Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 7 décembre 2021, point 6 de l'ordre du jour

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COFIN - RC_21_LEG_172_maj_21_LEG_237_Mojon

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Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Je vous rappelle la procédure. Nous commencerons par une discussion d’entrée en matière sur le budget 2022, suivie d’un vote général à ce même propos, une fois que le rapporteur de majorité et de minorité, puis les représentants des groupes selon leur importance numérique décroissante, les députées et députés qui le souhaitent et, enfin, Mme la présidente du Conseil d’Etat, puis le conseiller d’Etat en charge des finances se seront exprimés.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Le projet de budget 2022 déposé par le Conseil d’Etat présente un excédent de charges de 188 millions. Il respecte les limites constitutionnelles du petit équilibre, le résultat avant amortissement présentant un excédent de revenus de 12,9 millions. Par rapport au budget 2021, les charges augmentent de 291 millions à 10’673,1 millions, alors que les revenus progressent de 267 à 10’485 millions. Les charges Covid-19 ne sont, comme en 2021, pas portées au budget 2022.

Par nature, les charges de transfert, à savoir les parts de revenus destinés à des tiers, les dédommagements payés à des collectivités publiques, les péréquations, les subventions payées constituent très largement le poste le plus conséquent avec un montant de 6’324 millions, soit plus de 59,3 % du total des charges, suivies par les charges de personnel représentant 25,2 %.

Les principales progressions de charges sont enregistrées dans les domaines du social, pour 62 millions, essentiellement sous l’effet de l’accord canton-communes d’août 2020, du vieillissement de la population et des effets de la migration. Au niveau de la santé, + 55 millions sont essentiellement dus au fait de l’augmentation de l’activité somatique des hôpitaux et des amortissements liés aux récentes acquisitions et rénovations. Au niveau des charges financières brutes, 30 millions supplémentaires sont principalement dus au fait de la progression des amortissements sur les immeubles nouvellement construits et, au niveau de l’accompagnement à la diversification, à l’innovation, au soutien à l’économie, qui engendrent des coûts supplémentaires de l’ordre de 20 millions.

Comme chaque année, les membres de la Commission des finances ont visité tous les services et analysé en détail tous les budgets de chaque département. Le rapport y relatif figure à la fin du rapport de la Commission des finances sur le budget 2022. Chacun de ces documents a été présenté et étudié lors du séminaire de deux jours que la Commission des finances consacre chaque année à l’analyse du budget. J’en profite pour remercier tous mes collègues de la Commission des finances pour l’énorme travail fourni et de la qualité des rapports déposés. La Commission des finances remercie également toutes les collaboratrices et tous les collaborateurs des services visités, pour leur disponibilité et les documents préparatoires fournis. Des remerciements particuliers vont au chef du Service d’analyse et de gestion financière (SAGEFI) et à son chef de division, gestion opérationnelle qui nous ont accompagnés et renseignés tout au long de nos travaux. Une mention toute particulière également au secrétaire de la Commission des finances, dont les compétences, la disponibilité et la grande efficacité ont largement contribué au bon déroulement de nos travaux et à la bonne réalisation de notre rapport.

Pour l’analyse du budget informatique de l’Etat, la Commission des finances a à nouveau confié un mandat à la Commission thématique des systèmes d’information spécialisée en la matière. Celle-ci a rendu un rapport précis et détaillé que MM. les vice-présidents et présidents de la Commission thématique des systèmes d’information nous ont présenté de manière claire, précise et compréhensible. Ce mandat a été exécuté à l’entière satisfaction de la Commission des finances qui remercie la Commission thématique des systèmes d’information pour son excellent travail. La Commission des finances a fait siennes les recommandations exprimées par la Commission thématique des systèmes d’information.

Au niveau des revenus, ils proviennent essentiellement des revenus fiscaux, ascendant à 6’057 millions de francs, soit 57,8 % du total des revenus, suivis des produits de transferts qui représentent 24,7 % du budget. Conformément à sa pratique usuelle, la Commission des finances a procédé à une analyse détaillée des revenus fiscaux en recevant Mme la directrice générale de la Direction générale de la fiscalité (DGF) pour une présentation des recettes fiscales portées au budget 2022. Les principaux éléments ressortant de cette présentation figurent dans notre rapport. La Commission des finances a pu constater avec satisfaction que l’administration fiscale maintient inchangée sa méthode d’évaluation des recettes fiscales, celle-ci restant en tous points conformes aux principes de prudence exigée en la matière. Toutes les prévisions sont construites sur des bases solides et surtout constatées. Les recettes 2022 attendues sur les personnes physiques sont supérieures de quelque 151 millions au montant figurant au budget 2021 sous l’effet combiné des perspectives économiques favorables et de la progression démographique, et ce, malgré les augmentations de déductions fiscales prévues. Les impôts prélevés sur les personnes morales devraient également être supérieurs à ceux attendus pour 2021 pour quelque 72 millions.

La Commission des finances remercie Mme la directrice générale et ses équipes pour leur disponibilité et pour toutes les réponses apportées à nos questions. J’en profite pour également remercier la responsable du Service juridique de l’Administration cantonale des impôts (ACI) qui a accompagné la Commission des finances lors de l’analyse des objets fiscaux qui lui étaient soumis.

Le Conseil d’Etat propose de renforcer de manière substantielle l’effectif du personnel de l’Etat de Vaud en demandant au Grand Conseil de lui accorder 493,8 ETP supplémentaires. Ces nouveaux postes se répartissent à raison de +289.5 ETP pour le personnel administratif, et +204.3 ETP pour le personnel enseignant. Si l’ensemble de ces postes devait être repourvu, l’Etat de Vaud compterait, à fin 2022, 18’761 ETP. S’y ajoutent ceux employés par le CHUV, par l’UNIL, les Hautes écoles, les Offices régionaux de placement (ORP), les Eglises et Plateforme 10.

Les dépenses brutes d’investissement portées au budget 2022 atteignent le montant global record de 849 millions, soit 23 millions de plus qu’en 2021. Parmi tous les investissements envisagés pour 2022, 486 millions constituent des investissements directs, essentiellement dans des bâtiments hospitaliers – 86,8 millions – des bâtiments d’enseignement – 64,3 millions –, la mobilité – 63,0 millions – et les routes – 62,2 millions. Les 363 millions restants sont réalisés sous forment de divers prêts et garanties octroyés par l’Etat de Vaud, afin de couvrir les investissements réalisés par divers établissements et institutions vaudois.

Comme à l’accoutumée, le projet de budget est accompagné de divers projets de lois et décrets entraînant des conséquences financières sur l’exercice 2022. La Commission des finances les a tous analysés, et adhère globalement aux propositions du Conseil d’Etat. Dans le cadre de cette analyse, la Commission des finances a reçu M. le député Nicolas Suter pour sa motion « Autonomie énergétique du patrimoine immobilier du canton » (20_MOT_131), M. Sébastien Cala pour sa motion « N’oublions pas les indépendant-e-s ! » (21_MOT_1), et M. Marc Vuilleumier pour sa motion « Petits revenus et fisc, lorsque l’Etat donne d’une main ce qu’il reprend de l’autre » (21_MOT_2). Ces objets, ainsi que les recommandations relatives de la Commission des finances vous seront présentés au fur et à mesure du développement de l’ordre du jour.

Finalement, durant ses travaux, la Commission des finances a porté son attention sur certains dossiers ou certaines thématiques particuliers. Une délégation de l’Union des communes vaudoises (UCV) composée de sa nouvelle présidente et de son vice-président a été entendue par la commission des finances à propos de leur demande relatived’une part, à l’accélération de l’accord canton-communes ainsi que, d’autre part à une demande de compensation découlant des réformes fiscales cantonales ayant un impact sur les collectivités locales.

Données chiffrées relatives à la relation financière canton-communes.

Sur le projet Globe, un point de situation a été présenté sur ce projet de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) qui vise notamment à l’élaboration d’un ensemble de règles coordonnées entre Etats pour répondre aux risques de transfert de bénéfices ainsi que, surtout, bien évidemment, ses impacts potentiels sur la Suisse, plus précisément sur le canton de Vaud. La Commission des finances a également largement débattu de la politique de dividendes de la BNS et plus particulièrement de la prise en considération de ses diverses tranches dans le cadre des budgets de l’Etat. La commission a questionné le Conseil d’Etat afin d’obtenir le détail de la mise en œuvre de sa politique environnementale au budget 2022. Le Conseil d’Etat a complété sa réponse figurant dans le projet de décret du budget par divers tableaux figurant au chapitre 3.4. 3 de notre rapport.

La Commission des finances a finalement analysé diverses propositions d’amendements et elle n’en a retenu qu’un seul, d’ordre technique.

En conclusion, sur la base de l’ensemble des études et analyses, la Commission des finances recommande au Grand Conseil d’accepter les propositions de budget de fonctionnement et d’investissement 2022 tels que présentés. Le projet de budget de fonctionnement 2022 présente un déficit de 188 millions de francs et a été adopté par la Commission des finances par 13 voix contre 1 et 1 abstention. Un rapport de minorité est déposé, le budget d’investissement 2022 a, quant à lui, été adopté par 14 voix et 1 abstention.

M. Hadrien Buclin (EP) — Rapporteur-trice de minorité

La minorité n’est pas satisfaite du budget 2022 tel que présenté par le Conseil d’Etat. En particulier, ce budget n’est pas à la hauteur de l’urgence climatique que le Grand Conseil a proclamée à travers le vote d’une résolution. Il s’agit d’un budget qui, selon nous, ne répond pas aux difficultés sociales que rencontre une partie de la population.

En matière d’urgence climatique, rappelons que le Grand Conseil a également voté une initiative pour un fonds de 300 millions en faveur de la transition énergétique, notamment pour le soutien au développement des énergies renouvelables locales, telles que l’énergie solaire, la géothermie ou la biomasse. Compte tenu de l’urgence de la situation, et de celle d’engager une réelle transition énergétique, une première tranche d’investissements visant à mettre en œuvre cette initiative aurait dû être prévue au budget 2022. Ce n’est pas le cas et cela montre que la notion d’urgence climatique –même quand le Conseil d’Etat peut s’appuyer sur des décisions du Grand Conseil – n’est pas traitée à la hauteur des enjeux.

La minorité de gauche que je représente estime également que ce budget ne consacre pas suffisamment de moyens pour le soutien aux habitantes et habitants précarisés et pour le renforcement de secteurs du service public cantonal qui souffrent de sous-dotation, notamment le secteur des soins à domicile, où les salariés sont durement éprouvés par des mois de pandémie, mais aussi par des horaires à rallonge, un stress permanent et une difficulté à concilier vie professionnelle et privée. A ce sujet, la minorité défendra par des amendements un effort plus conséquent pour mieux soutenir certains milieux durement éprouvés par la pandémie de Covid. J’ai évoqué le secteur des soins à domicile, on pourrait également parler des actrices et des acteurs culturels qui sont éprouvés par la pandémie, par le pass sanitaire, par les baisses de fréquentation des lieux culturels. Une situation qui nécessiterait un soutien plus fort du canton et non pas la poursuite du train-train budgétaire habituel.

Au chapitre de la politique fiscale, nous nous opposerons aussi à certains des nouveaux allégements fiscaux prévus, mais qui profitent avant tout et de manière disproportionnée aux contribuables aisés. Je pense notamment aux retraits de capitaux de 3e pilier qui profitent évidemment surtout à des personnes avec des hauts revenus qui ont pu épargner dans un 3e pilier. A l’inverse, nous réclamerons une augmentation plus conséquente de la déduction fiscale en faveur des contribuables modestes, puisque la très faible hausse proposée dans le projet de budget ne permettra pas de compenser une hausse de leur facture d’impôt qui est intervenue suite à une décision prise par le Grand Conseil en 2018.

Afin de dégager une marge de manœuvre budgétaire pour financer les amendements soumis par la minorité au vote du Grand Conseil, et compte tenu du principe constitutionnel dit du petit équilibre, qui ne permettrait pas de financer l’ensemble des amendements sans dépasser la limite du déficit autorisé par la Constitution, nous proposerons de travailler sur les revenus et, en particulier, de réévaluer le montant budgété comme revenu au titre de la redistribution du bénéfice de la Banque nationale suisse (BNS). En effet, le budget présenté par le Conseil d’Etat annonce un revenu de 124 millions en provenance de la BNS. Or, si l’on observe le résultat intermédiaire, au 30 septembre 2021, la BNS versera très certainement un montant beaucoup plus élevé que les 124 millions budgétés, un montant qui équivaudra sans doute à 374 millions, soit 250 millions de plus que ce qui est budgété par le Conseil d’Etat. Cette sous-estimation du revenu de la BNS dans le projet de budget du Conseil d’Etat pose un réel problème du point de vue de la sincérité budgétaire, l’une des conditions de l’exercice d’un débat démocratique et parlementaire sur le budget. Ainsi, le projet de budget fait croire à un déficit, alors même que les comptes seront très probablement excédentaires, compte tenu de la sous-estimation du revenu de la BNS, mais relativement aussi à une sous-estimation généralisée des recettes fiscales telles que budgétées dans ce qui nous est soumis par le Conseil d’Etat. Ainsi, je ne citerai qu’un chiffre : le Conseil d’Etat a prévu dans son projet 2022, 6,4 milliards de recettes fiscales. Or, les comptes 2020 ont enregistré 7 milliards de recettes fiscales, un montant nettement supérieur. Pourquoi les recettes fiscales en 2022 décrocheraient de 600 millions par rapport aux comptes 2020 ? Cela paraît très improbable et montre bien que les recettes fiscales, une fois de plus, ont été très fortement sous-estimées dans ce projet de budget.

Il existe des moyens pour accroître les politiques publiques de soutien aux personnes les plus fragiles de ce canton ou de soutien à une réelle transition écologique au rythme que nous impose malheureusement le dérèglement climatique.

En conclusion, nous accepterons d’entrer en matière sur ce budget dans l’optique de proposer des améliorations et des renforcements. Si nos propositions sont rejetées, nous n’hésiterons pas, en vote final, à nous opposer à ce budget qui nous paraît, en l’état, insatisfaisant.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.

M. Jean-Daniel Carrard (PLR) —

Le groupe PLR a, comme tous les groupes de ce Parlement, étudié en détail ce projet de budget 2022. Je déclare mes intérêts, je suis membre de la Commission des finances et j’ai pu à ce titre étudier encore plus en détail certains points du budget, et entendre les diverses personnes auditionnées. Ceci dit, on peut constater que le budget respecte les limites constitutionnelles du petit équilibre, même si ce dernier reste fragile.

Le budget reste dans les mêmes limites que celui de 2021, avec des charges augmentant de 2,81 % pour une augmentation des revenus de 2,62 %, le tout avec un volume se situant à 10 milliards et demi. Nous pouvons considérer que les charges sont maîtrisées, même si certains points nous inquiètent et nous invitent à la vigilance. J’y reviendrai tout à l’heure. A relever que les charges Covid ne sont pas portées au budget 2022, à l’instar de ce qui s’est fait en 2021.

La dette actuelle du canton est de 975 millions, et devrait se maintenir à ce niveau en 2022. C’est donc une dette stabilisée et faible, que certaines communes pourraient nous envier… Globalement on est obligé de relever le travail de maîtrise et de rigueur du Conseil d’Etat et de son ministre des finances, qui permet depuis plus de 15 ans au canton de Vaud d’obtenir une appréciation de note triple AAA, même si le Conseil d’Etat présente une copie déficitaire pour la deuxième année conséctive.

Si on rentre maintenant dans le corps du budget, il y a quelques points de vigilance que nous tenons à relever. Commençons par le nombre ETP supplémentaires, soit 493. Il nous est annoncé que 101 ETP n’auraient pas d’impact financier, car il s’agit de pérenniser des postes existants et que, dès lors, la vraie augmentation des postes serait de 392. Permettez-nous de ne pas avoir la même lecture. Mathématiquement, c’est évidemment juste, mais sur le fond, ce qui était annoncé comme provisoire, va devenir définitif et restera donc dans les budgets futurs. Le PLR constate que l’augmentation la plus importante est au Département de la formation, de la jeunesse et de la culture, qui bénéficie à lui seul de plus de la moitié des postes, à savoir 265. Nous ne doutons pas que la formation doit avoir les moyens pour encadrer et former notre jeunesse, mais nous invitons le Conseil d’Etat à être prudent à l’avenir. Les charges continuent de croître dans le secteur de la santé et de l’action sociale, et la situation pandémique que nous connaissons actuellement ne va pas arranger les choses. Cela va nous obliger et suivre de près ce secteur où les coûts ne cessent d’augmenter.

Si nous regardons la fiscalité, celle-ci doit se placer dans une réflexion globale sur les années à venir, une feuille de route fiscale et non en une vision portant uniquement 2022. Il a été imaginé par le Conseil d’Etat une hausse des recettes fiscales pour 2022, tant pour les personnes morales que pour les personnes physiques. Nous devons tenir compte des différentes interventions qui sont en cours afin de soulager le fardeau fiscal des Vaudoises et des Vaudois, et ce dans l’espoir de leur redonner du pouvoir d’achat. Dans ce cadre, il faut citer l’initiative des jeunes PLR et centre droit, qui veulent augmenter les déductions fiscales des primes d’assurance-maladie. Cela pourrait représenter une baisse de 55 millions. En outre, deux motions parlementaires tendent à faire baisser la fiscalité de 5 points pour un enjeux de 160 millions. A relever que si l’on fixait cette baisse à 3 points, cela représenterait encore 100 millions. Si j’en parle, ce n’est pas pour nous affoler – le PLR soutient ces démarches – mais pour dire que nous devons avoir une vision financière prudente de l’avenir.

Autre sujet qui nous a poussés à réfléchir, l’accord canton-communes sur la participation à la cohésion sociale. Le Conseil d’Etat a annoncé un avancement du rééquilibrage pour 2027 de 25 millions. Rappelons que, pour 2022, la somme de 60 millions était prévue par un préfinancement. La question est la suivante : est-ce assez ? Quand j’étais membre du comité de l’Union des communes vaudoises (UCV), nous nous sommes souvent interrogés sur la capacité du canton à en faire davantage. Dans le fond, que fait le canton pour les communes ?

  • Récemment, le canton a placé 40 millions en faveur des transports publics, mais n’a pas porté à charge des communes la part de 16,6 millions ;
  • Des aides en faveur de leur politique climatique ;
  • Dans le cadre de la troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE III), les communes ont aussi retrouvé le sourire et les célèbres 25 millions de préfinancement – pour 2027, j’en conviens.

Loin de moi l’idée de défendre le budget de l’Etat contre l’intérêt des communes, mais nous allons vers des temps difficiles. Nous voyons que nous avons régulièrement des crédits complémentaires pour subvenir à l’urgence. Rien que la semaine dernière, la Commission des finances a validé plus de 90 millions de crédits complémentaires, certes, certains étaient dus au Covid.

Nous avons entendu les idées qui préconisaient de postuler un versement plus important des bénéfices de la BNS. Il est prévu deux tranches de 60 millions, soit 120 millions. Encore faut-il que les marchés permettent les bénéfices envisagés. Rien n’est moins sûr. Et, rappelons, s’il le fallait, que le budget est déficitaire. Il n’est pas nécessaire de consommer de l’argent que nous n’avons pas ! Sans parler des risques sur l’année à venir. Nous voyons les risques monétaires avec le franc qui se raffermit, les risques inflationnistes, géopolitiques, sans parler des risques identifiés par les services eux-mêmes, mais qui ne font pas partie du budget présenté. Vous me direz : « c’est du ressort du Conseil d’Etat ! » Certes, mais nos décisions vont permettre au Conseil d’Etat de travailler l’année prochaine. Nous devons garder à l’esprit cette situation instable, à l’instant où nous allons attaquer la réflexion sur le budget 2022.

Les communes souffrent, il est vrai. En tout cas certaines communes de ce canton. Mais travaillons à améliorer leur situation à travers la nouvelle péréquation. Là, quelque chose peut être entrepris, ne serait-ce que pour définir ce que l’on doit mettre dans la péréquation afin que ce ne soit pas au bon vouloir de certaines communes. Si nous voulons vraiment trouver une formule juste qui satisfasse toutes les parties, il me semble dès lors difficile d’échapper à une péréquation verticale. Mais c’est de la musique d’avenir. Ainsi, nous pensons que ce n’est pas en modifiant ce budget que nous allons résoudre l’équation des difficultés financières des communes. Gardons encore à l’esprit toute l’incertitude liée au Covid et aux incidences financières qui y sont relatives.

Ce budget, d’un Conseil d’Etat à majorité de gauche, satisfait néanmoins le groupe PLR qui, dans sa grande majorité, va le soutenir.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) —

En tant que vice-présidente de la Commission des finances et au nom du parti socialiste, nous vous prions de soutenir ce budget 2022 qui s’inscrit à nouveau sur fond instable de pandémie. Néanmoins, le canton a pu passer l’année 2021 en limitant la casse, grâce à une reprise du marché du travail et à une diminution du chômage au troisième trimestre, plus importante du reste de la Suisse, à raison de 0,2 %.

Les demandes de Réduction de l’horaire de travail (RHT) ont diminué progressivement depuis septembre 2021, en espérant que cela ne reparte pas à la hausse. A savoir qu’afin de soutenir l’économie durant cette période, les montants versés par la caisse de chômage se sont montés à près de 1,2 milliard. Grâce aux aides versées pour le Covid, les recettes fiscales n’ont pas été impactées comme on le craignait et ont même été budgétées à la DGF avec une croissance de 3,9 % pour 2022.

Comme l’année dernière, les services de l’Etat ont établi un budget qui ne tient pas compte de l’éventuelle poursuite des effets de la pandémie. Ces derniers sont toutefois considérés comme des risques, pour un montant estimé à près de 500 millions, contre 621 en 2021. Si ces risques se confirment, des aides seront accordées par voie de décrets ou par crédits supplémentaires aux milieux en difficulté, comme en 2020 et 2021.

Les charges totales du budget du canton s’élèvent à 10,625 milliards, les revenus à 10,178 milliards. Nous avons donc, pour la deuxième année consécutive, un budget de fonctionnement déficitaire à raison de 188 millions, soit 44 millions de plus qu’au budget 2021.Cependant, les recettes couvrant les charges avant amortissement, le petit équilibre est respecté. Ce budget est volontariste et de circonstance et met à juste titre l’accent sur les départements particulièrement impactés pour répondre au besoin de la population, tel que :

  • Département de la formation, de la jeunesse et de la culture, + 93 millions, dont :
    • + 21 millions dus à la politique salariale (y compris les augmentations statutaires) ;
    • + 20 millions liés à l’engagement de 174,3 ETP, dont 145,8 en lien avec la démographie ;
    • + 11 millions de renfort en faveur de l’enfance et de la jeunesse.
  • Département de la santé, + 55 millions, dont :
    • respectivement + 20 millions et + 11 millions aux groupes CHUV et FHV, consécutivement à la hausse de leurs activités et tâches d’utilité publique et à leurs investissements ;
    •  + 13 millions consacrés au renfort du maintien à domicile
  • Département de la santé et de l’action sociale, + 62 millions, dont :
    • les coûts des agences d’assurances sociales selon l’accord canton-communes d’août 2020 ;
    • le vieillissement de la population ;
    • les effets de la migration.
  • Département de l’économie, de l’innovation et du sport, +29 millions, dont :
    • 20 millions pour l’accompagnement à la diversification, à l’innovation et le soutien à l’économie pour la création ou le maintien de l’emploi ;
    • Département des infrastructures et des ressources humaines, + 20 millions ou + 3,2% , dont :
    •  5 ,5 millions pour l’accueil de jour des enfants ainsi que des investissements massifs pour les transports publics.

Seule ombre à ce tableau, les baisses fiscales obtenues par la droite, et qui, au vu de la situation actuelle, semblent incongrues en regard des défis à relever et des dépenses Covid prévisibles en dehors du budget.

Le parti socialiste ne peut donc que soutenir l’entrée en matière de ce budget, déficitaire certes, mais qui renforce les services aux postes où cela est vraiment indispensable. Ce budget permet à nos services de remplir leurs missions auprès de nos concitoyennes et concitoyens et prouve par les actes l’utilité d’un Etat fort et responsable en ces périodes de turbulences.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Le budget 2022 ressemble aux précédents ; il est à l’image de ces dernières législatures, soit :

  • des charges en perpétuelle augmentation, principalement dans le social, la culture et la santé ;
  • toujours plus de fonctionnaires avec près de 500 nouveaux postes ;
  • une politique toujours aussi laxiste concernant le renvoi des réfugiés déboutés par la Confédération qui coûte plusieurs millions à nos contribuables ;
  • et, cerise sur le gâteau, un appauvrissement constant des communes.

Par ce budget, le Conseil d’Etat nous annonce un déficit de 188 millions qui, probablement – comme évoqué par le rapporteur de majorité – au bouclement des comptes, se transformera en une petite centaine de millions, avoisinant presque le petit milliard avant bouclement…

Hélas, le groupe UDC constate des augmentations de dépenses principalement dans les départements tenus par la gauche, soit dans les domaines de la culture, de la formation et de la jeunesse, + 93 millions, du social, + 62 millions, et de la santé, + 55 millions. L’augmentation des charges de 2,81 % supérieure à celle de l’année dernière, mais surtout inférieure à la croissance des revenus qui se situe à 2,6 %, présage d’un Etat toujours plus gros, vivant au-dessus de ses moyens.

L’UDC ne peut que déplorer l’augmentation de 493,8 ETP hors CHUV, UNIL, Hautes écoles, Plateforme 10, etc., alors que de nombreuses sociétés, indépendants et employés se retrouvent en grande difficulté suite aux mesures sanitaires. Cette nette augmentation des emplois contribue à alimenter les charges de notre canton et à instaurer une véritable usine à gaz de la bureaucratie.

Je pense que vous connaissez toutes et tous la bande dessinée Les 12 travaux d’Astérix dont la huitième épreuve est dite de « la maison qui rend fou », quand Astérix et Obélix doivent obtenir le formulaire A-38. Un fonctionnaire émet un formulaire, puis un autre le contrôle et, pour finir, un fonctionnaire fait une statistique du formulaire. C’est la « La Maison qui rend fou » ! Et bien, dans notre canton, nous approchons de cette caricature, car cela devient le parcours du combattant pour obtenir un renseignement ou une aide. Il faut bientôt remplir 10 formulaires, qui passent par 3 ou 4 services de l’Etat, cela prend des semaines, si ce n’est des mois pour obtenir le plus souvent une chose simple. L’exemple pour l’obtention de subvention pour des panneaux solaires est marquant. En effet, la procédure et le coût de la demande coûtent bientôt aussi cher que la subvention elle-même. Et, pour terminer, avant de passer en revue brièvement les départements, on peut constater que notre gouvernement consacre toujours plus de moyens pour le social avec près de 810 millions de subsides.

Concernant le Département des institutions et du territoire, le groupe UDC s’interroge fortement sur l’impact pour les communes des baisses fiscales présentées dans la synthèse des revenus – baisse de 49 millions pour le canton – mais estimées à près de 21 millions pour les communes. Si le canton a les moyens de se permettre cette baisse, les communes n’auront d’autre choix que de relever leur taux d’imposition, car leur endettement augmente fortement, ce dernier étant la conséquence de la mise en œuvre des politiques publiques cantonales : écoles, accueil de jour, sécurité publique, etc. Ce ne sont pas les 25 millions injectés par le canton pour la facture sociale qui vont changer la donne, puisqu’ils couvriront simplement la baisse de revenus. Ainsi, l’accord canton-communes n’est à nos yeux qu’un enfumage !

Concernant le Département de la formation, de la jeunesse et de la culture, ce dernier représente 30,26 % des charges brutes avec un budget de 3,23 milliards. Il s’agit de la plus grosse augmentation des charges de ce budget avec 93 millions supplémentaires, mais surtout de la plus grosse augmentation de personnel avec + 265,96 ETP. Si une partie de ces moyens – surtout les ETP – sont en lien avec l’augmentation de la population, ou à l’augmentation statutaire d’effectifs, des moyens considérables sont mis en œuvre pour l’école inclusive, dite 360°… Du côté de l’UDC, nous émettons à ce stade de forts doutes sur cette politique, non seulement en termes de qualité d’éducation et de formation, mais également en termes d’impact de cette politique sur les finances communales, puisque celles-ci devront assumer ces mesures rien qu’au niveau de l’accueil de jour… A nouveau, le canton prend des mesures par idéologie politique qui impacteront les communes, les appauvrissant et, donc, finalement, aussi, les contribuables…

On constate également une augmentation du nombre d’élèves au gymnase de + 4,9 %, ce qui est réjouissant, mais qui a des conséquences financières énormes en termes d’ETP, mais également en termes d’infrastructures comme la construction de gymnases et de salles de gym, par exemple. En revanche, on constate avec regret une baisse de 1,2 % d’élèves dans la formation professionnelle. En effet, seuls entre 21 et 23 % des jeunes se dirigent vers un apprentissage au terme de leur scolarité. Ceci nous inquiète au plus haut point, car notre économie et plus particulièrement les entreprises employant des métiers dits « manuels » comme la construction manquent cruellement de main-d’œuvre qualifiée. On veut construire en bois ? On manque de charpentiers qualifiés ; on veut poser des panneaux solaires ? Il manque des électriciens ou des ferblantiers ; même le milieu de la mécanique souffre, manquant de mécaniciens, auto, poids lourd ou agricoles… Et, dans ces métiers-là, je peux vous assurer qu’il n’y a pas de chômage. Ces jeunes ont l’assurance de trouver un emploi, ils ont des perspectives professionnelles dès la fin de leur formation. Et, surtout, ils cotisent immédiatement à l’AVS et paient des impôts. Ainsi, j’ose espérer que le gouvernement ne favorise pas les études au détriment de la formation professionnelle. Notre groupe restera attentif, je vous le promets !

Concernant la culture, il faut relever l’augmentation des subventions accordées aux organisations privées à but non lucratif, soit + 3,7 millions, mais dont la majorité, soit 3 millions, vont directement à Plateforme 10. Ce musée qui, à terme, devrait coûter la modique somme d’environ 23 millions par année…

Au niveau du Département de l’environnement et de la sécurité, les charges connaissent une augmentation de 9,2 millions, dont 2,3 millions pour ECAVENIR. Un montant de 3,1 millions est également placé au budget du Département de la santé et de l’action sociale. Nous soutenons cette réorganisation, souhaitée de tous, mais compte tenu des problèmes rencontrés récemment, nous demanderons des explications sur ce sujet et exigerons une vision et une présentation globales des engagements financiers de ce projet. Néanmoins, l’UDC se réjouit de l’augmentation du montant dédié à la Police cantonale de + 1,6 million et + 4,8 ETP. Notre groupe salue également l’augmentation des ETP du Service pénitentiaire (SPEN), comme demandé dans notre résolution acceptée par ce Parlement lors du débat de la Commission d’enquête parlementaire (CEP) sur les prisons. En revanche, nous sommes fortement surpris de la décision d’augmenter la taxe de stockage des déchets matériaux de comblements pour la future gestion des sites pollués, ceci sans avoir tenu compte des principaux acteurs de ce canton et principalement l’Association vaudoise des graviers et déchets (AVGD).

Au niveau du Département de la santé et de l’action sociale, comme dit précédemment, on dépense toujours plus pour le social, avec par exemple près de 810 millions de subsides pour des résultats peu visibles, car la proportion de pauvres dans notre canton ne cesse d’augmenter. A nos yeux, avec une hausse de 117,9 millions, ce département devient incontrôlable. En effet, si la moitié de ce montant, soit 54,1 millions de hausse est destiné à la santé, et ceci en lien avec l’augmentation des activités, plus de 61,5 millions sont consacrés en sus pour le social. Heureusement, une partie de ces charges va en diminution des comptes des communes, ceci en lien avec la reprise des centres sociaux régionaux (CSR) et des agences d’assurance sociale. Néanmoins, il faut constater une hausse de 33 millions pour les subsides divers.

Quant au Département de l’économie, de l’innovation et du sport, l’UDC salue les investissements supplémentaires pour la Loi sur l’appui au développement économique (LADE) de + 11 millions en faveur de l’économie vaudoise qui en a vivement besoin.

Nous saluons également les moyens alloués à l’agriculture, ceci en lien avec une agriculture adaptée aux changements climatiques. L’UDC a clairement fait cette demande lors des votations sur les initiatives phytosanitaires.

La baisse des revenus du Service de la population (SPOP) de plus de 12 millions est due à la réduction du financement fédéral lié à la baisse du nombre de personnes en procédure et en admission provisoires. La fin de la prise en charge par la Confédération des personnes admises au titre de permis F et qui, après 7 ans, sont à la charge du canton, pèse sur les comptes de l’Etat. La politique du Conseil d’Etat qui n’applique pas les règles de la Confédération et qui ne renvoie pas les réfugiés déboutés par Berne coûte plusieurs millions aux contribuables vaudois. Les assurances-maladies des réfugiés non renvoyés par le canton sont désormais à l’entière charge de notre canton. L’UDC dénonce avec vigueur cette politique voulue par le Conseil d’Etat qui pénalise les Vaudoises et les Vaudois.

Quant au Département des infrastructures et des ressources humaines, ce sont des charges en augmentation de 20 millions, dont 3 pour la contribution à la Fondation pour l’accueil de jour des enfants (FAJE).

L’augmentation des coûts liés au système informatique, que ce soit en maintenance ou en termes d’ETP inquiète notre parti. Arriverons-nous à maîtriser ces dépenses ?

Pour le Département des finances et des relations extérieures, il n’y a pas grand-chose à dire, sauf une légère réduction des ETP, l’un des seuls départements dont le budget est élaboré sur une base très prudente.

En conclusion, suite aux multiples raisons évoquées en préambule, le groupe UDC ne peut cautionner ce budget présenté par le gouvernement et n’entrera par conséquent pas en matière.

Mme Rebecca Joly (VER) —

L’exercice budgétaire a quelque chose de frustrant, car il s’agit d’évaluer toutes les dépenses de l’Etat sans posséder la marge de manœuvre pour en modifier quoi que ce soit. Les Vertes et les Verts saluent la volonté affichée du Conseil d’Etat de continuer à investir, dans une période qui le nécessite, car sans vouloir encore le rappeler, la crise sanitaire que nous traversons depuis deux ans a des conséquences économiques et sociales importantes et exige que les pouvoirs publics investissent, et ce de manière massive, afin d’adopter une politique anticyclique. Ainsi, nous saluons le mouvement amorcé dans ce budget.

Toutefois, et sans surprendre personne, les Vertes et les Verts regrettent que l’urgence climatique n’ait pas engendré un changement de paradigme dans la création de ce budget et que, finalement, celui-ci ressemble peu ou prou à ceux des années précédentes. Concrètement, la communication de la part du Conseil d’Etat autour de ce budget mentionnait le retour bienheureux de la croissance. Or, ce paradigme de la croissance infinie dans un monde aux ressources finies ne peut plus aujourd’hui être le nôtre, et nous devons trouver des solutions pour conserver une prospérité économique dans un monde aux ressources finies, des solutions qui prennent en compte les limites naturelles de notre planète. Or, ce budget ne démontre pas la volonté d’investissements massifs dans les mesures prises pour lutter contre le changement climatique. C’est la raison pour laquelle nous présenterons un amendement sur la question de la transition énergétique, puisque nous pensons, même si cela demeure symbolique, que nous devons faire plus de pas et plus vite dans ce domaine. Nous attendons avec grande impatience la mise en œuvre de l’initiative Vassilis Venizelos pour les 300 millions destinés à la transition énergétique.

Enfin, j’ajouterai que nous saluons le début de mise en œuvre de la motion Vuilleumier relative à la déduction pour les contribuables modestes qui doit effectivement être augmentée afin d’éviter les effets de seuil pour les personnes aux plus bas revenus et qui se verraient à la fois avoir des subsides d’assurance, tout en voyant leurs impôts augmenter, qui se retrouvent peu gagnants, voire carrément perdants. Toutefois, il nous semble que la solution proposée par le Conseil d’Etat dans le projet de loi sur les impôts est insuffisante. Par conséquent, nous interviendrons à nouveau lorsqu’il s’agira de ladite loi pour que cette déduction soit augmentée.

En conclusion, les Vertes et les Verts soutiendront le budget présenté et l’entrée en matière tout en regrettant son caractère insuffisamment offensif, mais en saluant les efforts déjà consentis.

Mme Claire Richard (V'L) —

Ainsi, voici de nouveau venu le temps du budget… Le budget 2022 est certes légèrement déficitaire, mais à un niveau pour le moins peu alarmant de quelque 180 millions, sur plus de 10 milliards de francs de fonctionnement. On peut donc se réjouir que le budget soit encore cette année encourageant et très proche de l’équilibre, malgré la situation sanitaire difficile qui s’éternise. On voit donc que l’édifice est solide et sa construction presque inébranlable.

Le groupe vert’libéral se montrera bien sûr attentif aux amendements déposés au fur et à mesure de l’avancement du traitement de ce budget 2022. Il sera particulièrement attentif au traitement réservé aux communes et à l’avancement de l’accord canton-communes passé en 2020.

Pour le surplus, je ne vois pas que relever de plus qui n’ait déjà été dit, plus ou moins longuement, par mes nombreux préopinants. Si ce n’est que nous nous réjouissons que le fonds de 300 millions pour la transition énergétique soit mis en œuvre, mais cela ne se fera évidemment pas par le biais du budget. Dès lors, d’ici là, le groupe vert’libéral est satisfait de ce budget plutôt intelligent, entrera en matière et vous invite à en faire de même.

M. Vincent Keller (EP) —

Mesdames et messieurs, je vais commencer par une question : connaissez-vous l’histoire des trois brigands ? Elle est plus jolie que celle d’Astérix de M. Pahud. Allez, je vous la raconte comme si j’endormais ma fille le soir à 20h30. Cette histoire m’a inspiré hier soir, mais je vous rassure, vous vous m’inspirez toujours… vous le savez ! J’espère simplement qu’elle ne vous enverra pas dans les bras de Morphée.

C’est l’histoire de trois brigands : des méchants au grand cœur. Leur job consiste à piller les diligences. Le premier avec un soufflet qui lance du poivre pour faire peur aux chevaux, le second avec un tromblon pour mettre en joue les voyageurs, et le troisième avec une grande hache pour détruire les roues de la diligence. Ainsi, les brigands ont le temps de fuir. Une fois les voyageurs de la diligence dépouillés, les pièces d’or, les pierres précieuses et les colliers sont emportés haut dans la montagne dans la grotte des trois brigands. Le soir venu, ils admirent leur trésor : une montagne d’or et de pierres précieuses. Dit comme ça, vous vous dites peut-être, mesdames et messieurs les députés, que je suis un outrecuidant qui est parti pour insulter nos sept sages… Pas du tout. Je ne les insulte pas, je les encourage. Un jour, les trois brigands attaquent une diligence, mais ils n’y trouvent pas le moindre gramme d’or, pas une pierre précieuse. Rien ! Non… dans la diligence se trouve juste une petite fille orpheline qui pleure toutes les larmes de son corps, parce qu’elle doit aller chez une vieille tante grognon. Les brigands – parce que je vous ai dit qu’ils ont quand même un grand cœur – prennent pitié de cette petite fille et, au lieu de détruire la diligence, ils prennent Tiffany – c’est le nom de la petite fille – sous leur long manteau noir et l’emmènent dans leur grotte. Au début, la petite fille a très peur, mais progressivement elle sent que les brigands sont gentils avec elle. Des brigands au grand cœur avec un grand trésor. « Dites les brigands, pourquoi vous avez autant d’or et de pierres précieuses, ça vous sert à quoi ? » « C’est à nous ! C’est notre réserve. » Toute la nuit, les trois brigands pensent et repensent à ce que la petite fille leur a demandé. Finalement, ils décident d’utiliser leur trésor au lieu de le garder pour eux. Ils construisent une belle ville, avec trois tours en forme de leurs grands chapeaux noirs. Et dans cette ville, ils recueillent tous les orphelins du monde.

Voilà, il est 21h, les yeux de ma fille sont fermés, et papa peut aller lire les deux rapports de la Commission des finances pour le budget 2022. Que nous apprennent-ils ces deux rapports ? Que rien ne change dans ce canton. En tout cas avec cette majorité au Grand Conseil et ce ministre des finances-là. Je dois bien vous avouer quand même que je suis triste de m’imaginer que c’est la dernière fois qu’on aura l’occasion de croiser le fer sur un budget cantonal avec lui. Le groupe Ensemble à Gauche et POP est évidemment totalement insatisfait de ce budget 2022. Comme chaque année, il faut bien que le fragile accord entre personnes de bonne compagnie tienne. Alors, on débattra beaucoup, on lira beaucoup d’amendements, on votera beaucoup et on les refusera tous – sauf ceux proposés par la Commission des finances. Ça durera longtemps, et au vote final, on aura l’impression d’avoir mis sous toit un « budget ambitieux », une « avancée majeure pour toutes les Vaudoises et les Vaudois malgré l’influence catastrophique de la pandémie de Covid sur les finances cantonales », l’aboutissement d’un « difficile équilibrage entre besoins et moyens en tenant compte de la conjoncture difficile ». M. le chef du Département des finances et des relations extérieures félicitera la Commission des finances pour l’excellence de son travail, et le budget sera accepté par 144 oui et 6 non. Parce que oui, cette année on aura une voix de plus ! Nos idées avancent. Lentement, mais elles avancent…

Alors, le budget, et M. le rapporteur de minorité l’a bien expliqué, même s’il s’est concentré sur les amendements déposés à la Commission des finances, ce budget est minimaliste. Il est à des années-lumière des besoins des Vaudoises et des Vaudois. Nous y reviendrons avec de nouveaux amendements. L’argent existe, et il dort dans la grotte du Conseil d’Etat, au lieu d’être utilisé pour l’ensemble de la population.

Malgré l’augmentation de 266 ETP au Département de la formation, de la jeunesse et de la culture, on continue à avoir des classes avec plus de 20 élèves péjorant d’autant leurs apprentissages. Le Conseil d’Etat propose une excellente mesure, nous le pensons, qui vise à aller vers une école inclusive et non élitiste avec le Concept 360°. Mais il n’y met pas les moyens ! La pandémie a durement touché les collaborateurs de la santé, dans les EMS, dans les hôpitaux, alors remercions-les véritablement. Une majorité de ce Grand Conseil a craché au visage des jeunes de ce canton en refusant un tout petit montant dans le cadre du Plan climat qui visait à donner les moyens aux élèves d’aller vers une école durable et de comprendre le concept de durabilité. Corrigeons cette erreur majeure en donnant la possibilité aux enseignantes et enseignants de bénéficier de décharges pour celles et ceux qui seront ou sont des référents durabilité dans les établissements de l’enseignement obligatoire et postobligatoire.

Soutenons les créateurs artistiques de ce canton. Un domaine si peu financé avant et surtout durant la pandémie, au contraire d’autres branches que nous avons toujours soutenues. Mettons-y les moyens !

L’Etat doit respecter ses engagements, notamment en matière d’offres de salles de sport. Que cet exécutif respecte les décisions du premier pouvoir !

Et cela n’est qu’un petit florilège de nos amendements. Le groupe Ensemble à Gauche et POP espère que ce Grand Conseil saura améliorer les conditions des Vaudoises et des Vaudois en modifiant ce budget.

S’agissant de la modification de la Loi sur les impôts (LI) : il y a une telle discrépance entre les besoins de la population et ce budget que certains voudraient baisser les impôts pour favoriser encore les plus riches et augmenter toujours plus le fossé entre les plus riches et les plus précaires. Notre groupe vous invite à suivre la minorité afin d’éviter cela et refuser ces modifications à la LI.

Aujourd’hui, mesdames et messieurs, la petite fille de l’histoire, c’est moi, c’est le groupe Ensemble à Gauche et POP, toutes celles et tous ceux que nous défendons. Les moyens existent, mais au lieu de les utiliser, on les met dans de grands coffres et on les admire. Non, mesdames et messieurs les conseillers d’Etat, vous n’êtes pas des brigands. D’abord, les brigands cassent des diligences et font peur aux voyageurs. Mais entendez toutes les « Tiffany » de ce canton, et répondez simplement à leurs besoins ! Mesdames et messieurs les conseillers d’Etat, jamais je ne vous ai pensé être des brigands. Lorsque je parle de vos décisions et vos dires, c’est toujours avec un très grand respect pour l’institution.

Alors, lorsque j’ai raconté à ma fille que j’utiliserai l’histoire de Tiffany et des brigands aujourd’hui, elle m’a dit « Tu sais papa, tu peux leur donner mon livre à tes copains, c’est bientôt Noël. » Alors, madame la présidente du Conseil d’Etat, je ne sais si vous accepterez ce simple présent d’une future citoyenne de ce canton qui, je l’espère, saura apprécier les effets de votre politique volontariste ainsi que celle de vos collègues dans les années futures.

Le groupe Ensemble à Gauche et POP s’abstiendra sur l’entrée en matière sur ce projet de budget. Il poussera même à accepter le projet de budget dans son intégralité si tous ses amendements sont acceptés.

M. Serge Melly (LIBRE) —

Merci, madame la présidente de donner la parole aux petits derniers après six autres déclarations et contes de mille et une nuits sur le budget : il n’y a pas grand-chose à ajouter. Même si les Libres ne font plus partie de la Commission des finances, ils tiennent tout de même à dire qu’ils voteront le budget, tel que présenté par le Conseil d’Etat, sous réserve de quelques amendements.

Je ne commenterai pas les différentes charges du budget, mais constate qu’elles renforcent les missions de l’Etat en donnant des moyens supplémentaires aux secteurs qui le nécessitent, compte tenu de l’évolution démographique et du vieillissement de la population. On peut simplement regretter – même si le Conseil d’Etat a senti qu’un équilibrage financier entre l’Etat et les communes était indispensable, si ce n’est vital – qu’il faille attendre 2027 pour voir la réalisation de cette contribution. Les Libre proposeront d’ailleurs un amendement à ce sujet. Parce qu’ils sont quelque peu excessifs, le groupe des Libres ne votera pas les amendements de la minorité, mis à part celui destiné à renforcer les transports publics. Nous considérons cet amendement comme allant dans le bon sens, sachant qu’il en faudra beaucoup plus pour stimuler le report modal entre le trafic privé et public. Seul un électrochoc permettra le renforcement de l’offre des transports publics et le désengorgement du réseau routier. Cet électrochoc s’appelle la gratuité des transports publics.

Au niveau des revenus, j’exprime un peu plus d’hésitation avec une progression de ces derniers de 2,6 % et une hausse des recettes fiscales de 3,6 %. Voilà des chiffres bien assurés dans un domaine pourtant très aléatoire. Dans son communiqué, le Conseil d’Etat affirme que ses hausses traduisent un contexte de sortie de pandémie et de croissance économique retrouvée. Pour ma part, j’aurais plutôt dit « pour autant que la pandémie soit éradiquée » et que la croissance économique soit retrouvée. Car l’estimation des recettes est toujours aléatoire, et paraît cette année encore plus difficile. Ainsi, des termes plus forts s’imposent : des recettes hypothétiques, éventuelles ? Des prévisions chanceuses, hasardeuses, risquées ? Mais soyons comme le budget 2022, optimistes, alea, soit le dé des Romains roulera peut-être sur le site !

M. Jean-François Thuillard (UDC) —

D’abord, j’adresse une petite remarque au député Keller : il y a beaucoup de gentils brigands, mais surtout ceux du Jorat !

Ce budget 2022 me laisse sur ma faim. J’ai l’impression d’être pris en otage. Alléger la charge fiscale de nos citoyennes et citoyens ? Oui, j’y suis favorable, mais pas au détriment de pertes de rentrées fiscales pour nos communes. Je déclare mes intérêts comme syndic d’une commune qui voit son développement proche de zéro pour les 15 prochaines années, comme certainement les quelque 170 communes vaudoises bloquées par le moratoire sur les constructions, dû à la mise en réserve d’une partie de leur territoire post Loi sur l’aménagement du territoire (LAT), ce qui signifie certainement un très sombre avenir financier.

Les propositions du Conseil d’Etat impliquent énormément de bases légales à changer. Simultanément, les chiffres à avaliser me posent toujours un problème à cette période de l’année, sans même parler des incidences financières que nous allons décider sur les rentrées du canton ou des communes qui ne peuvent, de toute façon, une fois de plus, rien décider, mais subir, même avec les quelques représentants des autorités communales que nous sommes mais largement minorisés. Je vous ai déjà listé et signalé lors d’une séance au début de l’automne que nos décisions ont très souvent des incidences sur les comptes et budgets communaux sans que les autorités locales n’aient pu se prononcer par exemple sur les millions du Plan climat, qui sont très souvent liés à une charge communale, les transports publics en région périphérique, la biodiversité, pour me limiter à ces exemples. Sans parler des infrastructures en transports publics que nous allons développer ou encore du système scolaire avec l’école inclusive 360° qui entraîne des besoins pour les communes, alors que nos infrastructures ne sont pas prévues pour. Je m’arrête là ; mais sachez qu’à la base, « la rogne » monte… Néanmoins, je reconnais que le Conseil d’Etat assume une partie des augmentations de charges, comme le déficit des transports publics qui soulage la partie communale. Notez que cela est presque normal, puisque les communes subissent cette situation et se limitent à appliquer les décisions étatiques.

Le budget 2022 indique moins 50 millions pour le canton et moins 21 millions pour les communes. Le canton peut se le permettre en fonction des résultats des exercices précédents, mais pas les communes qui n’auront d’autre choix que d’augmenter leur taux d’imposition, ce qui est inacceptable. Je prends ce budget comme un contre-projet à la proposition UDC qui souhaitait baisser la fiscalité, mais uniquement au niveau cantonal. J’espère qu’une proposition de motion verra des jours ensoleillés. Je soutiendrai par conséquent tout amendement visant à soulager les communes et m’opposerai à tout amendement ou autre proposition visant à faire capoter cet allégement.

En attendant, à titre personnel, et comme la majorité de mon groupe, je vous propose d’entrer en matière sur ce budget. Un Etat fort ? Oui ; mais peut-être avec un petit équilibre, mais pas au détriment d’un plongeon des communes.

M. Pierre Zwahlen (VER) —

C’est une partie de poker menteur qui se poursuit de budget en budget. Au bas mot, 772 millions sont cachés sous la table des joueurs ou dans les caves de l’Etat. Les revenus du Département des finances qui s’élevaient à 7,7 milliards aux comptes 2020, année de confinement et de crise exacerbée, se réduisent à seulement 7,2 milliards dans le budget examiné ce jour. Comment justifier cette sous-estimation de 523 millions de recettes, alors que les indicateurs économiques du canton révèlent une situation souvent meilleure que celle de toute la Suisse. La part vaudoise au bénéfice de la Banque nationale suisse (BNS) est diminuée des deux tiers, soit 249 millions en regard de la contribution attendue. En additionnant ces deux chiffres, ce sont donc bien 772 millions au total qui témoignent de la marge budgétaire exorbitante, de l’absence de sincérité financière du futur excédent soi-disant surprise dont nous parlerons dans 18 mois. La magie finit par fatiguer. Ainsi, nous aurions apprécié un lingot pour la transition énergétique, dans le sens des 300 millions soutenus par le Grand Conseil. Car nous avons les moyens d’accélérer le solaire et les énergies renouvelables… mais, non. Le climat attendra. Et la promotion de la diversité ? Aussi. Et les communes ? Les écarts se creusent dramatiquement avec l’Etat. Selon Satistique Vaud, les engagements nets des communes – soit les dettes moins les actifs financiers – s’élèvent à 3,2 milliards en 2019. Il n’y a pas d’engagement net à l’Etat, mais des actifs de plus de 2,2 milliards, l’an dernier. L’écart différentiel est donc de 5,3 milliards entre l’ensemble des communes et le canton. Ce n’est d’ailleurs pas un modeste amendement de 25 millions qui y changera grand-chose… Nous apporterons un soutien critique à ce projet de budget 2022.

Mme Nuria Gorrite (C-DCIRH) — Président-e du Conseil d’Etat

Le Conseil d’Etat vous remercie pour vos prises de position respectives, tout comme il remercie la Commission des finances pour son examen attentif du budget et la Commission thématique des systèmes d’information pour l’examen du budget de l’informatique qui lui a été confié. Au terme des prises de position des différents partis, nous sommes – cette année, comme chaque année – confrontés à des demandes diverses avec des variations qui découlent finalement des programmes des partis respectifs.

Pour sa part, la charge du Conseil d’Etat est tout autre, puisqu’elle consiste à harmoniser, à stabiliser et à présenter un budget qui, comme cela a été rappelé, a été élaboré en temps de crise, crise dont nous ne sommes pas encore sortis, raison pour laquelle nous avons dû faire face – et nous nous y employons encore – à un certain nombre d’incertitudes face auxquelles il nous apparaît fondamental de pouvoir respecter les équilibres, mais aussi de continuer à répondre aux besoins qui se sont exprimés de manière très vive depuis mars 2020 besoins parfois largement relayés dans les rangs de votre Grand Conseil. En effet, vous vous êtes faits les porte-paroles de groupes de personnes particulièrement touchées par la crise – individuelles ou morales – relais de différents secteurs particulièrement impactés par la crise du coronavirus que nous continuons de subir.

Ainsi, le rôle du Conseil d’Etat et son engagement dans l’élaboration du budget 2022 ont consisté à respecter les principes de l’Etat : accompagner, protéger et stimuler. D’abord, protéger celles et ceux qui en ont le plus besoin, les pauvres – et il y en a – car les fragilisés de nos sociétés se sont révélés encore plus fortement avec la crise qui a mis à rude épreuve beaucoup de personnes dans notre canton. Les secteurs économiques particulièrement impactés ont fragilisé des secteurs entiers, des entreprises, des chefs d’entreprise, des employés qui ont vu leur salaire diminuer de 20 %, placés en RHT, des chefs d’entreprise qui ont survécu en injectant parfois des économies de longue date pour la survie de leur entreprise. Toutes ces personnes ont été accompagnées et continueront de l’être par le biais du budget 2022 de l’Etat. Nous matérialisons cette protection, parce que nous sommes convaincus que nos cohésions nous rendent plus forts que nos divisions.

Ensuite, accompagner. Nous accompagnons les évolutions de notre société liées au secteur informatique, notamment. Nous avons été particulièrement frappés par les nouvelles criminalités qui s’exercent à l’encontre des Etats ou des communes, des PME ou des grandes entreprises. Ainsi, nous devons continuer à investir, à sensibiliser et à accompagner dans de multiples secteurs : l’agriculture, soumise à des évolutions nécessaires, tout comme à des investissements fondamentaux dans l’évolution liée au changement climatique, dans l’environnement, dans la biodiversité par l’investissement des secteurs liés aux transports publics, pour l’accompagnement des organisations familiales et ainsi répondre aux besoins en matière d’accueil de jour des enfants. Investir dans l’avenir implique aussi d’investir dans la formation. Nous savons quels sont les métiers qui sont mis en péril par l’informatique, par la numérisation du monde. Notre seule réponse est de préparer nos jeunes à y faire face. Et la meilleure manière de le faire équivaut à leur offrir un accompagnement, une formation qui leur donne les moyens de survivre dans ce monde en transformation.

Stimuler ? Cela signifie continuer à investir dans le développement économique, dans l’accompagnement de nos entreprises, dans leur transformation numérique, mais aussi soutenir les secteurs de l’innovation dans lesquels nous serons bons demain, parce qu’aujourd’hui nous avons su anticiper. Nous avons pour responsabilité de respecter les accords de la feuille de route fiscale, raison pour laquelle nous matérialisons quatre baisses fiscales ciblées dans des secteurs identifiés, circonscrits, mais qui conservent nos marges d’action financière.

Accompagner, stimuler, protéger implique aussi de préserver les institutions. Ces derniers jours, les relations institutionnelles ont fait l’objet de nombreux échanges entre les représentantes et les représentants des communes avec celles et ceux des groupes politiques. C’est ainsi que nous arrivons à l’ouverture de ce débat budgétaire avec une discussion qui a permis de trouver une vision, une proposition débattue et acceptée par les représentants des communes. Je ne reviens pas personnellement sur l’accord canton-communes, car je laisserai le soin à ma collègue Christelle Luisier en charge des institutions et des relations avec les communes de vous le présenter, lorsque le débat portera sur ce point. Toutefois, il me semble essentiel de pouvoir vous dire que nous sommes préoccupés par le fait de stabiliser ces relations dans cette période de crise. Ainsi, si d’aucuns considèrent qu’« il n’y en a pas assez pour ici, pas assez pour là », avec « trop ici et trop là », il s’agit précisément de notre rôle d’arbitrage, de pesée des intérêts et d’une anticipation de l’avenir que nous avons exercé avec prudence.

Enfin, je remercie M. Keller pour son intérêt pour la littérature ainsi que de nous rappeler l’histoire des trois brigands ! Le Conseil d’Etat, pour sa part, est plutôt attaché aux classiques, et il s’inspire – comme vous le savez de longue date – des trois petits cochons. (Rires.) Un conte que je vous invite à relire avant de voter le budget de l’Etat, car il nous inspire que seule une construction prudente sur une base solide permet de faire face aux aléas de la vie. La stabilité institutionnelle, financière est celle qui nous a permis d’arriver jusqu’ici, dans cette période de crise, précisément parce que nous pouvons nous appuyer sur des relations et des finances institutionnelles préservées, parce que nous avons pu garder notre capacité d’action et avons été en mesure, tout au long de 2020 et 2021, de répondre aux nombreuses sollicitations qui nous ont été adressées. En effet, si nous avions soufflé comme le vent sur des constructions en paille, dilapidé l’argent public, nous serions aujourd’hui en train de mener une tout autre discussion, car les plus fragilisés auraient été menacés, puisque lorsque nous avons été confrontés à des crises économiques doublées de crises financières, ce sont les plus pauvres de nos sociétés qui en ont fait les frais en premier, les services publics étant attaqués. Relativement aux crises auxquelles nous devrons encore faire face à l’avenir, il est parfaitement inopportun de venir jouer à l’apprenti sorcier. Raison pour laquelle, ce budget est équilibré, répond aux besoins, anticipe l’avenir et préserve nos capacités d’action. Je vous remercie par conséquent de le soutenir avec force.

M. Pascal Broulis — Conseiller-ère d’Etat

La maison Vaud est solide. On ne peut pas uniquement regarder une seule partie du verre ; il faut observer comment il se remplit, « moitié plein, moitié vide ». Ce verre admet un côté fiscal. Le contribuable permet de financer les prestations publiques. Si ce dernier paie des impôts, c’est parce qu’il a pu créer de la richesse dans un espace de paix. Au nom du Conseil d’Etat, je remercie la Commission des finances pour son examen attentif des prestations 2022 durant tout l’automne 2021.

D’abord, il s’agit d’un budget déficitaire. Le déficit est lié à notre environnement macro-économique. Ce déficit tient compte de 500 postes supplémentaires dans l’administration qui renforcent les missions d’Etat, tout comme de la croissance démographique que le canton enregistre. Nous avons la chance que notre canton soit ouvert et conserve une croissance démographique qui nous garantit une pyramide des âges équilibrée. Ensuite, nous maîtrisons nos dépenses avec une croissance des charges de 2,8 %, un élément relevé par différents intervenants, un chemin équilibré sur des principes d’universalité de la dépense.

Quant aux bénéfices de la BNS, il s’agit d’observer cela à l’échelle de la Suisse, des 26 cantons et de la Confédération. Il faut savoir que beaucoup de cantons suisses n’intègrent pas l’entier du revenu de la BNS. La situation économique étant, d’autant plus, complexe. La bourse est très haute. Il est question d’inflation, d’un cours de l’euro à la parité, de différents enjeux qui peuvent toucher la monnaie. Le Conseil d’Etat a déjà augmenté la part des 60 millions que nous mettions habituellement pour la passer à 120. Si vous procédez au « grand total du grand total » avec un déficit de 190 millions plus le reliquat de la BNS, vous êtes à l’équilibre ; mais il faut aussi tenir compte des risques financiers – ce que font le Conseil d’Etat et la Commission des finances. En effet, les risques financiers de plus de 2 millions ont été listés à hauteur d’un demi-milliard. Par conséquent, le budget a éludé un demi-milliard. Depuis de nombreuses années, le Conseil d’Etat gère les risques d’un demi-milliard en dehors d’une procédure budgétaire, un aspect en lien avec les risques auxquels la Commission des finances a accès.

Quant aux communes – qui sont un partenaire institutionnel important – nous espérons qu’un chemin a été trouvé. Si le vote d’entrée en matière est fort, nous souhaitons aussi que vous souteniez massivement le projet de budget 2022.

Relativement au Covid, pour que nous soyons au clair et pour éviter toute forme de quiproquo, le projet 2022 ne comprend aucun coût Covid. Depuis 3 ans, nous avons un suivi qui est complètement en dehors des coûts Covid. D’abord, pour assurer une transparence de suivi. D’ailleurs, nous n’avons pas placé dans les projets de budget et les comptes successifs la question qui touche au Covid. En 2020, nous avons mis une somme de côté qui a été utilisée en 2021 et qui sera encore utilisée en 2022. Au vu de la situation pandémique, nous pensons que pour 2023, 2024 et 2025, voire plus loin – car les prêts Covid vont jusqu’en 2030 – nous devrons nous employer à un suivi Covid en dehors de la procédure budgétaire ou comptable.

Par ailleurs, les baisses fiscales sont ciblées, adaptées et permettent au canton de rester concurrentiel et attractif, car nous tenons l’engagement mis en œuvre dans le Plan de législature. Il s’agit de secteurs qui créent de la richesse, des entrepreneurs, des ouvriers, des salariés qui ont mis un peu d’argent de côté par le 2e ou le 3e pilier. Ce sont des baisses qui ont été demandées par votre Parlement, listées par le Conseil d’Etat dans son programme de législature 2017-2022. Nous remplissons par conséquent une action dudit programme.

Enfin, concernant les mesures de renforcement sectorielles, j’ai entendu des critiques pour certains secteurs… vous revenez sur la question de la formation professionnelle ou celle de l’enclassement. Les chiffres articulés ne sont pas tout à faire conformes à ce qui a été entendu, y compris dans le domaine de l’asile ou celui de la santé. Ce sont des aspects que nous corrigerons tout au long de ces deux ou trois jours d’examen du budget.

Au nom du Conseil d’Etat, je vous encourage à voter l’entrée en matière et à voter le budget tel qu’il a été examiné par la Commission des finances.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est close.

L’entrée en matière est admise par 105 voix contre 16 et 8 abstentions.

Projet de loi modifiant la loi du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux (LI) (21_LEG_172) et projet de loi complémentaire (21_LEG_237 (cmpl))

Premier débat

Pour commencer, conformément à ce qui vous a été annoncé par courriel par le Secrétariat général jeudi dernier, nous traitons du projet de loi modifiant la Loi du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux (LI). J’attire votre attention sur le fait qu’il y a deux projets de loi qui seront traités ensemble, les articles ouverts de la LI étant pris par ordre numérique. Cela implique un mixte des deux projets de loi.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Ce projet de loi modifiant la LI fait d’abord appel à quelques modifications en matière d’adaptation au droit fédéral. C’est essentiellement le cas de l’article 31 sur les sanctions où l’on reprend le droit fédéral. L’article 56 y est aussi lié. C’est aussi le cas des articles qui vous sont proposés dans le cadre de l’exposé des motifs du projet de loi complémentaire. Il y a ensuite un certain nombre d’articles qui portent sur l’augmentation de déductions fiscales en matière de frais de garde, de contribuable modeste. Enfin, il y a deux modifications qui concernent le capital prévoyance et l’estimation des titres de sociétés faisant l’objet d’un outil de travail.

Je commenterai les différents votes au fur et à mesure du passage des articles en détail. De manière générale, la Commission des finances vous propose d’entrer en matière sur cette modification de la LI. Pour les objets de l’exposé des motifs et projet de loi complémentaire, la commission a été unanime. Pour les autres objets, l’entrée en matière a été admise par 12 voix et 3 abstentions.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.

M. Pierre Volet (PLR) —

Pour la bonne compréhension des 150 députés présents dans la salle, je remercie Mme la présidente et tous les intervenants de préciser, à chaque fois qu’ils interviennent, les articles dont il est question pour que nous puissions nous y retrouver. Dans le cas contraire, on risque vite de se perdre.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Monsieur le député, j’ai entendu votre demande. Je répète que nous traitons actuellement de l’exposé des motifs et projet de budget, plus précisément à l’exposé des motifs et projet de loi modifiant la LI et l’exposé des motifs et projet de loi complémentaire qui vous a été adressé.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Permettez-moi, au stade de l’entrée en matière sur la LI, de vous préciser la position du groupe socialiste. Les impôts sont l’outil de solidarité que notre société se donne pour faire que chacune et chacun contribue selon ses moyens à des prestations qui s’adressent à toutes et tous selon leurs besoins. Notre groupe ne considère donc pas l’impôt comme une punition ou un mal nécessaire, mais comme un outil de progrès. Grâce à cette contribution, notre canton peut assurer l’instruction publique, des dispositifs d’action sociale visant à ne laisser personne de côté, un système sanitaire, un Plan climat, etc.

Bref, vous l’avez compris, notre groupe défendra les impôts et ne soutiendra donc pas, dans sa large majorité, la plupart des modifications proposées dans cette révision de la LI. Cela veut aussi dire que nous n’entrerons pas en matière sur des compensations pour les communes découlant de ces modifications, puisque nous ne soutiendrons pas ces baisses fiscales.

Dans le détail et pour ne pas reprendre la parole à chaque modification, voici nos différentes positions. Notre groupe ne soutiendra pas la modification concernant la défiscalisation de certaines sanctions administratives, c’est-à-dire qu’une partie du groupe s’y opposera et une autre s’abstiendra. La hausse de la déduction pour frais de garde sera soutenue à l’unanimité. La hausse de la déduction pour contribuable modeste devrait permettre une amélioration pour les contribuables les plus pauvres et nous la soutiendrons. Cela dit, elle ne constitue pas une réponse suffisante à la motion Vuilleumier. Nous avons aussi pris note que la minorité de la commission proposera un amendement. Notre groupe politique constate qu’aucune de ces solutions n’a été chiffrée, aucune simulation sérieuse n’a été présentée pour évaluer en quoi la réponse répondrait à la motion Vuilleumier. C’est la raison pour laquelle notre groupe sera partagé entre le soutien à la variante du Conseil d’Etat et la proposition de la minorité de la commission. Dans tous les cas, ultérieurement, nous refuserons la réponse à la motion Vuilleumier. Une large majorité de notre groupe ne soutiendra pas non plus l’augmentation des déductions concernant les retraits en capitaux des fonds de pensions et la refonte de la fiscalisation de l’outil de travail. Nous estimons que ces mesures ne profitent qu’à des contribuables déjà favorisés, sans cibler sur les besoins. Cela signifie qu’une partie de notre groupe s’y opposera et qu’une autre s’abstiendra. Les éléments figurant dans l’exposé des motifs complémentaire seront soutenus par notre groupe à l’unanimité.

M. Hadrien Buclin (EP) — Rapporteur-trice de minorité

Tout d’abord, une appréciation générale au stade de l’entrée en matière sur ces modifications fiscales, même si je reprendrai la parole pour un développement un peu plus détaillé sur certains articles particuliers. Nous sommes assez heurtés par l’équilibre général des modifications fiscales qui sont proposées. Il y a, d’un côté, une politique très généreuse en faveur des revenus les plus élevés de ce canton – je pense notamment aux retraits de capitaux liés au troisième pilier, mais aussi à l’évaluation de la fortune des entrepreneurs – et, d’un autre côté, on constate malheureusement une véritable pingrerie lorsqu’il s’agit d’atténuer les effets d’une récente hausse d’impôts qui a frappé les contribuables modestes, en particulier les bénéficiaires de rente-pont et de prestations complémentaires. Nous interviendrons donc pour corriger cela, d’un côté en demandant une compensation plus importante pour les contribuables modestes et, de l’autre côté, en refusant les allégements fiscaux qui vont profiter de manière disproportionnée aux revenus les plus élevés.

Mme Florence Gross (PLR) —

Nous y voilà ; nous entrons directement dans le vif du sujet. Les mesures proposées dans la LI par le Conseil d’Etat in corpore font partie du Programme de législature et sont, comme l’a rappelé M. Broulis qui fait partie du Conseil d’Etat, bénéfiques à l’ensemble du canton. Or, on entend déjà, de la part de différents députés de gauche, que celles-ci seront combattues aujourd’hui sous prétexte qu’elles profitent uniquement à une certaine partie des contribuables. J’entends déjà le terme de « riches » employé de manière péjorative. Or, jusqu’à aujourd’hui, si ce canton a pu réaliser des exercices comptables bénéfiques, si ce canton a réussi à limiter le chômage, si ce canton a réussi à offrir des prestations sociales importantes et ne laisser personne au bord de la route, c’est également grâce à ces contribuables qui ont aujourd’hui aussi le droit – sans remettre en cause ces prestations sociales majoritairement financées par ces bons contribuables – d’avoir certaines prestations qui leur sont dévolues. Or, ces baisses fiscales ne concernent pas uniquement ces bons contribuables ; elles concernent l’ensemble des contribuables. Un deuxième et un troisième pilier sur le capital de prévoyance par exemple, cela concerne aujourd’hui une majorité de contribuables qui cotisent au deuxième pilier, donc à la Caisse de pensions, en tant que salariés, voire au troisième pilier pour une prévoyance individuelle. Concernant l’imposition sur l’outil de travail, cela concerne majoritairement des patrons de PME qui offrent des emplois, qui forment nos jeunes, notamment en formation duale plus qu’importante de notre canton. Aujourd’hui, ces personnes se voient surimposer et nous rétablissons simplement une égalité. Aujourd’hui, nous ne sommes pas là pour favoriser une certaine classe de la population, mais simplement pour rétablir un équilibre que l’ensemble du Conseil d’Etat propose dans cette révision de la LI. Le groupe PLR s’engage donc à soutenir cette modification de loi et il refusera tout amendement.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est close.

L’entrée en matière est admise avec plusieurs abstentions.

Il est passé à la discussion du projet de loi, article par article, en premier débat.

Article premier. –

L’article 28 est accepté avec 1 avis contraire et plusieurs abstentions.

Art. 31.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Il s’agit tout simplement d’une adaptation au droit fédéral. Le droit fédéral a été précisé en matière de distinction entre ce qui est déductible et non déductible fiscalement en termes d’amende, ce qui est lié à un comportement ou à une sanction. Le Conseil d’Etat se devait donc d’adapter sa législation au droit fédéral. La Commission des finances en a débattu et a accepté cet article par 14 voix contre 1.

M. Hadrien Buclin (EP) — Rapporteur-trice de minorité

Nous avons conscience qu’il s’agit d’une adaptation au droit fédéral et donc qu’un refus revêtirait une dimension assez symbolique. Néanmoins, la minorité que je représente vous invite à refuser cet article, parce que le droit fédéral nous paraît très contestable en l’espèce ; il prévoit que l’on puisse déduire des impôts des sanctions, des amendes. Il y a donc une sorte de prime à l’entreprise qui n’a pas respecté les diverses législations en vigueur. Certes, il faudra intervenir au plan fédéral, mais nous avons des problèmes avec ce principe. Même si c’est à titre symbolique, nous vous invitons à refuser la modification proposée dans cet article de loi.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’article 31 est accepté avec plusieurs avis contraires et abstentions.

Art. 37.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Il s’agit ici d’augmenter la déduction pour frais de garde de 1000 francs pour la porter à 10’100 francs. La Commission des finances a accepté cette proposition à l’unanimité.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’article 37 est accepté avec 1 avis contraire et plusieurs abstentions.

Art. 42.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Nous sommes ici au niveau de la déduction pour contribuable modeste. Le Conseil d’Etat vous propose d’augmenter cette déduction de 200 francs pour la porter à 16’000 francs. Un de mes préopinants a effectivement affirmé que les diverses propositions allant dans un sens ou dans l’autre n’ont pas été totalement chiffrées. Je sais que M. le conseiller d’Etat dispose maintenant des chiffres, je ne doute pas qu’il va vous les présenter. Cette proposition a beaucoup été débattue au sein de la Commission des finances. Divers amendements, à la hausse ou à la baisse, ont été proposés, mais ils ont tous été refusés. Finalement, cet article a été accepté par 13 voix et 2 abstentions.

M. Hadrien Buclin (EP) — Rapporteur-trice de minorité

Pour rappel, en 2018, le Grand Conseil a décidé de supprimer une déduction fiscale au titre de l’assurance-maladie, ce qui a augmenté de manière importante – j’insiste sur ce terme – la facture d’impôt de nombreuses et nombreux contribuables de condition modeste, notamment les bénéficiaires de prestations complémentaires et de rente-pont. Pour des personnes dont le budget est déjà « à la limite », des personnes qui sont souvent en difficulté à la fin du mois, une telle augmentation de la facture d’impôts peut suffire à les faire basculer dans une situation vraiment difficile.

Dans les mois qui ont suivi la suppression de cette déduction, des associations de défense des retraités et des personnes précarisées sont montées au créneau pour dénoncer cette péjoration du pouvoir d’achat des personnes les plus modestes de notre canton. Ces protestations ont été entendues par le Grand Conseil qui a soutenu la motion déposée par mon collègue Marc Vuilleumier afin de demander au Conseil d’Etat de corriger la péjoration subie par les bénéficiaires de prestations complémentaires et de rente-pont, mais la minorité de gauche que je représente est très déçue de la réponse du Conseil d’Etat à cette motion. Pour toute réponse, le Conseil d’Etat augmente de 200 francs la déduction pour contribuable modeste, tout en rognant au passage la déduction pour les contribuables modestes ayant le statut d’époux – c’est l’alinéa 2 de cet article. On peut donc vraiment parler de pingrerie de la part du Conseil d’Etat. Finalement, cette hausse de la déduction est tellement faible qu’elle est très loin de compenser les hausses d’impôts subies. Pour rappel, ces hausses d’impôts se chiffrent à plusieurs centaines de francs par année pour un contribuable. Par exemple, pour un bénéficiaire des prestations complémentaires qui dispose d’un revenu déclaré de 28’400 francs, la facture d’impôts passe de 530 à 1050 francs, c’est plusieurs centaines de francs en plus pour des personnes déjà proches du minimum vital. Alors que les hausses d’impôts subies se chiffrent en centaines de francs, l’augmentation de la déduction pour contribuable modeste proposée par le Conseil d’Etat a un impact qui ne se chiffre qu’en dizaines de francs par année. D’un côté, il y a donc des centaines de francs d’augmentation de la facture et de l’autre des dizaines de francs de baisse : le compte n’est pas bon.

En commission, j’ai donc proposé un amendement aux proportions très raisonnables qui permet de soutenir de manière un peu plus conséquente les contribuables concernés : plutôt que d’augmenter de 200 francs la déduction pour contribuable modeste, je propose de l’augmenter de 600 francs. On parle de montants qui restent très faibles sur les factures d’impôts. Je dépose à nouveau cet amendement en espérant que la majorité de ce Parlement se montrera un peu moins indifférente que la majorité de la Commission des finances au pouvoir d’achat des personnes modestes de ce canton.

« Art. 42.

Al. 1 : Une déduction supplémentaire de 15'80016'400 francs est accordée (...) n'excède pas 15'89916'499 francs.

Al. 2 : Maintien de l'alinéa en vigueur actuellement (refus de baisser la déduction de 200 francs). »

M. Marc Vuilleumier (EP) —

Nous avons ici la concrétisation de la réponse du Conseil d’Etat à ma motion demandant de ne pas pénaliser fiscalement les bénéficiaires de prestations complémentaires, de rente-pont ou de hauts subsides à l’assurance-maladie à la suite de la suppression de la déduction forfaitaire de 2200 francs pour les frais de santé. Des dizaines de milliers de contribuables – dont tous les bénéficiaires dont je viens de parler – ont vu leurs impôts augmenter de manière très importante, tantôt de 40, 60, voire 100 % d’augmentation, sur une année, avec des revenus identiques. Qui accepterait de voir ses impôts augmenter dans une telle proportion ? Personne ! Les pauvres non plus, et en tout cas pas celles et ceux dans ce Parlement qui viennent de proposer une baisse d’impôts de 5 points qui, nous le savons toutes et tous, bénéficie principalement aux classes moyennes, aux classes aisées, donc à la grande majorité des gens qui siègent dans ce Grand Conseil.

Ce dernier a renvoyé au Conseil d’Etat une motion pour que ces contribuables ne soient pas lésés entre 2019 et 2020 et pour les années suivantes. Nous sommes – le rapporteur de minorité l’a dit – bien loin du compte, puisque l’aumône proposée par le Conseil d’Etat avec son augmentation de 200 francs à la déduction pour contribuable modeste ne compense pas du tout l’augmentation très importante des impôts pour ces gens. Pour améliorer la situation, il s’agit au moins de soutenir l’amendement du rapport de minorité, mais celui-ci ne compensera même pas l’augmentation d’impôts de ces personnes. Je vous remercie donc de soutenir l’amendement déposé par mon collègue Buclin. En ce qui concerne le traitement du rapport du Conseil d’Etat à ma motion, nous y reviendrons à la fin du débat budgétaire.

Mme Isabelle Freymond (SOC) —

Cette déduction supplémentaire de 200 francs ne représente effectivement pas grand-chose. Je déclare mes intérêts : je suis assistante sociale et j’accompagne de nombreuses personnes en difficulté qui doivent remplir leur déclaration d’impôts. Certaines de ces personnes n’ont pas payé d’impôts depuis des années, mais l’introduction du subside dans la déclaration d’impôts fait qu’elles doivent désormais payer des centaines de francs. Des demandes d’exonération d’impôts ont été faites auprès de l’Administration cantonale des impôts (ACI), mais ont été majoritairement refusées, ce qui revient à demander à des gens de payer des impôts, alors qu’ils se retrouveront en dessous du minimum vital avec ce paiement. Cela n’est pas acceptable. Personnellement, j’accepterai donc l’amendement de M. Buclin et je refuserai la réponse à la motion de M. Vuilleumier. Il n’est pas acceptable, dans un canton comme le nôtre, de mettre en difficulté des personnes à l’assurance-invalidité ou qui ne tournent qu’avec une petite AVS et des prestations complémentaires. Je vous encourage à faire l’exercice de vivre un mois avec le même montant qu’elles, tout en déduisant peut-être une certaine somme pour les impôts. Cela vous permettra peut-être de réfléchir un peu à ce que c’est que de vivre avec un minimum vital, alors que tout est cher. Je vous remercie donc d’accepter l’amendement de M. Buclin.

M. Pascal Broulis — Conseiller-ère d’Etat

Le président de la Commission des finances m’a interpelé pour connaître les chiffres que représente cet amendement. Le coût représente 20,5 millions de francs : 14,1 pour l’Etat et 6,4 pour les communes. Cela créerait 2300 personnes supplémentaires qui ne seraient pas assujetties au niveau du canton, ce qui aggraverait encore le problème et les tensions qu’il peut y avoir entre les personnes assujetties et les personnes non assujetties.

Je voudrais aussi corriger ce qui a été dit par Mme Freymond : il s’agit d’une correction d’une déduction qui n’avait plus lieu d’être. Nous ne fiscalisons pas les subsides. Il faut être conscient de cet aspect. Le canton de Vaud est le canton le plus généreux de Suisse. Le canton de Zurich donne un demi-milliard pour les aides à l’assurance-maladie, mais il compte deux fois plus d’habitants que le canton de Vaud. Cela peut aussi poser un problème d’équité en matière de pratique, parce que ces 800 millions ne sont pas fiscalisés. Dans la déclaration d’impôts des contribuables, nous ne fiscalisons pas les aides et les subsides. Certains pays le font : par exemple, au Danemark, toutes les aides sont fiscalisées et cela donne ensuite la possibilité d’obtenir une aide de l’Etat en fonction de sa capacité contributive globale et complète. Les subsides n’ont donc jamais été fiscalisés. A l’époque, on déduisait quelque chose que l’on ne payait pas. L’accélération de la règle des 10 % nous coûte aujourd’hui 800 millions, presque deux fois plus que le canton de Zurich qui est deux fois plus peuplé. Cela montre bien l’ampleur du dispositif.

C’est la raison pour laquelle le Conseil d’Etat a rapidement répondu à la motion de M. Vuilleumier. On ne peut pas revenir en arrière, puisque ça ne peut être que du prospectif. Nous faisons donc une proposition qui corrige – certes en partie – cet aspect.

Indépendamment de ce point, ce qui crée souvent beaucoup de discussions sur la facture sociale, c’est l’augmentation depuis 2016 – de deux tiers-un tiers au niveau de l’Etat – principalement du subside qui a passé en 2019 à 12 % au maximum pour les habitants de ce canton et, à partir de 2020, à 10 %. Au nom du Conseil d’Etat, je vous encourage donc à respecter le vote de la Commission des finances.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’amendement de la minorité de la commission est refusé par 64 voix contre 56 et 13 abstentions.

M. Marc Vuilleumier (EP) —

Je demande un vote nominal.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui acceptent l’amendement de la minorité de la commission votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Hadrien Buclin est refusé par 68 voix contre 54 et 14 abstentions.

*introduire vote nominal

L’article 42 est accepté avec de nombreuses abstentions.

Art. 49.

M. Didier Lohri (VER) —

Permettez-moi de vous soumettre un amendement à cet article 49. J’ai entendu parler d’agression contre les riches ou d’équité. Sans être le défenseur des communes, mais le défenseur de tous les citoyens, je vois mal comment je pourrais imposer une décision de modifier un article sur un prélèvement d’impôts qui va ensuite avoir une répercussion sur les communes. L’amendement que je propose consiste à séparer l’impôt cantonal et l’impôt communal, comme nous le verrons dans la LICom. Le fait que le canton veuille accorder une défiscalisation spécifique sur une tranche de citoyens spécifiques – à la place de la reporter sur l’ensemble de tous les contribuables vaudois – ne me convient pas. Si le canton veut absolument faire quelque chose pour la défiscalisation, il doit assumer sa propre décision et notre Grand Conseil doit prendre la décision sur la partie que nous gérons, à savoir les deniers du canton.

Sur la partie communale, il n’est pas juste d’imposer tout changement aux communes sans qu’il y ait des accords entre le canton et ces dernières. Je sais que c’est une tradition, la veille du débat en plénum, de nous annoncer des accords à venir, mais je crois qu’il est plus simple, une fois pour toutes, de savoir où l’on va et de dire que l’impôt cantonal et l’impôt communal mériteraient un amendement : si le canton veut défiscaliser, il défiscalise sa partie et il laisse le statu quo aux communes, de façon à ce que ces dernières ne soient pas péjorées dans leurs rentrées financières.

En tant que député, je suis pour l’égalité de traitement de tous les citoyens vaudois, sans me focaliser sur les riches, les pauvres, etc. Ce n’est pas là que réside le problème. Avec ce fonds de prévoyance, il faut admettre que les gens qui ont un petit salaire ne sont pas concernés par cette directive. Cela concerne bien de personnes avec des plus gros revenus. Je crois sincèrement que l’écart, pour les gens qui vont bénéficier de cette remise de 1/5 à 1/3, doit aller plus loin pour l’équilibre réel financier. En outre, on doit abaisser le taux à 14 %, si on veut être juste dans un esprit d’équilibre. De grâce, laissez l’impôt communal comme il est, sans toucher à quoi que ce soit.

« Art. 49.

Al. 2 : L’impôt cantonal est calculé sur la base de taux représentant le cinquième14% des taux d’imposition inscrits à l’article 47.

Al. 2bis (nouveau) : L’impôt communal est calculé sur la base de taux représentant le tiers des taux d’imposition inscrits à l’article 47. »

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Un amendement dans le même style, mais pas rédigé exactement de la même manière, proposant ces 14 % cités par M. Lohri a été présenté à la Commission des finances. Il a été refusé par 9 voix contre 2 et 4 abstentions.

M. Hadrien Buclin (EP) — Rapporteur-trice de minorité

Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors du débat d’entrée en matière, je vous invite à refuser la modification de l’article proposé par le Conseil d’Etat, parce que cette baisse proposée du taux va profiter de manière disproportionnée aux contribuables disposant des plus hauts revenus. Et ceci, pour une raison très simple : plus les retraits de capitaux retirés sont élevés, plus le rabais d’impôts sera important. Il faut rappeler – et cela me permet de répondre aux propos de Mme Gross lors de la discussion d’entrée en matière – qu’une partie des retraités de ce canton n’a pas de troisième pilier et que beaucoup d’entre eux ont un deuxième pilier trop faible pour en retirer une partie sous la forme de capital. Ils doivent se contenter d’une rente modeste, parce que, dans leur vie active, ils n’ont pas eu des revenus suffisants pour épargner. Ce sont ces personnes qu’il faudrait soutenir en priorité, y compris – pourquoi pas – sous forme d’allégements fiscaux, même si ce n’est pas ce qui est proposé par le Conseil d’Etat.

Encore une fois, il s’agit d’un soutien aux revenus les plus élevés. Si vous proposiez un rabais d’impôts de 500 francs sur les petits retraits de capitaux, nous pourrions entrer en matière, mais si vous proposez une baisse linéaire de l’impôt exprimée en pour cent, c’est très favorable aux hauts revenus et très peu aux petits retraits de capitaux. La méthode proposée ne peut pas nous convenir. Encore une fois, je rappelle le contraste assez frappant entre la générosité accordée aux revenus aisés par rapport à ce qui a été voté à l’article précédent concernant les contribuables modestes.

L’un des arguments mis en avant par les partisans de cet allégement fiscal, comme souvent, c’est le spectre d’une fuite des contribuables. Je pense qu’il ne s’agit pas d’une menace sérieuse : lorsqu’on regarde les recettes de cet impôt sur les retraits en capitaux ces dernières années, on voit que ces recettes sont en augmentation de manière régulière et de manière dynamique. Il n’y a donc aucune trace d’une fuite de contribuables dans des cantons où les taux seraient plus favorables. Certes, pour certains contribuables aisés, il peut y avoir une tentation de profiter de la possession d’une résidence secondaire en Valais pour y transférer son domicile fiscal, mais je pense que la réponse doit alors plutôt se situer au niveau de l’inspection fiscale, afin de réduire les tentatives de tricheries par rapport au domicile fiscal, plutôt qu’au niveau d’une baisse d’impôts généralisée sur le mode de l’arrosoir.

Sur ce sujet, des domiciliations en Valais, je porte d’ailleurs à votre attention qu’une interpellation de notre collègue Amélie Cherbuin, déposée en 2019, qui questionnait le Conseil d’Etat sur la présence de nombreuses plaques d’immatriculation valaisannes dans certaines communes aisées du canton, n’a toujours pas obtenu de réponse. Il serait relativement intéressant d’obtenir une réponse aux intéressantes questions soulevées dans cette interpellation.

Pour finir, en ce qui concerne l’amendement proposé par M. Lohri, la proposition qu’il fait est certes un moindre mal par rapport à la proposition du Conseil d’Etat, mais nous ne pourrons pas la soutenir en premier débat sous cette forme, parce qu’elle propose tout de même une réduction de l’impôt cantonal. Par cohérence, nous sommes opposés aussi bien à la réduction sur le plan communal que sur le plan cantonal.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Certes, le Conseil d’Etat aurait pu discuter avec les communes sur une modification de leurs ressources fiscales. Ceci dit, la proposition d’amendement de M. Lohri pose tout de même plusieurs problèmes. Tout d’abord, cet amendement revient à abaisser l’imposition encore plus que ce que proposait le Conseil d’Etat, puisqu’on passerait de 20 % à 14 %. Par ailleurs, cet amendement représente probablement un coût conséquent pour le budget cantonal. C’est la raison pour laquelle notre groupe s’opposera à cet amendement.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Je ne partage pas du tout les propos de M. Buclin. Je pense que cela concerne toutes les citoyennes et tous les citoyens, tous les contribuables de ce canton. Oui, il y a une augmentation dans le cadre de cet impôt qui est unique et distinct – deuxième et troisième piliers. Pour quelle raison ? Parce qu’il y a de plus en plus de personnes qui prennent en charge leur avenir et leur prévoyance. C’est vrai, il y a de plus en plus de personnes qui ont un troisième pilier. Peut-être qu’il serait important de connaître le montant moyen des capitaux qui sont retirés. Ce sont souvent des personnes qui ont décidé de prendre en charge leur destin, leur troisième âge. A mon avis, il faut respecter ces personnes et non pas les dénigrer. Il s’agit peut-être de personnes qui n’ont pas de revenus importants, des contribuables modestes qui ont décidé de mettre une partie de leur argent pour leur retraite. Il y en a certainement ! Il y a dans cette salle des députés qui sont assureurs et qui pourront peut-être en témoigner. Il n’y a pas que des personnes riches, il y a aussi des jeunes qui souhaitent le faire pour l’acquisition de leur propre logement ou pour devenir indépendants, parce que c’est un rêve. Tout le monde n’a pas le même avis, même s’il y a une sorte de bien-pensance dans ce plénum, il y a des gens qui ont d’autres manières de voir leur avenir ou leurs projets.

Par ailleurs, en comparaison intercantonale, le canton de Vaud, comme pour beaucoup d’autres impôts, est le plus cher. C’est simple, le canton est le plus cher partout. J’estime qu’il faudrait faire un effort en la matière. Je rappelle que cela découle d’un postulat, déposé par notre collègue Clerc il y a deux ans, qui a été traité par notre Parlement. On répond à ce postulat au même titre qu’on répond au postulat de M. Vuilleumier. La réponse n’est sans doute pas la meilleure qui soit, mais elle propose quelque chose de concret et de crédible. L’augmentation de cet impôt vient de l’augmentation du nombre de personnes qui ont pris en charge leur retraite et leurs projets. Je vous remercie donc de refuser ces amendements et d’accepter ce projet de loi.

M. Aurélien Clerc (PLR) —

Tout d’abord, je déclare mes intérêts : agent principal dans une compagnie d’assurances. Je tiens à remercier le Conseil d’Etat d’avoir repris la demande du postulat de 1/5 pour se calquer finalement sur le taux d’imposition fédéral. En effet, il faut comprendre que la principale motivation des jeunes est de pouvoir déduire quelque chose des impôts, se créer une épargne qu’ils pourront déduire des impôts. En ce qui concerne le retrait du capital – du deuxième ou du troisième pilier – je précise que le retrait du deuxième pilier intervient souvent à la suite d’une recomposition familiale ou si une personne n’est pas mariée ou qu’elle n’a plus d’enfant à charge, en cas de décès, toute l’épargne qui a été constituée pendant la vie professionnelle restera dans la caisse de pensions. Cette baisse permet en effet au canton de Vaud de pouvoir s’aligner sur les cantons limitrophes. En effet, le canton de Vaud est l’un des plus chers de Suisse. Je vous encourage donc à suivre la proposition du Conseil d’Etat et à en rester au 1/5 des taux ordinaires sur le revenu.

M. Julien Cuérel (UDC) —

A titre personnel, je soutiendrai l’amendement de M. Lohri. Je voudrais également revenir sur ce qui a été dit à M. Eggenberger précédemment. Sauf erreur de ma part et en voyant ce qui est mentionné dans cet amendement, pour le citoyen, il n’y aura aucune incidence sur le taux d’impôts. Nous en restons donc à la volonté du Conseil d’Etat en ce qui concerne le montant des impôts qui sera versé par le contribuable. En revanche, la grande différence avec l’amendement Lohri, c’est que les communes encaisseront le même montant qu’aujourd’hui, puisqu’elles n’ont pas été consultées sur cette baisse d’impôts – je déclare mes intérêts au passage : je suis syndic d’une commune – mais l’Etat encaissera bien sûr moins d’impôts que ce qui est prévu. On va peut-être vous dire que ce n’est pas conforme à la Loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs (LHID), mais je pense que cet argument est parfaitement erroné, puisque l’article 1 de la LHID prévoit que, si ce n’est pas prohibé par le droit fédéral, il y a une possibilité de le faire dans le droit cantonal. Or, nous sommes bien dans ce cas de figure. Légalement, c’est donc possible. Cet amendement permet aux contribuables de voir leur imposition diminuer – et c’est une volonté que je ne remets pas en cause – mais le montant encaissé par les communes serait égal à ce qu’il est aujourd’hui. Il n’y a donc pas de baisse de recettes fiscales pour les communes.

Mme Rebecca Joly (VER) —

Je ne suis pas non plus favorable à cette modification législative, comme j’avais été défavorable à la prise en considération du postulat de notre collègue Aurélien Clerc. Je m’opposerai à cette loi et à l’amendement de M. Lohri, parce que j’estime que diviser ainsi les répartitions de la fiscalisation de tel ou tel impôt n’est pas une façon propre de faire. Si je peux comprendre la démarche qui consiste à dire que la réduction de l’assiette fiscale impacte aussi les impôts communaux, je trouve que la méthode n’est pas la bonne. Dès lors, je refuserai cet amendement.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

A titre personnel, je dois contredire mon collègue Buclin lorsqu’il dit que c’est quelque chose qui va d’abord profiter aux riches. Je lui rappelle que les taux applicables à ces prélèvements en capitaux provenant de la prévoyance sont ceux de l’impôt sur le revenu. On parle simplement d’appliquer 1/3 ou 1/5 des taux. Or, les barèmes de l’impôt sur le revenu sont fortement progressifs. Ainsi, plus les montants seront importants, plus les personnes payeront. On ne peut donc pas dire que ça ne profite qu’à ceux qui ont les barèmes les plus fortement progressifs.

Par ailleurs, il est normal que le produit des impôts augmente. Je vous rappelle que nous connaissons un effet démographique important : aujourd’hui, les baby-boomers arrivent à l’âge de la retraite. Ils ont le droit de prélever leur prévoyance qu’ils ont mise de côté pendant toute leur vie. Il n’est alors pas étonnant qu’il y ait une progression de la somme générale de l’impôt.

En ce qui me concerne, je soutiendrai la proposition de loi telle qu’elle nous est soumise et je m’opposerai à l’amendement de M. Lohri.

M. Claude-Alain Gebhard (V'L) —

A titre personnel, je soutiendrai l’amendement Lohri. L’année prochaine, nous allons certainement devoir réviser la péréquation intercommunale et ce n’est pas le moment de brouiller les cartes. En revanche, cela fait beaucoup de sens de réviser le taux de l’impôt cantonal sur les rentes. Je vous encourage vraiment à soutenir cet amendement.

M. Hadrien Buclin (EP) — Rapporteur-trice de minorité

J’aimerais apporter une réponse à MM. Berthoud et Mojon. Je ne conteste pas qu’il y a des salariés aux revenus modestes qui cotisent au troisième pilier, mais le fait est que, proportionnellement, ces personnes toucheront un volume de réduction d’impôts beaucoup plus faible que les personnes qui disposent de hauts revenus et qui retirent de très gros montants dans les capitaux des deuxième et troisième piliers. Dans ma première intervention, j’ai dit que nous pourrions discuter si la proposition qui était faite était une réduction de 500 francs de la facture d’impôts pour toute personne qui effectue un retrait. A mon avis, cela serait beaucoup plus juste, parce que ça ne favoriserait pas de manière disproportionnée les personnes qui effectuent des retraits de montants très élevés. C’est la raison pour laquelle je pense que la méthode choisie n’est pas la bonne. Dès lors, je vous invite à la refuser.

Enfin, en ce qui concerne la question des baby-boomers, M. Mojon a raison de dire qu’il y a une vague de personnes qui arrivent à la retraite, mais si toutes ces personnes – ou une partie substantielle d’entre elles – partaient vers d’autres cantons au moment de la retraite, nous le verrions dans les recettes de cet impôt par une stagnation, voire une baisse. Or, ce n’est pas le cas. Selon moi, c’est bien parce qu’il n’y a pas de problème d’attractivité du canton de Vaud, canton qui a d’ailleurs d’autres atouts à faire valoir en termes de qualité de vie que sa fiscalité. C’est la raison pour laquelle je dis que, aujourd’hui, il n’y a pas de problème de compétitivité sur ce profil d’impôts.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je voudrais préciser trois choses. Tout d’abord, M. Buclin nous dit qu’il n’y a pas de trace de prélèvements qui partent dans d’autres cantons. Evidemment, puisqu’ils ne sont pas là. Vous pouvez les chercher longtemps. Il se trouve que je fais partie de cette génération des baby-boomers, que j’en connais personnellement et les montants sont significatifs.

Deuxièmement, les montants dont il est question sont significatifs, parce qu’il s’agit effectivement de gros contribuables qui ont payé beaucoup d’impôts. Je rappelle que, il y a quelques années encore, on parlait du principe de Pareto, c’est-à-dire que 80 % des impôts étaient payés par 20 % des contribuables. Aujourd’hui, c’est 10 % des contribuables qui payent 90 % des impôts. Or, ces 10 % sont précisément ceux qui ont les plus fortes capitalisations et qui sont tentés par des départs réels – vous pouvez mettre tous les policiers que vous voulez derrière eux, vous verrez qu’ils sont effectivement domiciliés dans d’autres cantons – et c’est autant d’impôts qui échappent au canton.

Troisièmement, l’accession à la propriété a déjà été évoquée. C’est important, parce qu’il n’y a pas que le fait pour un couple ou une famille de retirer son capital pour investir dans un appartement, il y a aussi ce que l’on appelle l’amortissement indirect, c’est-à-dire que l’on met en gage sa LPP ou sa police d’assurance-vie pour acquérir un logement. Au moment où vous voudrez toucher votre capital pour amortir votre dette hypothécaire – ce qui est sain – vous allez payer à fond l’impôt sur ce retrait de capital. C’est donc un très mauvais exercice pour des gens qui ne sont de loin pas des millionnaires.

Enfin, en ce qui concerne l’amendement de M. Lohri, je vous encourage à faire attention : je pense que la proposition qui nous est faite de segmenter l’impôt cantonal et l’impôt communal est une hérésie – même si le mot est un peu fort. Cela me paraît à la limite de la légalité, si ce n’est pas illégal. Si nous commençons à mettre le doigt dans ce genre d’artifice, nous ne sommes pas sortis de l’auberge. On en parlera pour les successions, etc. On n’osera plus modifier l’assiette – le principe même de l’impôt, par exemple l’architecture d’une imposition – mais il faudrait d’abord demander l’avis des communes, parce que cela pourrait les impacter. Est-ce que la prochaine réforme consistera en une assemblée des communes qui pourraient donner leur avis avant que nous puissions voter ? Evidemment, je forcis le trait, mais je vous invite à raison garder. Certaines personnes s’opposent à cette baisse fiscale, pour des raisons politiques qui leur sont propres, mais je vous invite à la soutenir. S’il vous plaît, de grâce, ne nous lançons pas dans des innovations hasardeuses pour lesquelles nous ne savons pas où nous allons et qui constitueraient un précédent à mon avis extrêmement dangereux.

M. Jean-Daniel Carrard (PLR) —

J’ai entendu dire que cette proposition fiscale allait principalement bénéficier à ceux qui sont prétendument riches, accessoirement à ceux qui ont de l’argent, qui l’utilisent ou qui le placent. Je pense qu’il faut arrêter de diaboliser les gens qui ont un certain revenu ; ils font partie, comme les autres, de l’équilibre de ce canton. Heureusement qu’il y en a encore dans notre canton et qu’ils ne sont pas tous en Valais. Par ailleurs, on ne peut pas nous reprocher d’avoir un principe de proportionnalité sur l’imposition. Il faut arrêter de diaboliser ces gens. Je vous invite à suivre simplement la proposition qui nous est faite par le biais de cette loi par le Conseil d’Etat.

En ce qui concerne la proposition de M. Lohri, je comprends ce que ce dernier souhaite faire, mais je crois qu’il ne faut pas le faire comme ça, à l’emporte-pièce, ici et maintenant. Normalement, il devrait y avoir des discussions entre le canton et les communes. Cela doit se faire calmement et pas à coups d’amendements dans une loi, dans le cadre du budget. Je vous encourage donc à accepter l’article tel que proposé par le Conseil d’Etat et, en tout cas pour l’instant, à ne pas soutenir l’amendement de M. le député Lohri.

M. Didier Lohri (VER) —

Je crois qu’il faut remettre les choses dans leur contexte. Je remercie mes collègues Buffat et Carrard pour leur intervention me rappelant la question de l’autonomie communale ou la discussion entre le canton et les communes prétendument calme depuis de nombreuses années. C’est tout sauf calme ! Le problème n’est pas là : le canton doit être compétitif. Le canton fait une comparaison sur quelque chose qui n’est pas correct. Monsieur Buffat, si on tient compte de ce que vous avez dit sur la loi de Pareto – les 10 % de la population qui payent le 90 % des impôts – c’est bien la démonstration que les gens ne partent pas tous en Valais. Pourquoi ? Parce que les gens font une comparaison de l’impôt cantonal. Si nous devons être compétitifs, cela veut dire que notre taux d’imposition cantonal doit être plus bas que celui du Valais pour éviter que les gens partent. Mais lorsque des gens déménagent dans d’autres cantons, les impôts communaux sont complètement différents et relèvent de l’autonomie communale. Il ne faut pas mélanger les choses : l’objectif pour le canton est de ne pas voir son argent partir dans d’autres cantons. Je le répète, ce n’est pas une question de riches ou de pauvres, c’est une question de principe de l’autonomie et d’égalité de traitement entre les gens. A mon avis, c’est ce qui ne colle pas. Je vous encourage, au pire, à laisser passer l’amendement de notre collègue Buclin, mais je doute que cela passe. Enfin, de grâce, ne touchez pas à cet impôt pour les communes et séparons l’impôt cantonal et communal. Je crois que les théories de M. Buffat sont démontrées très facilement : le 2,2 et le 1,1 attribué aux communes sur les droits de mutation en sont la parfaite démonstration. Je vous remercie de soutenir mon amendement.

M. Julien Cuérel (UDC) —

Je rejoins l’avis de mon préopinant sur un élément : normalement, si une baisse des recettes fiscales doit être introduite pour les communes, il faut bien que cela passe par une discussion entre le canton et ces dernières. L’amendement de M. Lohri vise exactement à rétablir cet état de fait : étant donné qu’il n’y a pas eu de discussion ou de négociation, cet amendement permet aux communes de ne pas connaître de baisse fiscale. S’il y avait une discussion ou une négociation entre le canton et les communes pour une baisse de recettes fiscales des communes, ce serait quelque chose d’acceptable. Mais étant donné cette absence de discussion, l’amendement Lohri rétablit le fait que les communes ne verront pas de diminution de leurs recettes fiscales, mais l’Etat – qui a décidé cette baisse d’imposition – verra quant à lui l’ensemble de cette diminution dans ses comptes. Je vous invite donc à soutenir l’amendement de M. Lohri.

M. Pascal Broulis — Conseiller-ère d’Etat

Je voudrais rétablir la vérité sur deux ou trois éléments qui ont été évoqués. Tout d’abord, on ne peut pas faire une remise fiscale. Ce n’est pas possible ; la loi ne permet pas de dire que l’on ne fiscalise qu’à partir d’une certaine somme.

Monsieur Cuérel, les communes n’ont aucune compétence ; c’est ce qui fait la différence entre l’Etat souverain – le canton de Vaud avec les 25 autres cantons dans le concert des cantons et la Confédération – et les communes qui pratiquent les centimes additionnels. Cela signifie que, aujourd’hui, la loi est claire en matière de LHID et LICom : il n’y a pas de compétence. Ce que dit Mme Joly est juste, on ne peut pas commencer à scinder et prévoir un taux à discrépance des communes. Ce n’est pas possible au niveau de la pratique ! C’est illégal !

Par ailleurs, il s’agit d’un impôt sur le revenu qui va permettre au canton de Vaud, non pas d’être agressif en matière de concurrence fiscale, mais d’être en accord avec ce que pratique la Confédération. Nous allons venir sur le taux de la Confédération, cela permettra au canton d’avoir une pratique non excessive relativement à un impôt particulier. Cela a été relevé par M. Buclin, cet impôt ne concerne pas les jeunes ; il concerne principalement les gens qui sont à la retraite ou en préretraite. Cela permet de pouvoir planifier sa retraite et de sortir une partie de son capital pour pouvoir faire un investissement immobilier, par exemple. Il n’y a donc pas de marge de manœuvre.

Si vous voulez suivre cette logique, il faut suivre l’avis de Mme Joly et refuser purement et simplement cette modification législative. Encore une fois, il n’y a pas de possibilité de donner une compétence supplémentaire aux communes. Cela serait non conforme à la LHID et à l’Impôt fédéral direct (IFD). Les communes n’ont aucune compétence ; cela reste une compétence cantonale, quitte à ce que chaque entité fixe ensuite sa stratégie. Comme la Commission des finances, je vous encourage à accepter ce projet de loi qui répond pleinement à ce qui avait été proposé l’année dernière, en 2020. A l’époque, le Parlement nous avait même reproché de ne pas avoir mis en œuvre le projet de loi qui vous est proposé aujourd’hui.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’amendement Didier Lohri est refusé par 100 voix contre 21 et 15 abstentions.

M. Jérôme Christen (LIBRE) —

Même si le vote n’est pas serré, je pense qu’il est important de savoir qui défend les communes. Je demande donc un vote nominal. (Réactions dans la salle.)

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande n’est pas appuyée par 20 membres.

L’article 49 est accepté avec plusieurs avis contraires et abstentions.

Art. 56.

M. Hadrien Buclin (EP) — Rapporteur-trice de minorité

Il s’agit de la deuxième modification fiscale que je vous invite à refuser, parce qu’elle a un impact à la baisse sur les recettes du canton et des communes tout d’abord, mais aussi, comme la précédente, parce qu’elle profite – selon nous – de manière disproportionnée à des personnes plutôt aisées. Même si cela ne concerne peut-être pas les contribuables les plus aisés, cela ne concerne en tout cas pas les contribuables dont nous parlons ici.

Il y a plusieurs raisons pour refuser cette baisse d’impôts en faveur des entrepreneurs et de la fortune de leur outil de travail. Premièrement, les taux d’impôt sur la fortune se chiffrent aujourd’hui en pour mille. Ils sont donc faibles – ou en tout cas pas excessifs – il n’y a donc pas de raison majeure de réduire l’imposition de la fortune, quelle que soit la forme que prend cette fortune, y compris lorsqu’elle se compose de titres d’entreprises dans lesquelles l’entrepreneur est actif professionnellement.

Certains députés de la droite ont prétendu, dans le débat d’entrée en matière, que cette réduction de l’impôt sur la fortune concerne avant tout des petites entreprises. Je pense que ce n’est pas le cas. En effet, le calcul de l’imposition de la fortune est basé sur le bénéfice de l’entreprise. Or, les petites entreprises ne dégagent pas – ou très peu – d’impôt sur le bénéfice. La baisse proposée ici profitera donc surtout à des entreprises qui dégagent des bénéfices, donc des entreprises qui ne sont certes pas cotées en Bourse, mais qui sont néanmoins rentables et qui peuvent avoir une valeur se chiffrant en millions dans le cas de certaines entreprises familiales. On est donc loin d’une baisse fiscale ciblée sur la boulangère ou le boulanger du village, comme certains voulaient nous le faire croire lors du débat d’entrée en matière. Je remarque d’ailleurs que cette baisse d’impôts a été revendiquée par différents groupements patronaux et que c’est bien une réponse à la revendication de certaines associations patronales. Compte tenu des taux actuellement faibles de l’impôt sur la fortune, je pense que nous pouvons maintenir l’évaluation de la fortune en vigueur et ne pas la modifier à la baisse.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Je dois donner raison sur un point à M. Buclin : effectivement, une partie des calculs se base sur le bénéfice. Néanmoins, faire du bénéfice pour une entreprise, c’est tout simplement assurer son avenir. Si elle ne fait pas de bénéfice, au bout d’un moment, elle meurt tout simplement. Oui, le calcul se fait sur le bénéfice, mais rien n’indique si ce dernier est distribué ensuite ou s’il est réinvesti dans l’entreprise. Dans la plupart de nos petites sociétés ou des PME locales, le bénéfice est totalement réinvesti. C’est ce qui permet à notre tissu économique de survivre et d’être aussi résiliant qu’il l’est aujourd’hui. Arrêtons de tuer la poule aux œufs d’or ! (Réactions dans la salle.)

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’article 56 est accepté par 73 voix contre 20 et 33 abstentions.

L’article 95 est accepté avec 1 avis contraire et plusieurs abstentions.

Les articles 174 et 179 sont acceptés avec quelques abstentions.

Les articles premier, 2 et 3, formule d’exécution, sont acceptés à l’unanimité.

Le projet de loi est adopté en premier débat.

Le deuxième débat interviendra ultérieurement.

Le débat est interrompu.

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