Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 8 novembre 2022, point 22 de l'ordre du jour

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RC n°2_EMPD 248 Gérard Mojon avec annexe

RC_EMPD_248

EMPL-D et préavis_ texte adopté par CE_248_VF

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Exposé des motifs et projet de loi modifiant la loi vaudoise sur l’énergie du 16 mai 2006
(contre-projet du Conseil d’Etat)

Suite du premier débat

Le débat est repris.

La semaine passée nous avons voté en faveur du principe de l’innovation. Nous sommes maintenant parvenus au moment d’aiguiller la suite de nos débats : le contre-projet ou le texte de l’initiative.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

Au vote final, la commission vous recommande d’accepter le projet de loi tel qu’issu du contre-projet par 7 voix et 1 abstention. Quant à lui, le projet de loi issu de l’initiative est refusé par 5 voix contre 2 et 2 abstentions, au profit du contre-projet.

 

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Le Grand Conseil opte pour le contre-projet du Conseil d'Etat par 100 voix contre 1 et 10 abstentions.

Article premier.

Art. 30a.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

Suite aux propos précédents, la commission entre en matière et accepte l’article 30a qui ouvre la porte au décret. Je vous encourage donc à accepter la modification de l’article 30a.

M. Guy Gaudard (PLR) —

Je tiens à proposer un amendement à l’article 30a. J’aimerais que soit ajouté « sauf pour les chauffages décentralisés. » Cet amendement allégerait les frais éventuels des propriétaires qui devraient équiper leur maison de conduites hydrauliques ou d’un nouveau type de chauffage.

« Art. 30a. – Al. 1 : Le montage et le renouvellement de chauffages électriques à résistance pour le chauffage :
a. des bâtiments, sauf pour les chauffages décentralisés ;
b. idem ;
c. idem ;
sont interdits. »

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Vous ne me voyez pas insensible à la situation des petits propriétaires ou des propriétaires retraités qui se trouvent face à l’obligation de remplacer leur chauffage électrique décentralisé. Toutefois, l’un des premiers articles de la loi que nous adoptons exclut les graves difficultés financières que pourraient rencontrer les propriétaires. En quelque sorte, monsieur Gaudard, ceux que vous voudriez protéger le sont déjà par principe. Pour les autres, la situation est identique à d’autres investissements. Dans un bâtiment, de temps à autre, il s’agit de remplacer le chauffage, et cela représente des frais sous forme d’investissements dans la durée – c’est d’ailleurs la situation dans laquelle je me trouve, à titre personnel. En conclusion, je vous conseille de ne pas suivre l’amendement de M. Gaudard, sachant encore une fois que ceux qui pourraient se trouver face à des difficultés financières sont protégés par un autre article de cette même loi.   

Mme Claire Attinger Doepper (SOC) —

Pour ma part, je vous recommande de refuser cet amendement qui n’a pas été présenté en commission, a priori, même si à l’évidence des amendements peuvent toujours être présentés en plénum. Toutefois, monsieur Gaudard, il me semble que cet amendement n’apporte pas tellement d’avantages, si ce n’est le maintien des chauffages électriques. Dans ce sens, je vous recommande de ne pas l’accepter.

M. Hadrien Buclin (EP) —

De la même manière, je voudrais vous inviter à rejeter cet amendement. D’abord, il aurait effectivement été appréciable, de la part d’un membre de la commission, de présenter cet amendement lors des travaux de cette dernière. Ensuite, sur le fond, je vous invite à le rejeter, car il réduirait considérablement la portée du décret. En effet, même s’il ne s’agit que de petites installations décentralisées, lorsque vous les cumulez, alors qu’elles seraient exemptées de la nécessité de l’assainissement, cela représente au final une consommation d’électricité tout à fait substantielle. Ainsi, je considère la réduction de la portée du décret assez dommageable. En effet, comme nous avons eu l’occasion de le dire, le décret est essentiel pour réduire les pics de consommation d’électricité en hiver. Et enfin, comme l’a indiqué M. Haury, une cautèle permet de « protéger » les propriétaires qui peuvent démontrer qu’ils n’ont pas les capacités financières de procéder à cet assainissement.

M. François Cardinaux (PLR) —

Nous faisons fausse route ; il faut suivre la proposition de M. Gaudard. En effet, aujourd'hui, on parle beaucoup d’électricité – qui est quelque chose de fantastique. On imagine donc des gens qui ont entrepris des travaux pour décentraliser leur chauffage, après qu’on les y a encouragés. Et aujourd'hui, on veut les détruire. Par conséquent, il faut au minimum approuver la modification.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Je déclare mes intérêts en tant que directeur d’un distributeur d’énergie ; je suis président de Multidis, l’Association romande des distributeurs multifluides et membre de la Commission énergie et environnement. Lors des précédentes séances plénières, j’ai pu rappeler pourquoi il est si important d’arrêter rapidement les chauffages électriques. Tout d’abord, nous devons mettre en œuvre la révolution énergétique, et pour des raisons d’efficience, permettre le remplacement des chauffages fossiles par des pompes à chaleur (PAC) notamment, ainsi que faire passer la mobilité de l’énergie fossile à l’électrique. Ensuite, ce qui est sans doute devenu paradoxalement le plus urgent et le plus important : il s’agit du moyen le plus rapide – avec probablement la construction d’éoliennes, et je me réjouis que certains collègues y soient très favorables – de diminuer le risque de pénurie l’hiver prochain. En effet, pour rappel – il me semble très important de bien l’entendre – la consommation des chauffages électriques représente 15 à 20 % de la consommation hivernale. Lors de la dernière séance, nous avons longuement discuté d’un décret qui permet des économies inférieures à 1 %, alors qu’ici, il s’agit de 15 à 20 % !

J’ai aussi entendu, dans le débat précédent, combien la droite de cet hémicycle est pressée et se réjouit de renouveler le parc immobilier pour le rendre plus durable. Nous tenons une magnifique opportunité, non seulement de le rendre plus durable, mais surtout de répondre à une question hyper urgente qui doit nous occuper : faire diminuer les risques de pénurie. En effet, si en 2023, 20 % des bâtiments chauffés électriquement y renoncent, ce seront quelque 3 % de réduction d’économie électrique, soit plus de trois fois le décret sur les économies d’énergie voté, voire plébiscité, la semaine passée. Selon PME magazine – je suis aussi chef d’entreprise – les PME helvétiques considèrent que la hausse des coûts de l’énergie cet hiver est le plus gros risque pour leur activité ; plus d’un tiers d’entre elles considère comme élevée ou très élevée l’entrave probable à leur activité. Concrètement, 36 % des entreprises estiment que la hausse des coûts générerait des problèmes pour elles, et 28 % s’attendent même à des problèmes d’approvisionnement – à raison, d’ailleurs.

En effet, certaines et certains d’entre nous participaient hier à un séminaire des gaziers romands qui a confirmé que le passage de l’hiver 2023-2024 serait critique : la considération est unanime de la part des experts. Dans ce contexte, je cite quelques propos de l’Association suisse de l’industrie gazière (ASIG) : « Malgré ces signaux de détente, il est trop tôt pour baisser la garde, car on ne peut exclure une pénurie de gaz pour cet hiver. » Il n’en demeure pas moins que la Suisse doit malgré tout économiser l’énergie ; la sécurité de l’approvisionnement pose de nombreuses questions sur le moyen à long terme. Ainsi, l’agence internationale de l’énergie rappelle dans son rapport les défis de l’approvisionnement en gaz pour l’hiver 2023-2024, en Europe. Aujourd'hui, l’industrie gazière suisse planche sur l’approvisionnement en gaz pour l’hiver 2023-2024 ; les défis – sans gaz, surtout en hiver, et plus assez d’électricité – restent de taille. Cette thématique est par conséquent la priorité de nos PME. Aujourd'hui, nous pouvons faire beaucoup pour réduire la consommation hivernale et donc la pression sur les prix et les risques de pénurie. S’il faut choisir entre des propriétaires qui savent depuis plus de 30 ans – il ne s’agit pas de quelques années ! – qu’ils devront trouver une alternative à leur chauffage électrique, alternatives qui sont par ailleurs proposées dans le décret, et l’avenir de nos PME, je n’hésite pas : je me prononce en faveur de ces dernières. Si vous êtes sensibles à l’enjeu d’aller vers une utilisation et une production rationnelle et durable de l’énergie, je vous encourage à soutenir ce décret tel quel, sans les modifications proposées, pour que nos PME puissent affronter les hivers à venir avec plus de sérénité.

M. Guy Gaudard (PLR) —

A contrario de M. Balsiger, je nourris quand même des doutes par rapport au drame qui s’annonce, c’est-à-dire au black out et à la pénurie d’énergie. Je crois qu’à un certain moment, il faut cesser d’effrayer les gens et se montrer un peu objectifs, sachant que tous nos barrages sont pleins, que nous avons une centrale nucléaire qui tourne, que Nant de Drance est mis en route et que les collectivités publiques ont pris plusieurs moyens pour assurer un éventuel contingentement. En tant que patron électricien, j’ai participé à mettre en place plusieurs dispositifs, pour la Ville de Lausanne, qui permettront de faire face. C’est la raison pour laquelle je peux en parler au même titre que M. Balsiger qui est spécialiste de diverses branches électriques. J’aimerais que les gens se rassurent et que nous cessions de les apeurer.

La suppression des chauffages électriques est synonyme de contradiction – veuillez m’excuser si je me répète. En effet, on admet l’extension continue des bornes de recharge électrique, dont on suppose qu’elles vont raisonnablement consommer de l’énergie. Or, d’après les délais fixés tant par le Conseil d'Etat que par le Conseil fédéral, nous aurons bientôt 40 % de véhicules électriques ; je me demande bien comment nous ferons pour les alimenter. Est-ce que l’énergie dégagée par la suppression des chauffages électriques sera utilisée pour alimenter des bornes de recharge ? Le cas échéant, je trouverais cela particulièrement indu. A ce sujet, j’aimerais savoir si M. le conseiller d’Etat peut m’informer : actuellement, quelle est la part de la consommation des chauffages décentralisés dans le canton de Vaud ? Ensuite, quant à l’objectif du démantèlement du chauffage électrique, fixé par le Conseil d'Etat en 2031, quelle sera la consommation des véhicules électriques ? Ce serait intéressant de se dire qu’en 2031, la part du chauffage électrique serait peut-être de 10 Gigawattheures (GWh) et celle des voitures électriques trois fois supérieure à ce chiffre. Nous n’aurions alors strictement rien résolu et supprimé du chauffage électrique pour pouvoir installer des bornes de recharge, ce qui me semble incarner une parfaite contradiction. En outre, j’estime que le Grand Conseil n’est pas suffisamment informé à ce sujet.

M. Felix Stürner (VER) —

Dans l’histoire de l’humanité, les technologies ont systématiquement évolué avec plus ou moins de douleur. Par exemple chez les Canuts de Lyon, lorsqu’il s’agissait de fabriquer du textile ou de passer de la locomotive à vapeur à l’électrique, l’abandon d’anciennes pratiques a été accompagné d’un certain nombre de douleurs. Relativement au débat sur l’efficacité énergétique que nous avons déjà mené la semaine passée, aujourd'hui, le chauffage électrique n’est plus une technologie en accord avec le fonctionnement général de notre utilisation. A ce titre, il faut que nous sortions, que nous passions peut-être déjà au XXIIe siècle, pour entrer dans l’ère où ce type de chauffage est totalement abandonné. Dans ce sens, les Vertes et les Verts vous invitent à ne pas suivre les amendements et à vous en tenir au texte présenté, soit à ce qui fut assez largement plébiscité.

M. François Cardinaux (PLR) —

J’aurais voulu déposer une motion d’ordre, mais d’un type différent. Désormais, lorsque nous parlerons d’un sujet, pourrions-nous éviter d’évoquer les catastrophes en perspective sans aucun élément ni clair, ni net, ni précis ? Je le répète : les propositions du député Gaudard sont logiques. Les gens concernés ? Il n’y en a pas énormément, et ce sont souvent ceux qui ont déjà consenti à un effort qui sont prêts à en faire d’autres, ou des personnes âgées, et je ne conçois pas pourquoi on détruirait leur système simplement parce qu’aujourd'hui la Direction de l’énergie (DIREN), notamment, a découvert qu’il fallait absolument agir rapidement. Non, agissons riches de notre volonté, avec un plan tel qu’il nous a été présenté ! En détruire quelques-uns pour aucun avantage ? Ce n’est pas ce que j’attends de nous.

M. Yvan Pahud (UDC) —

J’ai une interrogation et une question un peu plus technique. Finalement, on veut interdire les chauffages électriques, mais électrifier le parc automobile ; à ce stade, je me demande déjà si on ne marche pas déjà un peu sur la tête. Néanmoins, voici une question un peu plus concrète qui concerne toutes les régions périphériques qui ont recours à une énergie 100 % renouvelable : le bois. En effet, dans ma région, de nombreux ménages sont chauffés avec des bûches et, souvent, l’eau chaude sanitaire est produite par un boiler électrique. Or, ce système entre complètement dans la loi qui nous est soumise et par conséquent, ces personnes vont devoir changer leur mode de chauffage. Or, si l’on veut installer une chaudière à bûches avec un chauffage qui produise l’eau chaude sanitaire, ces ménages devront investir plusieurs dizaines de milliers de francs. Je ne considère pas que cela soit normal et que toutes les personnes qui recourent à un chauffage renouvelable soient pénalisées, alors qu’elles ne chauffent que leur eau avec un boiler électrique, soit uniquement la nuit et très peu d’électricité consommée. Que ceux-là soient pénalisés ? Je ne peux y souscrire.

Quant à la remarque de notre collègue Buclin portant sur les personnes qui n’auraient pas les moyens de procéder à des travaux importants et qui ne seraient pas soumis à la loi, elle a éveillé ma curiosité. Est-ce bien cela ? Est-ce bien ce qui serait repris à la lettre c) « lorsque le recours à un autre système de chauffage est impossible ou disproportionné » ? Je serais reconnaissant au conseiller d’Etat pour ses éclaircissements. Est-ce que cela concerne les petits propriétaires qui vivent avec des prestations complémentaires et qui devraient investir massivement pour changer leur système de chauffage, mais qui n’ont pas les moyens de le faire, puisque la partie des subventions couvre peut-être 40 % de l’investissement, quand le reste devrait être emprunté auprès d’un établissement bancaire ? Ceux-ci seraient-ils considérés comme bénéficiant du « disproportionné » de la lettre c) et n’auraient pas besoin d’exécuter ces travaux ?

M. Laurent Balsiger (SOC) —

J’ai bien compris que certains souhaitent ne rien changer. Mais, si nous ne visons pas l’efficience énergétique, si nous ne voulons pas passer à une mobilité décarbonée – raison pour laquelle nous souhaitons l’électrifier et sortir du fossile, si nous ne voulons pas remplacer les chauffages à source fossile par des pompes à chaleur ou des chauffages à bois, cela signifie que nous ne voulons rien entreprendre en faveur du climat. Au moins, cela a le mérite d’être clair. Les propos que j’entends chez certains d’entre nous équivalent à dire : continuons comme aujourd'hui. Or, ce n’est tout simplement pas possible ; c’est inimaginable, et d’ailleurs, c’est ce que nous dit la COP. Nous devons nous montrer plus efficients.

Changer ces installations n’est pas compliqué et, en outre, qu’elles soient centralisées ou décentralisées, elles ont plusieurs années. Les PAC existent aussi pour les boilers ; ces technologies sont parfaitement maitrisées, et subventionnées par le biais du Programme bâtiments. Comme je l’ai indiqué, la pénurie évoquée tout à l’heure n’est pas relative à mon expertise, mais à celle de l’Association suisse de l’industrie et du gaz, qu’on ne peut accuser d’être des gauchistes primaires ou des personnes qui cherchent la durabilité à tout va, et bien au contraire. Mais je considère qu’il existe une réalité des risques de pénurie, et c’est d’ailleurs, chers collègues de la droite en particulier, la préoccupation principale des PME – comme l’indique PME magazine. Ces préoccupations doivent être entendues, et l’occasion se présente d’agir. Il est vrai que cela a un certain coût. Ici, il faut relever que le décret est bien fait, puisqu’il prévoit que ceux qui veulent faire autrement que remplacer leur chauffage électrique le peuvent, notamment par l’installation de panneaux photovoltaïques pour produire leur propre énergie renouvelable, ou par l’isolation de leur bâtiment. En outre, refaire la façade et profiter pour isoler un bâtiment qui aurait une trentaine d’années paraît judicieux – des possibilités ouvertes par ce projet de décret.

Finalement, je souhaite suggérer au Conseil d'Etat de doubler, pour l’année prochaine, les subventions pour les propriétaires qui seraient prêts à supprimer leur chauffage électrique, parce qu’ils agiraient pour le bien commun en limitant le risque de pénurie pour l’hiver prochain. En effet, si nous parvenons à faire en sorte que 20 % des propriétaires renoncent l’année prochaine à ce type de chauffages, nous en aurons tous un bénéfice, car gagnerons 3 à 4 % d’économies d’énergie sur l’électricité, ce qui nous permettra sans doute de mieux passer le cap de l’hiver prochain qui s’annonce critique. Pour quelques millions à peine, nous avons tout à y gagner. Cet engagement nous coûtera beaucoup moins que des RHT ou des soutiens aux entreprises, puisqu’en diminuant la consommation, le bénéfice est double : d’une part des prix plus bas, car la demande est moins grande et d’autre part, les risques de pénurie sont moins importants. Par conséquent, je me permets de suggérer au Conseil d'Etat de renforcer pour l’année prochaine les subventions à destination des propriétaires qui renonceraient, en 2023, à leur chauffage électrique. C’est l’occasion de mettre le pied à l’étrier et de nous aider à sortir du mauvais pas des pénuries.

M. Nicola Di Giulio (UDC) —

Nombre de spécialistes sont intervenus en lien avec les chauffages électriques jugés abusifs et beaucoup de choses ont été dites ; je tâche par conséquent d’éviter la redondance. Néanmoins, j’aimerais préciser quelques détails. Certains bâtiments de la commune de Lausanne sont chauffés à l’électricité, le stand de Vernand, notamment, ou encore les vitrines qui se situent sous le tunnel de la Place éponyme. La mise aux normes impacterait sans nul doute fortement les finances publiques lausannoises déjà catastrophiques – je ne vous apprends rien.

A la fin des années 80, les services industriels et les politiciens de l’époque encourageaient le tout électrique, vantant une énergie propre n’épuisant pas les réserves terrestres ; le saviez-vous ?  Vous le savez aussi, les Services industriels lausannois (SiL) sont aux mains des écologistes de la Municipalité lausannoise depuis 1989. L’audit interne de la gouvernance des SiL relève nombre de carences dues à la gestion municipale. En 2022, les propriétaires concernés sont devenus de « vilains profiteurs » aux yeux de certains. En revanche, ceux qui aujourd'hui tendent à les juger encouragent la production et l’achat de véhicules électriques très gourmands en énergie, ceci à l’aube d’un hiver de pénurie. Ainsi, une question me vient à l’esprit : écologie ou commerce ? Les anti-chauffages y ont-ils réfléchi ? Une fois encore, le politique semble trahir le citoyen qui avait cru à l’époque aux sornettes des autorités et voulu faire un geste en faveur de l’écologie. Si l’on peut comprendre l’interdiction des chauffages électriques dans des bâtiments neufs, on ne devrait pas pour autant punir les propriétaires, ceux qui, à l’époque, ont été abusés et ont cru, de bonne foi, faire un geste pour l’écologie ni même de soutenir quelques erreurs tactiques de certains municipaux verts qui se sont succédé à la tête des SiL.

M. Didier Lohri (VER) —

Je déclare mes intérêts : ma formation d’ingénieur du siècle passé m’a permis de bénéficier d’une éducation dominée par les mathématiques et la physique comme branches essentielles et cela fait de moi un antinucléaire, identifié comme real-aus ou pragmatique d’obédience verte.

Il existe une volonté politique de modifier la loi qui dépasse toutes les argumentations techniques entendues dans cet hémicycle. Permettez-moi de demander un peu de modération au sujet des valeurs de coefficient de performance (COP) des PAC, évoqués la semaine passée, ou d’autres valeurs de consommation d’énergie, pour démontrer la nécessité de voter cette loi. Il faut bien comprendre que les indications d’un coefficient de performance d’une PAC ne sont pas des garanties d’une gestion idéale de la noble électricité, pour se chauffer. Les nouvelles normes introduisent un élément saisonnier important. En effet, il est clairement connu que lorsque la température extérieure est inférieure à 2 degrés, le COP de la PAC peut être largement inférieur à 2, ce qui nous amène à la même situation que les radiateurs électriques pour les PAC air/eau. Peut-être est-ce là le problème que certains propriétaires ont de la peine à identifier lorsqu’ils disent qu’on les embête avec leur chauffage électrique ?

En outre, la diminution de 4 % des logements chauffés électriquement, depuis 1990, est bien plus faible que l’augmentation, dans le même laps de temps, de 11 % des logements ayant recours à l’électricité pour se chauffer. Ciblons-nous bien les objets à gros potentiel d’économie d’énergie ? Les normes soulèvent le problème suivant : notre loi devrait être plus précise au sujet des types de PAC. De plus, la priorité ne devrait pas être l’élimination des radiateurs, mais plutôt le remplacement des chaudières à mazout et à gaz. D’ailleurs, M. Balsiger est d’accord avec moi au sujet du gaz et des systèmes de chauffage à distance à énergie locale – bois, déchets, biomasse, etc. – ou d’autres éléments de conversion d’énergie en électricité. En effet, malgré les améliorations thermiques des bâtiments, il reste encore 58 % de logements chauffés par des énergies fossiles, dont certains propriétaires et retraités ne trouvent pas le financement nécessaire pour rénover. A fortiori, ce n’est guère une subvention qui les aidera, mais plutôt un cautionnement cantonal qui aiderait à économiser l’énergie.

En conclusion, je m’abstiendrai de voter une loi qui se base sur une technologie du siècle passé – Einstein l’avait déjà développée au bord de la Limmat à Zurich – inadaptée à notre climat, pour promouvoir des pompes air/eau générant une pollution sonore et augmentant notre dépendance à l’électricité – qui sera forcément nucléaire – pour garantir une puissance électrique instantanée. A cet égard, monsieur Di Giulio, le commerce nucléaire a de l’avenir, car il s’agit bien d’une puissance instantanée énorme, impossible à obtenir avec de l’énergie photovoltaïque sans délestage des installations à alimenter. Le bon sens veut qu’un choix politique ait tendu à la suppression des chauffages électriques et le plénum doit prendre ses responsabilités sur ce point. J’attends du Conseil d'Etat une deuxième phase relative à l’économie de l’énergie produite par le gaz et le mazout, pour trouver une solution de non-dépendance énergétique externe au pays, soit-elle électrique ou fossile.

M. Grégory Bovay (PLR) —

Je ne suis pas aussi spécialiste que M. Balsiger, raison pour laquelle je me permets de l’interpeller puisqu’il nous a dit qu’il n’était pas compliqué de remplacer les chauffages décentralisés. Monsieur Balsiger, j’aimerais savoir si vous avez une idée du prix moyen du remplacement des radiateurs électriques décentralisés.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Généralement et comme je l’ai indiqué, pour les bâtiments dont les chauffages sont décentralisés, les installations ont une trentaine d’années ou plus. Pour un bâtiment de cet âge, vous profitez de rénover vos sols et tout l’intérieur. Dans ce cadre, les coûts sont de quelques dizaines de milliers de francs, mais des subventions de l’ordre de quelque 20'000 francs couvrent une part importante des frais. Lorsque vous comptez la dépréciation de ce qui existe et la plus-value du renouvellement, la nouvelle valeur de votre bien immobilier couvre généralement plus que largement les frais des travaux réalisés. A l’évidence, il y a des coûts, mais ils s’appliquent à une rénovation beaucoup plus complète de l’installation ; il s’agit d’une opportunité de plus-value importante pour la maison. Bien entendu, avec les prix de l’énergie actuelle et que nous connaîtrons encore pendant quelques années, posséder un chauffage électrique chez soi n’est pas favorable au porte-monnaie.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

En tant que président de la commission, je confirme que cette dernière n’a pas eu la possibilité de se prononcer sur l’amendement de M. Gaudard. Le principe a été discuté en long, en large et en travers, mais l’amendement n’a pas été proposé en tant que tel à la commission, et il n’y a donc nul préavis de cette dernière à ce sujet.

A titre personnel, je soutiendrai l’amendement de M. Gaudard. Il me semble nécessaire de savoir ce que représente le remplacement d’un système de chauffage. En effet, si vous remplacez un chauffage centralisé, vous remplacez la chaudière ; cela a un certain prix, mais dont je peux facilement imaginer qu’il est relativement supportable. Mais si vous remplacez un système décentralisé, vous devez créer une installation de circulation d’eau dans l’ensemble de votre maison, ce qui équivaut à insérer deux tuyaux à travers l’ensemble des pièces – parce qu’il faut un tuyau pour amener l’eau chaude et un autre qui ramène l’eau plus froide. Dans une villa d’un seul étage, imaginez ce que peut représenter de mettre des tuyaux dans l’ensemble des pièces : c’est un travail considérable. Si vous êtes dans un petit immeuble, l’investissement devient rapidement plus que considérable, et si nous avons affaire à un immeuble de deux, trois ou quatre appartements, cela devient énorme. Non, monsieur Balsiger, on ne peut dire que ce n’est « pas compliqué » à entreprendre. Au contraire, ce sont des travaux considérables : il faut percer des dalles – et déjà savoir où les percer ; d’énormes études sont à faire pour savoir où faire passer les tuyaux et comment. Selon moi, il s’agit de travaux compliqués, longs et coûteux.

Ensuite, le problème réside dans la répartition des coûts. M. Haury dit finalement que ceux qui n’en ont pas les moyens devraient être aidés et c’est très certainement ce que prévoit la loi, mais elle indique qu’on peut agir si tant est que le système de remplacement n’est pas impossible ou disproportionné. Que signifie « disproportionné » ? Qui décidera si le critère s’applique ? Cela sera-t-il proportionné pour quelqu’un qui en a les moyens et disproportionné pour quelqu’un qui ne les a pas ? Nous ne sommes pas très loin d’une société à deux vitesses, ce que je ne peux accepter.

Quant au fait que ces immeubles doivent très probablement être rénovés, finalement, je peux rejoindre M. Balsiger. En effet, tous ces « immeubles électriques », comme on les appelle, datent des années 80 et 90. Cela signifie que d’ici 2030 – les dates qui sont prévues par le décret – ces immeubles auront 50, voire 60 ans. A mon avis, le problème des chauffages décentralisés va plus ou moins se résoudre de lui-même par l’âge des bâtiments. Je sais qu’en Suisse nous construisons très solidement et pour des années. Mais je considère qu’après 50 ou 60 ans de vie, le nombre de maisons munies de chauffages individuels sera très bas. Par conséquent, obliger ces gens à entreprendre des investissements qui se chiffrent en centaines voire plusieurs centaines de milliers de francs – je parle en connaissance de cause, j’en ai remplacé un chez moi et ce sont des travaux tout à fait considérables – ne me paraît pas judicieux. Laissons plutôt faire le temps, même s’il est vrai que nous consommerons un peu plus à un moment. Le coût en vaut-il vraiment la chandelle ? Je n’en suis guère convaincu. Par conséquent, je vous encourage à soutenir l’amendement de M. Gaudard.

M. Pierre-André Romanens (PLR) —

J’ignorais que mon collègue Gérard Mojon possédait autant de compétences dans la construction. Je déclare mes intérêts puisque j’appartiens à ce monde, dirigeant une entreprise dans le domaine de la construction. Plusieurs choses peuvent être ajoutées aux propos qui viennent d’être tenus. Mon cœur, côté « éco », dirait que vous avez raison : une consommation de chauffage électrique direct équivaut à quatre fois celle d’une PAC ; un discours connu et pertinent, incontestable. Mais mon cerveau éco-« logique » me fait remarquer qu’on ne peut pas tout entreprendre tout de suite, et simplement qu’il s’agit d’engagements très lourds au niveau des travaux. M. Mojon dit que cela coûte environ 100'000 à 200'000 francs ; c’est fort possible. On parle ici d’une villa individuelle ou peut-être d’une villa double, sans même mentionner toute la problématique liée aux propriétés par étage (PPE). En effet, si une personne au sein d’une PPE décide de remplacer son chauffage électrique, l’entier de la PPE ne sera peut-être pas d’accord d’entreprendre cette démarche. Nous ne parlerons alors peut-être pas de centaine de milliers de francs, mais de beaucoup plus, de gros montants d’investissement qui souvent freinent les propriétaires d’une PPE.

En outre, nous avons maintenant mis en place le rapport amiante – j’y suis favorable. Toutefois, que vous dit ce dernier ? De ne pas vous limiter à remplacer votre chauffage, mais à remplacer toutes les parties qui ont une teneur en amiante – les fenêtres par exemple – et d’en profiter pour isoler. Je vais l’exprimer un peu crûment : parfois, il est plus simple de déconstruire la maison et d’en reconstruire une autre. En d’autres termes, du côté « eco », j’ai envie de suivre M. Balsiger, mais du côté « logique », je penche plutôt pour l’amendement de M. Gaudard. Nous sommes confrontés à un gros problème. Devons-nous accepter cet amendement pour donner un peu de place à la discussion et laisser du temps au temps ? J’ignore encore où mon cœur va pencher… toutefois, je considère que M. Gaudard a un tout petit peu raison.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Il me semble indispensable de répondre à MM. Lohri et Mojon. Monsieur Mojon, je comprends mal comment vous estimez des rénovations à plusieurs centaines de milliers de francs, hormis si vous avez refait tout l’intérieur ou si vous possédez une villa de plusieurs centaines de mètres carrés. Toutefois, vous ne pouvez imputer l’entier des réfections intérieures au chauffage. Equiper de conduites un bâtiment équivaut à quelques dizaines de milliers de francs, par conséquent beaucoup moins que ce que vous annoncez et sans même tenir compte des subventions.

Par ailleurs, pour les PAC, cher collègue Lohri, il est vrai qu’au siècle passé, elles étaient moins efficientes, mais leur COP a bien progressé, surtout pour les air-eau, puisqu’il a presque doublé depuis le début. En outre, le règlement de l’énergie prévoit de ne pas les installer à une altitude supérieure à 1000 mètres. Des précautions sont par conséquent prises pour garder un rendement élevé, comme l’a souligné notre collègue Romanens.

De plus, ce décret n’impose pas les PAC. Je le répète – et c’est à mon sens le grand bénéfice de ce décret – il a été réalisé par un groupe de travail composé de représentants des milieux de l’énergie et de la construction. La mise en place d’un circuit d’eau n’est pas imposée, et des alternatives, des choix sont possibles, comme la rénovation énergétique du bâtiment qui, si elle est suffisamment efficiente, permet de garder son chauffage électrique – une stratégie gagnant-gagnant. En effet, une surface de toiture suffisamment importante permet la pose de panneaux photovoltaïques au lieu de remplacer le chauffage électrique. Encore une fois, nous devons nous montrer responsables et ne plus gaspiller l’électricité. Si nous le pouvions au moment où ces chauffages ont été conçus, les temps changent. A moins que nous voulions reconstruire des centrales nucléaires… mais si nous voulons nous en passer, nous devons économiser l’énergie et l’utiliser à bon escient. En conclusion, je vous invite à soutenir ce décret tel qu’il vous a été présenté et à refuser l’amendement Gaudard.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Je vous rends attentifs au fait que d’autres amendements restent encore à discuter ; j’aurais souhaité que nous puissions avancer dans ce premier débat.

M. Guy Gaudard (PLR) —

Je vais essayer d’intervenir pour la dernière fois quant à cet amendement, puisque trois autres suivent. Monsieur Balsiger, lorsque M. Mojon estime des coûts entre 100'000 et 200'000 francs, il ne se réfère pas seulement à la pose des tuyaux. En effet, beaucoup de travaux annexes doivent être pris en compte : peinture, tapisseries, percement, isolation des tuyaux. En tant que béotien électricien, je me pose une question. Juridiquement, dans les années 80, un permis de construire avait été accordé aux propriétaires de maisons en construction avec une obligation de chauffer électriquement. Peut-on revenir 40 ans plus tard et discuter des droits du propriétaire relativement au permis de construire ? Existe-t-il une jurisprudence qui nous autoriserait à supprimer ces radiateurs électriques et exiger leur démantèlement ? Je vous remercie pour votre réponse et tiens à souligner – qui ne tient pas de l’excuse, mais de l’explication – que si les amendements n’ont pas été annoncés lors de la dernière commission, c’est qu’elle était un peu particulière, avec deux présidents et une moitié des commissaires ayant changé entre la première et la seconde séance, et des amendements différents ; il était un peu compliqué de s’y retrouver.

Mme Aude Billard (SOC) —

Pour être brève, j’ai le sentiment que nous pourrions peut-être tous tomber d’accord si nous entendions la réponse du Conseil d'Etat sur les possibilités de dérogation. En effet, je comprends les arguments qui ont été évoqués précédemment sur une demande qui serait disproportionnée, à savoir exiger de quelqu’un de refaire entièrement la tuyauterie d’un bâtiment. Pourtant, à la lecture des motifs exposés, il me semble que ces cas sont déjà traités, notamment par l’article 5 « dérogations ». Le principe de proportionnalité est donc également applicable. Par exemple, il pourrait être disproportionné d’exiger la réfection complète du système de distribution d’eau chaude sanitaire d’un immeuble lorsque le chauffe-eau décentralisé situé dans un des logements tombe en panne. Or, je crains que si nous acceptons l’amendement Gaudard, cela s’étende à une trop grande proportion de chauffages décentralisés et non à ceux qui ont motivé la demande en premier lieu, c’est-à-dire les tout petits propriétaires qui n’ont pas les moyens de refaire entièrement leur chaufferie. Je souhaite vraiment que nous puissions obtenir une clarification de la part du Conseil d'Etat sur le fait que ces cas sont déjà traités dans l’article « dérogations » afin que nous puissions aller de l’avant avec un projet de décret qui me semble assez équilibré.

M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) —

Tout cela me rend passablement perplexe. Pour changer ces chauffages décentralisés, pour la plupart, on tape sur les doigts de petits propriétaires qui ont suivi les recommandations de l’époque en installant un chauffage électrique décentralisé. Or, aujourd'hui, on les accuse d’être d’énormes « gaspilleurs », on les met au pilori, alors que celui qui s’achète un véhicule 4x4 électrique qui consomme énormément d’électricité est adulé ! Bravo ! Vous allez dans le bon sens ! A côté de notre Parlement sera bientôt installée une grande roue qui va tourner pendant trois mois et consommer énormément d’électricité… et tout le monde applaudira ! S’il vous plait, gardons les pieds sur terre. Je rejoins complètement mon collègue Mojon : le temps arrangera les choses et dans 15 ans, on ne parlera plus des chauffages décentralisés. Si nous pouvons déjà remplacer tous les chauffages électriques centralisés, cela sera déjà un grand avancement. Comme je l’ai dit, gardons les pieds sur terre et acceptons l’amendement de M. Gaudard qui va dans le bon sens.

M. Didier Lohri (VER) —

Comme M. Balsiger m’a interpellé sur mes propos, pour résumer et à votre instar, je pense que nous aurions pu aller beaucoup plus vite si nous étions tous d’accord qu’il existe une volonté politique de modifier la loi, qui dépasse tous les arguments techniques. Le débat sur l’article 30 – faut-il laisser ces 4 % de logements munis de radiateurs électriques directs ? – est bien peu de chose par rapport à tous les autres problèmes que pose l’alimentation électrique. Par ailleurs, veuillez m’excuser d’avoir cité les PAC du siècle passé, mais je rappelle que les dernières modifications au niveau européen font que vous ne pouvez plus parler d’un COP annuel, mais bien saisonnier. Je m’abstiendrai donc sur l’article 30 et la proposition de M. Gaudard, car pour moi, aller chercher ces quelques pour cent d’énergie sur les radiateurs électriques décentralisés équivaut à se poignarder à coups de carottes. Ayant indiqué que j’étais un pragmatique, à mon avis les installations centralisées devraient être dans le viseur, afin de réaliser des économies et de favoriser les énergies bois et autres, plutôt que tout ce qui est lié à une consommation d’énergie électrique.  

M. Vassilis Venizelos (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Je vous remercie pour cet intéressant débat sur l’avenir des chauffages électriques, qui a débuté en 2006 déjà suite au dépôt du projet de révision de la Loi sur l’énergie. En 2013, ce Parlement a décidé d’en sortir la disposition relative aux chauffages électriques pour éviter un référendum. L’année 2014 a vu le dépôt de l’initiative Pidoux, et ensuite des discussions ont eu lieu avec les différents acteurs concernés pour savoir comment calibrer le dispositif et prévoir toute une série d’exceptions, qui ont alimenté la première partie du présent débat. Ces exceptions sont très bien présentées dans le schéma que je vous invite à consulter en page 21 et qui explicite toutes les possibilités de dérogation pour les chauffages décentralisés, notamment aux articles 5, puis 9 à 11 du décret. Je comprends parfaitement les préoccupations qui ont été exprimées pour nous assurer que le dispositif ne soit pas trop injuste et n’impacte pas trop certains petits propriétaires. Cependant, je me permets de préciser que des débats ont eu lieu dans de nombreux cercles, notamment la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie, avec les différents défenseurs des propriétaires et avec les acteurs concernés par le dispositif proposé ; des accords et des pesées d’intérêts ont été menés. Mais il est totalement sain et normal que ce Parlement se saisisse à nouveau de ces différentes questions.

Premièrement, il me semble nécessaire de rappeler que les chauffages décentralisés représentent 80 % de la consommation électrique des chauffages de ce type. Ainsi, si vous excluez les chauffages décentralisés du dispositif, il ne touchera plus que 20 % de l’énergie consommée par l’ensemble du chauffage électrique ciblé par ce décret. Ainsi, 80 % des 10 % de la consommation électrique vaudoise est ciblé par les exceptions supplémentaires que l’on souhaiterait introduire dans le dispositif. Je tiens à rappeler à nouveau que les articles 9 à 11 prévoient déjà différents dispositifs qui répondent à tous les cas de figure de toutes les préoccupations entendues, sauf la condition de ressource économique, effectivement. Le débat a eu lieu lors des différentes étapes de l’élaboration du décret, mais cet élément a été mis de côté.

Je rappelle également que les montants forfaitaires des soutiens cantonaux prévus déjà aujourd’hui par le biais du Programme Bâtiments pour permettre le remplacement des chauffages électriques s’élèvent à 7500 francs pour un forfait de base, soit 2500 francs de plus que pour le remplacement d’un chauffage à mazout, et ce sans parler des soutiens supplémentaires qui peuvent être ajoutés en fonction de la taille et de la consommation du bâtiment concerné. Le Programme Bâtiment déploie donc des soutiens pour accompagner les propriétaires qui – si vous votez ce décret et en fonction des amendements que vous allez déposer et des délais d’assainissement que vous fixerez – bénéficieront au moins pendant dix ans de l’appui financier de l’Etat pour changer leur chauffage électrique. Ainsi, il me semble que le dispositif proposé ici est nuancé, proportionné, et qu’il prend en compte les différents cas d’exception, par ailleurs tout à fait légitimes.

A ce sujet, je me permets de rappeler que le débat a été mené avec les différents cercles et que le dispositif a été proportionné pour intégrer l’ensemble des cas qui pourraient être confrontés à des soucis de ressources. A nouveau, je vous invite à consulter les articles 9 à 11 du décret qui permettent d’affranchir les propriétaires qui auraient posé des panneaux solaires ou consenti à des efforts d’assainissement et d’isolement. Ainsi, en fonction des différentes catégories, les propriétaires possédant un chauffage électrique pourraient être exemptés de cette obligation. Ce dispositif est très bien décrit en page 21 et il prévoit une série d’exceptions, notamment par la reconnaissance des efforts qui auraient pu être déployés par les propriétaires ; les solutions me paraissent absolument nuancées et mesurées. Ainsi, comme rappelé en début d’après-midi dans le cadre des réponses aux questions orales, le Conseil d'Etat mettra 60 millions à disposition via le Programme Bâtiments, en 2023, non seulement pour l’assainissement énergétique – l’isolation – mais aussi pour le remplacement des chauffages électriques et à mazout. Par conséquent, affaiblir le dispositif mis en place en le détricotant mettrait à mal l’ensemble des efforts envisagés par le Conseil d'Etat pour atteindre les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés en matière de transition énergétique et que vous avez soutenus par vos différents votes, ces dernières années.

Diverses questions m’ont été posées et j’espère ne pas en avoir oublié. Il me semble avoir répondu à la question de la consommation des chauffages décentralisés qui correspondent à 80 % des 10 % de toute la consommation électrique représenté par les chauffages. Quant aux véhicules, leur consommation électrique sera assurément beaucoup plus importante qu’aujourd'hui – à l’évidence. En effet, les véhicules électriques sont tout d’abord beaucoup plus efficients que les véhicules thermiques et, ensuite, incontournables pour se déplacer si l’on considère que cela ne sera plus possible de le faire via des énergies fossiles – soit un objectif fixé par l’Accord de Paris à l’horizon 2050 et soutenu, me semble-t-il, par le Parlement. Par conséquent, à part la mobilité douce, si l’on exclut les énergies fossiles, le seul moyen de se déplacer reste l’électricité. Alors que, pour se chauffer, d’autres moyens peuvent être envisagés, tels que la géothermie, ou la biomasse, par exemple. Une consommation faible est un motif suffisant pour être exonéré de cette obligation. A nouveau, il ne s’agit pas de changer tous les chauffages électriques de tous les chalets de montagne et d’aller mettre le couteau sous la gorge de tous les petits propriétaires, mais bien plutôt d’agir sur un levier important de consommation électrique, qui représente 10 % dans sa globalité. C’est-à-dire que 80 % de ces 10 % par les chauffages électriques est une proportion relativement importante.

Si je comprends parfaitement les préoccupations exprimées, je le répète : le dispositif proposé est vraiment proportionné et il a été construit avec les différents acteurs concernés, au cours des dix dernières années. Apporter des soutiens financiers plus importants, comme le propose le député Balsiger, est une solution envisageable, si ce Parlement souhaite que l’on produise un effort plus important pour aider les propriétaires de chauffages électriques à les changer. Néanmoins, cela s’opérera au détriment d’autres mesures. En effet, faut-il privilégier les propriétaires qui ont des chauffages électriques, ou plutôt ceux qui ont des chauffages à mazout, sachant que ces deux objectifs font partie des priorités du Conseil d'Etat ? Ce sont des arbitrages auxquels il faudra procéder. Je me permets de préciser qu’aujourd'hui, la fourchette des 7500 francs destinés au remplacement des chauffages électriques et des 5000 pour les chauffages à mazout peut être revue à la hausse. Toutefois, compte tenu des commandes actuelles et de la capacité du marché à répondre aux différents besoins, cela n’aura probablement aucun effet sur la pénurie énergétique qui nous occupe cet hiver.

Enfin, certains ont l’impression qu’on crie au loup en parlant de pénurie énergétique et de la nécessité de s’affranchir des énergies fossiles. Pourtant, tous les rapports scientifiques nous rappellent la nécessité d’agir rapidement face à des enjeux à moyen et long terme liés au réchauffement climatique et, à court terme, relativement à la pénurie énergétique qui nous occupe dès cet hiver. Peut-être qu’il ne se passera rien, me direz-vous et c’est vrai. Toutefois, des incertitudes demeurent qui nous accompagneront les hivers suivants, l’année prochaine et la suivante. Le Conseil fédéral comme le Conseil d'Etat avaient d’ailleurs déjà identifié cette problématique et prévoyaient une pénurie énergétique, mais plutôt à l’horizon 2025. Elle se présente malheureusement un peu plus tôt, ce qui nous rappelle qu’en matière d’électricité, nous sommes fortement dépendants de l’importation, surtout l’hiver. Cette situation implique la nécessité de favoriser l’efficience énergétique et les économies d’énergie sans perdre nécessairement son confort, avec l’accompagnement et le soutien de l’Etat. C’est dans cet état d’esprit que le décret a été construit et que je vous invite à le voter, et à refuser cet amendement.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

L’amendement Guy Gaudard est accepté par 68 voix contre 66 et 4 abstentions.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Je demande le vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Guy Gaudard votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Guy Gaudard est accepté par 68 voix contre 67 et 4 abstentions.

* insérer vote nominal

L’article 30a, amendé, est accepté par 68 voix contre 66 et 3 abstentions.

M. Felix Stürner (VER) —

Je demande le vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’article 30a, amendé, votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, 68 membres se prononcent en faveur de l’article 30a amendé, 68 s'y opposent et 3 s'abstiennent.

L'article 30a, amendé, est accepté, la présidente ayant tranché en sa faveur.

* insérer vote nominal.

Les articles premier et 2, formule d'exécution, sont acceptés à l’unanimité.

Le contre-projet (loi) est adopté en premier débat.

Exposé des motifs et projet de décret
sur l’assainissement des chauffages et chauffe-eau électriques
(contre-projet du Conseil d’Etat)

Premier débat

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en premier débat.

Art. 1 à 6. –

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

Je vais avancer article par article, sans quoi vous ne vous y retrouverez pas. La commission a essentiellement discuté de quelques articles, mais nous parlions chaque fois de dates, et si je vous les présente d’un seul coup, vous ne saurez plus à quelle date vous êtes ; vous ferez des avancées dans le futur et des retours dans le passé. Je me contenterai donc de commencer par les dispositions générales et j’imagine que la présidente fera comme moi. Les articles 1 à 6 ont été acceptés à l’unanimité par la commission.

M. Hadrien Buclin (EP) —

L’article 4 étant consacré au devoir d’annonce, j’en profite pour dire que j’ai été étonné d’apprendre, lors des travaux de commission, combien le contrôle des pouvoirs publics est actuellement déficient. Je rappelle qu’aujourd’hui, la Loi sur l’énergie interdit de remplacer un chauffage électrique par un nouveau chauffage électrique et que le contrôle de cette interdiction est du ressort des communes. A ce que j’ai pu constater en commission, le canton ne dispose de pratiquement aucune information sur l’effectivité de ces contrôles par les communes. De plus, l’assainissement des chauffages électriques est mené à un train d’escargot, avec environ 200 chauffages assainis par année sur les 15 à 20'000 chauffages électriques en fonction. Au vu de cette lenteur, il me semble que des installations sont remplacées « en douce » par de nouveaux chauffages électriques, en toute illégalité. Le fait que M. Gaudard, lors de la dernière séance, ait brandi un modèle de chauffage électrique neuf sur le mode de la promotion publicitaire m’a conforté dans cette impression.

La question des contrôles me laisse assez insatisfait et j’ai pas mal de doutes concernant le respect de l’interdiction de remplacer un chauffage électrique par un nouveau chauffage électrique. J’appellerai en tout cas les autorités cantonales à se saisir de la problématique sur la base du présent décret qui leur donne désormais des prérogatives en termes de contrôle. Je les appelle donc à renforcer les contrôles et à prendre des sanctions au besoin.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Les articles 1 à 6 sont acceptés à une large majorité.

Art. 7. –

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

L’article 7 a été accepté par l’unanimité des membres de la commission.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

L’article 7 est accepté à une large majorité.

Art. 8. –

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

La discussion a porté – c’est assez simple à comprendre – sur la date limite des changements et donc du délai d’assainissement. Deux amendements ont été proposés à la commission. Le premier proposait de fixer la date limite des remplacements à 2028 et le deuxième proposait la date de 2033 qui correspond à la potentielle subvention fédérale qui pourrait être allouée dans le cadre par le contre-projet à l’initiative « des glaciers. » Le décret proposé par le Conseil d’Etat vous proposait l’année 2036, et le Conseil d’Etat s’y est tenu. Lors des débats de la commission, les deux amendements ont été opposés (2028 et 2033) et la date de 2033 a été préférée par 5 voix contre 2 et 2 abstentions. La date de 2033 ensuite opposée à la proposition du Conseil d’Etat (2036) a été préférée, de manière à pouvoir profiter au maximum des montants alloués par la Confédération. Au vote final, l’article amendé avec une date butoir en 2033 a été accepté par 5 voix contre 2 et 2 abstentions.

« Art. 8. – al. 1 : Le délai d’assainissement est fixé au 1er janvier 20362033 au plus tard. »

M. Hadrien Buclin (EP) —

Notre discussion a perdu beaucoup de sa portée, puisque l’amendement de M. Gaudard vide le décret d’une large partie de sa substance. En effet, désormais et si j’ai bien compris, 80 % des chauffages électriques ne sont plus concernés par ce décret. Je dois dire que je suis assez choqué par l’évolution du débat et par cet amendement sorti d’un chapeau et dont la commission n’avait jamais discuté.

Je présenterai néanmoins un amendement à cet article qui vise à anticiper le délai d’assainissement au 1er janvier 2030 plutôt que 2033 comme proposé par la commission. Avec ma proposition, les propriétaires auraient 7 ans pour procéder au remplacement ou à l’assainissement de leur chauffage électrique. Ce délai me semble parfaitement suffisant et je le trouve même généreux compte tenu de l’urgente nécessité d’assainir ces chauffages pour réduire les pics de consommation électrique en hiver. Et également étant donné que, comme l’a rappelé M. Balsiger tout à l’heure, les propriétaires de chauffages électriques savent depuis déjà trois décennies qu’ils doivent procéder à l’assainissement de l’installation. Je rappelle que 2030 est le délai en vigueur dans le canton de Neuchâtel, comme cela nous est précisé en page 3 du préavis du Conseil d’Etat. Je ne vois donc pas pourquoi un délai qui serait possible à Neuchâtel ne le serait pas dans le canton de Vaud. J’espère que ce dernier argument permettra de convaincre une majorité de se montrer un peu plus ambitieuse dans la transition vers une énergie propre, même si le décret a été très affaibli par la décision précédente.

« Art. 8. – al. 1 : Le délai d’assainissement est fixé au 1er janvier 2030 au plus tard. »

M. Vassilis Venizelos (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

J’aimerais faire deux rappels, qui figurent dans les rapports. En 1993 sont apparues les premières interdictions de pose de chauffage électrique, de façon indirecte, mais en tout cas pour les nouvelles constructions. De cette date à aujourd’hui, il y a donc trente ans, soit une durée semblable à la durée d’amortissement d’un tel investissement. Comme cela a été rappelé par le président de la commission, si le contre-projet à l’initiative « des glaciers » entre en vigueur en 2023 ou 2024, il proposera un dispositif de soutien financier sur dix ans. Ainsi 200 millions, grosso modo, seront à la disposition du canton de Vaud sur dix ans, pour soutenir des changements de chauffage électrique ou à mazout.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Je vous propose d’opposer les deux amendements, soit celui de la commission et celui proposé par M. Buclin.

L’amendement de la commission, opposé à l’amendement Hadrien Buclin, est préféré par 66 voix contre 61 et 1 abstention.

Mme Mathilde Marendaz (EP) —

Je demande un vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement de la commission votent oui ; celles et ceux qui préfèrent l’amendement Buclin votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Hadrien Buclin est préféré par 66 voix contre 65.

* insérer vote nominal

L’amendement Hadrien Buclin est accepté par 66 voix contre 65.

M. Fabien Deillon (UDC) —

Je m’étonne que l’on n’ait pas opposé les deux amendements.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

C’est ce que nous avons fait tout à l’heure. Nous avons opposé les deux amendements et maintenant, nous venons de voter sur l’amendement Hadrien Buclin, qui a été validé par votre plénum.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

Je demande un vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui acceptent l’amendement Hadrien Buclin votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Hadrien Buclin est accepté par 68 voix contre 66.

Insérer vote nominal*

L’article 8, amendé, est accepté par 69 voix contre 68.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je demande un vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui acceptent l’article 8 amendé votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, 69 membres acceptent l’article 8, amendé, et 69 membres s’y opposent.

Insérer vote nominal*

L’article 8 amendé est accepté, la présidente ayant tranché en sa faveur.

Art. 9. –

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

Cet article a été accepté par la commission à l’unanimité.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

L’article 9 est accepté à l’unanimité.

M. Vassilis Venizelos (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Je me permets de préciser qu’après le vote sur le projet de loi, les articles 9, 10 et 11 du décret n’ont plus vraiment de raison d’être, puisque votre Parlement a décidé d’exclure les chauffages décentralisés du dispositif mis en place. Par conséquent les articles 9, 10 et 11 n’ont plus d’effet si vous confirmez votre vote sur le projet de loi en deuxième débat, si la majorité de ce Parlement décide de sortir les chauffages décentralisés. Il faut néanmoins aller au bout du processus parlementaire dans le cadre du premier débat, mais dans une perspective de confirmation du vote au deuxième débat, cela impliquerait de modifier le décret. Dans ce cas, le Conseil d’Etat se réserverait la possibilité de le retirer.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Merci, monsieur le conseiller d’Etat pour ces précisions. Nous prenons tout de même l’article 10 pour lequel nous avons des propositions d’amendement.

Art. 10.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

Ici aussi, c’est une affaire de dates, mais ce ne sont pas les mêmes qu’à l’article 8. Deux amendements ont été proposés. L’un propose une date butoir à 2028 et l’autre à 2033 pour coller avec le subside fédéral. A l’opposition des deux amendements, la date de 2028 a été préférée à 2033, pour respecter le décalage initial proposé par le Conseil d’Etat dans son décret original. Ensuite, cet amendement a été opposé à la version du Conseil d’Etat et celle-ci (2031) a été préférée à l’amendement proposant 2028. Au vote final, l’article 10 non amendé a été accepté par 6 voix et 3 abstentions. On en reste donc à la proposition d’origine du Conseil d’Etat, parce qu’il avait décalé le centralisé et le décentralisé.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Je présente un amendement à l’alinéa 2, lettre a, de cet article 10. Il s’agit du cas que j’ai présenté précédemment de tous ces bâtiments, de toutes ces fermes chauffées au bois et dans lesquels l’eau chaude sanitaire uniquement est chauffée par un petit boiler. Les consommations électriques sont donc très basses et n’ont quasiment aucune incidence sur les pics électriques. Vis-à-vis de toutes les personnes qui se chauffent avec la source d’énergie renouvelable qu’est le bois, je trouve important qu’elles ne soient pas pénalisées. Il s’agit donc vraiment d’une mesure très light et qui ne va toucher que peu de personnes, mais je ne voudrais pas que ces personnes qui jouent le jeu soient pénalisées.

Je rappelle l’alinéa 2 complet :

« Art. 10 – Al 2 : Sur présentation d’un justificatif attestant de la consommation totale d’électricité, le service peut :

  1. dispenser provisoirement de l’obligation d’assainir en cas de consommation totale d’électricité considérée comme faible et lorsqu’un bâtiment est chauffé par une source d’énergie renouvelable, mais que seule l’eau chaude sanitaire est produite par un boiler électrique. »
M. Guy Gaudard (PLR) —

Je suis l’une des trois personnes qui s’est abstenue en commission, parce que j’avais trois amendements en tête que je vous présente.

Le premier amendement concerne une nouvelle lettre c à cet article 10 :

« Art. 10. – al.2, lettre c (nouvelle) : Les chauffages électriques seront démantelés uniquement en cas de vente du logement, pour autant qu’il ne fasse pas partie d’un lot de propriété par étage (PPE). L’administrateur devra justifier le non-remplacement des convecteurs rendus par l’impossibilité de rénover l’ensemble de l’immeuble. »

Mon deuxième amendement propose un nouvel alinéa 3 à l’article 10 :

« Art. 10. – al. 3 (nouveau) : Le Conseil d’Etat a proposé comme date butoir 2031. Nous proposons de nous aligner, pour le chauffage électrique centralisé et décentralisé, aux dates proposées par le Parlement fédéral afin de bénéficier des subventions y relatives. »

Mon troisième amendement propose l’ajout d’un quatrième alinéa :

« Art. 10. – al.4 (nouveau) : Il est autorisé de remplacer un chauffage électrique défaillant par un modèle de même puissance dit intelligent. Au même titre, il est autorisé de remplacer une pièce défaillante. »

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Par rapport à ce que vous nous avez présenté au préalable, il me semble que vous avez interverti les alinéas 3 et 4. Pouvez-vous le confirmer ?

M. Guy Gaudard (PLR) —

Oui, exactement, madame la présidente. Je rectifie :

« Art. 10. – al.3 (nouveau) : Il est autorisé de remplacer un chauffage électrique défaillant par un modèle (...) »

« Art. 10. – al.4 (nouveau) : Le Conseil d’Etat a proposé comme date butoir 2031. Nous proposons de nous aligner, pour le chauffage électrique centralisé et décentralisé, aux dates proposées par le Parlement fédéral afin de bénéficier des subventions y relatives. »

M. Alberto Mocchi (VER) —

Je m’interroge sur le sens de maintenir cette loi avec ces amendements. Soit on fait une loi qui vise à modifier des comportements et à interdire les chauffages électriques pour réduire notre consommation d’électricité, soit on ne la fait pas. Mais nous avons déjà réduit de 80 % le nombre de chauffages concernés, alors si nous commençons encore à sur amender tout cela, il ne servira plus à grand-chose d’avoir une loi qui concernera quelques centaines de chauffages électriques. Soit on se donne les moyens et on décide de remplacer les chauffages électriques parce qu’ils consomment trop d’énergie et qu’il y a d’autres manières de chauffer des logements qu’avec l’électricité – et l’on accompagne les propriétaires dans ces changements qui ne sont pas anodins, et je le reconnais tout à fait – soit on décide que les chauffages électriques sont quelque chose de bon et on refuse la loi. Mais amender et faire quasiment du filibuster de cette loi me semble dommageable.

M. Vassilis Venizelos (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Sur le fond, avec l’amendement voté au niveau du projet de loi, ce n’est même pas de l’immobilisme, mais un retour en arrière. En effet, le dispositif voté au niveau du projet de loi permettra certains remplacements de chauffages électriques qui sont aujourd’hui interdits par la loi, mais bref, nous y reviendrons au deuxième débat. Ici, avec les amendements sur le décret… Je l’ai dit tout à l’heure, sur la forme, si le vote du premier débat est confirmé en deuxième débat, les articles 9, 10 et 11 n’auront plus vraiment de raison d’être. Mais il est vrai que si l’on vient encore affaiblir le dispositif, on peut se demander s’il a encore du sens. C’est peut-être l’objectif poursuivi au travers de ces différents amendements…

Sur la forme, concernant l’amendement Yvan Pahud, il aurait peut-être une meilleure place à l’article 14 consacré aux chauffe-eaux électriques décentralisés, pour autant que le vote du premier débat ne soit pas confirmé. En effet, si ce vote était confirmé, les chauffe-eaux électriques décentralisés seront également sortis du décret. Dans l’esprit de votre amendement, j’estime qu’il aurait d’avantage sa place dans la section 2 consacrée aux chauffe-eaux électriques décentralisés.

Pour le reste, je vous invite à en rester au décret et je me réjouis d’ores et déjà du deuxième débat qui pourra préciser les intentions du Parlement vis-à-vis de la transition énergétique. Il y a eu plusieurs annonces dans le cadre des différentes campagnes politiques pour mettre les bouchées doubles afin de réussir la transition énergétique. Nous oublions notre dépendance vis-à-vis de l’importation et de l’extérieur ; cela passe par un renforcement de la production d’énergie renouvelable, c’est vrai. J’ai le sentiment que, sur ce point, il y a des majorités relativement confortables pour produire plus d’énergie renouvelable. Mais cela passe aussi par une meilleure efficacité énergétique et la lutte contre le gaspillage énergétique et c’est tout le sens de ce décret. Je souhaite vivement que ce Parlement prenne toute la mesure des enjeux qui sont en lien avec la transition énergétique, compte tenu du débat qui nous attend, beaucoup plus important et plus large, sur la révision de la Loi sur l’énergie. En l’état, je vous invite à en rester au décret, en espérant que les articles 9, 10 et 11 auront encore toute leur pertinence après le deuxième débat.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Les amendements à l’article 10 ont été portés à votre connaissance, mais nous ne les voterons pas aujourd’hui puisque nous arrivons en fin de séance.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Je suis relativement surpris par les amendements proposés par M. Gaudard, et en particulier par ceux qui concernent la possibilité de remplacer les chauffages électriques. On a souvent dit – et cela a souvent été soutenu, notamment par le PLR – qu’il faut profiter des rénovations et des changements pour remplacer ce style de chauffages. Je suis donc surpris que l’on demande aujourd’hui de pouvoir les remplacer, ce qui est effectivement un grand retour en arrière.

Je constate finalement que le PLR et l’UDC se montrent les chantres de l’inefficience et du gaspillage énergétique et je trouve important qu’ils l’assument. J’aimerais leur poser une question : nous venons de nous priver de 15 % d’économies possibles d’électricité pour ces prochaines années. Or, 15 % c’est effectivement énorme ; c’est plus de 15 fois le décret que nous avons voté, mardi passé, sur les économies d’énergie. Je pose donc la question suivante au PLR en particulier, puisqu’il a fait sa campagne sur la durabilité, la protection du climat et l’efficacité énergétique : comment va-t-il compenser ces 15 % ? A mes yeux, il prend une grande responsabilité sur les risques de pénuries futures et sur le ralentissement de toutes les adaptations au changement climatique.

En effet, nous allons évidemment prendre du retard. Pourquoi est-il si important de remplacer les chauffages électriques ? C’est parce que cela libère l’énergie électrique, notamment pour remplacer les chauffages fossiles par des pompes à chaleur ou par tout autre type de chauffage, ainsi que pour la mobilité. Je me réjouis d’entendre les propositions du PLR pour compenser ces 15 %. Dans le cas contraire, il montrerait clairement que le climat et l’efficacité énergétique lui importent très peu.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Le débat est interrompu.

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