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Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 8 février 2022, point 12 de l'ordre du jour

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Texte adopté par CE - R-CE INT Christen 21_INT_121 - publié

Transcriptions

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M. Jérôme Christen (LIBRE) —

Je ne suis guère convaincu par cette réponse ; l’orthodoxie du service responsable de l’aménagement du territoire n’est pas un mythe ni une légende, mais un thème récurrent dans les travées de ce Parlement. Tous les conseillers d’Etat en charge de ce département s’y sont cassé les dents et par dépit, au début des années 2000, d’aucuns ont même tenté de remettre en question les postes attribués à ce service. La menace n’a guère eu d’effets, et même si quelques changements et soubresauts ont néanmoins été observables au fil des conseillers d’Etat, avec quelques courtes périodes d’assouplissement, on rêve toujours d’une évolution non pas forcément radicale, mais qui tienne compte du bon sens.

Pour justifier cette orthodoxie, Mme Chantal Dupré, juriste au Service de l’aménagement du territoire (SAT), citait volontiers le cas d’un couvert posé pour mettre à l’abri une caravane et qu’un petit malin avait ensuite fermé sur les bords pour l’aménager finalement en logement – après avoir pris soin d’en sortir la caravane. Ce cas, dont on peut croire qu’il a une fois existé, doit cependant être unique, mais il permet malheureusement de justifier toutes les décisions les plus strictes, pour ne pas dire absurdes, hors zones à bâtir.

Le cas de Villeneuve que j’évoquais ici n’est pas unique. Pour étayer mon propos, j’aimerais me permettre une petite parenthèse qui accrédite la thèse selon laquelle on nage parfois en plein délire. Récemment, je me suis intéressé au cas d’une capite de vigne, à Perroy, mise en fermage auprès d’un vigneron local et remise en état par son propriétaire veveysan. Ce dernier n’a certes pas « fait tout juste » dans la réhabilitation de la capite, mais on exige aujourd'hui qu’il enlève un mât, installé depuis 20 ans, arborant fièrement les couleurs de notre beau pays de Vaud ; on exige qu’il démonte une pergola qui remplace une structure vieille de vingt ans, constituée de plans de vignes qui existent depuis 50 ans et qui devront être arrachés, sans qu’on ne comprenne dans quel but. Et, pour conclure, on exige encore qu’il supprime une arrivée d’eau ancestrale à l’intérieur de la même capite. Formidable concession : le robinet extérieur pourra être maintenu. Je vous épargne les détails, mais je m’étonne de l’état d’esprit qui prévaut à l’égard des vignerons, dont on a le sentiment qu’ils sont présumés coupables de ne pas respecter l’environnement.

Dans ce cas, comme dans celui de la bergerie de Villeneuve, je me demande bien où se trouve le risque de mitage du territoire et de maintien de terres agricoles, dès lors qu’on parle de constructions existantes qui servent à l’exercice de professions pour lesquelles nous devrions avoir la plus grande considération, lorsqu’on sait dans quelles conditions elles s’exercent et qu’elles permettent de subvenir à un besoin vital. Dans sa réponse, le gouvernement cultive l’ambiguïté, puisqu’il justifie la position de la Direction générale du territoire et du logement (DGTL) en arguant que la reconstruction du cabanon différait trop des plans autorisés pour être considérée comme licite, tout en expliquant plus loin que le tribunal avait admis la régularisation du bâtiment au vu de sa faible emprise. Au vu du cadre déjà très strict de la loi, y a-t-il vraiment de quoi se targuer de n’avoir été débouté que huit fois, dont une pour avoir été trop favorable au propriétaire ?

Dans son approche et de mon point de vue, il importe que le Conseil d'Etat donne une direction claire, en adéquation avec les buts poursuivis par le cadre légal. C’est l’esprit de la loi qui devrait systématiquement guider les services de l’Etat, pour éviter un mitage du territoire – et non pas un mitage des outils ou des espaces de convivialité du monde agricole ; éviter un juridisme étroit dont nous faisons malheureusement régulièrement les frais. Si le tribunal a intégré l’adage de Cicéron summum jus, summa injuria, soit « l’application excessive du droit conduit à l’injustice », il n’y a aucune raison que les services de l’Etat ne puissent pas en faire de même. S’il n’y a pas de raison de douter a priori de la bonne volonté – qui peut se transformer en zèle – des collaborateurs de la DGTL, de mon point de vue, le Conseil d'Etat doit donner des orientations claires et éviter des procès d’intention à l’égard des gens du monde agricole.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion n’est pas utilisée.

Ce point de l’ordre du jour est traité.

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