Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 2 mai 2023, point 16 de l'ordre du jour

Texte déposé

Dans un communiqué de presse du 4 avril dernier, l’Alliance Swiss Pass, structure tarifaire des transports publics en Suisse, a annoncé une hausse substantielle de 4.3% en moyenne pour l’ensemble des billets et abonnements nationaux. Dès décembre, un abonnement général 2e classe coûtera ainsi 4'080 CHF[1]. Cette politique interroge à la lumière de ce qui est mis en place en Allemagne où un abonnement général à 49 euros/mois, soit 588 euros par année, a récemment été mis sur le marché.

 

Cette annonce de l’Alliance Swiss Pass est assurément une mauvaise nouvelle pour les usagères et usagers des transports publics mais également pour les objectifs du Plan Climat vaudois, tant l’incitatif à prendre les transports publics s’en voit assurément péjoré. Pour rappel, le Conseil d’Etat vise une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50% à 60% d’ici 2030[2]. Pour ce faire, l’exécutif cantonal précise que « l’effort à fournir repose sur un renforcement du report modal vers les transports publics et la mobilité douce ». Afin de mettre en œuvre ce report modal, des investissements conséquents ont été et seront engagés par l’Etat afin d’améliorer les infrastructures et les interfaces de transport, renforcer l’offre (RER Vaud, ligne de bus régionales, etc.) ou mettre en œuvre une ambitieuse stratégie vélo.

Ces éléments sont assurément positifs, de récentes études menées en Suisse montrent d’ailleurs qu’une augmentation de l’offre amène rapidement des résultats positifs en termes de fréquentation des transport publics[3].

L’offre est un des déterminants du choix modal, tout comme la qualité et la fiabilité du service, le temps de parcours, le confort et enfin le coût[4]. Force est de constater que le système tarifaire Mobilis n’est pas optimal du point du vue du confort et du coût. En termes de confort, il est en effet compliqué pour les usagères et usagers de comprendre le maillage des 129 zones qui divisent le canton. C’est d’autant plus complexe pour les lignes de bus régionales où la limite des zones entre deux arrêts n’est pas toujours clairement lisible. Il y a d’ailleurs parfois des incohérences peu explicables, à l’image des deux zones tarifaires traversées par le funiculaire qui relie Cossonay-ville à la gare CFF de Cossonay-Penthalaz, élément qui n’a d’ailleurs pas manqué de créer de l’incompréhension parmi la population locale[5].

Au-delà de ce type d’incohérences, le modèle tarifaire actuel n’est pas incitatif. A titre d’exemple, une carte journalière toutes zones Mobilis avec un abonnement demi-tarif, revient à 27.80 CHF[6]. Le même titre de transport dans la communauté tarifaire Zurichoise (ZVV) revient à 17.20 CHF et si l’utilisateur choisit de ne pas prendre le train avant 9h, le tarif est de 13.00 CHF[7].

 

Le modèle vaudois comprend en outre de nombreuses zones non-desservies ou « zones fantômes » qui sont pourtant incluses dans les tarifs des transports ferroviaires. Une pendulaire entre Payerne et Yverdon-les-Bains traverse en effet les zones n°54 et n°109 qui ne sont pourtant pas desservies par des arrêts. Il en est de même pour le trajet Le Pont-Lausanne où trois zones tarifaires (zones n° 115, 11, 53) ne desservent aucun arrêt. Les grandes lignes sont également concernées puisqu’il y a des zones non-desservies entre Morges et Nyon (zone n°24) ou entre Nyon et Coppet (zone n°21), tout comme entre Yverdon-les-Bains et Neuchâtel (zone n°124) ou Aigle et Bex (n°83).

 

Ce système découle de la création de la communauté tarifaire Mobilis qui a remplacé un système basé sur les kilomètres parcourus. Ces « zones fantômes » ont vraisemblablement été ajoutées afin de trouver un équilibre financier et pérenniser notamment les lignes et les entreprises de transport régionales. Il faut toutefois mentionner que depuis quelques années, le financement n’est plus attribué par ligne mais par entreprise de transport. De ce fait, la pérennité des lignes régionales n’est plus remise en cause. Au contraire, les investissements récents consentis par le Canton pour développer le RER Vaud et les lignes de transport régionales démontrent l’intérêt de cette offre pour les politiques publiques cantonales. Les « zones fantômes » n’ont donc plus de cohérence et desservent même les objectifs du Conseil d’Etat en termes de report modal, puisqu’elles augmentent le coût de transport pour les usagères et usagers.

Il est en effet à souligner que le coût du transport a une incidence non négligeable sur le choix modal. Dans une étude récente mandatée par l’Union des transports publics, il est précisé que si le premier critère favorisant le report modal est la réduction du temps de parcours, « l’impact du prix sur le choix modal est important »[8]. Il apparaît dès lors qu’une réduction sensible du coût des titres de transport serait bénéfique à la mise en œuvre des objectifs du Plan climat vaudois.  

Le Conseil d’Etat s’engage dans cette voie au travers du programme de législature cantonal qui prévoit notamment des réductions tarifaires pour les jeunes de moins de 25 ans et les personnes retraitées[9]. Il est toutefois aujourd’hui nécessaire de porter une réflexion globale sur le modèle tarifaire Mobilis, raison pour laquelle les soussignées et soussignés ont l’honneur de demander au Conseil d’Etat de :

 

  • Elaborer au sein de la communauté tarifaire vaudoise un nouveau modèle plus simple d’utilisation (moins de zones), plus attractif financièrement pour les usagères et usagers des transports publics et qui correspond aux objectifs du Plan climat vaudois.

  

 

 

[1] Communiqué de presse de l’Alliance Swiss Pass, disponible ici : https://www.allianceswisspass.ch/fr/asp/Actualites/Newsmeldung?newsid=567 (consulté le 17 avril 2023).

[2] Conseil d’Etat vaudois, « Stratégie du Conseil d’Etat vaudois pour la protection du climat », juin 2020, p. 6.

[3] Périllon François, « Développer une offre de niveau urbain dans une commune isolée de 8'000 habitants : la démarche expérimentale de l’Agglomération de Fribourg sur la commune de Guin », Transports urbains, n°142, 2022/2, p. 19.

[4] Union des transports publics, « Perspectives pour augmenter la part modale des transports publics », 2021, p. 9.

[5] Commune de Cossonay, « Réponse de la Municipalité à l’interpellation ‘ Marin et consorts – EPLO ’ déposée le 31 octobre 2022 », 1er décembre 2022.

[6] Les tarifs de la Communauté tarifaire vaudoise (Mobilis) sont disponibles ici : https://www.mobilis-vaud.ch/fr/tarifs/ (Consulté le 02 avril 2023)

[7] Toutes les informations concernant la communauté tarifaire zürichoise (ZVV) sont disponibles ici : https://www.zvv.ch/zvv/en/home.html (Consulté le 02 avril 2023).

[8] Union des transports publics, « Perspectives pour augmenter la part modale des transports publics », 2021, p. 29.

[9] Conseil d’Etat vaudois, « Programme de législature 2022-2027 », novembre 2022, p. 51. 

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Cédric RotenSOC
Yannick MauryVER
Cendrine CachemailleSOC
Alberto CherubiniSOC
Patricia Spack IsenrichSOC
Julien EggenbergerSOC
Pierre FonjallazVER
Joëlle MinacciEP
Laurent BalsigerSOC
Jerome De BenedictisV'L
Céline MisiegoEP
Anna PerretVER
Céline BauxUDC
Alexandre DémétriadèsSOC
Carine CarvalhoSOC
Vincent JaquesSOC
Yolanda Müller ChablozVER
Blaise VionnetV'L
Martine GerberVER
Sylvie PodioVER
Jean-Louis RadiceV'L
Aude BillardSOC
Elodie LopezEP
Valérie InduniSOC
Felix StürnerVER
Claude Nicole GrinVER
Valérie ZoncaVER
Romain PilloudSOC
Oriane SarrasinSOC
Thanh-My Tran-NhuSOC
Sébastien HumbertV'L
Muriel ThalmannSOC
Théophile SchenkerVER
Vincent KellerEP
Nathalie VezVER
Jessica JaccoudSOC
Jean TschoppSOC
Sandra PasquierSOC

Document

23_POS_32-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Sébastien Cala (SOC) —

Le 4 avril dernier, l’alliance Swisspass – la structure tarifaire des transports publics en Suisse – a annoncé une hausse substantielle de 4,3 % en moyenne pour l’ensemble des billets et abonnements nationaux. Cette annonce est une très mauvaise nouvelle pour les usagères et usagers des transports publics, mais également pour les objectifs du Plan climat vaudois, tant l’incitatif à prendre les transports publics s’en voit assurément péjoré. Pour rappel, le Conseil d’Etat vise une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50 à 60 % d’ici 2030. Pour ce faire, l’exécutif cantonal souhaite en premier lieu renforcer le report modal.

L’offre est un des déterminants du choix modal, tout comme la qualité et la fiabilité du service, le temps de parcours, le confort, et enfin le coût. Force est de constater que le système tarifaire Mobilis n’est pas optimal du point de vue du confort et du coût. En termes de confort, il est en effet très compliqué pour les usagères et les usagers de comprendre le maillage des 129 zones qui divisent le canton. C’est d’autant plus complexe pour les lignes de bus régionales où la limite des zones entre deux arrêts n’est pas toujours lisible. Il y a d’ailleurs parfois des incohérences peu explicables, à l’image des deux zones tarifaires traversées par le funiculaire qui relie Cossonay-Ville à la Gare CFF de Cossonay-Penthalaz. Au-delà de ce type d’incohérences, le modèle tarifaire actuel n’est pas incitatif, ou en tout cas bien moins incitatif que certains modèles d’outre-Sarine, notamment à Zurich. A titre d’exemple, une carte journalière toutes zones Mobilis, avec un abonnement demi-tarif, revient aujourd’hui à 27,80 francs ; le même titre de transport dans la communauté tarifaire zurichoise revient à 17,20 francs et si l’utilisateur choisit de voyager après 9 heures, le tarif est de 13 francs.

Le modèle vaudois comprend, en outre, des zones non desservies, soit des zones fantômes qui sont pourtant incluses dans les tarifs des transports ferroviaires. Les pendulaires entre Payerne et Yverdon traversent deux zones fantômes ; entre Le Pont et Lausanne, trois zones tarifaires ne desservent aucun arrêt ! Les grandes lignes sont également concernées, puisqu’il y a des zones fantômes entre Morges et Nyon, entre Nyon et Coppet, entre Yverdon et Neuchâtel ou entre Aigle et Bex. L’ensemble du canton est, de fait, concerné par ces zones fantômes qui augmentent le coût de transport pour les usagers et usagères, éléments assurément contre-productifs alors que nous devons inciter au report modal.

Le modèle tarifaire Mobilis aura 20 ans en 2024. Il est temps de le réformer afin qu’il réponde aux enjeux actuels. C’est pourquoi je dépose ce postulat, qui demande au Conseil d’Etat d’élaborer, au sein de la communauté tarifaire vaudoise, un nouveau modèle plus simple d’utilisation, avec moins de zones, plus attractif financièrement pour les usagères et usagers des transports publics et qui corresponde aux objectifs du Plan climat vaudois. Ce postulat est cosigné par nos collègues Yannick Maury, Céline Misiego et Sébastien Humbert. Nous nous réjouissons d’en discuter avec vous en commission.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Le postulat, cosigné par au moins 20 membres, est renvoyé à l’examen d’une commission.

Retour à l'ordre du jour

Partager la page

Partager sur :