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Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 9 février 2021, point 16 de l'ordre du jour

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Rapport de majorite de la commission (19_POS_146)

Rapport de minorite de la commission (19_POS_146)

Objet

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M. Olivier Gfeller (SOC) — Rapporteur-trice de majorité

Tout d’abord, permettez-moi de signaler que je rapporte, au nom de la majorité de la commission, en lieu et place de notre ex-collègue Roxanne Meyer Keller, qui n’est plus membre de notre Grand Conseil. Je la remercie pour la qualité de son travail. Mon intervention s’appuie sur son rapport.

La commission a siégé en novembre 2019. Après un tel délai, il n’est sans doute pas inutile de faire un bref rappel. La postulante souhaite que l’on prenne des mesures visant à limiter l’impact des déchets issus des manifestations ayant lieu aux abords d’un lac ou à proximité de la nature. Force est de reconnaître que la plupart des festivals prennent leurs responsabilités et mettent en place des dispositifs permettant de limiter l’abandon sauvage de détritus. Des efforts importants ont été faits par les autorités cantonales pour sensibiliser les organisateurs. Ce postulat demande que l’on trouve de nouvelles pistes pour limiter les déchets sauvages. Il faut poursuivre les réflexions, en collaboration avec les organisateurs. Le but n’est surtout pas d’alourdir les frais, au risque de dissuader lesdits organisateurs. L’idée de la postulante consiste aussi à sanctionner plus lourdement les mauvais comportements des festivaliers, notamment et surtout ceux qui jettent des déchets en plastique ou des mégots dans le lac.

Lors de la séance de commission, le Conseil d’Etat nous a présenté les mesures de sensibilisation, de prévention, et aussi de remise en état, adoptées par les organisateurs des plus importants festivals du canton. Nous avons aussi appris la mise en place du « kit manif ». Cet ensemble de mesures à prendre dans le cadre de l’organisation de manifestations a été développé par l’Unité de développement durable de l’Etat de Vaud. Pour la conseillère d’Etat, présente lors de la séance, ces mesures répondent largement aux préoccupations de la postulante. Il faut aussi rappeler que ce sont les communes qui fixent les exigences en matière de gestion des déchets, ainsi que les mesures de prévention. Les communes ont la compétence d’imposer aux organisateurs la présentation d’un concept global de gestion des déchets.

C’est sur ce point, notamment, qu’il y a eu divergence entre la majorité et la minorité de la commission. La postulante souhaite généraliser cette obligation à l’échelle cantonale. Cette forme de mise aux normes pourrait être effectuée via la plateforme POCAMA, soit le formulaire cantonal en ligne pour l’organisation de manifestations. La minorité, quant à elle, souhaite laisser cette compétence aux communes. Je n’en dis pas plus, car le rapporteur de minorité se chargera de présenter ses arguments. Pour la majorité de la commission, il importe que les mesures prises soient les mêmes sur l’ensemble de notre territoire, alors que les communes n’ont pas toutes le même niveau d’exigence. La prévention actuelle est certes satisfaisante, mais n’est pas assez exigeante, de telle sorte qu’il arrive que des organisateurs ne fournissent pas de concept global destiné à préserver la nature environnante. Un concept global responsabiliserait plus les organisateurs négligents, même si la plupart jouent bien le jeu, rappelons-le, et font même parfois œuvre de pionniers.

Il faut encore relever que la présence inquiétante de microparticules de plastique dans le lac ne peut pas nous laisser insensibles. La majorité de la commission estime qu’il est impératif d’agir de façon cohérente, au niveau cantonal. La commission a d’ailleurs appris qu’une étude de l’EPFL avait démontré que 50 tonnes de déchets arrivent dans le lac chaque année, dont 10 à 20 % sont des apports directs de plastique. Pour la majorité de la commission, il ne s’agit pas d’enlever des compétences aux communes, mais bien de les soutenir. Voilà les raisons pour lesquelles nous vous invitons à accepter ce postulat, qui incite à poursuivre les réflexions qui permettront à tous les festivals de continuer à nous offrir de beaux moments, tout en respectant la nature environnante.

M. Sergei Aschwanden (PLR) — Rapporteur-trice de minorité 1

La minorité de la commission recommande au Grand Conseil de ne pas prendre en considération le postulat, pour quatre raisons principales. Premièrement, nous estimons que le domaine est de la compétence des communes et qu’il faut laisser à ces dernières l’autonomie de pouvoir décider et réglementer les différents paramètres relatifs à l’organisation de manifestations. Deuxièmement, nous estimons que portail POCAMA, en collaboration avec les autorités cantonales, remplit amplement les conditions, en termes de déchets et de gaspillage. En troisième lieu vient un point important à nos yeux, qui concerne la charge de travail. Il faut savoir qu’aujourd’hui, plus de 2000 autorisations sont délivrées, chaque année et cela dans un laps de temps relativement court. Il va de soi que si nous devons y ajouter des paramètres et des contraintes, cela risque d’augmenter la charge de travail d’une manière conséquente et excessive, tant pour les autorités cantonales que pour les organisateurs de manifestations. Je tiens également à rappeler que les très grandes manifestations telles que le Montreux Jazz festival ou le Paléo festival de Nyon, par exemple et pour ne pas les nommer, disposent déjà de concepts extrêmement élaborés et avancés, mais que pour la grande majorité des manifestations, de taille petite ou moyenne, si l’on ajoutait des contraintes supplémentaires, leurs organisateurs ne seraient pas forcément capables d’y répondre. Enfin, quatrièmement, vient un point déjà évoqué par le rapporteur de majorité : le « kit manif » a été mis en place et il répond parfaitement à l’ensemble des demandes de la postulante. Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission recommande au Grand Conseil de ne pas prendre en considération ce postulat.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Nathalie Jaccard (VER) —

J’avoue que défendre le renvoi de ce postulat au Conseil d’Etat, pendant cette période où la culture et les événements festifs sont réduits au silence depuis près d’un an, cela fait très bizarre ; cela donne le sentiment de tomber comme un cheveu sur la soupe, mais c’est peut-être aussi le meilleur moment pour réfléchir à l’après ? Pendant le temps du confinement, il fut constaté à une très large échelle que la réduction des activités humaines avait eu un réel impact positif sur l’environnement, sur la faune et la flore, et c’est tout aussi vrai pour les lacs de notre canton. Une manifestation culturelle et festive ou sportive a un impact sur l’environnement, c’est un fait. Les organisateurs de grandes manifestations l’ont d’ailleurs bien compris, les diverses mesures que le Paléo ou le Montreux Jazz festival ont mises en place pour limiter ces conséquences en sont la preuve. Si, comme déjà relevé, des efforts ont été réalisés et un ensemble de recommandations diffusé par différents canaux, il n’en reste pas moins que c’est insuffisant. Installer des poubelles de tri et utiliser de la vaisselle réutilisable, c’est bien, mais insuffisant.

J’aimerais rappeler que, dans sa réponse à l’interpellation « N’y aurait-il pas le feu au lac avec les déchets des festivals » (18_INT_174), le Conseil d’Etat avait admis que, lors des opérations de nettoyage menées par Net Léman, les déchets de grande taille — batteries de voiture, pneus, ferraille et autres mobiliers encombrants — étaient moins présents et que c’étaient plus fréquemment des bouteilles en PET, en verre, des canettes en alu, des briquets et des emballages en matière plastique et à usage unique qui étaient récoltés. Il est donc indéniable qu’un problème existe. Certes, la problématique n’est pas due exclusivement aux manifestations culturelles et festives, mais elles y contribuent.

Les signataires du rapport de minorité arguent que c’est aux communes de fixer des exigences, et que plus de 2000 autorisations sont délivrées chaque année. Pour rappel, ce total comprend l’ensemble des autorisations, y compris pour les manifestations qui ont lieu dans des lieux fermés où les risques pour l’environnement sont absents, ou beaucoup moins importants, et pour lesquelles le concept serait donc simple. Le nombre des manifestations concernées est donc relativement faible. Enfin, la plupart des manifestations ont lieu régulièrement, et dès lors, le concept une fois accepté, il n’y aurait pas de raison de le revoir entièrement à chaque édition, sauf si des changements majeurs venaient à intervenir. Aujourd’hui, lors d’un événement culturel, sportif ou festif, personne ne conteste l’utilité de lier un concept de sécurité à la délivrance d’une autorisation, dont les exigences et prescriptions sont édictées par le canton et contrôlées par les diverses polices du commerce. Le même modèle pourrait être imaginé pour le concept de gestion des déchets, qui a toute son utilité.

Les signataires du rapport de minorité se sont focalisés sur l’élaboration d’un concept global de gestion des déchets et de préservation de l’environnement, mais ils ont fait l’impasse sur les autres points demandés. Pour rappel, il s’agissait d’étudier la possibilité de mettre à disposition des organisateurs du matériel didactique de prévention et de prise de conscience de la nécessité d’avoir de bonnes pratiques et de respecter le lac, qui souffre lui aussi du jeter sauvage d’objets en tout genre ; de réfléchir avec les organisateurs connus de manifestations régulières pour trouver des solutions communes afin de préserver le lac lors d’événements culturels ou festifs, mais également d’étudier avec eux les mesures à mettre en place pour limiter les effets de ces mesures sur le budget et ne pas mettre en péril leur organisation ; enfin il s’agissait d’étudier la possibilité de réprimer plus sévèrement le jeter d’objets en tout genre dans le lac.

Ce postulat se veut donc ouvert, constructif et tourné vers la recherche de solutions. C’est la raison pour laquelle je vous recommande le renvoi au Conseil d’Etat.

Mme Pierrette Roulet-Grin (PLR) —

J’ai le regret de devoir dire à Mme Jaccard que son postulat est mal dirigé, pour la simple raison que ce qui la préoccupe est en place depuis longtemps pour nombre de manifestations, alors qu’il n’y a plus de manifestations « sauvages ». Le problème tient surtout aux personnes individuelles qui vont seules, en groupe ou en famille, sur les rochers du bord du Léman et sur les plages du bord des lacs. Car notre canton ne compte pas qu’un lac, n’est-ce pas ? Il y a aussi le lac de Neuchâtel, le lac de Morat, le lac de Joux et encore d’autres, tels les lacs de montagne. J’estime qu’il faut savoir de quoi nous parlons, et en l’occurrence, il s’agit de la préservation des eaux.

Je me permets d’indiquer ici mes intérêts personnels. J’ai présidé et conduit pendant 9 ans la « Fête au lac » d’Yverdon-les-Bains, au bord de la Thielle et à son embouchure dans le lac. Et je dois dire que la collaboration avec la section Manifestations de la Police cantonale est exemplaire. Je félicite ses collaborateurs pour leur conduite ; ils sont toujours à disposition pour être consultés et il y a toujours des possibilités de le faire. Lors des débats de commission, j’avais été très étonnée de voir que deux commissaires, municipaux de grandes villes, ne connaissaient pas du tout le contenu de la formule POCAMA !

La postulante s’en prend aux manifestations, alors que les problèmes ne viennent pas de là. Si l’on regarde POCAMA, quantité des points qu’elle évoque sont déjà compris dans le questionnaire et, en plus de cela, les communes sont tout à fait attentives à ce que tout se passe bien avec les organisateurs. En ville d’Yverdon, où se passe la Fête au lac, avant de remplir le formulaire du portail POCAMA, une concertation se fait avec les responsables communaux et notamment ceux qui s’occupent de l’environnement, pour que tout se passe bien. Le nombre et la nature des déchets qui peuvent en résulter sont définis et tout est mis en place pour éviter ce que craint justement Mme Jaccard. Nous mettons en place de la vaisselle consignée et subventionnée par la ville, des containers à verre et à PET sont mis à disposition, des mini-déchetteries sont réparties sur l’ensemble des terrains utilisés, des cendriers de poche sont distribués, enfin tout ce que l’on peut imaginer qui permette de cadrer la présence de 8'000 personnes sur un site pendant deux jours. Ce n’est pas le même ordre de grandeur que le Montreux Jazz festival, mais au niveau du lieu où cela se passe, il faut avoir une attention particulière. Je rappelle aussi que la demande POCAMA comprend de multiples questions. Pour la petite histoire, il faut aussi annoncer quels animaux se trouveront sur le site pendant la manifestation, avec les autorisations du Service vétérinaire : les trois brochets et les quatre truites exposés par le garde pêche dans un local adéquat, avec la quantité d’eau nécessaire, les quatre chevaux de trait qui doivent être très bien soignés et ont le droit de s’arrêter pour tirer des passagers dans une calèche, ou encore des chiens de sauvetage aquatique, pour lesquels il faut un service de sécurité spécialisé pour pouvoir les exhiber devant le public.

Encore une fois, le problème n’est pas là et c’est pourquoi j’invite le plénum à refuser le postulat, parce que la problématique vient du comportement des privés, qui vont au bord des cours d’eau ou des lacs pour se détendre, individuellement ou en groupe, et que ; c’est là que les nuisances se produisent. On ne peut pas encore charger le canton, qui fait déjà tout son possible avec l’information et les autorisations qu’il décerne pour que la commune responsable puisse autoriser la manifestation ; tout cela est déjà fait. Il faut plutôt intervenir sur le plan de l’éducation, en particulier des jeunes et des enfants. C’est à eux qu’il faut expliquer tout cela, car ils sont très réceptifs. Merci de votre attention et de refuser ce postulat, afin de laisser avancer l’affaire de manière que les organisateurs ne soient pas surchargés, alors que l’Etat n’a pas le personnel suffisant pour régler toutes ces problématiques. Les problématiques individuelles doivent être prises en compte ici.

M. Olivier Epars —

J’interviens afin de confirmer ce qui concerne le nettoyage du Léman. Dans le cadre de ma fonction à la réserve des Grangettes, cela fait 30 ans que je m’occupe du nettoyage annuel d’une portion de rive de près de 2,5 kilomètres. Je puis effectivement confirmer que les déchets de grande ampleur sont en diminution, mais par contre, il y a beaucoup plus de petits déchets, du style des bouteilles en PET trouvées en énorme quantité. Je crois donc vraiment que l’Etat doit en faire encore plus, à tous les niveaux. J’ai entendu qu’un rapport était inutile, car il s’agit uniquement d’individus, mais ces individus se trouvent dans les festivals où ils vont. Au niveau de l’information, on peut et doit en faire plus, ainsi que le demande le postulat. Je vous demande donc de renvoyer le postulat au Conseil d’Etat, car le canton doit faire encore plus pour ces plastiques, qui se transforment petit à petit en microplastiques, je vous le rappelle, et deviennent une peste dans la chaîne alimentaire, qui met en danger l’ensemble de la biosphère.

M. Philippe Ducommun (UDC) —

Je commence par annoncer mes intérêts, en tant que membre de la commission et signataire du rapport de minorité. Je souscris pleinement aux propos du rapporteur de minorité et de notre collègue Pierrette Roulet-Grin. Au vu du faible nombre de demandes d’organisations nécessitant un tel concept, ainsi que la postulante elle-même vient de le dire, et au vu des différentes mesures déjà mises en place par les services de l’Etat, je vous recommande de refuser la prise en considération de ce postulat, ainsi que le fera le groupe UDC.

Mme Béatrice Métraux — Conseiller-ère d'État

J’aimerais vous dire en premier lieu que je n’ai pas siégé dans la commission et donc que je vous apporte les informations complémentaires dont je dispose depuis février de cette année. Nous avons mis en place, dans le canton, certaines mesures concernant les questions posées par Mme Jaccard. Les mesures applicables à l’échelle cantonale se situent principalement dans le domaine de l’information et de la sensibilisation, puisque l’article 14 de la Loi sur les déchets donne la compétence aux communes. Or, la répartition des compétences dans le domaine des déchets est vraiment un sujet extrêmement délicat, pour lequel nous devons justement examiner avec attention le partage des responsabilités. Voici ce qui existait déjà, ce qui est en cours et ce qui va être fait : nous poursuivons notre action avec les journées annuelles « coup de balai » organisées avec le canton de Fribourg, nous participons aux campagnes responsables.ch menées par les organismes de coordination des périmètres régionaux de gestion des déchets, depuis 2012. Nous participons encore à la promotion des événements de nettoyage déjà indiqués de l’Association de sauvegarde du Léman. Et nous prévoyons une campagne de communication liée aux déchets plastiques, dès l’adoption du postulat du député Rydlo (16_POS_194) dans laquelle nous pourrons inclure des messages de sensibilisation spécifiques aux déchets liés à la situation sanitaire. Une discussion à ce sujet entre la Coopérative romande de sensibilisation à la gestion des déchets (COSEDEC) et les périmètres de gestion sera proposée en mars.

Pour POCAMA, je vous rappelle qu’il contient un onglet « organiser une manifestation responsable et durable » qui contient plusieurs points : trouver les bons sites, gérer les transports et les déchets ; on y explique l’outil « kit manif ». Alors, il est vrai qu’il était prévu d’évaluer ce dernier outil après plusieurs grandes manifestations, qui n’ont malheureusement pas pu avoir lieu. On pourra donc l’évaluer dès que les manifestations pourront reprendre. Bien évidemment, la décision appartient à votre autorité. La Direction générale de l’environnement (DGE) n’a pas les moyens d’intervenir directement, comme il a été dit. Nous faisons des actions de prévention et de sensibilisation ; une autre action sera menée lorsque le postulat Rydlo viendra en discussion devant votre plénum et nous suivrons les décisions de votre autorité, mais je puis déjà vous garantir que la problématique soulevée par Mme Jaccard est prise en considération par la DGE.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 69 voix contre 67 et 2 abstentions.

M. Sergei Aschwanden (PLR) — Rapporteur-trice de minorité 1

Je demande le vote nominal.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 députés.

Celles et ceux qui acceptent la prise en considération du postulat et son renvoi au Conseil d’Etat votent oui, celles et ceux qui s’y opposent votent non ; les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil prend le postulat en considération par 71 voix contre 67.

*insérer vote nominal

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