Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 8 juin 2021, point 3.5 de l'ordre du jour

Texte déposé

Depuis le lundi 31 mai dernier, les restaurants et bars peuvent (enfin !) retrouver leur clientèle – et les client.e.s retrouver la joie de s’attabler pour un verre de chasselas ou un repas. A l’image de ce qui s’appliquait l’année dernière, et depuis plusieurs semaines déjà avec les terrasses, cette réouverture est conditionnée à la collecte des coordonnées de chaque personne présente. Prévue par les art. 5 et 5a al. 2 let. d Ordonnance COVID-19 situation particulière ainsi que par le ch. 4 de son annexe 1 (droit fédéral), cette obligation peut aujourd’hui être respectée par un système d’identification de la clientèle lié à une application numérique ou papier. Dans les faits toutefois, l'utilisation de l’application « SocialPass » et son pendant « SocialScan » est aujourd'hui obligatoire, notamment car le Canton l’avait lui-même imposée en octobre dernier.

 

Or, le Préposé fédéral à la protection des données personnelles et à la transparence (PFPDT) a rendu public justement le 31 mai 2021 les conclusions du rapport final rendu suite à une procédure d’établissement des faits. Outre l’existence de déficiences organisationnelles et techniques, ainsi qu’un manque de transparence complet des entreprises conceptrices, on y apprend que le Canton de Vaud a obtenu un accès direct à la base de données centralisée pour un nombre quelconque d’options de recherches ciblées, en violation du principe de proportionnalité.

 

Au regard de ces conclusions, le Canton de Vaud entend-il conseiller, ou imposer, l’utilisation sur son territoire d’un système de traçage différent du SocialPass ?

Transcriptions

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Comme il s’agit d’une même thématique, Mme la conseillère d’Etat donnera une réponse commune pour les deux prochaines questions orales. Dans un deuxième temps, vous pourrez chacun poser une question complémentaire.

M. David Raedler (VER) —

Question orale David Raedler au nom des Vert.e.s vaudois.e.s - Avec le SocialPass, les données personnelles des client·e·s seront-elles aussi victimes de la pandémie ? (21_HQU_70)

Depuis le lundi 31 mai dernier, les restaurants et bars peuvent – enfin ! – retrouver leur clientèle – et les clientes et clients retrouver la joie de s’attabler pour un verre de chasselas ou un repas. A l’image de ce qui s’appliquait l’année dernière, et depuis plusieurs semaines déjà avec les terrasses, cette réouverture est conditionnée à la collecte des coordonnées de chaque personne présente. Prévue par les articles 5 et 5a, alinéa 2, lettre d de l’Ordonnance COVID-19 situation particulière, ainsi que par le ch. 4 de son annexe 1 (droit fédéral), cette obligation peut aujourd’hui être respectée par un système d’identification de la clientèle lié à une application numérique ou papier. Dans les faits toutefois, la faitière GastroVaud a demandé à ses membres l’utilisation de l’application SocialPass et son pendant SocialScan, notamment car le canton l’avait lui-même imposée en octobre dernier.

Or, le Préposé fédéral à la protection des données personnelles et à la transparence (PFPDT) a rendu publiques, justement le 31 mai 2021, les conclusions du rapport final rendu suite à une procédure d’établissement des faits. Outre l’existence de déficiences organisationnelles et techniques, ainsi qu’un manque de transparence des entreprises conceptrices, on y apprend que le canton de Vaud a obtenu un accès direct à la base de données centralisée pour un nombre quelconque d’options de recherches ciblées, en violation du principe de proportionnalité.

Au regard de ces conclusions, le canton de Vaud entend-il conseiller, ou imposer, l’utilisation sur son territoire d’un système de traçage numérique différent du SocialPass ?

Mme Rebecca Ruiz (C-DSAS) — Conseiller-ère d'État

Le Conseil d’Etat donne une seule réponse aux deux questions orales Philippe Vuillemin et David Raedler, qui portent sur le même objet. La stratégie fédérale de lutte contre cette pandémie a intégré très rapidement après le premier semi-confinement de 2020 la notion de traçabilité afin de permettre aux équipes de gestion des enquêtes d’entourage – contact tracing – d’essayer d’interrompre le plus vite possible les chaînes de transmission. L’objectif de cette mesure de santé publique a toujours été de maintenir certaines activités considérées « à risque », tout en permettant de contacter rapidement des personnes qui auraient été exposées à une personne malade. L’article 58 de la Loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l’homme (Loi sur les épidémies) donne ainsi aux autorités cantonales compétentes la base légale pour traiter ou faire traiter les données personnelles, y compris les données de santé, pour autant qu’elles soient nécessaires à l’identification de personnes malades, infectées ou présumées l’être. Cette disposition constitue donc le fondement du traitement des données par l’autorité cantonale compétente.

Les premières expériences de récoltes des données à l’aide de documents papiers à l’entrée des restaurants ont rapidement montré leurs limites en termes de protection des données, mais aussi pour des questions de faisabilité, car il était difficile pour les exploitants de contrôler que les clients s’inscrivaient correctement. De plus, les listes papiers étaient difficiles d’utilisation pour les équipes de gestion des contacts, car les données étaient de mauvaise qualité. A la décharge de tous les intervenants, il est important de souligner que c’est la première fois qu’une situation pareille devait être gérée et que ces processus n’ont jamais pu être testés dans la réalité et à très grande ampleur.

C’est dans ce contexte que plusieurs réflexions ont eu lieu entre les exploitants, via leur faitière GastroVaud, et des sociétés informatiques intéressées à offrir une solution sous la forme d’une application pour téléphones portables. Une collaboration s’est développée entre GastroVaud et la société Swisshélios autour du projet SocialPass. L’Office du médecin cantonal (OMC) a été interpelé afin d’exprimer rapidement quelles devraient être les informations minimales utiles à la gestion des enquêtes d’entourage, mais aussi qui pourrait y accéder et comment. L’OMC a ainsi fourni une liste de données nécessaires et a confirmé que ces données ne seraient utilisées que dans le cadre d’enquêtes d’entourage ou lorsque les équipes cluster auraient identifié un risque important de transmission dans le cadre d’une activité réunissant une grande quantité de personnes sans plan de protection. Seul le médecin cantonal et ses équipes de supervision du traçage ont été autorisés à accéder à la plateforme SocialPass.

Cela étant, le canton n’a pas exigé que le traçage dans le domaine de la restauration se fasse exclusivement au moyen de l’application SocialPass. Seule l’exigence d’une transmission des données par voie électronique a été posée en octobre dernier dans le cadre de l’Ordonnance fédérale COVID-19 situation particulière, pour les raisons évoquées auparavant. Par ailleurs, l’arrêté cantonal a toujours permis une récolte sous format « papier ». D’autres applications informatiques que Socialpass sont donc envisageables, bien qu’une dispersion des solutions de collecte des données ne réponde pas à l’intérêt de la clientèle, ni des restaurateurs.

Il convient de rappeler ici que les recommandations du Préposé fédéral à la protection des données dans le cadre de l’examen de l’application SocialPass sont destinées à l’exploitant de cette application. Ce n’est pas l’application elle-même, ni l’accès direct des autorités sanitaires cantonales aux données qui sont visées par les recommandations, ces éléments répondant en effet à un intérêt public prépondérant, dans le cadre de l’article 58 de la LEp que j’ai évoqué tout à l’heure. C’est uniquement le respect de la proportionnalité qui est remis en cause par le préposé. Or, même si l’exploitant de cette application a décidé de développer des fonctionnalités plus larges que celles requises par le médecin cantonal, ce dernier a limité l’utilisation des données au strict minimum nécessaire aux enquêtes liées à un cas identifié ou à un cluster. En réponse à la question de M. le député Vuillemin, il n’y a donc pas d’accès « sans filtres » aux données des personnes qui utilisent l’application SocialPass pour s’enregistrer lorsqu’elles fréquentent un restaurant.

En réponse à la question de M. le député Raedler, comme j’ai pu l’évoquer dans la réponse à la question de M. le député Vuillemin, il n’est pas dans les prérogatives du canton de Vaud d’obliger les citoyens à utiliser l’une ou l’autre des applications existantes. L’usage restrictif des données provenant de l’application SocialPass par l’OMC permet au demeurant de conclure au respect du principe de proportionnalité. Dans ces conditions, le Conseil d’Etat n’entend ni recommander ni imposer l’utilisation d’un système de traçage en particulier.

M. David Raedler (VER) —

Comme cela a été relevé, il y a une obligation pour les restauratrices et restaurateurs de faire ce suivi et d’assurer une accessibilité facilitée à ces données pour le médecin cantonal dans un intérêt public, cela est totalement justifié. Néanmoins, il existe également d’autres applications open source. Est-ce que le canton entend à minima offrir une liste aux restauratrices et restaurateurs des applications autres que SocialPass qu’ils peuvent utiliser, dans le but d’accroître les moyens disponibles qui sont plus respectueux de protection des données ?

Mme Rebecca Ruiz (C-DSAS) — Conseiller-ère d'État

Je viens de vous le dire, le Conseil d’Etat n’entend ni recommander ni imposer l’utilisation d’un système de traçage en particulier. Cela étant, si dans les discussions que nous avons de manière fréquente avec la faîtière des restaurants, il apparaît qu’il y a une demande de la part de la faîtière de pouvoir avoir des informations sur des recommandations que vous semblez connaître et que nous avons, de notre côté, des assurances sur le type d’application dont il s’agit, nous ne voyons aucun inconvénient à transmettre ces informations à la faîtière, mais nous n’allons pas nous immiscer de manière proactive dans ce dossier pour les raisons que j’ai évoquées auparavant.

Retour à l'ordre du jour

Partager la page

Partager sur :