Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 7 février 2023, point 10 de l'ordre du jour

Texte déposé

La Conférence intercantonale de l’instruction publique de Suisse romande et du Tessin (CIIP) a annoncé le 9 juin 2021 une « étape clef dans l’adaptation de l’orthographe à l’état actuel de la langue ». Elle entend ainsi que l’orthographe rectifiée devienne la référence pour l’enseignement du français dans les cantons romands.

 

Il s’agit ainsi d’imposer de nouvelles règles orthographiques, découlant de 14 principes, pour l’enseignement du français dans les cantons romands.

 

Une interpellation a été déposée à ce sujet par la soussignée en juin 2021, à ce jour sans réponse du Conseil d’Etat.

 

Or, cette question de l’orthographe rectifiée pose de nombreux problèmes pratiques et ne peut être mise en vigueur sans une large consultation.

 

Cette décision de la CIIP a immédiatement suscité de vives réactions populaires et politiques, aussi bien sur la forme que sur le fond. Il n’appartient en effet pas à l’État d’intervenir dans le contenu des connaissances ni d’en modifier les règles, mais il doit le transmettre et le promouvoir.

 

Ainsi, plus de 5000 personnes ont signé une pétition demandant à la CIIP de revenir sur sa décision.

 

Il n’appartient en effet pas à l’Etat de définir le savoir, mais de le transmettre, respectivement le promouvoir. Comme le dit la loi jurassienne relative à l’usage de la langue française, l’Etat "assure un enseignement qui permet la maîtrise et suscite l'amour de la langue française." Pas plus notre Constitution que celle des autres cantons romands ne confie à l’Etat la mission de définir le contenu d’une des langues nationales ou d’en modifier les règles.

 

La décision de la CIIP s’appuie sur la réforme de l’orthographe de 1990. Or, cette dernière, après avoir suscité nombre de débats et de prises de positions les plus diverses, a été tolérée par l’Académie française. C’est ainsi qu’un ensemble de rectifications orthographiques proposées par le Conseil supérieur de la langue française a été approuvé par l’Académie française et publié en décembre 1990 dans les « Documents administratifs » du Journal officiel. Ces rectifications avaient pour but de résoudre les problèmes graphiques importants, d’éliminer les incertitudes ou les incohérences et de permettre la formation correcte des mots nouveaux qu’appelle le développement des sciences et des techniques.

 

Or, cette réforme n’a jamais été mise en œuvre de manière large. Des éditeurs scolaires français ont ainsi renoncé à intégrer la réforme de l’orthographe dans leurs manuels. De plus, il apparaît que l’adhésion des enseignant.e.s n’est pas évidente face à cette réforme. Enfin, cela posera de nombreux problèmes pratiques par exemple pour des employeurs, ayant appris l’ « ancienne » orthographe, recevant des lettres de motivation écrites avec la « nouvelle » orthographe, qu’ils considéreront comme pleines de fautes. Il faut ainsi que toute nouvelle réforme reçoive l’adhésion de toutes et tous.

 

La CIIP n’a pas consulté la Commission interparlementaire de contrôle de la Convention scolaire romande à ce sujet. Aucune consultation large n’a été menée.  Cette «simplification» de la langue française décidée unilatéralement est inacceptable tant sur le fond que sur la forme. Il n’est pas admissible de voir une entité échappant à tout contrôle démocratique définir les règles de la langue française. 

 

La présente motion demande ainsi au Conseil d’Etat de surseoir à la décision de modifier les règles orthographiques du français dans les manuels scolaires destinés aux élèves vaudois.

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Josephine Byrne GarelliPLR
Claude MatterPLR
Anne-Lise RimePLR
Florence GrossPLR
Rémy JaquierPLR
Dylan KarlenUDC
Pierre-André RomanensPLR
Aurélien ClercPLR
Nicolas SuterPLR
Jean-François CachinPLR
Guy GaudardPLR
Sergei AschwandenPLR
François CardinauxPLR
Pierre-François MottierPLR
Nicolas BolayUDC
Chantal Weidmann YennyPLR
Marion WahlenPLR
Maurice NeyroudPLR
Alain BovayPLR
Julien CuérelUDC
Jean-Daniel CarrardPLR
Daniel RuchPLR
Jean-Rémy ChevalleyPLR
Werner RiesenUDC
Carole DuboisPLR
Catherine LabouchèrePLR
Gérard MojonPLR
Daniel DeveleyPLR
Olivier PetermannPLR

Documents

RC_21_MOT_26_min_M. Wahlen

RC - MAJ - (21_MOT_26) - J.-L. Chollet

21_MOT_26-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Graziella Schaller (V'L) — Rapporteur-trice de majorité

(remplaçant Jean-Luc Chollet, ancien député) La motion de Mme Bettschart-Narbel demande un moratoire pour que le Conseil d’Etat reporte sa décision de modifier les règles orthographiques du français dans les manuels scolaires. Pour la motionnaire, l’apprentissage du français constitue un élément important de la démocratie. Sa motion a pour ambition de défendre la langue française. Elle constate que la dernière réforme orthographique, qui entend simplifier la langue française, maintient un certain nombre d’exceptions qui apportent des difficultés supplémentaires et que cela soulève des réserves. Elle regrette que la Commission interparlementaire (CIP) n’ait pas été informée en avance de cette réforme et elle s’interroge quant à la marge de manœuvre que possède l’Etat de Vaud dans ce domaine. Elle demande donc un moratoire.

La conseillère d’Etat a rappelé que tous les cantons romands soutiennent cette réforme, à l’exception de Vaud. A Genève et Fribourg, des interventions parlementaires similaires ont été classées. Quant aux milieux concernés, ils ont été largement consultés et ils soutiennent unanimement la présente réforme. Les nombreuses questions soulevées par cette réforme ont donné lieu à des échanges nourris en commission et des réserves ont été exprimées, telles que la crainte de voir les jeunes discriminés au moment de leur entrée sur le marché du travail. Plusieurs députés estiment que, d’ici là, ces simplifications seront entrées dans les mœurs et ne défavoriseront pas les jeunes qui postuleront sur le marché de l’emploi. Des députés estiment que c’est un combat d’arrière-garde et que les choses sont déjà faites. Il est donc vain de faire cavalier seul. Enfin, ils estiment qu’un moratoire risquerait de retarder l’impression des manuels scolaires, alors qu’ils sont très attendus. Pour ces différentes raisons, la majorité de la commission vous recommande de classer cette motion transformée en postulat.  

Mme Marion Wahlen (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

Dans notre société, l’apprentissage du français constitue un élément important de la démocratie. En ce sens, la motion transformée en postulat n’engage pas un débat futile, mais a pour ambition de défendre la langue française. Celle-ci est riche de toutes les origines qui l’ont composée. En quoi est-ce un progrès d’écrire « ognon » au lieu d’« oignon » ? Il ne suffit pas de simplifier l’orthographe de quelques termes pour en faciliter l’apprentissage. Considérons-nous réellement les jeunes incapables d’appréhender certaines subtilités jugées arbitrairement inutiles ? Comment cette rectification orthographique sera-t-elle efficace, si les acteurs de la vie sociale, culturelle et administrative ou économique ne prévoient pas de l’appliquer ? La complexité de notre orthographe apporte de nombreuses richesses à la langue, que la dernière réforme met en péril. Si celle-ci entend simplifier la langue française, force est de constater que le maintien d’un certain nombre d’exceptions ainsi que le mélange entre orthographes traditionnel et rectifié apportent une confusion et des difficultés supplémentaires. Dès lors, il est urgent de ne rien changer. Laissons faire les mouvements naturels des mots et du vocabulaire de la vie. Rectifier ce qui fonctionne revient à imposer un changement fantaisiste. Nous vous invitons à soutenir cette motion transformée en postulat.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) —

C’est un débat qui a déjà eu lieu plusieurs fois dans cet hémicycle. Beaucoup de choses ont été dites par les deux rapportrices de la commission. Ce qui me frappe dans cette affaire, c’est qu’on dit que l’on souhaite une simplification, mais j’ai la liste des propositions sous les yeux et il reste encore de nombreuses exceptions. Dès lors, je ne vois pas où est la simplification. Comme je l’avais déjà dit à l’époque, ce dossier a été mal emmanché, notamment parce que la Commission de contrôle de la convention scolaire romande n’avait pas été informée, alors qu’elle siégeait une semaine avant que les conseillers d’Etat nous informent de cette réforme. C’était une grave erreur stratégique. Il aurait au moins fallu informer la commission qui traite du Plan d’études romand et de ce genre de questions. Le dossier a donc mal commencé. Ensuite, en se penchant dessus, on constate qu’il reste de nombreuses exceptions. Or, selon moi, ce qui est important, c’est d’avoir une adhésion de la population en général sur les réformes orthographiques, car si cela ne passe que par l’école et les petites classes, je crains que certains pensent que les gens ne savent plus écrire. Je ne suis pas sûre que ce soit si facile de changer l’orthographe d’un coup. Dès lors, je maintiens mon postulat et je vous invite à le soutenir.

Mme Sabine Glauser Krug (VER) —

J’adore l’orthographe ! C’est un peu comme un puzzle : pour chaque pièce, il faut se demander quel est son sens, sa forme, sa place, afin que le tout donne un ensemble correct. J’aime d’autant plus que l’orthographe que je m’en sors maintenant passablement bien. C’est un peu le fruit de mon dur labeur scolaire. Cela me permet de me valoriser en corrigeant les autres, voire éventuellement en jugeant les autres sur leur orthographe. Il fût même un temps où je remettais en question le droit d’expression des personnes qui orthographiaient leurs propos incorrectement, comme si ces derniers perdaient soudainement toute crédibilité. Il n’y a pas de quoi en être fier… Toutefois, pour me déculpabiliser, je me dis que je ne devais pas être la seule, parce que l’orthographe française a été conçue pour distinguer – je cite les cahiers préparatoires du premier dictionnaire de l’Académie française – les gens de lettres des ignorants et des simples femmes. Si l’orthographe, outil de base au service de la langue française – fondamentalement orale – a été élaborée pour créer des inégalités, rares ont été les propositions de simplification qui ont abouti, alors que les décisions politiques visaient une alphabétisation pour toutes et tous.

Nous avions changé et démocratisé le système scolaire, mais l’orthographe, délibérément compliquée, est restée à peu d’exceptions près toujours aussi complexe. Je rejoins la motionnaire, quand elle dit que malgré la réforme orthographique de 1990 l’orthographe reste extrêmement difficile à apprendre, ce qui réjouira accessoirement les organisateurs de concours de dictées. Mais je crois que toute simplification, aussi légère qu’elle soit, est bonne à prendre. Je suis d’ailleurs convaincue que l’idée de simplifier l’orthographe de manière que chaque phonème corresponde à un graphème – et inversement – ne convaincrait pas davantage la motionnaire. Pourtant, je reste convaincue que si le mot « dysorthographique » s’écrivait avec un « i », un « t » et un « f », il y en aurait nettement moins ; cela coûterait moins cher aux Etats et les élèves auraient davantage de temps et de disponibilités mentales pour explorer d’autres domaines. C’est ma conviction personnelle…

L’objet dont nous parlons remet en question une révolution de bien moindre envergure, mais corrige de manière cohérente un certain nombre de difficultés. Certes, l’absence de communication de la CIP à la Commission de contrôle de la convention scolaire était clairement une maladresse à dénoncer et à relever. Depuis, cette même commission a refusé un postulat demandant de revenir en arrière sur sa décision. Dans la mesure où cette simplification de l’orthographe a été adoptée par les cantons romands en 1996 – il y a plus de 25 ans – qu’elle est tolérée depuis, de plus en plus pratiquée, le contexte donne raison à la CIP dans son choix de l’adopter enfin, également dans les moyens d’enseignement romands. Pour ces raisons, et pour éviter de ralentir encore l’édition de ces moyens d’enseignement, le groupe des Verts dans sa majorité refusera la prise en considération de cette motion transformée en postulat, acceptant ainsi le rapport de la majorité. Je vous invite à en faire de même.

M. Yannick Maury (VER) —

Je déclare mes intérêts : je suis enseignant à l’école obligatoire, donc en partie concerné par le présent texte. On est toutes et tous d’accord pour dire que l’orthographe revêt un caractère important dans notre société et que son apprentissage doit se faire de façon rigoureuse. Dans ce sens, je peux partager les préoccupations de la motionnaire ; on le dit souvent : l’orthographe est la carte d’identité d’une personne – d’un ou une élève en l’occurrence – et ne pas la respecter peut, dans certaines situations, desservir la personne qui la maitrise mal ou trop partiellement. Cela étant, de quoi parle-t-on ici ? On parle d’empêcher l’application, dans les manuels scolaires, d’une réforme orthographique qui a pourtant été proposée par le conseil supérieur de la langue française et approuvée, il y a plus de 30 ans, par l’Académie française, institution hautement conservatrice. Je doute que l’on puisse accuser l’Académie française de progressisme prononcé et de vouloir saper nos bases langagières dans la pratique ; l’orthographe rectifiée est largement répandue et utilisée, aussi bien dans qu’en dehors des classes, sans que cela ne pose le moindre problème. La langue a toujours évolué, continuera à évoluer et, à ce titre, je souhaite que l’on projette un exemple *A insérer

On peut être content ou regretter ces évolutions, mais elles sont un fait. Il est affiché un extrait des Amants magnifiques de Molière. Les œuvres de Molière, auteur phare de la francophonie, ont été modifiées maintes fois ; on peut considérer que, par rapport au XVIIe siècle, on lit ses œuvres en orthographe rectifiée ; vous voyez à gauche une version du XVIIe siècle et à droite une version actuelle. Pourtant, absolument personne ne milite dans les classes pour que l’on revienne à l’édition du XVIIe siècle. Je vous mets au défi de lire en quelques minutes une page d’une édition du XVIIe siècle, car ce sera trop compliqué. C’est donc un exemple concret qui montre que la langue évolue et que cela ne pose aucun problème. Vouloir contrarier cette évolution, pourtant validée par les institutions, s’apparente à un combat passéiste.

Si on venait à contester de manière régulière les évolutions actées et enseignées à l’école plusieurs décennies après, comme c’est le cas avec cette réforme orthographique qui date de 1990, notre système scolaire perdrait en sérénité et marcherait sur des œufs à chaque apparition d’un nouveau moyen d’enseignement.

Je vais terminer par une boutade : si on doit maintenir une orthographe dite traditionnelle, et si cette motion transformée en postulat devait être acceptée, est-ce que le groupe PLR peut s’engager à retirer la motion Masson qui vise à imposer le « C » majuscule à l’expression « Canton de Vaud » et qui va dans le sens d’une simplification exactement contraire au texte dont on discute en ce moment. Le rapport de la commission est sorti et il y a, de la part des personnes qui ont signé les deux textes, des arguments qui sont à l’exact opposé. Dès lors, si un texte passe, il faut nullifier l’autre, car je ne vois pas comment le Conseil d’Etat pourrait jouer avec deux argumentations contradictoires qui émanent du même groupe. C’est assez cocasse.

M. Vincent Bonvin (VER) —

Défendre la langue française, c’est défendre une langue qui évolue depuis plus de 1000 ans : un mélange de latin, de langue germanique et de francique. Cette langue du Haut Moyen-Age a constamment évolué depuis : les accents et les mots ont évolué de manière orale, comme de manière écrite. Si la langue française se distingue d’autres idiômes, c’est par son régime d’exception, dont certains perdurent encore aujourd’hui. Sans revenir sur chacun d’entre eux – sinon nous serions encore là demain – une partie de ces exceptions se justifiait par des raisons loin d’être acceptables de nos jours. Bien heureusement, depuis, des réformes ont eu lieu et ces réformes se doivent d’être acceptées par l’Académie française, même si elles restent extrêmement rares. La réforme de 1990 est importante : elle permet de rectifier des incohérences de notre orthographe. Enlever des incohérences signifie faciliter l’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour les élèves, en particulier pour ceux qui sont les plus en difficultés.

L’ancien professeur de français que je suis vous invite à ne pas sous-estimer l’importance de cette réforme dans les apprentissages des élèves. De plus, au vu de ce qui a été dit précédemment, je m’inquiète de la volonté de politiser le débat de cette rectification orthographique acceptée il y a plus de 30 ans par l’Académie française, qui composée des garants de notre si belle langue et dont les compétences sont autres que les nôtres, linguistes et grammairiens n’étant par les professions les plus représentées dans cet hémicycle. Dans une Francophonie qui regroupe 88 pays, avec 300 millions de locutrices et de locuteurs sur les cinq continents, je ne verrais pas d’un bon œil que nous fassions les irréductibles Vaudois en retardant ad aeternam cette réforme dans nos manuels scolaires, alors que nos voisins vont de l’avant. Alors rendons à César ce qui est à César, rendons la langue française à l’Académie française et laissons la CIP imprimer les manuels qu’elle juge nécessaire. Je vous invite à refuser cette motion et à suivre la majorité de la commission.

Mme Monique Ryf (SOC) —

Deux des trois membres du parti socialiste qui ont participé à la commission ne siègent plus dans notre Grand Conseil. La troisième personne, Valérie Induni, est excusée aujourd’hui pour cause de maladie. Mais comme elle avait déjà préparé son texte, auquel j’adhère, je vais vous le lire.

C’est en 1990 déjà que l’orthographe rectifiée et ses quatorze principes ont été validés, sur proposition du Conseil supérieur de la langue française et approbation de l’Académie française. L’année 1990 est proche et lointaine à la fois ; comment situer cette année ? A l’époque, certaines personnes qui siègent dans cette salle n’étaient pas encore nées. L’année 1990 est l’année d’apparition du « www » soit le World Wide Web, tandis que le premier SMS a été envoyé en 1992. C’est quatre ans avant l’inauguration du Tunnel sous la Manche. En 1990, on ne pouvait pas encore aller regarder au cinéma des films tels que Le Silence des agneaux, sorti un an plus tard, ou La Liste de Schindler, sorti en 1993. En 1990, M. Pierre Cevey était conseiller d’Etat en charge de la formation, remplacé dans ce département, quatre ans plus tard, par M. Jean-Jacques Schwaab. Ainsi, parler d’une nouvelle orthographe qu’on viendrait de découvrir, alors qu’elle a été validée en 1990, n’est que pure illusion. L’orthographe rectifiée ne concerne que 0,4 % des mots. Les deux orthographes seront toujours autorisées. Le seul changement réside dans le fait que l’orthographe rectifiée sera enseignée dans nos écoles, alors que c’était l’inverse durant ces trente-deux dernières années. Voilà la seule chose sur laquelle nous nous prononçons ce jour. Les cantons romands attendent désormais les nouveaux moyens d’enseignement qui ont été gelés en attendant le traitement de diverses motions cantonales. Pour information, le canton du Jura a classé une motion du même type en décembre 2021, et celui de Neuchâtel a refusé une motion UDC demandant l’abandon de l’orthographe rectifiée en septembre 2022. Il est donc grand temps de faire un pas supplémentaire vers l’enseignement de l’orthographe rectifiée qui cohabitera avec la graphie enseignée jusqu’à présent. Cela ne représente pas un grand événement. Au fait, savez-vous écrire le mot « événement » ? Il s’écrit « évènement » en orthographe rectifiée, avec un accent grave et non plus avec un accent aigu. Le correcteur orthographique, lui, a déjà fait le choix ; il suggère d’écrire « évènement » avec l’orthographe rectifiée. Au nom de Valérie Induni, je vous invite à ne pas prendre en considération cette motion transformée en postulat, comme le recommande la majorité de la commission.

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Je crois qu'on va pouvoir donner un prix à la postulante, celui de l'obstination, de la témérité, de l'acharnement parlementaire. C'est notre troisième long débat sur le sujet de l'orthographe rectifiée. J'espérais un sage retrait de ce postulat, mais non ! Tour à tour, les Parlements du Jura, de Neuchâtel, de Genève et du Valais ont enterré les demandes correspondant à celle de notre collègue Bettschart-Narbel, entre fin décembre 2021 et décembre 2022. Dans le canton de Fribourg, c'est vrai, il n'y a jamais eu d'opposition déclarée à l'orthographe rectifiée.

Les nouveaux manuels de français sont en cours de production en Suisse romande. Notre Grand conseil sèmera-t-il la zizanie en terre francophone en acceptant ce postulat ? Vous le savez, l’orthographe rectifiée modifie 0,4 % de l'usage de notre langue. Cela représente donc quatre mots sur 1000. On n’aura plus besoin d'écrire « oignons » grâce à cette réforme tout à fait marginale, mais qui est désormais appliquée par toutes et tous. La France, la Belgique, le Canada appliquent l'orthographe rectifiée ; les dictionnaires de référence ou les correcteurs automatiques le font. La Suisse romande deviendra-t-elle cette petite île en terre francophone qui appliquerait encore des usages décidément dépassés ?

Vous avez peut-être vu dans le rapport de la commission cette magnifique citation de Maurice Druon – peut-être que les seuls anciens s'en rappellent. Il faudrait vraiment beaucoup pour le qualifier d'esprit progressiste. Il n’était, en 1990, rien de moins que Secrétaire perpétuel de l'Académie française. Qu'avait-il dit de cette réforme ? Qu'elle vise à mettre fin à des hésitations, à des incohérences impossibles à enseigner de façon méthodique, à des scories de la graphie qui ne servent ni la pensée, ni l'imagination, ni la langue, ni les utilisateurs. Or, la postulante désire ces scories et ces incohérences. Je la rassure tout de suite : les petits esprits sadiques qui enseignent le français auront encore du matériel devant eux. Je rappelle à Mme Florence Bettschart-Narbel qu'elle peut toujours exercer l'accord des participes passés des verbes pronominaux. Je les ai récemment répétés avec mon fils au gymnase. C'est génial, j'ai tout réappris il y a maintenant deux mois, mais je crois que j'ai tout oublié maintenant ; je n'arrive plus à vous en faire la démonstration. Mais Mme Florence Bettschart-Narbel nous la fera certainement.

Je vous invite à suivre la très grande majorité de la commission. A ce que j'ai pu voir, l'ensemble de la couleur politique de Mme Bettschart-Narbel ne l'a pas suivie. J'espère que le Grand Conseil aura la sagesse de rejeter ce postulat.

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Lorsque le député PLR genevois Jean Romain, avec lequel j’ai conduit plusieurs combats scolaires – et avec succès – m’a demandé de me joindre à lui dans ce combat contre l’orthographe rectifiée, j’ai refusé ! Par conséquent, je vais tenir ma position et accepter le rapport de la majorité, considérant que la langue évolue. Mais j’aimerais quand même rassurer les partisans de ce combat, par exemple en prenant l’évolution du mot « clef » : on nous apprend que « oignon » sera toujours toléré à côté d’« ognon » ; or, le mot « clef », qui vient de clavus en latin, a été reconnu en 1080 et le mot « clé » a été reconnu en 1121. Cela fait donc 902 ans que les deux orthographes coexistent et je pense que cette coexistence pacifique devrait inviter le Grand Conseil à renoncer à ce postulat.

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) —

J’ai une certaine ténacité sur cet objet, en effet, mais l’impression que j’ai est que beaucoup n’ont pas lu le Petit Livre d’Or qui a été édité pour la réforme de l’orthographe, avec notamment la liste de tous les mots qui vont changer. C’est là que je constate quelques contradictions entre ce que vous m’expliquez, à savoir une simplification, et ce qu’on lit. M. Haury parlait du mot « clef », mais on voit que « porte clef » ne prendra plus de tiret, alors que « porte-bonheur » gardera un tiret. Allez m’expliquer la raison de cette différence… Entre « tire-lait » et « tirebouchon », lequel prend un tiret ? On peut faire un petit quizz… Dans cette réforme, il y a un certain nombre de choses qui sont un peu absurdes et c’est ce qui me fait dire qu’avant de se lancer dans ce genre de projet, on devrait vraiment réfléchir à la véritable simplification que cela apporte. On pourrait peut-être organiser une fois une dictée du Grand Conseil et voir qui répond à la nouvelle orthographe et qui n’y répond pas ; je pense que je serai plutôt dans la deuxième catégorie. Cela a une importance pour notre structure de rigueur dans notre apprentissage. Je suis comme Mme Glauser Krug, j’aimais bien l’orthographe et les dictées. L’orthographe amène une certaine rigueur dans notre pensée. Je pense donc qu’il faut parfois savoir résister au modernisme ambiant.

Mme Elodie Lopez (EP) —

On peut lire dans le rapport de la commission que la motion a pour ambition de défendre la langue française. Enfant maltraitée, malmenée, la langue française serait ainsi violemment attaquée ou en danger, parce que des adaptations orthographiques ont été décidées par l’Académie française et qu’elles ont été appliquées par le canton de Vaud. Ce phénomène a lieu régulièrement, depuis longtemps, et à chaque fois cela implique le même type de débats, très longs, parfois stériles, toujours pour contrer des transformations qui sont en fait en cours dans la société et contre lesquelles il est difficile de lutter – un peu comme la transition numérique. On peut lire dans la motion qu’il n’appartient pas à l’Etat de définir le savoir, mais de le transmettre et de le promouvoir. Avec une telle approche, je pense que l’on se trompe sur la manière dont on envisage la langue. Elle n’est pas un objet de marbre dont les règles sont gravées pour la nuit des temps. Elle n’est pas non plus un savoir ; il s’agit avant tout d’un outil qui sert à exprimer des idées, des opinions, qui sert aux individus à se comprendre au sein d’une communauté.

La langue appartient avant tout à celles et ceux qui la parlent et qui l’utilisent. On est d’accord sur le fait que l’on n’utilise pas le même français en Haute-Savoie, dans le Gros-de-Vaud, à Paname ou à Bruxelles et que personne ne crie à l’attaque de la sainte langue française quand vous glissez en plénum une tournure grammaticale toute vaudoise ou un mot de patois – et c’est tant mieux. Certes, il faut un minimum de règles pour que l’on puisse toutes et tous se comprendre et des instances comme l’Académie française ont une autorité pour décider de grandes règles qui seront ensuite suivies dans les institutions. Dans notre cas, l’Académie française a pris des décisions et le fait qu’il n’y ait pas eu de mise en œuvre de manière large de ces décisions ou que certains éditeurs n’aient pas intégré ces réformes – comme le mentionne la motion – ne justifie en rien que ses décisions n’aient pas été motivées ou réfléchies. A l’heure actuelle, j’estime qu’il y a quelque chose d’absurde à devoir mettre davantage de temps à apprendre des règles orthographiques au nom d’une certaine rigueur, plutôt que de mettre des efforts sur comment se servir de ce magnifique outil. Ces excès de puritanisme langagier, c’est se tromper de combat si on souhaite placer les élèves au centre.

La motion soulève qu’il y aura des malentendus et des problèmes de pratique entre les personnes qui auront en tête l’ancienne orthographe et ceux qui auront la nouvelle ; c’est probable ! Mais cela nous donnera l’occasion de discuter et de débattre encore de ce merveilleux outil qu’est la langue, en dehors des portes des institutions académiques et politiques. Pour avoir eu la chance d’étudier l’évolution de certaines langues latines dans le temps, j’ajoute que les moments de flou ou de flottement entre des manières d’orthographier ou de se référer à des réalités ont toujours existé ; nous avons parlé latin, moyen français, nous parlons aujourd’hui un français qui a évolué. Dans les documents officiels, on a toujours eu un décalage entre ce qui était utilisé au sein des institutions, et en dehors, entre des groupes de personnes aussi. Il y aura donc toujours des décalages entre ce qui était utilisé hier et ce qui le sera demain ; c’est normal.

Ce matin, pendant le débat sur l’éducation numérique, certains de nos collègues ont déclaré « Il faut vivre avec son temps ». Alors gardons ce bon sens tout vaudois quand on parle de langue, car cela n’a aucun impact sur le climat ou la santé. Le groupe Ensemble à Gauche et POP vous invite à refuser la prise en considération de cette motion.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Je déclare mes intérêts pour la quatrième fois aujourd’hui : je suis président de syndicat et enseignant de français. Je m’excuse auprès de Mme Bettschart-Narbel pour avoir estropié son nom ce matin. Ce n’est pas parce qu’elle a dit des choses erronées que cela me donnait le droit de me tromper sur son nom.

Concernant le texte qui est sur la table, on a l’impression qu’il faut que la nouvelle génération apprenne ou subisse des règles sans en comprendre la logique, car elles n’en ont pas. Ces rectifications de l’orthographe visent à supprimer des bizarreries, des incohérences liées à l’orthographe d’usage. Il n’y a là – et c’est malheureux – aucune réflexion complète sur une simplification de l’orthographe, en particulier de l’orthographe grammaticale. Allons vers une transparence de son usage entre la langue qui est parlée et la langue qui est écrite. Ce n’est pas la discussion d’aujourd’hui, car on ne vise qu’à alléger, et non pas simplifier, quelques règles qui seraient plus communes et moins fondées sur des exceptions. En réalité, quand vous étudiez la liste des rectifications qui ont été édictées, la très grande majorité est utilisée par nous toutes et tous, dans les journaux, dans nos écrits. Il y a quelques éléments qui résistent : on donne toujours l’exemple de « oignon » et c’est probablement un raté dans cette rectification. On aurait dû aller au bout du raisonnement et aussi enlever le « g » de ce mot, comme en anglais, ce qui serait plus cohérent et logique.

Il y a eu d’autres rectifications de l’orthographe, ce ne sont pas les premières que l’Académie française valide. Par exemple, au XVIIe siècle, on a décidé d’enlever le « i » dans « montagne » ; aujourd’hui, aucun député PLR n’a déposé un postulat pour qu’on réintroduise ce « i » dans « montagne ». On a enlevé le « z » à la fin de « amitié » ; en revanche, on l’a laissé dans « chez ». Cherchez la logique… Mais je n’ai pas l’impression que la demande de Mme Bettschart-Narbel vise à revenir en arrière sur cette série de rectifications. Ce projet, que je vous invite à refuser, pose deux questions : doit-on renommer Plateforme10, car il s’écrit sans trait-d’union ? Et doit-on sortir de la CIP et éditer des manuels de français vaudois ? Ce serait une catastrophe !

M. David Vogel (V'L) —

Je déclare mes intérêts : je suis enseignant non syndiqué au Secondaire II. En écoutant les débats, on constate que c’est un sujet très émotionnel. Je regrette que l’on tombe dans un match gauche-droite, à coups de remarques assassines de part et d’autre. Il faut voir quel est l’effet concret de cette motion. A titre personnel, je ne suis pas un fan de l’Académie française, qui décide de tout alors qu’elle est constituée de personnes absolument pas spécialisées dans la question. De plus, je suis Mme Bettschart-Narbel sur le fait que la procédure et la manière de faire n’étaient absolument pas idéales.

Sur le fond, je suis pour une simplification plus large du système et j’estime que c’est un pas dans la bonne direction que d’essayer de simplifier un peu les choses. Concrètement, si on accepte cette proposition, on rencontrera d’une part un tas de problèmes avec les brochures déjà imprimées – doit-on les brûler, les conserver, attendre ? De plus, on donnera au département et à M. le conseiller d’Etat Borloz un travail supplémentaire à gérer : que va-t-on faire seul dans notre coin, avec notre orthographe à nous ? J’estime que ce n’est pas très constructif. Dès lors, au nom du pragmatisme, je vous invite à refuser la prise en considération de cette motion transformée en postulat.

Mme Josephine Byrne Garelli (PLR) —

J’ai cherché désespérément à trouver l’intervention que j’avais faite à ce sujet lors d’un précédent débat, mais malheureusement je ne trouve pas mes notes. Aujourd’hui, l’idée de fond me revient : j’écoute avec grand intérêt toutes les interventions, qui sont d’une très grande érudition et qui montrent un très haut niveau de formation au sein de ce Grand Conseil. Mais il ne faut pas minimiser les problèmes que les réformes orthographiques successives peuvent poser, non seulement pour les élèves, mais aussi pour les adultes qui vont les prendre en formation plus tard. Concernant la réforme de 1990, je vous lis une analyse faite par Marie-Eva de Villers, directrice de la qualité de la communication à la HEC à Paris, en 2002 : « Avec un peu de recul, force est de reconnaître aujourd’hui que la simplicité visée par la réforme de l’orthographe française n’était pas véritablement atteinte par les rectifications proposées, qu’elle impose un nouvel effort d’apprentissage à tous les locuteurs francophones sans apporter en retour une réduction appréciable des exceptions et de nouvelles règles grammaticales davantage empruntes de logique et d’harmonisation. » Le résultat de ce constat est que, dans bien des cas, de grands pans de la population n’ont pas adopté ces réformes, n’ont pas modifié la façon dont ils avaient appris le français – cela concerne la première vague de 1990. Nous ajoutons maintenant une nouvelle vague et l’on se retrouve à chaque fois avec des conflits de génération autour de l’orthographe française qui est déjà assez compliquée ainsi. Il y a des élèves qui font toute leur scolarité en français sans arriver jamais à maîtriser correctement l’orthographe ; cela les pénalise toute leur vie. C’est une triste réalité. Je partage l’avis de Mme Bettschart-Narbel : quand on veut réformer une langue, il faut tourner sa langue sept fois dans sa bouche, afin d’être sûr de ne pas rajouter de la complexité et des barrières supplémentaires dans la communication entre les jeunes et les adultes. Je soutiens le texte de Mme Bettschart-Narbel.

Mme Florence Gross (PLR) —

Je vous invite à soutenir la minorité de la commission. La majorité de la commission ne veut pas accepter ce texte qui parle de simplification d’une langue qui, pourtant, a des racines antiques à ne pas renier, qui a une histoire qu’on n’enseignera bientôt plus par mesure de simplification, tout comme, par souci de wokisme, on renie aujourd’hui certains auteurs qui ont pourtant fait de notre langue française un renom. En même temps, les mêmes qui souhaitent simplifier la langue font ajouter des points médians, des tirets ou autres signes qui n’ajoutent absolument aucune simplification à notre langue. Je vous invite donc à suivre la minorité de la commission et à suivre le texte de notre collègue Bettschart-Narbel.

M. Frédéric Borloz (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Les vies se succèdent pour certains d'entre nous. Avant d’être députés, vous étiez autre chose. Pour ma part, avant d’être conseiller d’Etat, j'ai d'abord été élu. Avant cela, j’étais en campagne électorale. Or, dans une campagne électorale, on est souvent interpellé et on nous pose des questions ; et je me souviens qu’une fois on m’a demandé en public ce que je pensais de l'orthographe rectifiée. J'ai répondu que je n’y voyais pas l’intérêt et qu’on apprenait une langue et non un dialecte ; c’était ma réponse. Quelques mois plus tard, je me suis retrouvé dans mon département avec un dossier sur la table. J'ai donc dû savoir quels étaient les tenants et les aboutissants de cette réforme et de quoi il s'agissait – ce que je n'avais bien entendu pas fait auparavant. Dans ce cadre, je ne trouve pas que l'intervention de Madame Bettschart-Narbel ressemble à une obstination quelconque ; je pense qu’il est tout à fait légitime de se poser ce genre de questions, ce sont des bonnes questions. J'étais plutôt heureux de me les poser et d'étudier le fond de cette réforme.

Alors beaucoup de choses ont été dites et vous avez rappelé, dans le cadre de ce débat, d'où vient cette réforme, qui y avait adhéré, qui faisait la langue française, vous avez rappelé l'existence de l'Académie française – ce qui n’est pas inutile quand on parle de cette réforme – rappelé également que les cantons romands, sauf Genève, avaient tous adopté cette réforme. On peut encore ajouter que la Belgique et la France ont accepté cette réforme de manière officielle. Les dictionnaires, depuis une dizaine d'années, ont intégré ces nouveaux mots avec les doubles orthographe – c’est la référence. Les correcteurs orthographiques de nos téléphones portables et autres ordinateurs ont également intégré ces nouveaux mots. Alors, sans vouloir parler des origines de notre langue, de l'importance de conserver des règles qui nous permettent de se comprendre – cela a été très bien dit et je ne veux pas revenir là-dessus –ce qui compte aujourd’hui c'est la référence. Si on ne sait pas comment écrire un mot, si on a un doute sur son orthographe – ce qui arrive à la plupart d'entre nous – on prend un dictionnaire, on regarde comment s’écrit le mot et on l’écrit comme le dictionnaire le propose. Le contexte a considérablement évolué ; la conférence romande n’a pas très bien communiqué au début, mais elle a essayé de se rattraper ensuite. Je crois qu’il y a aussi beaucoup d'idées qui sont véhiculées sur cette orthographe et ses changements, mais toutes les langues vivantes évoluent, changent et se modifient.

Pour vous, pour moi, surtout pour les jeunes qui viennent derrière nous – car on pourra continuer à écrire les mots comme on les a appris – c'est la référence qui compte et la référence est le dictionnaire ; or, le dictionnaire a changé. Alors qui serions-nous, Pays de Vaud, pour faire un peu cavalier seul au milieu de cet océan francophone composé de tous ces pays ? Je n’ai pas regardé pour le Québec, mais je crois que qu’ils l’ont aussi adopté depuis longtemps. Que ferions-nous ? On peut réimprimer nos livres, on est libre de faire ce qu'on veut, mais est-ce que c'est bien raisonnable ? Est-ce que cela a du sens de partir tout seul sur une langue qui est la nôtre, parce qu'on l'a adoptée, mais qui est quand même un peu ordonnée par le pays voisin ? Certes, ce n’est pas très démocratique, car les Français n'ont pas effectué de votation populaire pour cette orthographe ; c’est une institution qui dit oui ou non. Il y a aussi un conseil supérieur de la langue française qui dit oui ou non, sans nous demander notre avis. C’est ainsi, c’est l'organisation même d’une langue. J’ai demandé à mes connaissances qui maîtrisent parfaitement l’allemand – ce qui n’est pas tout à fait mon cas – et ils m’ont dit que l’allemand avait lui aussi évolué durant ces derniers siècles, comme cela a été le cas avec le français.

Dès lors, j'ai envie d'être pragmatique et de dire merci à Mme Bettschart-Narbel d'avoir soulevé cette question et d'être allée jusqu'au bout des possibilités et des réflexions au sein de ce Parlement. Il est sain d'avoir ces réflexions-là, mais soyons pragmatiques et pratiques. Au-delà des dogmes, rappelons simplement que les références ont changé et que c’est à ces dernières que les prochaines générations feront appel.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 72 voix contre 63 et 3 abstentions.

M. Alexandre Démétriadès (SOC) —

Je demande un vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui suivent la majorité de la commission, à savoir le classement de la motion, votent oui ; celles et ceux qui suivent la minorité de la commission, à savoir le renvoi au Conseil d’Etat, votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil prend le postulat en considération par 71 voix contre 67 et 1 abstention.

* introduire vote nominal

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