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Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 17 novembre 2020, point 23 de l'ordre du jour

Texte déposé

Par plus de 58% des suffrages exprimés, la population genevoise a soutenu l’initiative « 23 frs, c’est un minimum ». Il s’agit d’un signal très clair pour en finir avec des salaires qui ne permettent pas de vivre dignement. Le salaire minimum genevois, qui correspond à 4'186 francs bruts pour 42 heures de travail hebdomadaire, conduira à l’augmentation des salaires pour quelque 30'000 travailleuses et travailleurs, dont deux tiers de femmes.

L’instauration d’un salaire minimum dans un canton voisin, partenaire économique essentiel pour Vaud, doit nous inciter à agir dans le même sens, en vue d’une harmonisation minimale des conditions salariales entre les deux cantons. Dans le canton de Vaud aussi, les salaires trop faibles pour vivre constituent un grave problème pour une couche importante de la population. Rappelons en effet que selon le Rapport social vaudois publié en 2017 par le Département de la santé et de l’action sociale, les bas salaires concernent 14 % des salariés du secteur privé. Est considéré comme bas salaire toute rémunération standardisée inférieure aux deux tiers du salaire médian. En 2012, la limite est ainsi fixée à 3930 francs. Parmi ces travailleurs à bas salaire, 65 % sont des femmes. En équivalents plein temps (EPT), le nombre de postes à bas salaire est de 25’900 en 2012. Leur proportion en EPT dans le secteur privé vaudois est passée de 11 % à 13 % au cours des dix dernières années (Rapport social vaudois, p. 33). Les conventions collectives ne s’avèrent pas à elles seules suffisantes pour lutter contre ce phénomène, dans la mesure où elles ne couvrent de loin pas tous les salariés du canton et qu’une partie d’entre elles ne prévoient pas de salaire minimum.

Par ailleurs, le 14 juin 2019, des milliers de femmes ont manifesté dans le canton de Vaud pour mettre fin aux discriminations dont elles sont victimes, notamment sur le plan des salaires. En améliorant le salaire de milliers de travailleuses touchant de faibles rémunérations, l’instauration d’un salaire minimum permettrait un pas concret vers l’égalité salariale.

Les soussignés partagent aussi l’avis du comité d’initiative pour un salaire minimum à Genève qui estiment que « contrairement à une idée reçue largement répandue, le salaire minimum légal ne tirera pas l’ensemble des salaires vers le bas. Car les employeurs peuvent baisser les salaires bien plus facilement sans salaire minimum (…) Le salaire minimum posera enfin une limite à cette sous-enchère, et favorisera même une amélioration globale des salaires. Dans aucun pays ni aucune région, pas même la France, la moindre étude économique sérieuse n’a démontré un effet négatif du salaire minimum légal sur l’ensemble des salaires. C’est toujours le contraire qui s’est vérifié : avec l’amélioration du pouvoir de négociation d’une part importante des travailleurs/euses, c’est l’ensemble des salaires qui a tendance à augmenter.

Dans tous les pays où des études de terrain ont été menées, il a été démontré que l’amélioration du pouvoir d’achat de dizaines de milliers de salarié-e-s génère très rapidement de nouveaux emplois. En effet, les personnes qui ont de bas salaires ne peuvent pas épargner un revenu supplémentaire, mais doivent le dépenser pour subvenir à leurs besoins de base. Cela stimule immédiatement la consommation et donc l’emploi. C’est un cercle vertueux. »

 

Enfin, la crise du Covid-19 a révélé la précarité subie par de larges couches de salarié.e.s. Le salaire minimum est un outil adéquat pour combattre ce phénomène. De plus, dès lors que de nombreuses entreprises ont reçu des aides publiques en réponse à la crise, il est légitime que l’Etat exige comme contrepartie sur le plan législatif des salaires permettant aux employé.e.s de vivre dignement.

 

Compte tenu des arguments ci-dessus, la présente motion demande une modification de la loi cantonale sur l’emploi (LEmp) qui pourrait avoir la teneur suivante, largement inspirée des dispositions genevoises :

 

TitreI   Dispositionsgénérales

ChapitreI   Butetchampdapplication

Article 1 al 2

« let. g (nouveau) : instituerunsalaireminimumafindecombattrelapauvreté, defavoriserlintégrationsocialeetdecontribuerainsiaurespectdeladignitéhumaine. LeConseildEtatdéfinitlerôledesautoritéscompétentes, mentionnéesauchapitreIIduTitreIdelaprésenteloi, danslamiseenœuvreetlecontrôledusalaireminimumcantonal. Ilfixeunbarèmedessanctionslorsquunemployeurnerespectepaslesalaireminimum»

Article 2 ancien… jusqu’à l’article 7

« TitreII   Salaireminimum (nouveau)

ChapitreI   Champdapplication (nouveau)

Article 8 (nouveau) LesrelationsdetravailentretravailleursaccomplissanthabituellementleurtravaildanslecantonsontsoumisesauxdispositionsduprésentTitrerelativesausalaireminimum.

Article 9 (nouveau) LesdispositionsduprésentTitrenesontpasapplicablesauxcontratsdapprentissageausensdesarticles 344 etsuivantducodedesobligations, auxcontratsdestagesinscrivantdansuneformationscolaireouprofessionnelleprévueparlalégislationcantonaleoufédérale, auxcontratsdetravailconclusavecdesjeunesgensdemoinsde 18 ansrévolus.

ChapitreIIMontantdusalaireminimum (nouveau)

Article 10 (nouveau) Lesalaireminimumestde 23 francsparheure. Parsalaire, ilfautentendrelesalairedéterminantausensdelalégislationenmatièredassurance-vieillesseetsurvivants, àlexclusiondéventuellesindemnitéspayéespourjoursdevacancesetpourjoursfériés.

Article 11 (nouveau) Chaqueannée, lesalaireminimumestindexésurlabasedelindicedesprixàlaconsommationaumoisdaoût, parrapportàlindiceenvigueurle 1 janvierdelannéeprécédente. Lesalaireminimumprévuàlarticle 10 nestindexéquencasdaugmentationdelindicedesprixàlaconsommation.

ChapitreIIIPrimautédusalaireminimum (nouveau)

Article 12 (nouveau) Silesalaireprévuparlecontratindividueldetravail, uneconventioncollectiveouuncontrat-typeestinférieuràceluifixéàlarticle 10, cestcedernierquisapplique.

Article 13 (nouveau) Lesusagesnepeuventenaucuncasprévoirunsalaireminimuminférieuràceluifixéparlarticle 10.

LeTitreIIdevientleTitreIIIetlart. 8 devientlart. 14. Pourlereste, sanschangement.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Didier LohriVER
Nathalie JaccardVER
Felix StürnerVER
Céline MisiegoEP
Marc VuilleumierEP
Yvan LuccariniEP
Claire Attinger DoepperSOC
Vincent KellerEP
Rebecca JolyVER
Taraneh AminianEP
Séverine EvéquozVER
Alice GenoudVER
Yves FerrariVER
David RaedlerVER
Jean-Marc Nicolet
Sylvie Pittet BlanchetteSOC
Jean-Louis RadiceV'L
Sabine Glauser KrugVER
Olivier Epars
Sylvie PodioVER
Pierre ZwahlenVER
Léonard Studer

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Hadrien Buclin (EP) —

A une large majorité, la population genevoise a soutenu une initiative pour l’introduction d’un salaire minimum de 23 francs bruts de l’heure, soit 4180 francs pour 42 heures de travail hebdomadaires. Il s’agit d’un signal clair contre la persistance des bas salaires qui continuent notamment à toucher les femmes. En effet, il y a deux tiers de femmes parmi les 30’000 travailleuses et travailleurs qui verront leur salaire revalorisé suite à cette importante votation, intervenue il y a quelques semaines, à Genève.

Suite à cette votation, l’introduction d’un salaire minimum dans le canton de Vaud paraîtrait adéquate, en vue d’une harmonisation minimale des conditions salariales entre deux cantons qui entretiennent des liens économiques étroits. Cela d’autant que, d’après le Rapport social vaudois publié en 2017, les bas salaires sont également une problématique importante dans le canton de Vaud. Aujourd’hui, 14% des salariés du secteur privé gagnent moins de 4000 francs par mois. Cela permettrait également un pas important en direction de l’égalité salariale, puisque parmi les 14% de salariés cités, une large majorité — de 65% — est constituée de femmes. La relance d’une proposition sur le salaire minimum est donc aussi une réponse aux très larges mobilisations en faveur de l’égalité salariale manifestées dans notre canton, notamment le 14 juin 2019. Je rappelle aussi que, dans le cadre de la crise COVID, cette précarité a malheureusement éclaté au grand jour. Dès lors que l’Etat a aidé massivement les entreprises, à travers notamment des prêts de la Confédération, il paraît légitime de demander, comme contrepartie, un respect des conditions salariales minimales, à savoir un salaire minimum qui permet de vivre dignement.

La présente motion vise donc à relancer le débat. Je rappelle aussi qu’en 2011, la population vaudoise n’avait refusé qu’à une très courte majorité l’introduction d’un salaire minimum. C’est aussi une raison de revenir à la charge, en demandant une modification de la Loi sur l’emploi.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La motion, cosignée par au moins 20 députés, est renvoyée à l’examen d’une commission.

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