Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 23 mars 2021, point 9 de l'ordre du jour

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Rapport du Bureau sur la CEP HRC avec annexes

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Philippe Jobin (UDC) —

Eclairer cette affaire nécessite de diriger le faisceau lumineux dans la bonne direction. Ainsi, les groupes UDC, PLR et Vert’libéraux ont demandé, il y a quelques mois, l’institution d’une commission d’enquête parlementaire (CEP), prévue par l’article 67 de la Loi sur le Grand Conseil (LGC) « si des événements d’une grande portée l’exigent », ce qui est encore le cas à l’heure actuelle. Nous avons déjà voté en faveur de 100 millions de francs pour diverses garanties. Nous voterons en faveur ou défaveur des 52,65 millions de francs pour financer les coûts supplémentaires liés à la construction du dispositif hospitalier avec autorisation, par le Conseil d’Etat, d’adhérer à la version modifiée de la Convention intercantonale sur l’HRC.

Avec tous ces suppléments, compléments financiers et avec nos commissions de surveillance qui se sont fait danser sur le ventre, il est temps pour le Grand Conseil de prendre ses responsabilités sur la question des relations entre le pouvoir politique et l’HRC, en particulier. Nous ne pouvons pas nous épargner ce travail sous prétexte qu’il porterait atteinte à l’hôpital et à son personnel que mon groupe politique ¾ j’insiste ¾ a toujours soutenu et soutient toujours. C’est aussi pour eux et pour notre population que nous avons le devoir d’apporter un éclairage différent sur ce dossier délicat. Je rappelle à tous les indécis — encore faut-il qu’il y en ait lors du vote — que nous avons l’appui de médecins qui veulent une enquête rapidement. Les audits menés par la société BDO Visura et par le CCF nous ont apporté une partie des réponses que nous étions en droit de recevoir, mais nous devons effectuer le reste du travail.

Nous ne pouvons pas laisser notre institution parlementaire perdre de son pouvoir par les commissions de surveillance. Il en va de notre crédibilité et du sérieux de nos travaux. Ayons la fierté et le courage de faire le nécessaire par le biais de la CEP. Pour toutes ces raisons, je vous encourage à la demander.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Pour rappel, la base légale des objets qui nous sont soumis sur l’HRC se trouve dans les articles 67 à 80 de la LGC. La requête déposée par M. le député Philippe Jobin selon la loi a été transmise aux groupes politiques et au Bureau du Grand Conseil qui vous a remis un rapport en octobre 2020. Mme la vice-présidente du Grand Conseil rapportera sur cet objet sur la base de la prise de position du Grand Conseil.

Le traitement de cet objet a pris du retard par rapport au calendrier initialement prévu en raison de la crise sanitaire et d’objets qui ont dû être traités avant les Relâches. Au nom du Bureau, je remercie le Secrétariat général du Grand Conseil pour l’appui qu’il a apporté au Bureau concernant le traitement de cet objet.

Comme cela vous a été communiqué le 26 février, après avoir entendu M. Jobin, nous entendrons Mme la vice-présidente, puis, dans la discussion d’entrée en matière, les groupes politiques dans l’ordre décroissant du nombre de leurs députés.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Vice-président-e

En date du 26 mai 2020, une requête a été déposée par M. le député Philippe Jobin et consorts, aux noms des groupes UDC, PLR et Vert′libéraux, co-signée par 80 autres député-e-s. Le 9 juin 2020, le Grand Conseil en a pris acte.

Conformément à l’article 68 de la LGC du 8 mai 2007, le Bureau du Grand Conseil a fixé un délai au Conseil d’Etat au 20 octobre 2020 pour lui permettre de produire un rapport lui garantissant d’exercer son droit d’être entendu et de se déterminer sur l’institution d’une CEP. Le rapport a été rendu public le 29 octobre 2020. Dans ses conclusions, le Conseil d’Etat rejette la requête d’institution d’une CEP.

Après avoir pris connaissance du rapport du Conseil d’Etat, le Bureau du Grand Conseil a constaté l’existence d’arguments tant en faveur qu’en défaveur de l’instauration d’une CEP. Parmi les arguments en faveur de l’institution d’une CEP, ressortent notamment :

  • La débâcle financière de l’HRC, nécessitant l’intervention urgente et massive des pouvoirs publics, révèle une absence d’anticipation des difficultés potentielles, et de suivi proactif permettant d’éviter les problèmes, ce qui interroge fortement. Il n’est ainsi pas certain que les lacunes identifiées jusque-là, notamment suite aux deux audits diligentés par les Conseils d’Etat vaudois et valaisan, soient les seules ou ne cachent pas des manquements plus graves encore. A ce titre, le rapport du Conseil d’Etat sur la requête d’institution d’une CEP pourrait ne pas avoir apporté toutes les réponses nécessaires.
  • Autre argument : l’important dépassement des coûts de construction initialement prévus. Les chiffres présentés par l’HRC ont singulièrement manqué de fiabilité.
  • Par ailleurs, des voix se sont élevées, y compris au sein de l’hôpital lui-même, pour dénoncer des dysfonctionnements au niveau du management et de l’organisation.
  • Enfin, l’institution d’une CEP permettrait la levée du secret de fonction et offrirait la possibilité de solliciter d’autres expertises, en vue de proposer des solutions efficaces.

Parmi les arguments en défaveur de l’institution d’une CEP, ressortent notamment :

  • En premier lieu, le mécontentement légitime du Grand Conseil face aux difficultés rencontrées par l’HRC a pu s’exprimer en Commission des finances ainsi qu’au plénum à l’occasion de l’examen de l’exposé des motifs et projet de décret (229) accordant à l’hôpital en particulier une garantie temporaire complémentaire. Le Grand Conseil a, lors de cet examen, admis et suivi le raisonnement du Conseil d’Etat, adoptant le projet de décret à l’unanimité, en deuxième débat immédiat.
  • Autre argument avancé : deux audits fouillés ont été réalisés, portant sur les aspects financiers — construction et exploitation de l’HRC — et de gouvernance. En toute transparence, ces audits ont été rendus publics.
  • Troisièmement, les difficultés rencontrées par l’HRC — déficits d’exploitation, problèmes de trésorerie, carences de management et d’organisation — ont fait l’objet de mesures correctrices fortes comme le renouvellement du Conseil d’établissement, de la direction générale et de la direction administrative et financière de l’HRC.
  • Enfin, la possibilité pour le Grand Conseil d’intervenir sur le dossier de l’HRC ne dépend pas de l’instauration d’une CEP. Les député-e-s peuvent en tout temps faire usage des instruments parlementaires habituels dont la LGC les dote et les commissions de surveillance et de contrôle ont toute latitude pour exercer leur mission sur l’HRC.

La position du Bureau du Grand Conseil est la suivante : compte tenu de l’ensemble de l’argumentation développée dans son rapport, qui a cherché à être le plus complet possible, le Bureau se montre très partagé. Toutefois, il se prononce, finalement et dans sa majorité, contre le principe de l’institution d’une CEP.

En effet, dans son rapport, le Conseil d’Etat prévoit une information plus régulière et précise, tant sur les aspects financiers que de gouvernance, à l’attention de la Commission des finances, de la Commission de gestion et de la Commission interparlementaire de contrôle (CIC). Il convient de prendre acte des assurances fournies par le Conseil d’Etat, de fonctionner dans un rapport de confiance avec les nouveaux dirigeants de l’HRC et d’attendre le plein effet des mesures correctrices en cours d’implémentation. C’est uniquement dans un second temps que la demande de procéder à une investigation spécifique pourrait si besoin être déposée.

Au-delà de la question de la condition matérielle, à savoir l’existence d’événements d’une grande portée, les deux conditions formelles relatives à l’institution d’une CEP prévues par l’article 68 de la LGC sont remplies : d’une part, la requête a été cosignée par au moins 20 députés — en l’espèce, 80 —d’autre part, le Conseil d’Etat a pu faire usage de son droit d’être entendu à travers la rédaction du rapport qu’il a adressé au Grand Conseil. De plus, tous les groupes politiques ont pu se prononcer et leurs positions sont en annexe des différents documents. Dès lors, une décision requérant la majorité absolue des membres du Grand Conseil devra être prise ; cette décision pourra s’appuyer sur le projet de décision et de mandat proposé par le Bureau.

Si le vote d’entrée en matière est soutenu par la majorité absolue des membres du Grand Conseil, les articles suivants du projet de décision du Grand Conseil seront examinés, soit, notamment, la proposition de mandat de la CEP. Cependant, si l’article premier est amendé de manière substantielle, il conviendra d’autoriser le Conseil d’Etat à exercer de manière complémentaire son droit d’être entendu ; il en ira de même si d’éventuels amendements apportés à l’article 2 devaient entrer en contradiction avec la formulation de l’article premier.

Si la décision du Grand Conseil quant à l’entrée en matière est négative, il ne sera pas nécessaire d’examiner les articles suivants de la proposition du Bureau du Grand Conseil et la procédure sera terminée.

En conclusion, de l’avis du Bureau, les conditions à remplir pour la mise en place d’une CEP sur l’HRC ne sont pas réunies. Au nom du Bureau du Grand Conseil, je vous invite donc à suivre ses conclusions et à rejeter l’entrée en matière.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.

M. Jean-Daniel Carrard (PLR) —

J’interviens en tant que vice-président du groupe PLR. En préambule, nous tenons à assurer qu’en aucun cas nous ne mettons en cause la nécessité d’un établissement hospitalier dans l’Est vaudois. Au contraire, nous désirons que cet hôpital puisse repartir sur des bases saines et solides pour être au service de la région entière. Le PLR tient à comprendre le fil de l’histoire organisationnelle et financière de l’HRC, afin d’en tirer les leçons adéquates et d’assurer un avenir serein à l’hôpital. Ni la qualité des soins ni la sécurité des patients ne sont mis en cause, mais les questions financières, d’organisation et de gouvernance, ainsi que les choix à leur origine.

Deux rapports d’audit ont été mandatés par les Etats de Vaud et du Valais. Le rapport du Contrôle cantonal des finances vaudois en collaboration avec l’inspection des finances valaisanne, ainsi que celui de BDO Visura ont été publiés. Ils ont traité de la situation financière extrêmement délicate dans laquelle se trouve l’établissement, ainsi que des lacunes de gouvernance. Le Conseil d’Etat, ayant pris acte des manquements identifiés par les deux documents, considère que les éléments identifiés sont suffisamment étayés et graves pour proposer des mesures d’adaptation afin de retrouver un équilibre financier, ce que nous appuyons.

Bien que les deux rapports attestent de l’absence de malversations, toutes les causes à l’origine de la situation n’ont pas été démontrées. Un plan de retour à l’équilibre financier pour 2026 est présenté. Nous saluons les mesures d’économie identifiées, dont certaines sont déjà pratiquées. L’ensemble de ces mesures est conditionné par une augmentation du taux d’occupation. Le Conseil d’Etat estime que sa mise en œuvre serait lésée par une CEP, consommatrice de temps et de ressources, certaines personnes étant impliquées dans le plan de relance. Selon le gouvernement, cela donnerait une image négative de l’HRC. Selon nous, au contraire, le rapport fourni par une CEP serait bénéfique en termes d’image et contribuerait à rétablir la confiance de la région et de la patientèle actuelle et future, garante de la fidélisation de cet établissement régional. Ne pas aller au bout de la démarche ferait perdurer des non-dits qui se transformeraient en ressentiments. Faire la lumière sur le passé clôturerait le chapitre des sous-entendus et ouvrirait celui de la sérénité et du développement.

A titre d’exemple, les précédentes CEP sur les EMS et la BCV ont permis de tirer un trait sur les erreurs commises, de donner une impulsion salutaire aux institutions concernées et de se doter des clés du succès. A ce titre, pour le HRC, une étude plus approfondie est nécessaire afin d’obtenir des renseignements sur les décisions ayant conduit à cette situation financière très inquiétante, d’identifier les causes de l’hémorragie et donc de limiter, voire juguler cette dernière. A ce jour, nous peinons à entrevoir des réponses claires, crédibles et transparentes. La confiance est rompue. Elle doit être rétablie, en particulier par la capacité de l’établissement à assumer son autonomie. Les erreurs du passé doivent être identifiées et analysées afin de continuer à construire l’institution avec le ciment de l’avenir. L’important dépassement des coûts de construction, certes partiellement dû à l’ajout des départements d’oncologie et de cardiologie, n’a pas été totalement expliqué. Le remboursement des emprunts nous coûtera 8 millions de francs par an jusqu’en 2036. La compatibilité du dimensionnement de l’HCR avec la planification hospitalière cantonale n’a pas été démontrée. Cette nouvelle planification urgente est annoncée pour le début de 2022 ; tous les acteurs sanitaires du canton l’attendent avec impatience, mais cette attente ne facilite pas les projections vers l’avenir. Une partie du déficit des recettes est expliquée par la fuite des médecins spécialistes qui se sont tournés vers des structures privées. Il faudrait nous garantir que ces compétences professionnelles indispensables à l’équilibre financier de l’établissement seront assurées d’ici à 2026. D’autre part, la confiance entre l’HRC et les médecins de la région doit être rétablie, afin qu’ils y envoient systématiquement leur patientèle. Cette dernière doit aussi croire en l’hôpital et lui faire confiance.

Les questions du dimensionnement de l’HRC et du coût de ses deux antennes et de sa pharmacie n’ont toujours pas trouvé de réponses. Les tâches prioritaires doivent être redéfinies. Si nous voulons la stabilisation de l’institution, cette dernière doit repartir sur des bases saines, également pour retrouver la confiance et la sérénité. A cette condition, le Grand Conseil pourra valider le soutien financier des pouvoirs publics, en premier lieu le projet de décret présenté aujourd’hui.

Cette déclaration n’enlève rien à la reconnaissance du PLR envers le personnel de l’hôpital qui fait un travail magnifique, notamment dans cette période difficile de pandémie. Nous le remercions. En résumé, le groupe PLR maintient et défendra devant le Parlement la requête d’une CEP sur l’HRC.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Le groupe socialiste vous invite à ne pas entrer en matière sur la requête d’une CEP, un outil disproportionné. Nous plaidons au contraire pour un retour au calme, afin de maintenir la qualité des soins et d’envisager l’avenir de l’hôpital dans un climat de confiance.

Outil disproportionné : je suis contente que mon préopinant ait mentionné le contexte dans lequel la dernière CEP, concernant la débâcle de la BCV en 2003, a été instaurée. Lors de cet événement, il a été question, pour le canton de Vaud, de reprovisionner la banque à hauteur de 2 milliards de francs. Nous sommes loin des garanties prolongées ou augmentées dans le cadre de l’HRC. De plus, dans le cas de la BCV, des membres du Conseil d’Etat étaient membres du conseil d’administration de la banque. Nous sommes donc là aussi loin de la situation qui nous occupe avec l’HRC, où le Conseil d’Etat fait office d’organe de surveillance de l’hôpital. La direction générale de la BCV avait également été auteure de malversations financières. Les audits déployés jusque-là ont montré que cela n’a pas été le cas pour l’HRC. Quant aux recommandations élaborées par la CEP sur la BCV, qui ont notamment abouti à des modifications de loi, le Conseil d’Etat a déjà fait la démarche dans le cas de l’HRC : les modifications du cadre légal autour de l’hôpital, à savoir la convention interparlementaire, sont soumises à notre vote. Puisque la majorité du Grand Conseil l’a voulu, nous discuterons après le vote sur la CEP des modifications du cadre légal dont relève l’hôpital, en lien avec la convention interparlementaire. Par conséquent, le contexte comme les mesures étant bien différents de la situation de 2003, l’outil proposé n’est pas calibré.

Par ailleurs, depuis le dépôt de la requête, le contexte a évolué. A l’époque, le groupe socialiste s’était bien évidemment positionné en faveur de mesures permettant d’assurer la pérennité de l’hôpital et de déterminer les lacunes relatives à la gestion opérationnelle et financière de l’établissement pour que des recommandations soient édictées et des décisions mises en œuvre rapidement. Nous avons soutenu la publication des rapports d’audit et, évidemment, les mesures annoncées dont la plupart ont déjà été mises en œuvre. Les audits ont révélé des lacunes dans la gestion, mais aucune malversation, contrairement au cas de la BCV. Les experts et auditeurs qui se sont rendus sur place ont eu accès à la totalité des informations ; l’hôpital a pleinement collaboré sans rien cacher aux personnes qui œuvraient sur place. De plus, sous l’angle de la gouvernance, de nombreuses décisions ont été prises, puisque le Directeur général de l’établissement a quitté ses fonctions peu de temps après le dépôt de la requête d’une CEP. Un Directeur général ad interim est entré en fonction peu de temps après, et un nouveau Directeur général prendra ses fonctions cet été. La direction financière a également été modifiée, comme vous le savez, et les conditions dans lesquelles l’ancienne direction financière a œuvré ont très rapidement été questionnées. La direction a été modifiée. Par conséquent, les têtes qui auraient dû être coupées sont déjà tombées. Les rapports ont fait la lumière sur les faits et les difficultés que l’hôpital a rencontrées et ils ont énuméré des recommandations dont la majorité a donné lieu à une suite. Nous sommes sur le point d’introduire les dernières mesures en adoptant le décret que vous avez choisi de traiter après la requête d’une CEP.

Monsieur Carrard, vous l’avez mentionné : le Conseil d’établissement s’est doté d’un plan pour le retour à l’équilibre financier. Derrière ce nom barbare se cachent des mesures structurelles et organisationnelles qui permettront à l’hôpital de retrouver non pas l’équilibre, mais des résultats positifs en 2026. L’hôpital ne sera pas éternellement un gouffre financier, le but étant qu’il puisse retrouver des chiffres plus positifs. Le plan de retour à l’équilibre financier a été considéré par certains experts — comme M. Stephania,mandaté afin d’analyser le plan — qui ont estimé que ce dernier était réalisable et répondait aux besoins de l’hôpital. Le plan fera l’objet d’un suivi serré par la Commission des finances. En effet, le Conseil d’Etat s’est engagé à ce qu’elle soit saisie régulièrement et examine point par point et étape par étape l’évolution du plan. La Commission des finances se verrait dépourvue de ses compétences de suivi, dans l’hypothèse où une CEP serait nommée, puisque cette dernière aspirerait toutes les compétences aujourd’hui en mains des commissions parlementaires.

Nous avons entendu des arguments selon lesquels une CEP serait nécessaire pour pouvoir mener un travail plus abouti et aller au bout de l’exercice. S’il s’agit d’aller au bout du raisonnement, nous désignerons une CEP dès qu’elle serait déposée, pour aller au bout de l’exercice. Il n’y aurait donc plus de raisons d’en refuser une, dès lors qu’elle est déposée, puisqu’il faut aller au bout de la démarche. Contrairement à ce qui a été évoqué, le groupe socialiste estime que dans le cadre de la CEP, qui serait composée d’une vingtaine de députés, les compétences pourraient difficilement être supplémentaires à celles déjà dégagées tant par le Contrôle cantonal des finances et l’Inspection cantonale des finances valaisannes, que par les experts de BDO Visura. Si des questions complémentaires demeurent, ce que je peux imaginer, elles pourront être posées dans le cadre de la Commission des finances, la Commission de gestion et la CIC. Si nous ne menons pas le travail à travers ces commissions et que nous choisissons la voie de la CEP, le Grand Conseil perdra la main sur les éléments et les questions en suspens.

Voici le deuxième point de ma déclaration : la CEP n’aurait d’autres objectifs que de déstabiliser l’hôpital et mettre en jeu son avenir. En effet, l’établissement doit maintenant réaffecter ses ressources et son énergie pour se projeter dans l’avenir avec l’arrivée d’un nouveau Directeur général dans le courant de l’été. Ce dernier devra prendre possession de sa fonction, s’approprier son rôle, développer sa vision de l’avenir de l’hôpital, prendre en main une nouvelle équipe et un conseil d’établissement presque entièrement renouvelé. Une culture d’entreprises positive et fédératrice devra être dessinée, permettant de bonnes conditions de travail et le recrutement de bons médecins, car il question de conserver une image positive de l’hôpital. Enfin, le Directeur général devra asseoir son autorité et faire sa place. A cet égard, les défis auxquels la direction et le conseil d’établissement doivent faire face sont incompatibles avec le travail colossal d’accompagnement d’une CEP, orientée vers le passé et nécessitant énormément de ressources internes. Cela pourrait mettre en péril la mise en œuvre du plan de retour à l’équilibre financier, une nécessité pourtant absolue.

Pour toutes ces raisons, une CEP constituerait un obstacle sur le chemin, certes caillouteux mais bien dessiné, que devra emprunter l’hôpital ces prochains mois et années. Face aux défis qui attendent celui-ci, nous devons nous assurer qu’il est correctement équipé et l’accompagner dans chaque étape, mais en aucun cas, glisser un caillou pointu et blessant dans sa chaussure qui ne ferait que ralentir sa marche. Tout à l’heure, la nécessité de rétablir la confiance a été invoquée. La CEP aurait précisément comme conséquence l’opposé que ce que ses partisans essaient de nous faire croire. En réalité, avec la CEP que vous décideriez d’instaurer pour des questions opérationnelles ou financières, l’hôpital aurait mauvaise presse. Nous lirions des commentaires négatifs ; la notion même de CEP inquiéterait la population. Si vos voisins, amis, membres de votre famille ou proches doivent conduire un enfant ou un parent à l’hôpital, il y a de fortes chances, au vu du doute régnant dans la population, pour qu’ils choisissent de se réorienter vers d’autres établissements, notamment privés qui se sont allégrement installés dans la région, au détriment de l’HRC. Ce manque de confiance qui naîtrait de l’instauration d’une CEP entraînerait une baisse de la patientèle et donc des recettes, et mettrait en péril le retour à l’équilibre financier de l’hôpital. Nous entrerions dans un cercle vicieux, et non dans le cercle vertueux que nous souhaitons pour l’hôpital, afin qu’il se remette sur les rails.

A entendre la position du groupe PLR, qui sera peut-être exprimée par d’autres, la CEP est nécessaire afin d’expliquer ce qui s’est passé sous l’angle politique et du passé. Je rappelle que l’HRC est un établissement autonome ¾ contrairement au CHUV ¾ qui n’est pas rattaché au Département de la santé et de l’action sociale, et le Directeur général n’est pas subordonné à la cheffe de ce département. Les compétences du Conseil d’Etat se limitent à la surveillance de la gestion et du fonctionnement de l’établissement. Tant le Conseil d’Etat vaudois que valaisan ont agi avec la plus grande célérité. Dès l’identification des problèmes, ils sont intervenus en informant, du côté vaudois, le président de la Commission des finances, et en dépêchant des personnes sur place qui ont permis de lancer les audits. C’est bien le Conseil d’établissement le responsable de la gestion de l’établissement ; il arrête le budget, les comptes et le plan financier. Enfin, l’Etat ne finance pas directement les projets de construction ; il se limite à accorder des garanties. La Loi sur l’assurance-maladie (LAMal) est claire à ce sujet : depuis 2012, les investissements des hôpitaux publics relèvent de la responsabilité des hôpitaux, non des cantons. Dès lors, on peine à comprendre quel type de responsabilité politique les tenants de la CEP entendent trouver, et quel est l’objectif de ce qui pourrait ressembler à une croisade contre un modèle de gouvernance pourtant privilégié il y a peu de temps pour le CHUV.

Le message que nous souhaitons transmettre est le suivant. Nous avons entendu les inquiétudes que vous avez exprimées l’année passée et en avons partagé la plupart. Nous prenons acte du chemin parcouru par l’hôpital depuis près de douze mois et des réorganisations structurelles et opérationnelles mises en œuvre ou sur le point de l’être. Nous aurions voulu éviter que l’hôpital ne se retrouve dans cette situation financière. Nous avons confiance dans les mesures prises par le Conseil d’Etat et le Conseil d’établissement. Le Grand Conseil dispose de moyens moins dommageables afin d’assurer le suivi des mesures de redressement de l’hôpital. Nous devons donner un gage de confiance à l’HRC pour la qualité des soins et les habitants de la Riviera et du Chablais et vous invitons à ne pas faire de l’hôpital l’otage de postures politiques, mais de voter pour la confiance en l’avenir et la poursuite de soins de qualité accessibles à toutes et tous. Nous vous remercions de refuser l’entrée en matière sur la requête d’une CEP.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je ne vais pas vous faire l’affront de répéter la prise de position que j’ai eue lors de l’entrée en matière, mais je tiens à relever trois points. Nous politiques avons, bien sûr, des comptes à rendre à notre population, en particulier au travers de nos commissions de surveillance qui n’ont pas été entendues ou du moins comprises dans leur rôle. Nous avons donc manifestement un problème institutionnel entre notre travail et les auditions que nous faisons à l’extérieur de cet hémicycle. Pour que l’avenir soit serein, il est indispensable de régler le passé. Nous devons travailler en toute transparence, apporter la lumière là où cela est nécessaire, car certains endroits doivent être éclairés. J’ai le sentiment que cette CEP pourra le faire. De plus, l’outil de gouvernance est adéquat, mais n’a pas été utilisé comme il se doit. Nous l’avons répété et je ne peux que le confirmer. Par ailleurs, pour celles et ceux qui ne l’auraient peut-être pas lue, la convention, à l’article 2, stipule : « Pour accomplir sa mission, l'Etablissement dispose de l'autonomie conférée par la présente convention, sous réserve de la surveillance des Conseils d'Etat et des Grands Conseils des deux cantons. » Force est de constater que cela n’a pas été fait jusqu’à présent. Il me semble donc nécessaire d’apporter notre pierre à l’édifice et de régler ces situations, mauvaises pour nous politiques, ainsi que pour l’extérieur des entités que nous avons à auditer ou pour lesquelles nous devons nous rendre sur place. Le groupe UDC entrera en matière sur cette CEP, pour le bien non seulement de la population et des employés du site, mais également pour notre institution. Je vous invite à en faire de même.

M. Vassilis Venizelos —

Dès le début, il y a eu des erreurs dans la gestion de ce dossier ; il faut le reconnaître. Il y a eu des erreurs caricaturales, comme l'emprunt contracté auprès de la Banque cantonale des Grisons, sans garantie de l’Etat, sans en informer les cantons partenaires, ni la Direction générale, ni même le Conseil d’établissement. Il y a eu des erreurs plus structurelles, comme le manque de transmission d’informations de la part de la direction de l’établissement à son Conseil d’établissement ou aux organes de haute surveillance — la Commission des finances ou la Commission de gestion, voire le Conseil d’Etat. Pour connaître ces erreurs, il faut les reconnaître et condamner ces manquements. On sera tous d’accord là-dessus : il faut tout mettre en œuvre pour nous assurer qu’une telle situation ne se reproduira pas, avec cet établissement hospitalier ou un autre. Toutefois, il faut reconnaître que le Conseil d’Etat a réagi extrêmement rapidement face à la crise, avec des mesures fortes et importantes. Les autorités ne sont pas restées les bras croisés. Depuis l’apparition des problèmes, des audits ont été menés, les failles dans la gestion identifiées, les responsabilités de ces erreurs, des mesures prises. Les auditeurs ont eu accès à l’ensemble des documents. Il y a une transparence totale sur les pièces du dossier, pour que les auditeurs puissent faire leur travail. Aucune malversation ou responsabilité politique n’ont été identifiées. Des mesures ont été prises ; un changement a été opéré à la tête de l’institution. Le Conseil d’établissement a été renouvelé ; il y a un nouveau directeur financier, un nouveau directeur général. La convention intercantonale, dont nous avons discuté tout à l’heure, a été revue avec le renforcement des mesures de contrôle interne et des outils de gestion financiers, ainsi que ce fameux plan de retour à l’équilibre qui nous permettra à l’établissement de retrouver une situation financière saine pour les cinq prochaines années.

En matière de transparence, il faut rappeler que la Commission des finances sera saisie deux fois par an des rapports de suivi. La reprise en main et le contrôle seront garantis par le Grand Conseil et la Commission des finances.

On se demande donc en quoi la CEP nous permettrait de sortir de cette « gonfle ». Il y a un problème d’agenda. Une CEP ne ferait que retarder l’ensemble des mesures de mise en œuvre, largement décrites et commentées tout à l’heure. Selon moi, nous devons concentrer notre action sur le suivi de ces actions. La Commission des finances — et pourquoi pas la Commission de gestion ? — a la compétence pour s’assurer que l’ensemble des mesures énoncées soient mises en œuvre. Les mesures sont en train d’être mises en œuvre et c’est là-dessus que nous devons travailler.

Vu la crise sanitaire que nous traversons, la priorité est de permettre à l’institution de fonctionner, de se relever, puis de fonctionner et d’assumer sa responsabilité de prise en charge des patients. Une CEP serait, au contraire, de nature à entraver le bon fonctionnement de l’hôpital. Le rapport de confiance entre la population et le système de santé, essentiel pour permettre le fonctionnement de ce dernier, serait probablement rompu ; ce serait regrettable. La population et le personnel soignant ont besoin de stabilité et de sérénité pour retrouver ce rapport de confiance, pour faire en sorte que le système de santé et l’établissement fonctionnent. L’agitation qu’une CEP provoquerait irait très clairement dans le sens contraire, renforcerait le sentiment négatif envers l’institution. Selon nous, l’hôpital doit pouvoir se projeter vers l’avenir et les prochaines années ; une nouvelle enquête sur le passé n’apporterait rien.

L’outil de la CEP n’est clairement pas le bon outil. Il est chronophage et trop lourd. Nous avons d’autres outils et instruments, qui ont déjà été déployés. Nous en avons d’autres pour nous assurer que les mesures annoncées seront effectivement mises en œuvre.

Enfin, je parle ici en tant que membre du comité directeur des établissements hospitaliers du Nord vaudois, il y a un malaise dans ce débat, un silence qui m’inquiète un peu. Tous les établissements hospitaliers d’intérêt public se trouvent dans une situation extrêmement compliquée avec la crise sanitaire qui impacte encore plus fortement la santé financière de nos établissements. Je suis surpris de ne pas entendre la Fédération des hôpitaux vaudois (FHV) pourtant censée défendre les intérêts de ses membres, prendre leur défense et combattre la CEP.

Nous voulons toutes et tous offrir à la population vaudoise un système de santé de qualité qui fonctionne, avec un personnel qualifié et motivé. La CEP ne fera que perturber le système de santé, déjà mis sous pression. Elle n’offrira aucune solution pour améliorer la qualité et la solidité du système de santé. Il faut donc rejeter l’idée de création d’une CEP et se concentrer sur les actions qui permettront à l’HRC de se relever.

Mme Graziella Schaller (V'L) —

Nous devons décider de la mise en place d’une CEP sur l’HRC. Depuis plus de vingt ans, plusieurs projets hospitaliers ont vu le jour, afin d’offrir des soins coordonnés à la population de la Riviera et du Chablais, soit pour plus de 180'000 habitants. Fusion, rapprochement, convention intercantonale, cinq ou six sites : c’est une longue histoire. Cette saga a fini par accoucher d’un hôpital intercantonal qui a poussé à Rennaz dans un champ de patates, comme l’avait dit une collègue députée. Cela fait presque deux ans que l’hôpital a été inauguré. Malheureusement, les problèmes financiers liés à des problèmes de gouvernance ont continuellement fait parler de l’HRC : recours, retards, mauvaises surprises lors du chantier, évolution financière préoccupante et finalement en décembre 2019, un emprunt conclu en catimini. Tout cela a abouti à deux audits, dont nous avons déjà abondamment parlé. Le Contrôle cantonal des finances vaudois et l’Inspection des finances du canton du Valais se sont chargés de l’audit sur la situation financière, et BDO Visura de celui sur les aspects de gouvernance générale et opérationnelle. Tous deux ont rendu des rapports dont certaines conclusions et recommandations se rejoignent. Les analyses financières ont révélé des manquements dans l’organisation des suivis. Certains outils ont déjà été mis en place. Pourquoi dès lors vouloir mettre sur pied une CEP, alors que le canton estime aujourd’hui avoir pris toutes les mesures préconisées par les deux audits ? Si nous saluons le travail de ces derniers et les mesures déjà mises en place, il reste des questions sans réponse. Ainsi, le CEP pourra amener des éléments nécessaires afin que l’activité de cet hôpital repose sur des bases solides. Par exemple, on peut se demander pourquoi une organisation de cette taille n’a pas été nantie, dès le départ, d’entités financières compétentes et outils adéquats, afin d’assurer le suivi financier. Quand on entend qu’il n’y avait même pas de rapport trimestriel, voire semestriel, cela laisse tout de même songeur. Qui sont les responsables des mauvaises planifications financières qui concernent les antennes de Vevey et de Monthey, dont les travaux de rénovation étaient budgétés en 2012 à 21 millions et qui passent subitement à 40 millions ? Ces sites nous réservent encore bien des surprises. Quel sera l’impact de ces erreurs ? Faudra-t-il réorienter la planification hospitalière sur la Riviera ? Ces antennes feront l’objet d’une discussion et, par conséquent, le dossier HRC devra se rouvrir. Il est nécessaire d’apporter la lumière sur ces décisions, afin d’en tirer des enseignements et peut-être modifier des projections, qu’elles soient financières ou organisationnelles. Quel est l’impact des dysfonctionnements de la gouvernance sur les décisions prises, sur l’implication des médecins dans l’organisation, sur les restructurations du personnel ? Ces impacts ont-ils été mesurés ? Le rapport du Contrôle cantonal des finances relève également que le plan financier 2020-2026 repose sur des bases incertaines et que sa vraisemblance et sa représentation de l’activité sur le nouveau site ne peuvent être prises en compte. Nous sommes donc inquiets de la véracité des projections financières qui laissent miroiter un équilibre en 2026. De même, quel sera l’impact de la réduction du nombre de lits — moins 38 — et la diminution du nombre de lits en pédiatrie. Cette réduction de l’activité hospitalière nous obligera-t-elle aussi à revoir la planification financière et hospitalière ? Un article d’aujourd’hui, que vous avez certainement tous lu, évoque aussi des médecins démissionnaires qui auraient souhaité être entendus. Ceux-ci ont-ils été entendus dans le cadre des audits ? Je l’ignore.

Ces éléments nous inquiètent. Il est donc de notre devoir de faire toute la lumière sur le passé, afin d’en tirer les enseignements pour l’avenir. Nous comprenons qu’une CEP soit une surcharge momentanée, mais elle pourra s’appuyer sur les résultats de ces deux audits. Nous sommes persuadés que ce travail sera profitable à l’hôpital et permettra d’établir son fonctionnement sur des bases saines et solides pour le futur. Le personnel de l’HRC ainsi que la population attendent que toute la lumière soit faite, ce qui renforcera la confiance de tous dans cet hôpital. Le groupe vert’libéral soutient et réitère son soutien à cet hôpital, nécessaire pour la population du Chablais et de la Riviera. Il continuera à soutenir à la quasi-unanimité la requête d’instituer une CEP.

M. Vincent Keller (EP) —

Deux mois après le début de la pandémie COVID-19 en mai 2020, la droite de ce Grand Conseil — l’UDC, le PLR et les Vert’libéraux — déposait la requête pour l’établissement du plus gros outil dont le Parlement dispose : une CEP. Quelque part, il faut avoir un certain courage pour s’attaquer à la santé, à un hôpital en pleine première vague d’une pandémie que les scientifiques annonçaient déjà à l’époque comme particulièrement difficile à maîtriser — encore faut-il les écouter. Quel agenda ! Sur le fond, personne ne peut nier de grosses défaillances dans la gestion, notamment financière, de l’HRC ; certains de mes préopinants les ont d’ailleurs déjà rappelés. On ne peut nier une opacité préoccupante dans la gestion de l’HRC, la Commission des finances du premier pouvoir du canton et la Commission interparlementaire de contrôle n’ayant jamais été informées de l’état catastrophique des finances de l’hôpital. Il y a là une forme d’amateurisme et d’entre-soi qui ferait sourire si elle ne concernait pas un établissement de première importance fonctionnant avec de l’argent public et devant donc être contrôlé en tout temps de façon démocratique, par le Parlement. Cela, le groupe Ensemble à Gauche et POP l’a toujours demandé.

On ne peut nier non plus un gros problème d’agenda pour la droite de ce Parlement, quand elle demande dans sa requête que la CEP devra « analyser le dimensionnement de l’hôpital lui-même ». À la suite des événements majeurs qui ont mené à une situation très difficile, notamment avec la presque surcharge du système de santé, on ne peut que se réjouir que l’HRC soit bien dimensionné et ait pu, et continuera de pouvoir répondre à la demande. S’il avait été dimensionné plus grand, aurait-il pu prendre plus de patients COVID à charge ? Je rêve à voix haute pour l’UDC : aurait-il pu aider celles et ceux qui n’écoutent jamais les scientifiques et qui voulaient ancrer dans la loi la date d’hier pour la fin de la pandémie ? Au groupe Ensemble à Gauche et POP, nous sommes d’abord reconnaissants envers le personnel soignant de l’HRC, pour l’excellence de son travail depuis plus d’une année, dans des conditions qui forcent l’admiration. La moins bonne nouvelle pour elles et eux est que c’est loin d’être terminé. Pour le groupe Ensemble à Gauche et POP, la santé est un bien public qui ne devrait jamais être monétisé ! C’est un point majeur qui nous différencie de la droite de ce Parlement, pour qui la santé n’est qu’un service de plus à privatiser au maximum, un simple moyen de faire exploser les gains financiers déjà bien épais de quelques nantis. Nous pensons en premier lieu à l’humain et à son bien-être.

 

Parmi les signataires de la requête de la CEP figure un groupe politique parlementaire qui demande de transformer le vaisseau amiral de la santé du canton — le CHUV — en établissement autonome de droit public, avec les arguties habituelles des tenants de la santé réservée aux riches : « le privé ne fera jamais les erreurs du public », « on pourra optimiser les coûts », « tout cela coûtera moins cher », blablabla. Aujourd’hui, ce même groupe politique revendique une enquête parlementaire sur la très mauvaise gestion d’un établissement autonome de droit public. La semaine prochaine, aura-t-on droit à une nouvelle initiative du PLR pour la privatisation totale du CHUV ? Encore une fois, la droite du Parlement devra revoir son agenda et cesser de penser aux bénéfices à court terme. La droite devrait penser à faire passer l’humain et son bien-être avant le fric. Le groupe Ensemble à Gauche et POP n’a pas décidé si la CEP est l’outil adéquat pour répondre à ces questions. Il s’abstiendra donc sur l’entrée en matière de cette requête. Il demande toutefois que, si l’établissement d’une CEP est accepté par le Grand Conseil, tous les groupes politiques y soient représentés.     

M. Jérôme Christen (LIBRE) —

Comme ils en ont l’habitude, les députés Libres ont procédé à une pesée d’intérêts. Si certains d’entre nous avaient encore quelques doutes avant de se plonger dans ce dossier, avant d’avoir examiné de près les mesures prises par le Conseil d’Etat et la gouvernance de l’hôpital, les arguments des uns et des autres, nous n’en avons plus. S’il manquait un argument, on nous en a donné un en proposant une dernière manœuvre ¾ la modification de l’ordre du jour. Nous avions des doutes sur le fait que la démarche était de l’ordre de la politique politicienne, nous n’en avons plus. Or, nous avons toujours refusé d’entrer dans ce jeu purement partisan. Certains députés Libres avaient certes signé le texte de M. Jobin, mais les audits réalisés et les mesures prises nous ont convaincus que cette démarche n’avait plus de raison. Une CEP se justifie lorsqu’il y a la suspicion que quelqu’un a cherché à tirer un profit personnel d'une situation, qu’il y a eu volonté de nuire ou de graves erreurs à l’échelon politique. Or, tel n’est pas le cas. Certains d’entre nous et d’entre vous ont estimé que, dans le cadre du désastre de Beaulieu, il n’était pas nécessaire de faire la lumière sur ces manquements édifiants, alors que plusieurs dizaines de millions ont été engloutis dans la débâcle. Dans le cas présent, incomparable quant à sa gravité, vous voudriez partir à la chasse aux sorcières, voire aux grands sorciers. Allez comprendre… A la suite de deux audits, les dysfonctionnements ont été identifiés et des mesures prises pour les corriger. La gouvernance a été renouvelée. Il faut maintenant tourner la page pour éviter de compliquer davantage la tâche de celles et ceux qui s’emploient à redresser la situation. Comme le dit le rapport, l’ensemble des problèmes ont été identifiés et ils ont reçu une réponse appropriée. Nous pouvons encore avancer l’importance du coût de l’opération, pour un résultat potentiel que nous peinons à percevoir. Enfin, dernier argument et pas des moindres : alors que nos homologues valaisans étaient plus virulents que nous il y a une année, ils n’ont pas voulu de CEP. Des Valaisans qui ne veulent pas de CEP, vous conviendrez que c’est à priori hors du commun. Mais au fond, c’est logique, pour un bon résultat, on ne plante pas de CEP dans n’importe quel environnement. Tout cela conduit les Libres à refuser l’institution d’une CEP.

M. Jean-Luc Chollet (UDC) —

Lors du précédent débat, relatif à l’opportunité d’une CEP destinée à faire la lumière au sujet des « manco » importants de flux de trésorerie et à la situation préoccupante des finances de l’hôpital, j’avais voté en faveur de cette commission un peu dans l’émotion du moment. Avec le recul, je vois aujourd’hui les choses différemment et je souhaite vous les exposer aussi brièvement que possible.

En matière de bicantonalisation, nous avons deux précédents : la fusion Aigle-Monthey il y a vingt ans, ensuite Payerne-Estavayer. Dans les deux cas, il y a eu de grosses difficultés pour uniformiser deux cultures différentes sur des objets fondamentaux comme les salaires et les caisses de pensions, sans compter les ajustements du processus étatiques pour que l’argent arrive où il faut et quand il faut. Tout cela pour deux établissements et sans délocalisation. Avec l’HRC, c’est la fermeture de cinq sites et le regroupement d’hôpitaux régionaux sur un unique site employant 2'000 collaborateurs de cinquante nationalités, pour un budget qui dépasse les 300 millions. Si tout avait fonctionné sans incident, l’opération aurait relevé de la haute voltige, dans la synchronisation de la mise hors service des cinq hôpitaux, combinée à la montée en régime de Rennaz. Mais rien ne s’est passé comme prévu. Tout d’abord, il y a eu un recours lié aux marchés publics. Le recours a été accepté avec le rapport de minorité d’une des trois juges. Le jugement a été cassé ensuite par le Tribunal fédéral. Qu’importe, le mal était fait, comme toujours en pareil cas, à savoir une année de retard et un bon 10 % de coûts supplémentaires. En effet, reporter d’une année la fermeture de cinq hôpitaux n’est pas les prolonger tel quel en espérant qu’ils tiennent, mais les maintenir au top du top selon nos standards helvétiques jusqu’au dernier jour. Tout cela a un coût ! D’ailleurs, les cinq hôpitaux promis à la fermeture ont cessé les admissions environ trois semaines avant le déménagement. Cela aussi a un coût en matière de manque à gagner. Et voilà que, durant une période critique dans la mise en route et le rodage d’une telle structure, déboule le COVID avec son lot de bouleversements. Je ne m’étendrai pas sur l’effort énorme accompli par le CHUV et les hôpitaux de la FHV, mais dans le cas de Rennaz, la pandémie est survenue au moment où l’institution était dans un état de grande vulnérabilité pour les raisons que je viens de vous décrire. Or, que constatons-nous aujourd’hui ? Les signes avant-coureurs de gros investisseurs privés pour lesquels la Riviera représente un vivier potentiel de bonnes affaires. Non pas pour ce qu’ils coûtent, car les urgences chirurgicales, la néonatologie, la pédiatrie et les maladies rares resteront toujours à Rennaz, mais pour la médecine privée, entre autres esthétique. Bref, ce qui rapporte serait ou sera amputé de l’HRC, qui plongerait ou plongera dans les chiffres rouges, jusqu’à poser l’équation suivante : maintenir une structure à flot par une perfusion de fonds publics ou vendre l’HRC à un groupe international pour un prix dérisoire. Quel rapport avec une CEP ? A la lumière de ce que je viens de déclarer, je ne suis pas certain que les grands nettoyages d’une CEP conduiront automatiquement aux résultats escomptés. Mais il se pourrait au contraire qu’elles représentent une formidable opportunité pour l’HRC de démontrer chiffres et faits à l’appui qu’il n’a pas démérité et que, à ce jour, la garantie de l’Etat n’a pas été actionnée, pas plus d’ailleurs que les garanties foncières de certains des cinq hôpitaux historiques. Elle aurait comme seul mérite de clore un débat qui dure depuis trop longtemps et de permettre à l’institution un véritable départ au service d’un bassin de 80'000 patients potentiels. Je m’abstiendrai dans un premier temps, et réserve ma décision pour la suite. 

M. Nicolas Mattenberger (SOC) —

J’interviens principalement en qualité de député de la région, puisque j’habite La Tour-de-Peilz et suis utilisateur de cet hôpital — ce weekend encore, pour un enfant. C’est important pour notre région et je souhaite partager cela avec vous. Tout d’abord, on vient de nous dire aujourd’hui, pour justifier cette demande d’enquête parlementaire, qu’il y a lieu de lever les doutes et soupçons. On a pu entendre de la part de plusieurs députés que deux audits ont été menés — un de BDO Visura et un du Contrôle cantonal des finances — qui arrivent à la conclusion qu’il n’y a pas de malversation ; c’est l’élément indispensable. Alors quelles sont les questions si importantes à laquelle une CEP devrait répondre ? Mme Schaller a évoqué des questions liées à l’organisation : pourquoi n’y a-t-il pas de contrôles financiers ? Je partage sa remarque, mais cela a été détecté ; aujourd’hui on a pris des mesures pour que cela ne se passe plus ainsi. On nous parle aussi des sites de Vevey et du Valais, en construction. Là aussi, je suppose que le Conseil d’Etat et le Conseil d’établissement ont été en mesure d’étudier et de réévaluer ces questions, de revoir ce dont la région avait besoin.

Revenons sur l’historique. C’est vrai, la construction de cet hôpital unique avait été abordée il y a de très nombreuses années — avant que je ne m’établisse dans cette région ; notamment le site de Sully avait été abandonné par un vote populaire, notamment à La Tour-de-Peilz. On a mis énormément de temps à discuter. Il a fallu discuter avec différentes entités, des communes et un autre canton pour choisir ce site. N’oublions pas que notre Grand Conseil, à l’époque, a été consulté et a pu s’exprimer sur ce choix ; j’ai moi-même fait partie de la commission qui avait rapporté sur cette question. Nombre de points avaient été abordés, notamment les transports publics par rapport au choix du site. On avait aussi parlé du dimensionnement de l’hôpital — était-il assez grand ? Mais notre Grand Conseil et les commissions qui se sont prononcées l’ont accepté, en prenant des risques. En effet, avec un projet de cette envergure, autant d’argent investi et le temps qui passe avec des procédures judiciaires retardant les constructions, il y a un certain risque financier. Mais tout cela a été identifié par le travail des deux entités mandatées par les deux Conseils d’Etat vaudois et valaisan. Franchement, je ne vois pas ce que vous essayez de trouver avec cette CEP. Vous nous dites que c’est pour lever les doutes et les soupçons, mais je vais vous dire ce qu’il se passe dans ma région : comme l’a dit Mme Jaccoud, cela génère des doutes et des soupçons sur la qualité des soins, sur la manière dont les patients sont accueillis à l’hôpital. Cela va s’inscrire dans la tête des gens, alors que dans notre région, nous avons besoin de confiance dans l’hôpital et dans les soins qui y sont donnés. Je l’ai dit : je suis utilisateur de cet hôpital et de son service d’urgence pour mes enfants, mon épouse ou moi-même. Chaque fois, j’ai été bien reçu par un personnel et des médecins de qualité. J’en ai assez d’entendre certains spécialistes maintenant dans des structures privées — qui ponctionnent des patients pour les opérations qui rapportent — savonner la planche de cet hôpital en disant : « vous serez mal soignés ; il y a une mauvaise image de cet hôpital ». C’est ce que l’on vit quotidiennement dans ma région.

Aujourd’hui, cet hôpital et son personnel ont besoin de sérénité, comme la direction, avec son futur directeur général qui, je crois, a réussi à le démontrer, puisqu’il a repris les rênes de l’Hôpital de Nant qui connaissait aussi une période assez difficile et a réussi à rétablir cette confiance de la région envers Nant. Il faut laisser à ces personnes la possibilité de travailler et de progresser. En effet, il faut surveiller cela, mais comme on l’a entendu tout à l’heure, notre Grand Conseil est armé pour cela avec la Commission de gestion, la Commission des finances et la Commission interparlementaire. Que nous donnions à ces commissions le rôle de faire ce suivi, de s’assurer que les mesures d’assainissement avancent, et de pouvoir intervenir si ce n’est pas le cas. Voilà ce que nous devons faire, mais en aucun cas paralyser l’hôpital, prendre le temps de personnes qui doivent construire et aller de l’avant dans cet hôpital pour répondre à une CEP qui ne nous amènera pas grand-chose.

 

Enfin, député depuis longtemps, j’avais dû, à l’époque, me prononcer sur la CEP sur la Banque cantonale vaudoise (BCV). On parlait de malversations, de choses graves qui avaient des implications pénales, avec des montants énormes, si on prend en considération ce qui nous intéresse aujourd’hui ou ce qu’on peut reprocher à ce qu’il s’est passé à l’HRC. Cette CEP avait pu fonctionner, car il y avait un consensus au sein du Grand Conseil pour sa création ; il n’y avait pas le partage que l’on connaît aujourd’hui. Nous avons des blocs ; même au Bureau, la décision a été très partagée. Je ne vois pas comment cette CEP pourra travailler en toute sérénité, avec de telles divergences au sein du Parlement. Nous n’avions pas connu cela dans le cadre de la CEP sur la BCV, ni très certainement dans celle sur les EMS. Pour toutes ces raisons, pour permettre à la région dans laquelle j’habite de disposer d’un hôpital de qualité qui ne se fait pas prendre des patients par des structures privées au motif que des doutes planent sur la qualité de ces soins — car c’est ce que l’on va retenir — je vous invite à refuser l’instauration de cette CEP.

M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) —

Rien n’est pire que le doute, quel que soit l’événement pour lequel il se manifeste ! Le doute est synonyme de perte de confiance, de limitation de l’engagement, de soucis récurrents, de questions en suspens, d’incertitudes et de sentiments d’impuissance face à une situation qui nous échappe. Le doute peut être à l’origine de climat de confiance rompu, de collaborations ralenties. Bref, le doute est une chose négative à éviter à tout prix. La population, qui a participé au travers de ses impôts à la construction et à la mise en œuvre de l’HRC, a droit à autre chose qu’un climat où le doute règne en roi. Nous devons procéder à la levée de ce doute, pour que l’avenir s’éclaircisse, et pour que le personnel et les dirigeants de cet établissement puissent continuer à travailler dans des conditions normales et acceptables. C’est pourquoi, même si la CEP peut paraître disproportionnée pour obtenir des réponses aux questions et aider à corriger les éléments inadéquats au bon fonctionnement de ce magnifique établissement, elle constitue l’outil le plus efficace pour lever ce doute au plus vite et ainsi couper court aux polémiques. Je vous encourage vivement à voter en faveur de la mise sur pied de la CEP pour que nous puissions avancer, éviter des empoignades politiques inutiles dans les années à venir et surtout instaurer un climat de confiance pour les personnes qui travaillent et qui gagnent leur vie sur ce site.

M. Gérard Mojon (PLR) —

Je me permets d’apporter quelques précisions. Tout d’abord, concernant l'ampleur de l’objet, on nous dit « oui, sur un autre cas, on parlait de quelques dizaines de millions ; là, on en est loin ». Je suis d’accord sur le fait qu’on en est loin, mais pas forcément dans le sens où le pensait mon préopinant. A l’origine, l’HRC aurait dû « coûter » — entre guillemets, car il s’agissait de garanties à donner — 315 millions ; c’est le montant du projet de décret de base. Il en coûtera finalement, en termes de garantie, plus de 400 millions. S’y ajoutent 40 millions de cautionnements en garanties de fonds de roulement qui devront porter jusqu’à fin 2036 et s’y ajouteront, si on accepte le nouveau projet de convention, des prestations d’intérêt général (PIG) portant sur quinte ans sur un montant global de 125 millions. D’un montant initial, toutes formes confondues de soutien financier, de 315 millions, on passe à 565 millions. Vous aurez calculé la différence : on nous demande 250 millions de plus. Pour moi, le montant est clairement significatif et mérite qu’on s’y arrête. Il mérite en tout cas un certain suivi par la Commission des finances. Certains de mes préopinants disent qu’ils font confiance à la Commission des finances dans cette fonction ; je les en remercie, mais pour que la Commission des finances puisse faire son travail correctement, elle doit savoir exactement de quoi on parle. On l’a dit à juste titre : la Commission des finances sera saisie de manière semestrielle du suivi du dossier financier de l’HRC et du retour à l’équilibre. Mais comment voulez-vous que votre Commission des finances puisse assurer le suivi si elle ne sait pas où étaient les problèmes à l’origine — c’est tout de même difficile ! D’autant qu’à l’origine, les gens qui avaient effectué les calculs n’étaient certainement pas idiots. Ils ont travaillé de manière consciencieuse, au plus près de leur conscience et de leurs connaissances. Et malgré tout, on constate de grands écarts. Alors pour un suivi, savoir que certains éléments ont été sous-estimés ne me suffit pas. Je dois en savoir beaucoup plus, je dois disposer de faits et de réponses concrètes. Pour ma part, c’est cela que je veux obtenir avec une CEP.

Evidemment, on me dira « on sait d’où viennent les surcoûts, il n’y a pas de problème ; les coûts de construction ont été plus élevés, il y a eu des choix supplémentaires. Tout cela explique la différence. » En matière d’investissement, c’est vrai. Mais en matière d’exploitation, au départ, on nous a dit que l’HRC devait être à peu près à l’équilibre. C’est normal pour une entreprise. Elle doit être à l’équilibre, parce qu’elle doit générer elle-même de quoi payer le service de sa dette. Qu’en est-il ? 2019 : 18 millions de pertes ; 2020 : on nous annonce plus de 20 millions de pertes. Mais si on ne nous l’explique pas clairement, si on ne peut pas regarder clairement d’où viennent des écarts aussi importants en matière d'exploitation, comment voulez-vous apprécier le suivi que l’on devra faire ? De plus, on entend : « il y a eu des informations à la Commission des finances et à la Commission de gestion. » Oui, il y a eu des informations : de la part de la Commission de gestion, on a clairement entendu que des gens s’y sont rendus et, encore au début de cette année, on leur a dit « tout va bien ! » A la Commission des finances, on a aussi eu une présentation de la direction de l’HRC ; ils sont venus nous présenter leurs chiffres, projections, etc. Et même les professionnels de la Commission des finances et les financiers du domaine ont été convaincus. Tout ceci paraissait absolument clair pour nous. Pourtant cela s’est révélé clairement faux. Alors si l’on n’a pas la possibilité de creuser le problème, de savoir où étaient les difficultés, on va au-devant de problèmes.

Je me permets de terminer sur le problème de la sérénité. Tout le monde veut un retour de l’hôpital à la sérénité. En effet, c’est absolument indispensable. Mais comment retrouver la sérénité si d’énormes points d’interrogation restent en suspens ? Ce n’est tout simplement pas possible. On a cité un cas, celui de la BCV. Pour moi, ce cas est exemplaire. On dit « il y a un risque d’image, un risque de perturber le fonctionnement, etc. » La BCV a eu sa CEP et elle est aujourd’hui parfaitement sereine. Enormément d’entreprises de ce canton aimeraient bénéficier de l’image qu’a la BCV à ce jour. Selon moi, pour l’ensemble de ces raisons, la constitution d’une CEP est nécessaire.

M. Olivier Gfeller (SOC) —

Mon intervention sera moins technique, mais plus régionale, puisque j’habite dans le bassin des patients potentiels de l’HRC. Je rappelle la situation antécédente sur la Riviera : on avait un hôpital multisite ; il fallait par exemple se rendre à Montreux pour une fracture, mais à Vevey pour une pneumonie. Pour avoir subi cette situation, je vous assure que cela n’avait rien d’anodin de se demander dans l’urgence où aller lorsqu’on est blessé ou malade. Désormais, il y a un site unique, c’est une bonne chose. Rassembler les multiples établissements sur un seul site était une prouesse. Les écueils étaient nombreux. J’ai eu l’occasion de me rendre à l’HRC, notamment pour y amener mes parents faire le vaccin COVID-19. La prise en charge était excellente, attentionnée et humaine. J’ai été soulagé de voir mes parents aussi bien pris en charge. J’ai ressenti cet immense apaisement que l’on éprouve quand les personnes qu’on aime se sentent rassurées, en confiance et bien soignées. C’est important pour tous les habitants de la région d’avoir confiance en leur hôpital. C’est important surtout pour les plus fragiles, les plus âgés, ainsi que leurs proches. Certains veulent continuer d’instrumentaliser les problèmes rencontrés, mais sur la Riviera la plupart des gens sont passés petit à petit à autre chose. Ils apprivoisent désormais cette nouvelle institution et apprennent à lui faire confiance. Ils se lassent des attaques contre leur hôpital. Un énorme travail a déjà été effectué par les commissions concernées pour tirer la situation au clair. La CEP n’apportera rien de plus et prolongera inutilement une période de défiance due aux problèmes de mise en œuvre. Une CEP continuera d’instiller le doute, au contraire de ce que pensent certains. Laissons désormais une région entière nouer sereinement une relation de confiance avec son nouvel hôpital. 

M. Stéphane Masson (PLR) —

Plus on plaide contre la CEP, plus on a le sentiment qu’il y a anguille sous roche. Il faut arrêter de diaboliser la démarche. Il ne s’agit pas forcément de couper des têtes, madame Jaccoud, ni forcément d’enquêter à charge sur le passé, monsieur Venizelos. Il suffit de s’en tenir à l’article de la Loi sur le Grand Conseil (LGC) selon lequel cette commission a pour but, notamment, de réunir des moyens d’appréciation et d’exprimer des propositions. Si les deux rapports d’audit n’ont pas suffi, comme le relève Mme Schaller, on réunira d’autres moyens d’appréciation et on exprimera des propositions dans un esprit constructif de façon à améliorer la situation. Eu égard aux enjeux présents et pour reprendre le terme de la loi, à savoir si des événements d’une grande portée l’exigent, ce n’est pas un luxe de voter en faveur de l’instauration de cette CEP. Je vous invite à en faire de même. 

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Dans un premier temps, je souhaite répondre à M. Gfeller et lui dire — je pense représenter l’ensemble de mon groupe, de l’UDC et des Vert’libéraux — qu’à aucun moment on ne met en doute la qualité des soins effectués dans cet établissement. On salue la qualité des travaux réalisés par les infirmières, les infirmiers, le personnel soignant, les médecins, tous les collaborateurs et collaboratrices qui travaillent dans cet établissement. Pour preuve, et nous l’avons déjà démontré, en mai 2020, lorsqu’avec mes deux collègues Baehler Bech et Mojon, nous nous sommes réunis dans une séance de crise pour pouvoir libérer 40 millions de francs, pour permettre de payer les salaires à fin juin, car ils n’étaient pas assurés — c’est ce que nous avaient dit les cadres et collaborateurs de la Direction générale de la santé du canton. Ces 40 millions ont été libérés dans ce plénum, en urgence. On a travaillé jour et nuit pour être capable de réaliser ce site, tant au niveau de la Commission des finances que du Parlement. On a traité le texte en premier et deuxième débat sur une seule séance. C’est bien la preuve qu’à aucun moment on ne veut mettre en doute cet hôpital. Pour nous, l’implantation est là et, au contraire, on doit assurer la qualité des soins et la continuité de cet établissement.

Quand j’entends aujourd’hui des gens parler de la BCV ‑ je déclare mes intérêts comme collaborateur de la BCV depuis 1992. J’ai donc vécu toutes les situations de fusion et la Commission d’enquête parlementaire. À aucun moment, je n’ai souffert — puisque la CEP a été mise en place par nos prédécesseurs, apparemment M. Mattenberger était présent, peut-être d’autres aussi — en tant que collaborateur de la banque d’une enquête parlementaire ; c’est la première. Une situation a été mise en place, des considérations ont été prises. Une deuxième commission parlementaire a été mise en place, concernant les EMS. La considération principale, dans le cadre de ces EMS, c’est la constitution du Contrôle interdisciplinaire des visites en établissements sanitaires et sociaux (CIVESS) et des mesures de contrôle. Aujourd’hui, je pense que personne dans ce Parlement ne conteste ce CIVESS, qui fait des contrôles et qui permet d’améliorer la qualité pour les patients, les résidentes et les résidents de ces EMS. Selon moi, c’était une réussite. Je rappelle les propos tenus par nos collègues : « on a plus de 90 millions de dépassement », « on a un budget 2019 qui était prévu à moins 6 millions ; 18 millions de pertes, cela fait plus de 12 millions », « une situation de remise à l’équilibre en 2026 », « une pharmacie fait une perte de 2 millions, qui est englobée dans cet aspect » — je pense que vous avez souvent vu des pharmacies faire faillite — « une collaboratrice a signé pour 20 millions de crédit, sans garantie, dans un établissement hors du canton de Vaud », « un leasing de 10 millions apparaît, dans la dernière discussion que nous avons eu à la Commission des finances », « un rapport d’une vingtaine de pages a été réalisé par la fiduciaire BDO, qui cherche à améliorer et à savoir quelles sont les pistes pour améliorer l’efficience de cet hôpital », « le contrôle cantonal des finances s’est borné à parler de la situation des coûts de l’hôpital : les 90 millions de dépassement » – je rappelle que l’on a 20 millions de dépassement sur les deux antennes, de 20 à 40 millions. Je pense que, en plus du rapport de BDO et du Contrôle cantonal des finances (CCF), un rapport sous l’angle politique est nécessaire, parce que dans peu de temps, nous aurons d’autres hôpitaux à rénover, notamment dans le Nord vaudois. C’est l’occasion, dans le cadre de cette CEP, d’éviter de répéter les erreurs du passé sur les autres projets, qui seront aussi conséquents. C’est aussi l’occasion de voir ce qu’il s’est passé au niveau de la planification financière. A-t-on quelque chose de solide dans ce canton ? Doit-on modifier cette planification ? C’est l’occasion de pouvoir réaliser cet aspect. À aucun moment, l’hôpital ne sera l’otage de positions politiques. J’insiste : à aucun moment. On doit prendre l’engagement : à aucun moment, nous n’allons rompre la confiance avec le personnel soignant, de l’apprenti au directeur général. Nous devons prendre cet engagement aujourd’hui.

J’aimerais revenir sur les propos de M. Chollet. Il y a 500 millions de dettes sur cet hôpital. Je peux vous assurer que, même si vous le vendez à 1 franc, il n’y a pas une seule entreprise qui va acquérir cet hôpital, parce que les déficits sont prévus sur les prochaines années. En clair, si vous prenez aujourd’hui cet hôpital pour 1 franc, dans 5 ans vous aurez 30 ou 40 millions d’endettement. C’est garanti sur facture ; il n’y a même pas besoin d’en discuter. La garantie de l’Etat ne sera à aucun moment actionnée, puisque dans la deuxième partie de l’ordre du jour de cet après-midi, on va traiter le projet de décret pour soutenir et assurer la pérennité de ces établissements. Pour moi, cela est assez clair. Aujourd’hui, dans cette CEP, cela nous permettra de voir quelles sont les considérations. Mais dans le fond, les considérations, sous l’angle politique… il y a peut-être des erreurs qui viennent du Conseil d’Etat ou de l’administration. Si c’est le cas, que va-t-il se passer ? Il faudra payer et désendetter l’établissement de l’hôpital. On le fait assez régulièrement dans le cadre du bouclement des comptes pour les EMS. Certes, quand on rembourse un EMS, cela change les donnes dans le cadre du budget du Département de la santé et de l’action sociale. Mais s’il faut passer une fois, car on considère que l’on a fait des erreurs au niveau du Gouvernement et que tout n’a pas été communiqué correctement, je pense que c’est vraiment l’occasion de payer la dette. Je vous propose d’accepter cette CEP, qui mettra vraiment à jour l’ensemble de la situation.           

M. Stéphane Montangero (SOC) —

Je voudrais en premier lieu remercier l’ensemble du personnel du HRC qui fait un travail remarquable, malgré les tempêtes médiatiques successives, et qui souhaite pouvoir au plus vite se concentrer sur sa si noble mission, encore plus importante depuis le début de la pandémie, à savoir prendre soin de notre santé, à nous toutes et tous. Rien que pour elles et eux, pour leur amener la sérénité à laquelle elles et ils ont droit, ne pas mettre sur pied cette commission d’enquête parlementaire ferait déjà pleinement sens. Mais ce n’est pas le seul motif, loin s’en faut. Je voudrais ainsi apporter deux focus qui me semblent importants avant de prendre une telle décision qui est l’instauration ou non d’une commission d’enquête parlementaire, l’ultima ratio de notre système parlementaire.

Je voudrais tout d’abord revenir sur l’outil et sa pertinence. Notre collègue Jessica Jaccoud a bien rappelé les motifs et les montants qui étaient en jeu pour la CEP concernant la BCV. Nous sommes, dans le présent cas de figure, à des années-lumière de ce qui prévalait à l’époque de l’instauration de la CEP BCV, non seulement par les montants, mais aussi par l’implication des membres du Conseil d’Etat. La commission d’enquête parlementaire ne saurait être un outil parlementaire à utiliser à la légère. Non, nos institutions valent bien mieux que cela. Nous avons, en effet, des commissions de surveillance — la Commission de gestion, la Commission interparlementaire et la Commission des finances — qui, de surcroît, peuvent, si besoin est, être épaulées par des mandats externes, apportant ainsi des compétences et des ressources supplémentaires à nos collègues, si elles venaient à leur manquer. Ces deux commissions — la Commission de gestion et la Commission des finances — font un travail remarquable. Et elles sont parfaitement habilitées et outillées, par exemple sous forme de délégations conjointes, pour examiner les éventuels points encore à creuser, suite aux audits et au rapport du Conseil d’Etat, qui, pour ma part, me satisfait grandement. De même pour la CIC qui peut auditionner toute personne qui lui paraît idoine d’entendre.

Relevons encore, toujours au plan institutionnel, quelques aspects problématiques dans le cas de figure qui nous occupe. Tout d’abord, l’HRC est une institution concernant deux cantons : le nôtre et le Valais. Or, il n’aura échappé à personne, comme cela est mentionné en page 4 du rapport du Bureau du Grand Conseil, que nos homologues du Grand Conseil valaisan se sont prononcés contre l’instauration d’une CEP. Dans le cas où la majorité absolue de notre plénum décidait de la mise sur pied de cette CEP, le périmètre d’investigation serait, de toute manière, limité, ce d’autant plus que, malgré la puissance d’investigation d’une CEP sur sol vaudois, cette puissance s’arrête aux bords du Rhône. Nous voyons mal comment certains hautes ou hauts fonctionnaires valaisans, voire des membres du Conseil d’Etat valaisan, pourraient être « convoqués » par la CEP vaudoise et surtout répondre favorablement à ladite convocation. Cela est pour le moins gênant, si l’on prétend vouloir faire toute la lumière, que de savoir que, au vu de la clé de répartition des coûts, au moins 25 % restera inexploré, puisqu’extérieurs à la juridiction vaudoise. Et si c’est l’angle politique qui est interrogé, c’est la moitié, soit 50 %, qui manquerait alors. Il faut ainsi admettre que les audits commandités par les deux Conseils d’Etat — le nôtre et celui du Valais — ont bénéficié de conditions d’investigation que la CEP vaudoise ne pourra avoir.

Au vu de ce qui précède, nous pouvons dire que la mise sur pied d’une CEP, dans le présent cas de figure, équivaut un peu à prendre un bazooka pour tuer une mouche. Non seulement, on n’est pas certain de toucher la cible, mais surtout, on est quasi sûr de faire d’énormes dégâts collatéraux. Une telle décision aurait des conséquences très importantes sur l’HRC, sur son personnel, sa motivation, sur les futures embauches dans un secteur malmené et hyper concurrentiel, mais aussi et surtout sur la confiance des potentiels patients. Car qui dit « commission d’enquête parlementaire » dit, pour la plupart de nos concitoyennes et concitoyens, de graves problèmes à l’hôpital, et qu’il vaut sans doute mieux ne pas s’y faire soigner. C’est ce qui m’amène au 2e point de focus que je voulais aborder : le futur de l’HRC et sa réputation.

Les deux Conseils d’Etat ont pris le taureau par les cornes, depuis la découverte des problèmes mentionnés dans le texte déposé de la requête de CEP. De nombreux et impressionnants travaux ont été effectués et publiés rapidement, les deux Conseils d’Etat jouant la carte de la transparence. Ainsi, outre les audits et les changements massifs au Conseil d’établissement, tout comme une nouvelle convention intercantonale, il y a surtout eu les départs de l’ancien directeur et de l’ancienne directrice financière. Il y a eu aussi l’engagement de M. Stefan Stefaniak, pour accompagner la nouvelle direction de l’HRC, afin de retrouver au plus vite le chemin de l’équilibre financier. C’est le fameux Plan de retour à l’équilibre financier (PREF). Celui-ci prévoit, avec les mesures identifiées, un équilibre d'exploitation pour 2026. Mais la tenue de cette échéance est liée, d’une part, au fait que l’ensemble des ressources de l’HRC soit consacré à cet effort et, d’autre part, que la confiance de la patientèle soit restaurée, car l’hôpital n’est plus affecté par une image négative. Or, en cas d’instauration d’une CEP, les principaux éléments moteurs de la mise en œuvre du PREF seront accaparés par la CEP, pour répondre aux sollicitations en tous genres. Quant à la construction d’une image positive, ou mieux d’une bonne réputation, comme nous avons pu le voir récemment avec un positionnement intelligent de l’HRC dans les réponses à la crise COVID, que ce soit par la vaccination ou la mise sur pied de consultations pour les COVID longs, tous ces efforts seront rapidement réduits à néant en cas de vote positif ce jour. Car que vous le vouliez ou non, l’instauration d’une CEP retardera d’autant le PREF. Cela veut dire qu’en plus des 500'000 à 1 million que coûteront le fonctionnement et l’instauration de la CEP en tant que telle, il faudra y ajouter la perte préprogrammée due aux retards occasionnés sur le PREF. Et là, cette perte se chiffrera en dizaines de millions.

M. Stefaniak, dans la présentation qu’il a faite aux députées et députés intéressés, le 2 mars dernier, a insisté sur le choix, qui est le nôtre ce jour :

1) mettre une énergie énorme pour examiner le passé encore plus à fond que ne l’ont fait les deux audits, ou 

2) concentrer les forces et l’énergie pour assurer à cet hôpital le futur qu’il mérite et le ramener au plus vite dans les chiffres noirs.

Car nous avons ici un cas de confiance : confiance à restaurer auprès du grand public, confiance à témoigner au personnel de l’hôpital, confiance dans nos institutions, à commencer par nos commissions de surveillance, confiance de la patientèle, ô combien nécessaire pour tout établissement hospitalier, encore davantage sans doute pour cet hôpital né de la fusion de cinq établissements.

« Commission d’enquête parlementaire » : un terme qui résonne comme un énorme coup de tonnerre dans l’ensemble des médias et qui ferait que M. et Mme Tout-le-Monde mélangeraient allégrement tout, à commencer à propos des raisons mêmes de cette CEP, quoi qu’en disent certains aujourd’hui. Et le doute s’insinuant, la confiance en cet hôpital ne peut être construite jusqu’à la fin de la procédure, voire des mois après, vu les effets retards d’une telle procédure. Car, nous le savons toutes et tous : il faut des années pour construire une bonne réputation, et il suffit de quelques secondes pour réduire le tout à néant. Ainsi, de nombreuses personnes renonceraient sans doute à venir se faire soigner à l’HRC. Cette perte de patientèle viendrait s’ajouter aux retards susmentionnés, et le retour à l’équilibre financier s’en trouverait reporté encore davantage, péjorant le bilan financier, alors qu’il y aurait moyen de le pallier. Voter la mise sur pied de la CEP HRC, c’est assumer une perte par dizaine de millions.

Je reviens à mes propos introductifs, en parlant du personnel de l’HRC. Celui-ci ne veut plus être associé à de possibles problèmes auxquels il ne peut strictement rien, et d’autant moins que les personnes qui portaient une responsabilité lourde ont démissionné. Ce personnel espère pouvoir lire, entendre et voir, à chaque fois que l’on parle de leur hôpital, non pas une énième fois les problèmes du passé, mais bien des mentions positives, de pratiques volontaristes, permettant à l’ensemble de notre société d’aller vers un avenir plus serein. Il escompte être reconnu pour l’ensemble de son implication envers notre société.

En conclusion, le vote d’une CEP coûterait extrêmement cher aux contribuables vaudois, que ce soit par le fonctionnement de celle-ci, mais surtout dans les retards occasionnés sur la remise à flot de l’HRC. Cela se chiffrera sans doute en dizaines de millions, comme expliqué précédemment. Et pour quels résultats potentiels ? Lever les doutes qui pourraient éventuellement rester d’une quelconque culpabilité de personnes qui ont déjà été remplacées ? Ce n’est ni sérieux ni responsable.  Le rapport du Conseil d’Etat et les deux audits donnent les réponses à quasiment toutes les questions et tous les énormes points d’interrogation mentionnés jusqu’ici dans les débats par certains de nos collègues.

Dès lors, j’en appelle à votre bon sens, à vous demander où se trouve, dans le présent cas de figure, le principe de proportionnalité. Je rappelle que, lors des précédentes CEP, toutes les autorités s’étaient largement ralliées à la mise sur pied d’une CEP. Cela était le fait de devoir restaurer la confiance entre l’Etat et sa population, comme pour les comptes truqués, les EMS ou la BCV. Au plan fédéral, il en est de même pour les CEP ; pensons à l’affaire des Mirages ou à celle des fiches. Ici, rien de tel. Alors, je vous invite à ne pas voter l’instauration de cette CEP sur l’HRC, qui mérite bien mieux, et à mettre notre énergie et nos moyens à donner un vrai futur à l’HRC et, bien entendu, à accompagner institutionnellement le PREF de l’hôpital.

Mme Graziella Schaller (V'L) —

J’aimerais revenir sur quelque chose qui a été évoqué par M. Montangero et, plus tôt, par M. Christen. Cela concerne le Valais et le choix de faire ou non une CEP. En effet, au mois de juin de l’année passée, le Valais a choisi de ne pas faire de CEP, mais c’était en attendant le résultat des deux audits. Il a clairement été voté au Grand Conseil valaisan un postulat demandant de créer une CEP intercantonale, qui a été accepté. De même, leur plénum s’était exprimé en disant que, si le canton de Vaud faisait quelque chose, le Valais s’y associerait. Ce n’est pas tout à fait ce qui a été dit ; il a été dit que le Valais ne voulait pas de cette CEP. Ce n’est pas ce que j’ai compris, mais peut-être y a-t-il de nouvelles informations que j’ignore, depuis le mois de juin. Dans tous les cas, il n’est pas vrai de dire que le Valais ne veut pas de CEP. Il voulait simplement attendre le résultat des audits, mais souhaite lui aussi que toute la lumière soit faite, et ce, en collaboration avec le canton de Vaud.

M. Jean-Marc Nicolet —

Régional de l’étape, potentiel utilisateur de l’HRC et, de surcroît, membre de la Commission interparlementaire de contrôle, j’aimerais témoigner du fait que cette nouvelle institution, au service d’un bassin de quelque 180'000 habitants, de la Riviera vaudoise au Chablais vaudois et valaisan, a surtout et avant tout besoin d’un capital de confiance et d’une image positive retrouvée, de la part de nous, politiques, de la part de la population de l’Est vaudois et du Bas-Valais ainsi que de l’ensemble des collaboratrices et collaborateurs de l’institution. A contrario de ce que viennent d’affirmer nos collègues Carrard et Schaller, l’institution d’une CEP ne contribuera en rien à renforcer la confiance dans l’institution de l’hôpital et encore moins à redorer son image. C’est vraiment ignorer, hélas, la réalité du terrain dans l’Est de notre canton.

Je vous rappelle que réunir cinq hôpitaux de province devenus vétustes et quelque 2'000 collaborateurs sous un seul toit, s’implanter sur le site de Rennaz, à mi-distance de Vevey et de Monthey, et changer les habitudes de la population constituent un énorme défi pour lequel il faut du temps, de la confiance et des moyens financiers — comme cela a été relevé par M. Jean-Luc Chollet. Du temps, oui, car l’opération a été particulièrement chronophage, avec une vingtaine d’années de tergiversation autour du choix d’un site acceptable pour les deux cantons, à quoi il faut ajouter une dizaine d’années pour la construction et, enfin, l’ouverture du nouvel hôpital en automne 2019. De la confiance, il en faut de la part des quelque 180'000 habitants concernés, après tant d’attente, d’atermoiements, après le faux départ de 2020, et alors que la pandémie n’a vraiment rien fait pour arranger les choses. Cela alors que les bons risques, comme aiment à le dire les assureurs, à savoir les activités rémunératrices telles que l’orthopédie, les dialyses et l’imagerie médicale se sont privatisées à toute vitesse sur la Riviera. Des moyens financiers, il en faut aussi et encore, pour le long démarrage d’une entreprise de cette envergure — comme pour n’importe quelle nouvelle entreprise, sans doute. Le rythme idéal de croisière ne sera vraisemblablement atteint que dans 5 à 10 ans, à condition surtout que toute la population s’approprie l’HRC et que l’on se mette à parler de cette institution, dans les journaux et ailleurs, pour la qualité de ses urgences, de sa prise en charge, de ses soins et de ses soignants. Il faut que cesse, désormais, l’entreprise de dénigrement, que dis-je, de démolition, dont l’HRC est victime depuis trop longtemps, sacrifié sur l’autel du doute et peut-être de certains règlements de compte politiques. Le nouvel hôpital a besoin maintenant de sortir des soins intensifs, tout en restant sous perfusion, comme d’autres hôpitaux régionaux, le temps qu’il faudra, au nom du service à la population. Pour l’HRC, il s’agit de retrouver un peu, beaucoup de sérénité et, surtout, la pleine confiance de la population, afin que cette dernière puisse se l’approprier, afin qu’il trouve ses marques, comme l’ont souligné fort à propos nos collègues Mattenberger, Gfeller et Montangero. L’institution d’une CEP tomberait donc au plus mauvais moment et ne contribuerait en tout cas pas à rassurer la population de l’Est vaudois et du Bas-Valais. Une telle décision serait assurément contreproductive, une fausse bonne idée, n’en déplaise à notre collègue Jean-Rémy Chevalley. Une CEP ne fera que retarder un bon redémarrage de l’institution, à l’heure où le conseil d’établissement et la direction de l’HRC ont été renouvelés en profondeur après les deux rapports d’audit dont nous avons parlé. Vous m’avez compris : il s’agit de refuser cette proposition aux allures d’enterrement de première classe. Et moi qui croyais qu’on ne tirait pas sur les ambulances… A contrario, il s’agit pour notre Parlement de redonner un capital de confiance à l’hôpital et un signal positif à la population, car tous deux n’attendent que cela de notre part.

M. Grégory Devaud (PLR) —

En réponse à l’un de mes préopinants qui se posait la question de savoir si on devait rester dans le passé ou regarder vers l’avenir, j’ai envie de répondre que nous pouvons faire les deux. Aujourd’hui, il s’agit de boucler la boucle, de quittancer le passé pour mieux construire l’avenir. Je suis aussi de la région, j’y suis depuis toujours. J’entends les gens et n’ai manifestement pas les mêmes échos qu’un certain nombre d’entre vous. Il y a une confiance en l’hôpital de Rennaz. Il n’y a pas de discussion. Dès le moment où nous devons faire un vaccin, procéder à une intervention ou aller aux urgences, on va à Rennaz. C’est désormais inscrit dans l’opinion publique, dans la volonté des habitantes et des habitants de toute une région. Il est clair qu’il y a une volonté de sérénité ; nous ne remettons pas cela en doute. Il n’y a ni attaque, ni défiance, ni manœuvre politique, ni menace ; la sérénité est aussi notre volonté aujourd’hui pour aller de l’avant, mais les échos des Chablaisiennes et des Chablaisiens font aussi état de certaines inquiétudes sur l’efficience pérenne, sur la pérennité de l’établissement, et ils ont besoin d’avoir un peu d’espoir. Nous relevons la qualité du travail du personnel soignant ; c’est indéniable ! Nous relevons la qualité des soins et des services, la qualité des infrastructures, la qualité du site. En revanche, si de nombreux acteurs ont déjà été actifs dans cette opération — la Commission des finances, la Commission de gestion, la Commission interparlementaire, la Commission de projets ‑ dont j’avais eu l’honneur d’être membre à l’époque, la commission sur cet objet, les audits, le Contrôle cantonal des finances, BDO, le Conseil d’Etat — certaines modifications de la gouvernance ont été apportées, certaines adaptations des investissements sont aussi projetées. Néanmoins, il reste un certain nombre de zones d’ombre sur le fonctionnement même de l’exploitation et sur cette volonté de durabilité d’un établissement dans le paysage hospitalier vaudois, chablaisien en particulier.

A ceux qui souhaitent un avenir plus durable, un avenir plus démocratique, j’ai envie de dire qu’il manque peut-être aujourd’hui un maillon de la chaîne — évidemment, une métaphore en lien avec le vélo me plaît particulièrement. Ce maillon qui nous manque, c’est la Commission d’enquête parlementaire, un maillon qui est simplement là pour faire tourner rond — comme une roue de vélo — cet hôpital, et plus longtemps. Mardi dernier, je citais Einstein avec la bicyclette, avec l’équilibre pour avancer toujours plus loin ; aujourd’hui, je suis convaincu que cet hôpital peut fonctionner, je suis convaincu que le travail de l’entier du personnel est efficient et que les infrastructures à disposition sont excellentes, mais je suis aussi convaincu de la nécessité de pouvoir adapter le fonctionnement même de cet hôpital. Cette Commission d’enquête parlementaire est ici pour faire toute la lumière sur cet objectif, d’aller vers l’avenir, de construire ensemble le futur du monde hospitalier de notre région. Je vous invite à soutenir cette Commission d’enquête parlementaire.

Mme Eliane Desarzens (SOC) —

Je déclare mes intérêts : je suis membre de la Commission interparlementaire de contrôle (CIC) de l’HRC, mais aussi citoyenne d’une commune de l’Est-vaudois — Bex — et c’est en cette qualité que je me permets d’exprimer mon ressenti. L’HRC était attendue depuis plus d’une décennie par toute la population du Chablais, vaudoise ou valaisanne, les hôpitaux d’Aigle et de Monthey ayant atteint depuis longtemps leurs limites, aussi bien en termes d’infrastructures que de prise en charge médicales. L’HRC de Rennaz est apte, désormais, à pallier tous les manquements et lacunes. C’est un magnifique outil, doté des dernières techniques, à la pointe dans certains domaines spécifiques, animé par un personnel compétent, professionnel, conscient de ses responsabilités, un outil que j’ai personnellement pu expérimenter. Or, les collaboratrices et collaborateurs de l’HRC ont besoin aujourd’hui de se sentir soutenus par nous, instances politiques, pour poursuivre leurs missions.

Certes, la mise en route de cet hôpital n’est pas allée de soi. Elle a connu des écueils majeurs, dont la portée essentiellement financière est discutée ici aujourd’hui. Cela dit, il ne faut pas oublier que ce regroupement de cinq établissements sur un seul site a constitué un événement unique en Suisse. Une telle opération ne pouvait se régler avec quelques coups de bistouri, deux points de suture et un pansement ; en maîtriser tous les aspects constituait un défi. Ne pas soutenir l’HRC aujourd’hui, c’est oublier cette population du Chablais et de la Riviera qui ne demande qu’à disposer des prestations hospitalières auxquelles elle a droit, c’est oublier le personnel qui effectue un travail remarquable dans les conditions sanitaires que l’on sait, c’est oublier les nouveaux dirigeants qui mettent tout en œuvre pour que le retour à l’équilibre financier attendu de tous soit conduit avec le sérieux requis — l’instauration d’une CEP ne ferait que le retarder — c’est semer le doute dans les esprits et faire en sorte que la population se détourne de l’HRC et opte pour d’autres solutions, notamment privées, ce qui ne ferait qu’aggraver la situation. Je m’opposerai à cette CEP et vous encourage à en faire de même.             

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Que de grands mots à propos de cette CEP — articles 67 et suivants de la Loi sur le Grand Conseil (LGC) — « entreprise de démolition », « totalement disproportionnée », « coûteuse », « lente » ; j’en passe… J’ai envie de vous dire : pourquoi ne pas supprimer ces articles 67 et suivants ? S’ils sont tellement inutilisables… Ce sera de toute façon — à entendre ceux qui ne veulent pas d’une CEP — traumatisant, pour quelque institution que ce soit. J’ai envie de vous demander : avons-nous tenu les mêmes propos sur le personnel soignant, lors de la CEP sur les EMS ? Avons-nous nourri les mêmes doutes sur la prise en charge du personnel résidant ? Si j’écoute ceux qui s’opposent à la CEP et qu’on transpose les arguments sur les EMS, il semble évident que l’on n’aurait fait aucune CEP. Pourtant, il est tout de même intéressant de constater que cette CEP, que vous n’auriez certainement pas acceptée concernant les EMS, pour les mêmes motifs, n’a aucunement porté atteinte à la qualité des soins en EMS ni à la prise en charge, qu’elle a permis de trouver des solutions en matière de reporting sur les activités en EMS, sur les politiques salariales, sur l’utilisation des fonds publics, et même de renforcer l’activité de la police sanitaire. Au final, il n’y a pas de traumatisme mais une meilleure utilisation des fonds publics, une optimisation des ressources et une solution assainie, puisque depuis, on n’en a plus entendu parler.

Deuxième exemple : la BCV. On nous dit : « Ouh là là, c’est à des années-lumière du cas qui nous occupe ! » A voir… J’aimerais tout de même vous rappeler qu’on a recapitalisé la BCV pour 2 milliards. En contrepartie, on a obtenu des actions qui, chaque année, permettent de distribuer un dividende appréciable. Les activités, la gouvernance de la BCV, ses relations avec les autorités politiques, ont été clarifiées et assainies. On a parlé tout à l’heure de malversations, d’éléments à caractère pénal. J’ai regardé : une personne a été condamnée pour distribution « de bonus insolites ». Quand on nous dit qu’on est à des années-lumière du cas qui nous occupe, étant précisé qu’en ce qui nous concerne, on n’a pas eu l’imprudence de dire qu’en l’espèce il y aurait eu des fraudes, des malversations ou quelques autres éléments à caractère pénal. D’ailleurs, il n’est absolument pas nécessaire, selon l’article 67, d’événements de grande portée relevant des attributions en matière de surveillance.

Notre collègue Montangero nous disait « tout va très bien », nous avons une Commission des finances et une Commission de gestion. Justement, c’est là que le bât blesse. Quand on entend, tout à l’heure, M. Mojon, président de la Commission des finances, nous dire « on a eu un exposé » devant la Commission des finances, qui est précisément habilitée à faire de l’analyse financière, et « les chiffres qu’on nous a donnés n’étaient pas les bons » ; lorsqu’on entend les délégués à la gestion qui se sont rendus au mois de janvier 2020 pour obtenir des renseignements et qu’on leur dit « tout va bien au niveau des liquidités, il n’y a pas de souci à vous faire, vous pouvez retourner à votre commission » et que, dans le même temps, on apprend qu’on a dû emprunter en urgence 10 ou 20 millions de prêts de banques d’autres cantons… Tout de même… Est-ce que ce Grand Conseil a encore un minimum de crédibilité dans le monitoring et le contrôle des activités, lorsque dans deux commissions, de façon claire, documentée et rapportée par nos collègues, nous n’avons pas d’informations conformes à la réalité des choses ? Il ne s’agit pas d’éléments à caractère pénal ; les déclarations de tous les membres soutenant cette CEP ont été parfaitement claires : il ne s’agit ni d’une chasse aux sorcières ni d’une chasse aux coupables. J’aimerais relever une phrase révélatrice de M. Montangero, tout à l’heure : « les deux personnes qui avaient d’importantes responsabilités dans tout cela sont parties, donc il n’est plus nécessaire de faire une CEP ». Ah bon ? A l’époque, on nous disait : « il n’y a pas de problème », « le Conseil d’Etat a une pleine confiance dans les personnes qui dirigent la situation ». Maintenant, on nous dit : « ceux qui sont partis pouvaient avoir leur part de responsabilité ». Ce n’était pas notre débat, mais c’est tout de même intéressant à relever.

Comme le disait M. Gfeller, je pense que pour assurer la viabilité du bateau, il faudra peut-être 5 à 10 ans. Je pense que c’est réaliste. Mais qu’on nous le dise… et qu’on nous dise combien cela coûte et comment on va pouvoir gérer tout cela. A ceux qui disent que ceux qui veulent la CEP sont en train de crier au loup, il faudrait vous rappeler qu’après deux mois de suspension parlementaire, la première chose que nous avons faite dans ce Parlement était de voter en urgence de l’argent pour payer les salaires. Si vous trouvez que ce n’est pas alarmant et que ce n’est pas de nature à rompre le minimum de confiance que peut avoir la population dans un hôpital, je ne sais pas ce qu’il vous faut comme supplément de gravité de situation. Ce n’est tout de même pas ceux qui sollicitent une CEP, aujourd’hui, qui sont venus en catastrophe quémander de l’argent au Grand Conseil ; cela a été traité en urgence pour permettre à cet hôpital de fonctionner.

Je réitère ici, au nom du PLR, tout le soutien à cet hôpital, à ses activités, au personnel soignant qui doit être pérennisé, mais pour ce faire, il faut aller au-delà des informations qui ont été transmises ou non, à nos Commissions des finances et de gestion, il faut aller jusqu’au bout du bout, il faut arriver à des solutions, comme dans les EMS, comme dans l’affaire BCV, où l’on arrive à apporter des améliorations que ce soit dans le monitoring ou dans la gestion. Contrairement à ce qui a été dit, je suis convaincu qu’il ressortira plus de confiance, un climat apaisé et, de surcroît, des solutions intéressantes, intelligentes, qui renoueront la confiance que les autorités, ce Grand Conseil, peuvent avoir en cet hôpital et qui amélioreront les processus pour ces prochaines années.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Je souhaite revenir sur quelques propos tenus durant ce débat. Monsieur Buffat, évidemment, vous attirez mon attention lorsque vous tentez de faire le jeu des différences entre les CEP faites dans le passé, dans notre canton, et celle discutée aujourd’hui. Il est vrai qu’il y a des différences ; la première est que 20 ans ont passé entre la dernière que notre canton a connue et cette année. Mais cette différence temporelle n’empêche pas de marquer un point essentiel : le fait que ni dans le dossier des EMS ni dans celui de la BCV, le Grand Conseil n’était nanti d’audits de recommandations et de décisions, comme nous l’avons aujourd’hui. Il est juste de rappeler que des audits ont été mandatés par les Conseils d’Etat, mais il faut également indiquer que ces audits ont débouché sur des recommandations.

Si vous avez lu ces audits, monsieur Buffat, et je suis sûre que vous avez la même assiduité que moi à la lecture, vous avez également constaté qu’ils ne consistent pas uniquement à relever des lacunes manifestes — ce dont nous n’avons jamais douté ; ces audits relèvent également des recommandations qui sont assez similaires, pour certaines, à ce qui est sorti de la dernière CEP sur la BCV, et ces recommandations ont ensuite fait l’objet de décisions et de communications de la part tant du Conseil d’Etat vaudois, du Conseil d’Etat valaisan que du Conseil d’établissement sur la mise en œuvre de ces recommandations. Nous nous trouvons donc dans une situation totalement différente, au-delà des questions de chiffres, que ce que ce Grand Conseil a vécu dans le cadre de la BCV ou des EMS. Par ailleurs, avec mon groupe, nous n’avons jamais éludé les lacunes que vous évoquez. Nous n’avons jamais sous-estimé les mesures qui devraient être mises en œuvre dans cet hôpital pour le remettre à flot, et les audits non plus. Ces erreurs qui ont été faites à l’hôpital, notamment parce que celui-ci n’avait pas les instruments financiers pour voir exactement ce qu’il se passait, ont été admises par l’hôpital ; il n’a pas essayé de cacher les faits. En plus de l’admettre, il a transmis toutes les informations, et les audits ont permis de démontrer que, à ce moment-là, il n’y avait aucune volonté de sciemment mentir ou de cacher des faits. Monsieur Buffat, je vous renvoie également à la page 9 de la réponse du Conseil d’Etat, pour avoir toutes les informations que vous cherchez s’agissant des mesures qui ont été prises pour un suivi plus serré, puisque c’est précisément l’objet de votre demande. Je vous rappelle également que les solutions que vous proposez et les pistes que vous évoquez sont également celles que les auditeurs évoquent dans leur dernier rapport.

J’aimerais également revenir sur la terminologie employée aujourd’hui par celles et ceux qui soutiennent cette CEP. J’ai entendu des phrases du type : « nouvelle équipe à même de faire face aux défis », « confiance dans l’hôpital qui peut fonctionner », « on veut de la sérénité », « nous ne devons pas diaboliser la démarche », « l’intention n’est pas de couper des têtes ». Monsieur Berthoud, vous avez évoqué — et je vous en remercie — qu’à aucun moment vous ne mettiez en doute la qualité des soins. S’il y a quelque chose que nous devons tous partager dans ce Grand Conseil, c’est le fait qu’aucun d’entre nous ne remet en doute la qualité des soins. En revanche, ce qui nous oppose, c’est la vision que nous avons sur les conséquences de cette CEP, puisque selon nous, indépendamment du fait que la qualité des soins n’est pas remise en cause aujourd’hui, nous craignons véritablement que des répercussions telles que des communications négatives et de mauvaises pressions sur cet hôpital détourneront véritablement une patientèle de l’Hôpital de Rennaz vers des structures plus privées. A cet égard, je relève que nous irons toujours à Rennaz pour les urgences, mais lorsque nous devrons nous faire poser une prothèse du genou, nous n’irons peut-être pas à Rennaz ; il y a d’autres cliniques privées qui seront peut-être préférées par certaines patientèles. Et lorsque nous avons des opérations ou des interventions électives, nous nous détournerons peut-être de Rennaz, parce que quand nous avons le choix — et je vous le promets, monsieur Devaud — et que nous ne sommes pas entièrement renseignés sur la situation, nous n’allons pas dans un hôpital qui fait l’objet d’une CEP. C’est bien cela que nous craignons pour l’avenir de cet hôpital.

J’ai également entendu le fait que le rapport qui devrait être rendu par cette CEP est un rapport qui devrait aussi s’attaquer à l’angle politique. Cela me surprend, car le mandat de cette CEP, déposé au mois de mai de l’année passée, ne prévoit pas d’axe politique, pas d’enquête sur l’axe politique ou sur les responsabilités politiques. Si c’est véritablement cela le nerf de la guerre ou l’axe principal de cette CEP, alors cas échéant, il faudra quand même peut-être soulever ce point, modifier le mandat d’enquête parlementaire et resoumettre ce mandat à notre Conseil d’Etat pour qu’il puisse exercer son droit d’être entendu, puisque, quand je lis le mandat, tel qu’il a été proposé par ceux qui le souhaitent, il n’en est pas fait mention.

Enfin, pour répondre à Mme Schaller, les Valaisans ont définitivement abandonné la CEP. Ce point n’est plus ouvert. Le Grand Conseil a pris une décision ferme : il n’en veut pas. Si nous allons dans la direction d’une CEP, nous serons donc le seul des deux cantons à diligenter une CEP pour un hôpital intercantonal.

M. Patrick Simonin (PLR) —

J’abonde dans le sens d’instaurer une Commission d’enquête parlementaire sur l’HRC. Pas question de remettre en question le bien-fondé de cet établissement ni la qualité des soins qui y sont prodigués grâce à l’engagement de son personnel. En revanche, c’est le système récurrent qui gère les projets hospitaliers dans notre canton qui m’interpelle. Les entreprises générales ou totales, qui obtiennent les marchés dans le domaine hospitalier vaudois, ont ensuite libre choix de mener à bien leur projet avec une seule systématique : le prix bas permanent. C’est lorsque l’exploitation des sites commence que le bât blesse. En effet, les travaux commandés à bas prix et, souvent sous-sous-sous-traités à des entreprises non renommées avec de la main-d'œuvre peu qualifiée, font qu'il y a énormément de travaux à reprendre, car non adaptés aux demandes initiales des maîtres de l’ouvrage. Et je ne parle pas seulement pour les corps de métiers de la Fédération vaudoise des entrepreneurs (FVE). Je déclare mes intérêts : j’y suis secrétaire patronal.

Cette commission est l’occasion que la lumière soit faite sur les montants liés à des malfaçons qui grèvent les coûts d'exploitation des premières années dans les milieux hospitaliers. Car lorsque ces malfaçons surgissent, les entreprises responsables, non renommées, ont souvent disparu de la circulation et ne peuvent justement plus faire face à leurs responsabilités. Des coûts supplémentaires interviennent ainsi aux frais de l'institution, ce qui grève considérablement ses charges d'exploitation dans les premières années. Cette Commission d’enquête parlementaire permettrait de faire la lumière sur ces coûts à l’échelle de l’HRC et d’en tenir compte à l’avenir pour d’autres projets hospitaliers.

Mme Josephine Byrne Garelli (PLR) —

Par cette intervention, je ne souhaite pas remettre en question la qualité et le travail des collaboratrices et collaborateurs de l’HCR. Ces derniers ne portent pas de responsabilité pour les lacunes dans la gestion et la gouvernance de l’hôpital, dans le passé, et leur travail est apprécié et respecté de tous. Cela dit, les citoyennes et citoyens de ce canton doivent trouver des réponses aux nombreuses interrogations sur la situation financière de l’HRC et les surcoûts de la construction. A la lecture de la presse et des documents publiés depuis l’éclatement de l’affaire, certaines réponses des acteurs en présence manquent de précision. Quand le président de la Commission de construction annonce que « l’écart provient notamment du fait que nous avons apporté des modifications au projet initial pour améliorer son adéquation aux besoins des professionnels de l’hôpital là où cela s’imposait », il cite notamment un montant de 7 millions de francs pour l’augmentation de la surface d’oncologie et de radiothérapie… et des impondérables pour 5 millions. Les équipements ont coûté 18 millions de plus que prévu, les changements de normes 8 millions, les « améliorations » pour leur part ont coûté 15 millions — et je vous passe les détails.

Les députations valaisanne et vaudoise ont accepté un financement pour la construction et l’équipement de l’hôpital pour un montant de 327 millions en 2012. A l’arrivée, la facture atteint 430 millions. Et le même président de la Commission de construction qui affirme qu’il « ne faut pas comparer ces chiffres : le budget de base ne couvrait pas l’entier du périmètre à réaliser. » On en reste pantois ! Pourquoi faire voter un montant qui ne couvre pas l’entier du périmètre à réaliser ? Je ne connais pas la réponse, mais je pense qu’une CEP pourrait analyser plus profondément les motivations politiques qui nous amènent à la situation actuelle.

De plus, et c’est peut-être plus grave, l’hôpital a perdu 24 cadres médicaux sur 100, depuis 2015. Et certains de ses médecins-chefs ont alerté à de multiples reprises la presse sur les problèmes qu’ils rencontraient avec la direction de l’hôpital. La corrélation n’est peut-être pas linéaire, et nous savons que les médecins peuvent être des prima donna parfois, mais quand 25 % des chefs de service quittent l’entreprise, le minimum serait que le Conseil d’établissement se questionne sur le style de management de la direction qui a poussé ces médecins à partir. Pourquoi le Conseil d’établissement n’a-t-il rien fait face à cette hémorragie de talents et de leurs patients, sources des revenus de l’établissement ? Un style de management très dur envers les collaborateurs, tandis que des lacunes dans les procédures ont permis de contracter un emprunt de 20 millions par un collaborateur sous sa seule signature. Nous voulons tous le succès de l’HRC, pour son personnel et pour la population, mais nous devons instaurer une Commission d’enquête parlementaire pour comprendre les mécanismes qui nous ont conduits à la situation actuelle et en tirer les enseignements pour construire l’avenir sereinement.

Mme Séverine Evéquoz (VER) —

En réaction à une intervention de Mme Schaller, j’aimerais préciser que la CEP au niveau du canton du Valais a été refusée par le Parlement cantonal valaisan, en juin dernier. Il est vrai que le Parlement cantonal valaisan a accepté une proposition de développer une CEP intercantonale, mais cet outil n’existe pas et n’a pas de base légale. Je tiens encore à préciser qu’aujourd’hui nous avons déjà, comme instrument intercantonal, une Commission interparlementaire de contrôle, qui est déjà concrète et effective. C’est également un outil pertinent.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je souhaite juste répondre à mes confrères et consœurs qui disent, dans 24heures, qu’« on n’en a pas foutu une » ; ce n’est pas vrai ! Ensuite, j’aimerais dire à M. Jobin que, de toute ma carrière politique, je n’ai jamais dansé sur le ventre des autres, et je le défie de danser sur le mien ! J’ai trouvé que son propos était à la limite de l’injurieux.

J’aimerais dire ici que la Commission interparlementaire sera évidemment à la disposition de la CEP — si elle est nommée ; elle éclairera sa lanterne et lui procurera des phares. Je vais conclure en disant ceci, et le Grand Conseil vaudois, toutes tendances confondues, ferait bien de méditer sur cette question : pourquoi est-ce que chaque année, quand votre serviteur présentait son rapport sur l’HRC, il fallait compter entre 45 et 120 secondes pour faire passer l’objet, sans jamais aucune question, aucune remarque, aucune suggestion ? Vous comprendrez que la Commission interparlementaire a fait ce qu’elle a pu, et je remercie mes collègues de l’avoir fait.

Pour garder toute ma liberté de manœuvre, je vais encore dire un mot : je vais devoir faire le rapport Riviera-Chablais 2019, puisque le Valaisan ne peut, ne veut ou ne sait pas le faire, en plus de celui de 2020. Commission parlementaire ou pas, je m’arrangerai pour vous les présenter et pour vous dire un certain nombre de choses qui vous éclaireront sûrement, aussi bien ceux qui veulent une CEP que ceux qui n’en veulent pas. Je m’abstiendrai.

Mme Amélie Cherbuin (SOC) —

En tant que membre de la Commission des finances, j’aimerais relativiser les propos de notre président, M. Mojon. A la Commission des finances, nous avons eu des informations par le Conseil d’Etat sur la situation de l’HRC, le 10 octobre 2019, déjà. Les raisons qui expliquent les surcoûts nous ont été présentées par l’hôpital. Lors de cette présentation auprès de la Commission des finances, en présence des représentants du Département de la santé et de l’action sociale, d’une délégation de la Commission de gestion, de la Commission thématique de la santé publique et de la Commission interparlementaire de contrôle, il nous a été expliqué les raisons des différences de coûts, notamment des projets hors garantie de l’Etat, mais prévues dans l’exposé des motifs et projet de décret de l’époque, comme des compléments d’équipements ou un parking dont les recettes devaient couvrir les coûts. Par ailleurs, de nouveaux projets ont été inclus, en particulier une augmentation de la surface d’oncologie et de radiothérapie.

Les retards de mise en fonction de l’hôpital suite aux recours ont creusé un grand trou dans le budget de fonctionnement ; cela a été extrêmement bien expliqué par M. Chollet. C’est à mi-avril 2020, suite au confinement et à l’interruption des opérations non électives, que nous avons été informés que l’hôpital se trouvait dans une situation critique, car en manque de trésorerie, et que, sans cette intervention urgente, les charges ne pouvaient plus être payées et que les salaires des collaborateurs ne pouvaient plus être payés. Pour faire face à ces obligations, l’HRC avait donc conclu en janvier ce fameux emprunt de 20 millions, hors de toute garantie étatique et sans en informer immédiatement les deux responsables cantonaux. C’est là que les audits ont été mandatés. Or, ces deux contrôles ont largement permis d’identifier les problèmes et les responsabilités respectives. Je me permets de rappeler que c’est le Conseil d’établissement qui était maître d’ouvrage, et non l’Etat — en l’occurrence les deux cantons. Dès lors, ces derniers étaient en retrait lors des décisions prises sur le suivi de la réalisation des travaux. Le contrôle du management était également de la responsabilité du Conseil d’établissement. Je ne vois donc pas ce qu’une CEP permettrait de lever comme doute ; il n’y a pas eu de malversations, mais une mauvaise gestion de l’hôpital — cela a été reconnu. Il faut maintenant aller de l’avant. Une CEP n’aura aucune utilité pour sauver l’HRC, puisque toutes les recommandations ont été prises en compte dans la nouvelle convention. Je vous recommande de refuser cette CEP.    

Mme Monique Ryf (SOC) —

C’est en tant que présidente de la Commission de gestion que j’ai sursauté aux propos de M. Buffat, qui a mentionné allégrement des propos de la sous-commission de la Commission de gestion — deux commissaires qui sont membres de son parti. M. Buffat aime beaucoup mentionner les textes de loi et j’aimerais ici rappeler l’article 13, alinéa 3bis, de la LGC : « Les renseignements obtenus par les commissions en matière de gestion et de finances sont confidentiels. Ils ne peuvent être communiqués à des députés non membres des commissions qu’avec l’autorisation de ces dernières. » Je trouve qu’il y a là abus de la part de l’utilisation de ses propos. La Commission de gestion est parfaitement à même de faire son travail. L’étude sur l’HRC pourrait bénéficier de questions posées par la sous-commission, mais il ne faut pas dévoiler les propos qui sont tenus dans le cadre de la Commission de gestion.

M. Jean-Luc Chollet (UDC) —

Au vu de l’heure qui avance, de l’attention qui se relâche, ainsi que de la lassitude qui nous gagne, j’ai l’honneur de demander, par voie de motion d’ordre, qu’après avoir ouï Mme la conseillère d’Etat, nous passions sans plus tarder au vote.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La motion d’ordre est appuyée par au moins 20 députés.

La discussion sur la motion d’ordre est ouverte.

Mme Rebecca Ruiz (C-DSAS) — Conseiller-ère d'État

Depuis le début de l’après-midi, vous débattez de la situation de l’HRC. Vous continuerez sans doute à le faire prochainement, lorsque les deux décrets qui sont inscrits à l’ordre du jour et qui ont trait à la régularisation des garanties seront traités.

Je vous ai écoutés avec la plus grande attention. Le Conseil d’Etat est conscient des attentes fortes, du mécontentement, de l’agacement et des besoins d’explications suscités par ce dossier complexe et ancien. Cette attention était d’autant plus forte après votre vote de mai dernier qui a permis d’octroyer une garantie financière temporaire à l’hôpital, alors qu’il faisait face à une situation financière grave. La question qui se pose à vous désormais est d’instaurer ou non une CEP. Beaucoup de choses ont été dites sur les précédents, sur le caractère proportionné ou disproportionné d’une telle CEP, ou encore sur le besoin d’analyses, d’informations et de suivis.

Permettez-moi de revenir quelques instants sur l’histoire de cet hôpital. Avant même l’idée d’un hôpital intercantonal, nombreux sont les projets de regroupement qui ont échoué, en particulier sur la Riviera. Il a fallu une volonté politique forte — celle des Conseils d’Etat vaudois et valaisan, mais aussi et surtout celle des Grands Conseils — pour concrétiser enfin ce qui n’était pour certains qu’une vue de l’esprit. A l’heure où la médecine devient de plus en plus spécialisée, où les frontières cantonales s’effacent, où une certaine taille critique est nécessaire, les autorités politiques des deux cantons ont choisi la voie de la collaboration, non par goût pour la concentration hospitalière, non pour éloigner la population de son hôpital, mais parce que ce projet était le plus à même de répondre aux besoins de la population. Est venu ensuite le temps de la construction. La question des coûts a été thématisée, car il est vrai, le projet a vu son coût total augmenter. Il faut néanmoins préciser qu’il a beaucoup évolué, notamment les surfaces dédiées à l’oncologie, qui ont été augmentées, et des impondérables comme de nouvelles contraintes sismiques ou des changements de normes inévitables. Quand on reconstitue le coût final, il ne faut pas perdre de vue que certains projets étaient imaginés en dehors de la garantie étatique, il y a de cela 10 ans, voire qu’une partie n’était pas prévue du tout. S’agissant des raisons précises de toutes ces évolutions, elles sont maintenant expliquées, détaillées et stabilisées. La Commission intercantonale de contrôle, tout comme le Contrôle cantonal des finances, a effectué un contrôle régulier. Enfin, l’argent public ne finance pas directement les investissements. L’Etat, comme c’est le cas pour les autres hôpitaux du canton en dehors du CHUV, octroie sa garantie aux emprunts qui sont faits et qui sont assumés par l’hôpital. Ces emprunts sont ensuite remboursés par l’hôpital — ce qui est également le cas pour l’HRC.

Après la construction est arrivé le choc de la découverte d’une situation financière largement dégradée, au printemps dernier. Les Conseils d’Etat vaudois et valaisan ont déjà eu l’occasion d’exprimer leur mécontentement, y compris moi-même devant vous. En effet, l’hôpital, en tant qu’établissement autonome de droit public, est responsable de sa propre gestion. Cela étant, les gouvernements ont décidé de passer immédiatement à l’action : deux audits indépendants ont été déclenchés — le Contrôle cantonal des finances, avec l’inspection valaisanne des finances, ainsi que la fiduciaire BDO, fiduciaire spécialisée dans l’examen de la gouvernance. Des mesures ont été prises pour doter l’hôpital d’instruments financiers, qui lui permettaient ainsi d’avoir une visibilité juste, en particulier sur ses recettes, cette visibilité qui manquait et qui a amené l’hôpital à donner des informations erronées à des députés. Par la suite, l’hôpital a dû présenter un plan de retour à l’équilibre financier qui a été mis sur pied, avec le concours d’un expert externe spécialiste en gestion hospitalière. Le travail a été intense pour présenter les deux décrets qui sont aussi à l’ordre du jour de cette séance. Faut-il alors considérer l’hôpital comme un mauvais outil inadapté aux défis de notre époque ? Bien au contraire. S’agissant du nombre de lits, il faut savoir que le projet avait déjà été légèrement revu à la baisse avant 2012. De plus, le bâtiment est conçu pour pouvoir s’adapter à une éventuelle hausse de l’activité. L’évolution démographique que notre canton va connaître laisse peu de place au doute : nous aurons besoin de ces lits.

S’agissant des ratios en personnel, des suivis de l’activité, ces points ont été traités par le Contrôle cantonal des finances, et les mesures nécessaires sont incluses dans le plan de retour à l’équilibre financier. Force est de constater que, s’agissant du passé, des investigations poussées ont déjà eu lieu par le biais de rapports d’organismes dont l’objectivité et la neutralité sont garanties. L’accès aux documents et aux personnes concernées a été total. La réponse du Conseil d’Etat vous présente aussi des éléments supplémentaires qui permettent de reconstituer le fil de tous les événements de l’année dernière. Tous ces documents sont publics, la transparence a donc été faite.

Au-delà de la construction de l’hôpital et de la crise du printemps dernier, il s’agit en réalité de se demander quel est le futur que nous, autorités politiques, souhaitons pour l’hôpital. Au final, la seule question qui devrait guider votre vote est la suivante : est-ce qu’une CEP aidera réellement l’hôpital ? En près d’une année, un travail considérable a été abattu. La Direction générale de l’établissement a été largement renouvelée, tout comme son Conseil d’établissement qui évoluera encore si vous votez le projet de nouvelle convention intercantonale. Un nouveau Directeur général entrera en fonction au mois de juin. La modification de la convention intercantonale et l’octroi de nouvelles garanties apporteront l’assise juridique et financière nécessaire. La moitié des recommandations du Contrôle cantonal des finances est réalisée et l’autre est en cours. Les deux cantons et les deux Grands Conseils suivront, par ailleurs avec beaucoup d’attention, le respect du plan de retour à l’équilibre financier. Un résultat financier à l’équilibre doit être atteint au plus tard en 2026 ; ce point est même inscrit dans la convention intercantonale qui est soumise à votre appréciation.

Madame Schaller, s’agissant du Valais, je peux confirmer ce qui a été dit par Mme Jaccoud, puisque vous l’avez soulevé. Au mois de juin, un débat a en effet eu lieu dans le canton du Valais. Ce débat se réservait la possibilité, en fonction des audits, de lancer une CEP. Depuis lors, la régularisation des garanties a été votée dans le canton du Valais et leur Grand Conseil a considéré qu’une CEP n’était pas souhaitable.

S’agissant des investissements de l’hôpital, la semaine dernière, une nouvelle étape a été franchie avec l’antenne de Vevey. Permettez-moi de vous donner quelques informations à ce sujet, puisque cela a été soulevé par certaines et certains d’entre vous. Les travaux du Samaritain ne sont pas encore terminés, puisque tout a été stoppé à l’automne dernier, au moment où il apparaissait indispensable, pour prendre le temps de l’analyse, de bien s’assurer du chemin juste à prendre et de ne pas faire des choix irréfléchis qui pourraient encore accroître les difficultés de l’hôpital. Au terme de cette analyse approfondie menée par l’hôpital, mes services et le Valais, les nouvelles sont bonnes. Je crois que l’on peut se féliciter d’avoir pris le temps d’examiner tous les scénarios qui s’ouvraient à nous. Sans entrer dans trop de détails, je peux rassurer le Grand Conseil : l’antenne de Vevey pourra accueillir, en 2023 au plus tard, 47 lits de gériatrie aiguë et de réadaptation, ainsi que 28 lits de court séjour. Ces lits de court séjour seront exploités par la Fondation Beau-Site, en remplacement d’un site — le Maillon — qui doit être rénové. Le site du Samaritain proposera aussi, comme cela a été également prévu dans le projet initial, une permanence pour prendre en charge les petites urgences ainsi que des consultations ambulatoires spécialisées. Le projet intégrera aussi la santé communautaire, avec un pan de réadaptation à domicile, pour créer des synergies inédites, sur un seul site, entre différents acteurs qui, tous, pourront concourir ainsi à développer et améliorer la prise en charge des personnes âgées sur la Riviera. Tous les éléments sont donc réunis pour pouvoir créer un pôle de compétences unique sur ce site du Samaritain qui, j’en suis sûr, sera très bien accueilli par la population de la Riviera. J’ai d’ailleurs eu l’occasion, très récemment, de présenter le projet aux syndics et municipaux de la région et l’accueil a été très bon.

Autre point central qui n’est pas à négliger, puisqu’il concerne un aspect financier, la Fondation des hôpitaux de la Riviera, ancien exploitant des sites du Samaritain et de la Providence, a également été convaincue par ce projet et a décidé d’octroyer un don de 5 millions de francs en faveur du projet. Désormais, un seul objectif doit guider nos actions : que l’hôpital retrouve au plus vite la sérénité dont il a besoin. La pandémie que nous traversons nous a rappelé à quel point des hôpitaux publics forts étaient une nécessité, mais aussi à quel point ce sont des structures fragiles. Dans le cadre de la réponse au COVID-19, l’HRC a fait plus que jouer son rôle. Grâce à son infrastructure de pointe et son personnel mobilisé, près de 1'000 patients atteints par le COVID ont été soignés dans cet hôpital, depuis le début de la pandémie. L’HRC a aussi plus que joué son rôle en tant que centre de soins régional, servant de centre de dépistage, d’appui aux établissements médico-sociaux et, maintenant, en tant que centre de vaccination. On sait à quel point un hôpital est existentiel pour une région. On y a toutes et tous à faire un jour ou l’autre. Des connaissances s’y sont rendues et racontent leur expérience. C’est là que des vies commencent et que d’autres s’achèvent. La population de la Riviera et du Chablais n’échappe pas à ces différentes règles. Elle doit pouvoir avoir confiance en son hôpital. Or, la confiance ne se décrète pas, elle se crée. Aujourd’hui, l’hôpital est doté de tous les outils nécessaires pour y parvenir. Avant toute chose, il a besoin de stabilité, et ce, au plus vite.

Au vu de sa situation financière fragile, le chantier de la confiance rétablie ne peut pas être retardé, même de quelques mois. Cet argument est déterminant pour le Conseil d’Etat. Tout doit être fait pour remettre l’hôpital sur de bons rails, dans les meilleurs délais. Le gouvernement ne peut pas suivre l’argument selon lequel une CEP permettrait à l’hôpital de s’offrir un nouveau départ. Le Conseil d’Etat estime, au contraire, qu’il produirait assurément un dégât d’image à long terme, alors que l’hôpital doit justement recréer des liens nécessaires avec sa région. Elle ralentirait, par ailleurs, la réalisation du Plan de retour à l’équilibre financier, alors qu’il y a urgence à le mettre en œuvre. Enfin, elle mobiliserait la nouvelle équipe de direction, alors que celle-ci doit se consacrer tout entière au futur. Encore une fois, il ne s’agit aucunement de faire fi du passé, mais force est de constater que les enquêtes nécessaires ont été menées. Par ailleurs, les commissions du Grand Conseil pourront suivre de très près la situation de l’établissement. En effet, le Conseil d’Etat s’est déjà engagé à informer régulièrement la Commission des finances. Ce souhaitable suivi politique pourra se faire aussi à travers la Commission intercantonale de contrôle, comme elle s’y employait jusqu’à maintenant. Ce suivi pourra se réaliser avec des instruments qui n’hypothèquent pas l’avenir de l’hôpital. En conclusion, le Conseil d’Etat vous invite à refuser la création d’une CEP.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

La motion d’ordre Jean-Luc Chollet est acceptée par 124 voix contre 2 et 14 abstentions.

L’entrée en matière est admise par 77 voix contre 55 et 8 abstentions.

M. Jean Tschopp (SOC) —

Je demande un vote nominal.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 députés.

Celles et ceux qui soutiennent l’entrée en matière sur cette Commission d’enquête parlementaire votent oui ; celles et ceux qui y sont opposés votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’entrée en matière est admise par 78 contre 54 et 8 abstentions.

* Insérer vote nominal

Le débat est interrompu.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Madame la présidente, je ne comprends pas très bien comment on ordonnance les débats cet après-midi. Il me semble que l’on aurait pu voter les éléments de la CEP d’un bloc, puisque je n’ai pas connaissance d’amendements. On aurait peut-être pu nous le dire. On passe, tout à coup, à autre chose, sans que l’on ait d’explications. S’il y a des amendements, je souhaiterais qu’on nous les communique, afin qu’on les ait pour mardi prochain.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Monsieur le député, nous allons voter sur un ensemble d’articles qui sont assez importants. Il est prévu que je les mette en discussion article par article. Il arrive parfois que certains députés nous transmettent les amendements avant les débats, mais il arrive également que nous en prenions connaissance en cours de débat. Chat échaudé craignant l’eau froide, je préfère nous donner le temps nécessaire pour débattre de façon sereine de cet objet, compte tenu de son importance.

La séance est levée à 17 heures.

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