu’il ne concerne pas SOS Communes. D’ailleurs, la question que je soulève serait la même avec ou sans l’acceptation de cette initiative, puisque dans un cas comme dans l’autre, la péréquation intercommunale va être révisée — je crois que c’est souhaité par beaucoup de monde, y compris au sein de la commission qui a étudié ce postulat — idem pour la répartition de la facture sociale qui est également l’objet de négociations. Dès lors, quelle que soit la question, je ne fais pas le procès pour ou contre SOS Communes ; ce n’est pas l’objet de mon postulat. Je voulais remettre les choses dans leur contexte. La question d’une analyse du taux de solidarité entre les communes sera pertinente quel que soit l’avenir de cette initiative populaire cantonale.

Mme Josephine Byrne Garelli (PLR) —

En effet, SOS Communes n’est pas le sujet de ce texte. Mais il est vrai, quand la conseillère d’Etat dit que 300 millions seraient injectés par l’Etat, que certaines communes perdraient largement. Dans un premier temps, toutes les communes perdraient 15 points d’impôt, car il y a une bascule de 15 points d’impôt vers le canton pour l’aider à assumer le financement de la facture sociale. Les communes qui contribuent le plus actuellement seront les plus gagnantes, mais ensuite l’objectif est que le canton passe à la caisse pour aider les autres communes, dans un deuxième temps, dans le cadre de la péréquation. Sans ressources supplémentaires dans le panier de ménage de l’ensemble des communes vaudoises, il serait impossible de mettre 100 millions à disposition des communes-centres, qui en ont besoin, et 100 millions à disposition des communes excentrées, avec beaucoup de routes, de forêts ou de décharges. Il ne serait pas possible non plus de soulager les communes qui sont aujourd’hui les contributrices, mais qui n’ont plus rien pour leur ménage communal. A la page 4 du rapport, il est dit « concernant le risque que représente l’initiative par rapport au calendrier annoncé de 2023, il est précisé que le peuple pourrait avoir à se prononcer ». Suit toute une série d’arguments qui ne sont que des suppositions, parce que le peuple pourrait avoir à se prononcer. Il reste tout loisir au Conseil d’Etat, en cas d’aboutissement de l’initiative, de venir avec un contre-projet. Alors, en effet, le peuple pourrait avoir à se prononcer, mais je lance une bouée à la mer : le Conseil d’Etat peut aussi venir avec un contre-projet et trouver enfin la paix entre le canton et les communes sur ce dossier qui pourrit depuis très longtemps. Je rappelle tout de même que, depuis que les communes ont repris 50 % de la facture sociale, le canton de Vaud a remboursé 10 milliards de dettes, a constitué 6 milliards de réserves de préfinancement et de bénéfices, et a refinancé la Caisse de pensions de l’Etat de Vaud à hauteur de 1,4 milliard. Cela fait 17,4 milliards sur une période de 16 ans. Je pense que l’on peut partir du principe que le moment est venu de renvoyer l’ascenseur aux communes, d’une manière ou d’une autre. Je me réjouis d’en discuter avec le Conseil d’Etat et avec la députation, en temps voulu.

M. Pierre-André Romanens (PLR) —

On arrive au terme de la récolte de signatures de SOS Communes. On va attendre la fin de la récolte pour pouvoir en parler ; ce n’est pas le sujet, pas le débat du jour, même si dans le rapport on lit que SOS Communes veut déstabiliser et affaiblir ce canton. C’est strictement le contraire qui est visé par cette initiative. Lors des Assises, le professeur Jeanrenaud, expert en la matière, a dit une chose que tout le monde a trouvé essentiel pour notre canton : si on ne détricote pas notre système, si on n’arrive pas à séparer la facture sociale et la péréquation, on n’y arrivera jamais. Tous les chiffres donnés aujourd’hui sont faux, parce qu’on mélange les deux systèmes. Tant qu’on fera cela, on n’arrivera pas à s’en sortir. Si on veut répartir une véritable richesse dans ce canton, il faut une péréquation solide, efficace, avec des moyens. Si on veut avoir une facture sociale qui est financée par — qui commande paie — le canton, il faut aussi donner les moyens au canton et il les a ! Et les communes aideront le canton. C’est un système très simple. Le professeur Jeanrenaud n’est pas Pierre-André Romanens. Ce sont ses propos et il le dit très clairement, de même que le rapport de la Cour des comptes : tant qu’on n’enlève pas ce système à deux têtes, cela ne marchera pas !

M. Didier Lohri (VER) —

Quand on a un problème qui traîne depuis plusieurs années, c’est qu’à la base la définition de cette péréquation n’est pas bonne et n’est pas connue de tout le monde. Ce postulat s’inscrit comme une pièce dans le puzzle qui va permettre d’affronter l’avenir et d’avoir tous les outils à disposition pour trouver une solution pour la péréquation. Il ne faut pas mélanger les choses. SOS Communes était l’une des pistes, la péréquation 1123 en est aussi une. Laissez les cerveaux humains étudier toutes les pistes, de telle manière que l’on ait une solution qui soit adaptée pour affronter les dix ans qui vont venir avec cette péréquation. Je pense sincèrement qu’il faudrait passer au vote de ce postulat, car tout ce que l’on fait, c’est envenimer les débats sur SOS Communes, etc. Je pense que l’on a fait le tour. La commission a voté par 6 voix contre 0, et 7 abstentions : le signal d’un dossier chaud. Il faut absolument envoyer ce postulat au Conseil d’Etat.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) —

Si, sur le principe, j’adhère au principe de renforcement de la solidarité entre communes, je ne suis en revanche pas convaincue du seul indicateur du taux d’imposition. Celui-ci ne me semble pas pouvoir permettre d’assurer cette solidarité à elle seule. En effet, il y a d’autres critères à prendre en compte dans ce genre de réflexion : le degré d’autofinancement d’une commune, la capacité d’autofinancement, la quotité d’investissement, l’endettement net pur par habitant, la dette brute et la quotité des intérêts nets, la quotité de la charge financière, la couverture des charges par les ressources, la valeur du point d’impôt et le taux d’imposition. Ce sont beaucoup de critères et c’est en analysant ces critères qu’on peut faire un comparatif et voir par qui et comment cette solidarité peut être mise en place. Etant donné le caractère exclusif de cet indicateur du taux d’impôt, qui me semble insuffisant, je m’abstiendrai sur ce postulat.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d'État

Si, sur le principe, j’adhère au principe de renforcement de la solidarité entre communes, je ne suis en revanche pas convaincue du seul indicateur du taux d’imposition. Celui-ci ne me semble pas pouvoir permettre d’assurer cette solidarité à elle seule. En effet, il y a d’autres critères à prendre en compte dans ce genre de réflexion : le degré d’autofinancement d’une commune, la capacité d’autofinancement, la quotité d’investissement, l’endettement net par habitant, la dette brute et la quotité des intérêts nets, la quotité de la charge financière, la couverture des charges par les ressources, la valeur du point d’impôt et le taux d’imposition. Ce sont beaucoup de critères et c’est en analysant ces critères qu’on peut faire un comparatif et voir par qui et comment cette solidarité peut être mise en place. Etant donné le caractère exclusif de cet indicateur du taux d’impôt, qui me semble insuffisant, je m’abstiendrai sur ce postulat.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération partiellement par 51 voix contre 27 et 44 abstentions.

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