Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 29 juin 2021, point 28 de l'ordre du jour

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Rapport de commission - Curatelles où va-t-on (maj.)

Rapport de commission - Curatelles où va-t-on (min.)

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M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

La Commission thématique de la politique familiale s’est réunie le lundi 14 décembre 2020. Le Conseil d’État était représenté par Mme la conseillère d’État Christelle Luisier Brodard, accompagnée de Mme Katiuska Stekel, cheffe du Service des curatelles et tutelles professionnelles (SCTP) et de M. David Barbi, responsable du domaine administratif et financier du SCTP. M. Florian Ducommun, secrétaire de la commission, a rédigé les notes de séance et il en est vivement remercié.

Le postulant s’inquiète de l’évolution dans le domaine des curatelles et tutelles. Une augmentation de 13,4 ETP entre le budget 2020 et le budget 2021 l’a interpellé. Il a également été peu rassuré par les nombreuses difficultés rencontrées lors du recrutement de curatrices et curateurs volontaires. La décentralisation du service à Vevey a également attiré son attention. Il se permet ainsi de demander quelle direction a été prise dans ce domaine.

Mme la conseillère d’État a apporté un éclairage clair et précis sur la question, en s’appuyant sur un document projeté très explicite commenté par Mme Stekel. Il a ainsi été porté à notre connaissance l’augmentation très nette des cas lourds définis par la Justice de paix et impliquant la prise en charge par un personnel professionnel. La courbe de l’augmentation du nombre de cas suit plus ou moins la moyenne suisse.

Au terme de la présentation et des nombreuses questions suscitées, M. le postulant s’est dit quelque peu rassuré par la maîtrise du dossier par le Conseil d’État et ses services, mais reste soucieux pour l’avenir. Malgré la clarté des explications apportées, il tient à maintenir son postulat et à le renvoyer au Conseil d’État pour aller plus en profondeur dans ce dossier et sensibiliser le Grand Conseil à cette question qui, à court terme, pourrait devenir préoccupante. En conclusion, la commission par 6 voix contre 5 et 2 abstentions recommande au Grand Conseil de renvoyer ce postulat au Conseil d’État. À la suite de cette décision, un rapport de minorité a été annoncé.

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) — Rapporteur-trice de minorité 1

Au cours de l’été 2020, le canton de Vaud a reçu plus de 600 candidatures de curatrices et curateurs volontaires. Plusieurs difficultés ont été constatées : l’inscription dans le temps, puis les désistements ainsi que les roulements. Entre octobre et novembre 2020, une campagne de recrutement a eu lieu avec une décentralisation des services de curatelles à Vevey. Le but de ce postulat est d’obtenir des explications sur la politique menée dans le secteur de curatelle, ainsi que ses conséquences.

Dès lors, le Conseil d’État nous a expliqué que la répartition des mandats entre curateurs professionnels et volontaires se situe respectivement autour de 36 % et de 64 %, et que l’évolution démographique et l’augmentation des personnes en situation de vulnérabilité augmentent de fait. Face à ces constats, des postes supplémentaires sont nécessaires et ont été demandés pour assurer les mandats de protection confiés.

Pour bien comprendre les situations éligibles à une curatelle, je me permets de revenir sur le déroulement du processus. Les signalements viennent des proches, et également et surtout des réseaux des aides et des soins à domicile actifs auprès des centres médico-sociaux (CMS), hôpitaux, etc. Au moment où une décision de la Justice de paix est prise, le SCTP accueille ce mandant et le prend en charge. Pour améliorer cela, une des pistes est d’essayer de travailler en réseau avec l’ensemble des acteurs sociaux et médicaux pour accompagner les personnes afin d’éviter les curatelles. Par ailleurs, il n’est aujourd’hui plus envisageable de revenir à un système qui renvoie toute la responsabilité aux proches. La réforme fédérale ayant eu lieu sur dix ans, il est impensable de laisser tomber ces personnes. Un crédit a récemment été voté pour remplacer le système d’information, ce qui permettra d’automatiser certaines de tâches. Cela a une incidence sur la gestion, bien meilleure, des dossiers. Enfin, la Commission thématique des systèmes d’information a étudié l’exposé des motifs et projet de décret relatif à l’obtention d’un crédit d’investissement pour un nouveau système d’information, qui n’a jamais mentionné une diminution du personnel. Et comme nous l’a annoncé Mme la conseillère d’État à l’occasion de l’échange, en fin de matinée, sur les conditions contractuelles du personnel, environ 60 postes seront transformés de contrats à durée déterminée (CDD) à durée indéterminée (CDI) ces trois prochaines années. Dès lors, considérant que le Conseil d’État a fourni l’ensemble des réponses aux questions posées par le postulant, la minorité de la commission considère que le texte déposé n’est pas adapté et vous recommande son classement.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Pierre-François Mottier (PLR) —

(remplaçant M. Jean-Daniel Carrard, absent) Le postulant a désiré faire durer son postulat et le renvoyer malgré tout au Conseil d’État, estimant que même si les réponses apportées par les services et la conseillère d’État ont été claires et précises, pas mal de choses restent floues. Les courbes exponentielles de l’augmentation de la population et du nombre de personnes dans les services sociaux et ayant besoin de curatelles ne sont pas exactement similaires. L’augmentation au budget, importante entre 2020 et 2021, est forte et les 13,4 ETP en plus pour les années à venir inquiète le postulant. C’est pourquoi il estime que son postulat doit être renvoyé au Conseil d’État, afin qu’il fournisse davantage de précisions à l’ensemble des députés. Il vous encourage à soutenir le rapport de la majorité ; j’en ferai de même.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Le groupe Ensemble à Gauche et POP propose de suivre l’avis de la minorité de la commission et de classer ce postulat, pour deux raisons principales. Premièrement, l’essentiel des questions posées par le postulat a trouvé une réponse en commission et figure dans le rapport de majorité à travers les renseignements donnés par Mme la conseillère d’État lors de la séance de commission. Deuxièmement, le postulat laisse entendre, certes en des termes prudents et couverts, que le budget du SCTP augmente trop rapidement. C’est un avis que nous ne partageons pas du tout. Au contraire, le service souffre de moyens insuffisants, notamment avec un recours excessif aux CDD, pour la prise en charge aussi complète que possible des cas lourds auxquels il est confronté. Je rappelle le ratio de 60 dossiers par curatrice ou curateur, ce qui est très élevé, sachant qu’une partie est composée de cas vraiment complexes. À ce stade, une pression très forte est exercée sur le personnel du service. Un postulat laissant entendre qu’il faut une croissance plus lente des postes est malvenu. Dès lors, je vous invite à classer ce texte

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d'État

J’ai bien entendu les rapports de majorité et de minorité ainsi que les avis exprimés en plénum. Du côté du Conseil d’État, nous vous invitons à suivre le rapport de minorité, car nous avons pris beaucoup de soins pour répondre aux questions évoquées dans le cadre du postulat. Il est important d’évoquer cette politique publique, essentielle dans le cadre cantonal ; on a aussi eu l’occasion de l’évoquer ce matin. Au fond, pour répondre aux demandes du postulat — fournir un tableau récapitulatif des cas en fonction des degrés de complexité, de la nature des cas, avec une projection sur les années 2020 et 2021 — nous sommes venus en commission avec l’ensemble de ces éléments. Il nous semble difficile, voire impossible, de livrer des éléments, puisque nous avons, dans le cadre des travaux de commission, dressé un tableau complet de la situation du service. À ce propos, je tiens à rappeler quelques éléments. L’activité du SCTP a été impactée des dernières années par des réformes successives, tant sur le plan fédéral que cantonal. Depuis 2012, depuis la réforme dite des cas lourds, le nombre de mandats de curatelles pour les adultes est passé de 1’300 à 4’500 mandats à la fin de 2020. Parallèlement, en 2013, le nouveau droit de protection de l’adulte et de l’enfant introduit le renforcement du principe d’autodétermination ainsi que de nouvelles exigences pour la désignation des curateurs et leurs responsabilités. Jusqu’en 2014, 20 % des mandats de curatelle étaient pris en charge par l’État, contre 70 % en moyenne dans les autres cantons suisses, et 80 % des mandats étaient assumés par des privés — les proches ou des privés imposés. Sur la base d’un sondage réalisé en 2013 auprès de 5000 curateurs privés du canton, il s’est avéré que plus de la moitié des personnes interrogées se disaient prêtes à poursuivre leur mandat, même sans y être obligées. Partant de ce constat, le Conseil d’État a décidé de miser sur la solidarité citoyenne et d’aboutir à un partage égal des mandats de curatelle — 50/50 % entre curateurs professionnels et volontaires. Enfin, en mai 2017, le Conseil d’État a annoncé renoncer à imposer le mandat de curateur dans le canton de Vaud dès le 1er janvier 2018 et il a mis en œuvre le dispositif de la réforme vaudoise de la curatelle ; on a vraiment anticipé des mesures prises sur le plan fédéral. Depuis la décision du Conseil d’État d’abandonner la curatelle imposée et le lancement de la campagne de recrutement, les curateurs volontaires ont pris en charge la totalité des mandats légers, soit 600 en 2018 et en 2019. À ce jour, le SCTP n’assume aucun mandat léger, grâce au succès des campagnes de recrutement de curateurs volontaires. La solidarité des Vaudoises et des Vaudois vis-à-vis des personnes nécessitant un accompagnement a permis de dépasser l’objectif du Conseil d’État. La répartition des mandats entre curateurs volontaires et professionnels se situe autour de 64 % et 36 % ; le système a donc été rendu plus efficient. Cependant, et malgré le succès de la campagne de recrutement des curateurs volontaires, le SCTP voit son nombre de mandats de curatelle continuer à évoluer, soit environ 400 à 450 cas dits lourds par année. Rien n’indique une éventuelle baisse de ces mandats. L’évolution démographique et le vieillissement de la population tendent à augmenter le nombre de personnes en situation de vulnérabilité. La même tendance se constate d’ailleurs en Suisse : les derniers chiffres publiés par la Conférence suisse en matière de protection de l’adulte montrent une augmentation de près de 3 % des mandats pour les adultes par rapport à l’année précédente. En moyenne, 14 adultes sur 1000 bénéficient de mesures de protection ; 84 % des cas sont des curatelles sur mesure. L’analyse par âge et par sexe indique que les hommes ont davantage tendance que les femmes à avoir besoin de mesures de protection et que la tranche d’âge des plus de 65 ans représente la part la plus importante de toutes les mesures. On peut donc raisonnablement penser que le nombre de cas lourds continuera à progresser, avec des problématiques de plus en plus complexes. Dans le canton de Vaud, environ 15 adultes sur 1000 bénéficient d’une mesure de curatelle — dans la moyenne suisse. À ce sujet, le SCTP ne maîtrise pas le volume de ses activités — il importe de le préciser — puisque les mandats de curatelle sont attribués par les autorités de protection de l’adulte et de l’enfant, à savoir les justices de paix. Le service n’a donc pas d’influence sur la croissance du nombre de mandats de protection. Nous sommes dans l’indépendance juridictionnelle. Ce n’est donc pas un élément sur lequel nous avons prise en matière de séparation des pouvoirs. Face à ces constats, le SCTP a l’obligation de demander des postes supplémentaires, afin d’assurer les mandats de protection confiés par les justices de paix. Cependant, comme il a été expliqué lors de la séance de commission, d’importants efforts d’optimisation ont été fournis depuis 2015 à la suite d’une revue menée par l’UCA, dont les résultats ont été présentés aux services transversaux. Reste à développer un axe d’amélioration stratégique en lien avec le système d’information métier. En effet, il ne correspond plus aux exigences techniques ni aux besoins métier. L’objectif est de mettre à disposition des curateurs professionnels un dossier unique par bénéficiaire et de faciliter les échanges avec les supports métier via la dématérialisation des documents. Grâce à cette modernisation du système d’information dont le projet de décret a été voté au mois de septembre 2020, la qualité du suivi des mandats sera améliorée. Il sera également possible de contenir l’augmentation des ETP de support engagés par le service, puisque des gains de productivité sont attendus.

Par rapport aux demandes du postulat, je crois pouvoir dire que nous avons répondu à l’ensemble des questions, comme relevé dans le rapport de minorité. Je comprends les inquiétudes formulées par le postulant et relayées par M. Mottier, mais l’on ne peut pas parler ici de courbes exponentielles. Nous avons bien expliqué les raisons de l’augmentation du nombre de cas par année, cas qui nous sont transmis par la Justice de paix et sur lesquels nous n’avons absolument aucune prise. Nous pouvons discuter avec les acteurs et avec la Justice de paix pour trouver des solutions, mais nous n’avons pas les moyens, au niveau de l’État, de nous opposer à une demande et à un besoin de prise en charge transmis par l’Ordre judiciaire. Nos budgets sont simplement en lien avec les ETP nécessaires pour faire face au nombre de cas. Nous avons optimisé nos processus, un nouveau système d’information va arriver, mais notre objectif est uniquement de maintenir les ratios actuels de 60 dossiers de curatelle par curateur. Nous n’avons pas affaire à une vaudoiserie, mais à des standards reconnus sur le plan fédéral ; nous les appliquons simplement, sans faire de spécialités.

Enfin, s’agissant des postes, il y avait une volonté relayée par la Commission des finances de baisser le nombre d’auxiliaires et de passer en CDI sur des postes pérennes. C’est le chemin sur lequel le Conseil d’État s’est engagé auprès du Parlement et c’est le chemin que l’on respecte aujourd’hui avec la pérennisation des postes discutés ce matin en relation avec l’interpellation de M. Vuilleumier. Tous ces éléments sont rappelés pour vous dire que, par rapport à toutes les questions évoquées dans le cadre du postulat, nous avons apporté les informations nécessaires. Dans tous les cas, à ce stade, nous n’aurions pas d’informations supplémentaires à celles communiquées dans le cadre de la commission et relayées dans les rapports de commission.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 53 voix contre 50 et 5 abstentions.

M. Stéphane Montangero (SOC) —

Je demande un vote nominal.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 députés.

Celles et ceux qui suivent la majorité de la commission votent oui ; celles et ceux qui suivent la minorité de la commission votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil prend le postulat en considération par 60 voix contre 53 et 3 abstentions.

* Insérer le vote nominal

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