RAP_678470 - Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le Postulat Carine Carvalho et consorts - Comment va la santé des personnes détenues dans les prisons vaudoises ? (19_POS_159).
Séance du Grand Conseil du mardi 3 juin 2025, point 22 de l'ordre du jour
Documents
- Rapport de la commission - RC RAP_678470 - Sylvie Podio
- Texte adopté par CE - RAP-CE POS Carvalho 19_POS_159 - publié
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa commission s’est réunie le 11 avril 2025, et je remercie M. Ischy, secrétaire de commission, pour les notes de séance. La postulante remercie le Conseil d’Etat pour son rapport détaillé. Elle relève notamment que la préoccupation récurrente de l’inadéquation des conditions de détention au vu de l’actuelle surpopulation carcérale constitue un défi majeur pour la santé des personnes détenues. Dans l’attente d’une amélioration des infrastructures, il est nécessaire de procéder à des aménagements afin de garantir les soins en prison. La postulante salue la volonté du Conseil d’Etat d’élargir la réflexion à la problématique du vieillissement de la population carcérale, la généralisation des visites médicales d’entrée et l’amélioration de la coordination entre les différents acteurs. Pour la postulante, l’augmentation des troubles psychiatriques parmi la population carcérale – comme dans la population générale – confirme la nécessité d’investir dans le domaine de la promotion d’une bonne santé mentale.
Ainsi, la postulante accepte le rapport tout en s’interrogeant sur l’horizon temporel pour la réalisation de l’Etablissement de réinsertion sécurisé (ERS) pour adultes à Cery, de l’Unité psychiatrique de la prison pour la ferme de la Tuilière et d’une division gériatrique aux Etablissements pénitentiaires de la plaine de l’Orbe (EPO).
Concernant ses interrogations, il a été répondu en commission que des discussions sont en cours entre le Service pénitentiaire (SPEN) et le CHUV pour l’ERS, notamment sur la question de la répartition des charges entre les deux instances. L’unité psychiatrique de la prison de la Tuilière devait être finalisée courant 2027. La réflexion est en cours concernant la création aux EPO d’une unité spécifique pour les personnes âgées. Lors de la lecture du rapport, différentes thématiques ont été abordées concernant la gouvernance du dispositif, l’incidence supérieure du diabète de type 2 au sein de la population carcérale, qui pourrait être due à une plus grande sédentarité et/ou une plus grande tendance au grignotage. Concernant la couverture Assurance obligatoire des soins (AOS), celle-ci est aussi obligatoire pour les personnes incarcérées. Pour les personnes sans statut, le coût des soins est pris en charge par le SPEN. Un projet de loi fédérale est en cours d’élaboration afin de garantir une couverture d’assurance aux personnes en Suisse qui n’en ont pas.
Lors des différentes questions posées, la commission a été surprise d’apprendre qu’alors que les détenus hommes bénéficient d’un accès gratuit aux préservatifs, les femmes n’ont pas accès aux digues dentaires pour des raisons financières. Pour des commissaires, il est choquant que des digues dentaires ne soient pas distribuées aux femmes détenues au seul motif du coût, alors même que des préservatifs sont remis aux hommes détenus, hommes d’ailleurs largement majoritaires dans les établissements pénitentiaires. La commission note avec satisfaction que la cheffe du Département de la santé et de l’action sociale (DSAS) se charge de relayer cette problématique à qui de droit et espère qu’il sera rapidement mis fin à cette inégalité de traitement.
Les questions en lien avec la prévention, la santé sexuelle et la prévention du suicide ont aussi été abordées. Concernant le vieillissement de la population carcérale, il convient de tenir compte d’une part que la liberté d’une personne âgée incarcérée de rejoindre – ou pas – une division pour personnes âgées devrait être garantie. D’autre part, la question politique d’accepter le décès en prison des personnes âgées détenues ou d’effectuer un transfert à l’hôpital pour dispenser les soins palliatifs et accompagner l’arrivée de la mort devrait être tranchée. En effet, lorsque l’état de santé de la personne incarcérée se trouve à ce point dégradé, la personne incarcérée ne représente plus un risque pour la société et pourrait mourir ailleurs qu’en prison. D’ailleurs, actuellement, le transfert en fin de vie en institution sanitaire relève déjà de la pratique des établissements pénitentiaires vaudois.
Forte de ce qui précède, la commission vous recommande, avec 1 abstention, d’accepter le rapport du Conseil d’Etat.
La discussion est ouverte.
Mon postulat demandait un état des lieux de la santé des personnes détenues dans les prisons vaudoises, un sujet régulièrement soulevé tant par la Commission des visiteurs que par la Commission de gestion (COGES). Le principe d’équivalence des soins impose que toute personne détenue ait accès aux mêmes soins qu’une personne libre. Cela inclut, bien entendu, les diagnostics, les traitements et la prévention. Un bon état de santé est essentiel à la réinsertion et à la réduction du risque de récidive. Je souhaite souligner en particulier l’importance de la prévention des infections sexuellement transmissibles et du traitement des addictions. Par ailleurs, les établissements pénitentiaires sont souvent conçus pour les hommes, alors que la santé des femmes incarcérées mérite une attention spécifique. Ces points avaient déjà été abordés dans un postulat de notre ancienne collègue, Valérie Schwaar, dont la réponse vient compléter utilement le présent état des lieux. Le vieillissement de la population carcérale constitue également un défi majeur. Certaines personnes finiront leur vie en prison, ce qui soulève des questions éthiques, mais surtout la création d’unités spécialisées. C’est pourquoi la commission qui a pris en considération mon postulat a souhaité intégrer cette thématique très importante dans le texte.
Je remercie le Conseil d’Etat pour son rapport très complet. Je note que la surpopulation carcérale demeure une préoccupation majeure, nuisant aux conditions de détention et à la santé des personnes détenues. Le Conseil d’Etat prévoit bien sûr de nouvelles constructions pour y remédier, mais cela prendra du temps. Des aménagements sont donc nécessaires dès à présent pour garantir l’accès aux soins. Le rapport fait d’ailleurs état de quelques-uns. Les visites médicales à l’entrée sont désormais généralisées. Le Service de médecine et psychiatrie pénitentiaire (SMPP) est mieux coordonné avec le SPEN et ses prestations sont étendues à l’ensemble des établissements du canton. Il est également essentiel d’assurer le soin pour les personnes sans assurance. Une base légale fédérale est attendue afin d’élargir l’assurance obligatoire aux personnes détenues.
Enfin, je relève plusieurs éléments importants de réflexion. D’abord, je déplore que le préservatif féminin – les digues dentaires – ne soit pas distribué aux femmes pour des raisons financières, et me joins à l’étonnement des membres de la commission à ce propos. Les troubles psychiatriques sont en augmentation, tant en prison que dans la population en général. Les liens entre santé mentale, criminalité et incarcération sont manifestes. Il est donc indispensable d’investir dans la prévention et dans la santé mentale, même en période de contraintes budgétaires. La pénurie du personnel de santé est aussi une préoccupation et constitue un véritable défi. Les personnes détenues sont plus âgées et présentent davantage de troubles. Il est crucial de garantir la présence de personnel qualifié en nombre suffisant pour répondre à ces besoins. Je suis donc satisfaite de la réponse apportée et remercie le Conseil d’Etat.
Je voudrais remercier Mme la députée Carvalho pour le dépôt de son postulat sur la santé des personnes détenues et remercier également le Conseil d’Etat pour cet excellent rapport. En tant que membre de la Commission des visiteurs et en tant que médecin, j’ai pu apprécier la qualité de ce rapport qui répond à beaucoup de questions que je m’étais posées en intégrant la Commission des visiteurs. Ce rapport décrit de façon très complète l’activité du SMPP. Cette activité est importante – environ 28’000 consultations par année – et le SMPP accomplit un travail remarquable, dans des conditions parfois difficiles, comme à la Tuilière il y a quelques mois, en lien avec les travaux. Je voudrais saluer aussi l’extension de ce rapport à la population des détenus âgés, qui vont devenir un enjeu de santé majeur au sein de nos établissements pénitentiaires. Je souhaite également relever l’excellent travail médical effectué lors de la pandémie du Covid, puisqu’il n’y a eu aucun décès et aucun transfert en soins intensifs en lien avec le Covid lors de la pandémie. En conclusion, je remercie le SMPP pour son engagement et pour la qualité de ses services pour permettre aux détenus d’avoir un accès aux soins médicaux et psychiatriques avec une qualité élevée de prise en charge, malgré les temps d’attente. Par conséquent, je vous invite à accepter ce rapport.
J’aimerais simplement adresser une question à Mme la Conseillère d’Etat. A-t-elle pu, dans l’intervalle, se renseigner quant à la distribution gratuite de digues dentaires ?
J’ai pu poser la question à mes services. Des discussions sont en cours actuellement entre le SMPP et l’Office du médecin cantonal pour savoir comment intégrer la distribution de préservatifs féminins dans le cadre du Programme cantonal de réduction des risques. Cela devrait avoir lieu dans les meilleurs délais.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le rapport du Conseil d’Etat est approuvé à l’unanimité.