Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 9 mars 2021, point 7 de l'ordre du jour

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Rapport de la commission - RC 19_POS_158

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M. Vassilis Venizelos — Rapporteur-trice

En commission, le postulant nous a rappelé les inégalités face au désir d’enfant. Si la majorité des couples parviennent rapidement à avoir des enfants, d’autres doivent faire preuve de patience ou ne peuvent pas avoir d’enfants. Le nombre de couples infertiles ou stériles augmente, en particulier en raison du recul de l’âge des femmes au moment de la naissance de leur premier enfant et de facteurs externes, comme l’environnement et les perturbateurs endocriniens. Le phénomène touche toutes les classes sociales et les informations manquent encore sur le nombre de couples qui renoncent à avoir des enfants et qui ont tenté sans succès des fécondations in vitro (FIV). En plus du tabou qui règne sur la question, il existe une barrière financière importante. En Suisse, les frais de FIV ne sont pris en charge ni par l’assurance de base, ni par les assurances complémentaires. Un cycle complet de FIV coûte entre 8’000 et 10’000 francs, au minimum. Souvent, plusieurs processus doivent être réalisés pour aboutir à une grossesse conduite à terme. Très rapidement, les sommes engagées se montent à 20’000 ou 30’000 francs. Dès lors, le postulant demande au Conseil d’Etat, premièrement, de produire un rapport sur les causes de l’infertilité croissante afin de traiter le problème à la racine, rapport incluant des renseignements statistiques sur l’évolution du recours à la FIV ces quinze dernières années, ainsi que des informations sur les conditions financières et l’encadrement dans lequel s’exercent les FIV, deuxièmement, d’envisager des mesures sur la base du rapport demandé pour alléger autant que possible les exigences financières d’accès aux FIV aux couples qui remplissent les conditions pour y avoir droit ou de prévoir, en tous les cas, des arrangements de paiements moyennant une évaluation chiffrée du coût desdites mesures pour les différenets collectivités et les régimes d’assurance sociale.

Durant les travaux de la commission, il a été rappelé qu’environ 6000 femmes ont recours à la FIV en Suisse chaque année, dont plus de 700 dans notre canton. Les responsables des centres de procréation médicalement assistée dans le canton s’accordent sur le montant de 15’000 francs par cycle complet de traitement, de la stimulation hormonale de la patiente jusqu’au transfert du dernier embryon. Cela représente une charge importante. La prise en charge de la FIV par la Loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) constituerait, selon Mme la Cheffe de département, la meilleure option au regard de l’égalité de traitement des personnes concernées dans toute la Suisse. Toutefois, pour cela, une demande de remboursement de la FIV devrait être déposée auprès de la Commission fédérale des prestations générales et des principes (CFPP) en matière d’assurance maladie. Le dernier examen de demandes concernant la FIV par cette commission remonte à 1994, ce qui justifie d’autant une démarche aujourd’hui. Une autre piste pourrait être l’élaboration d’une loi cantonale spécifique qui offrirait un soutien financier aux couples recourant à la FIV selon des modalités à définir, évidemment. L’analyse des coûts considérés et l’estimation précise des économies possibles devraient être réalisées. Pour le département, en renvoyant le postulat, on pourrait mener une réflexion et une démarche, puis trouver la solution la plus équilibrée.

Dans le cadre des discussions, les commissaires s’accordent sur la nécessité de reconnaître la souffrance des personnes touchées par les problèmes d’infertilité, ainsi que les difficultés d’accès à la FIV, notamment pour les familles les plus modestes. Certains commissaires estiment qu’au regard de l’égalité de traitement des personnes concernées par les problèmes d’infertilité dans toute la Suisse, le remboursement de la FIV par la LAMal serait préférable à l’instauration d’un soutien financier spécifique au canton de Vaud. Pour d’autres commissaires, cette dernière piste mérite d’être explorée en affinant les différentes modalités d’application. Selon plusieurs commissaires, les demandes, en particulier la première concernant les informations statistiques sur la FIV, s’avèrent peu adéquates pour plusieurs raisons. D’abord, certains craignent que cela écorne le secret médical, Ensuite, certains relèvent que les causes de l’infertilité sont multiples, complexes, voire impossibles à élucider totalement. Finalement, d’autres rappellent que nombre d’informations existent déjà sur les plans romand, suisse et mondial, rendant peu utile un rapport par le Conseil d’Etat. La majorité de la commission estime, au contraire, que si les statistiques doivent être élaborées de façon anonyme, en respectant la protection des données, la quantité d’informations statistiques à fournir reste limitée. Les députés ne demandent pas au Conseil d’Etat une recherche fondamentale sur la question, mais de s’appuyer sur les études et statistiques connues à ce jour. Les autres renseignements demandés par le postulat ne sont pas d’ordre statistique. Ils constituent des éléments de contexte portant essentiellement sur les causes plus ou moins identifiées de l’infertilité. Il existe un intérêt de santé publique à être mieux renseignés sur ces causes - mode de vie, perturbateurs endocriniens. Il n’est pas question de demander une recherche exhaustive, mais plutôt de passer en revue les différents facteurs impliqués.

Finalement, après discussion, la commission vous recommande, à l’unanimité, de prendre en considération le postulat, qui permettra, d’une part, d’être mieux renseignés sur la situation dans le canton de Vaud - de nombreuses familles souffrent de la difficulté à avoir un enfant - et sur les causes. Il est aussi nécessaire que le Conseil d’Etat engage des démarches et des réflexions pour améliorer l’accès financier à la FIV.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Jean Tschopp (SOC) —

Rarement j’aurai été autant approché par des personnes anonymes, souvent, ou que je connais, à la suite du dépôt du postulat. Elles m’ont fait part de l’impossibilité ou des difficultés qu’elles rencontrent pour avoir des enfants. C’est une souffrance, un tabou. On n’en parle pas facilement ni volontiers, mais la situation montre que de nombreux couples aspirent à avoir des enfants, mais rencontrent des difficultés. On peut citer différents facteurs, dont l’incapacité et l’impossibilité, pour les femmes atteintes de certains cancers. La chimiothérapie peut provoquer l’absence de fonctions ovariennes et l’impossibilité totale d’avoir des enfants. Une grossesse extra-utérine peut mener à l’ablation des trompes avec la même conséquence : l’impossibilité d’avoir des enfants. Beaucoup de femmes et de couples en souffrent. J’ai en tête le témoignage d’un couple vaudois qui, après énormément de tentatives, a renoncé. Il ne s’agissait pas d’une impossibilité totale. Le couple a fini par se rendre en Australie pour une FIV. Ce pays, comme beaucoup d’autres, prévoit des aides financières pour que les conditions de revenu ne constituent pas un motif d’empêchement pour les couples qui souhaitent avoir des enfants. C’est la demande du postulat. Les conditions sociales, la pauvreté, ne doivent pas empêcher d’avoir des enfants, en cas d’incapacité ou impossibilité.

A ma connaissance, le dossier n’a pas évolué sur le plan fédéral, raison pour laquelle j’ai déposé ce postulat qui demande deux choses. D’abord, un rapport : on peut se reposer sur les nombreux documents et études déjà produits sur la situation actuelle et ses causes. Mme la Cheffe de département nous a appris, en séance de commission, que dans le canton 700 femmes par année sont concernées par les problèmes d’infertilité ou de stérilité. En plus des maladies que j’ai mentionnées, d’autres éléments interviennent, comme le recul de l’âge pour avoir un premier enfant - en Suisse, 32, voire 33 ans dans certains cantons – qui accroissent l’infertilité. Ces éléments permettront de recevoir des réponses. La deuxième demande est la plus importante : l’accès aux FIV, en particulier pour les couples qui n’en ont pas les moyens. Le rapporteur M. Venizelos l’a déclaré d’entrée de cause : le budget est très conséquent. Si on ajoute le coût d’une FIV aux frais de stimulation hormonale, de congélation, de décongélation et de traitement, les montants atteignent rapidement 10’000 à 15’000 francs. Il faut des ressources importantes pour accéder aux FIV. En 2021, ce n’est pas acceptable, d’où la demande d’envisager une base légale pour accéder aux FIV, universelle ou sous conditions - c’est à voir. Ces éléments devront être soupesés et mis en perspective dans la réponse au postulat. Je vous invite à soutenir ce dernier et à suivre l’ensemble de la commission dans sa recommandation.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération à une large majorité.

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