23_POS_77 - Postulat Fabrice Moscheni et consorts - Une croissance de l’Etat maitrisée pour le bien de tous les Vaudois.
Séance du Grand Conseil du mardi 6 mai 2025, point 33 de l'ordre du jour
Texte déposé
Un des axes prioritaire du programme du Conseil d’Etat pour la période 2022-2027 est l’« agilité de l’Etat”. Cette agilité est effectivement importante pour mener à bien les prestations.
Liée à une amélioration continue des processus de travail, l’agilité s’entend aussi dans une logique d’amélioration de la productivité : avec les mêmes moyens, plus de prestations peuvent être délivrées. En d’autres termes, à prestation égales moins de moyens sont requis, en particulier moins d’heures de travail sont requises et entraine une diminution du nombre de fonctionnaires nécessaires pour effectuer un travail donné. Une autre tendance liée à l’Etat est une croissance des prestations qu’il doit effectuer. Lié à de nouvelles règlementations ou à des nouveaux besoins de la population, de nouvelles prestations apparaissent. Ceci requiert plus d’heures de travail et donc engendrent une augmentation du nombre de fonctionnaires.
Aujourd’hui, le Canton de Vaud comporte près de 20'000 fonctionnaires dans l’administration Cantonale Vaudoise (i.e. ACV). Entre 2013 et 2022, leur nombre a cru de près de environ 19%, alors que la population croissait de 14%.
Pour la bonne gouvernance du Canton et pour maintenir un Etat « agile » comme le demande le programme de législature, il s’agit de trouver une manière de piloter la variation du nombre de fonctionnaires. A cette fin, la variation de la population vaudoise semble fournir un cadre raisonnable pour régenter la variation du nombre de fonctionnaires.
Le présent postulat demande au Conseil d’Etat de donner un rapport sur la manière dont il compte, sur une moyenne glissante sur 5 ans, limiter la croissance du nombre des employés à temps complet (i.e. ETP) de la fonction publique vaudoise afin qu’elle soit inférieure ou au maximum égale à la croissance de la population vaudoise.
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Guy Gaudard | PLR |
Alain Cornamusaz | UDC |
Stéphane Jordan | UDC |
Cédric Weissert | UDC |
Thierry Schneiter | PLR |
Georges Zünd | PLR |
Patrick Simonin | PLR |
Nicole Rapin | PLR |
David Vogel | V'L |
Sébastien Humbert | V'L |
Pierre-André Romanens | PLR |
Loïc Bardet | PLR |
Yann Glayre | UDC |
Aliette Rey-Marion | UDC |
Denis Dumartheray | UDC |
Jean-Rémy Chevalley | PLR |
Philippe Germain | PLR |
Michael Demont | UDC |
Aurélien Demaurex | V'L |
Josephine Byrne Garelli | PLR |
Nicolas Bolay | UDC |
Jean-Bernard Chevalley | UDC |
Maurice Treboux | UDC |
Pierre-Alain Favrod | UDC |
Grégory Bovay | PLR |
Pierre Kaelin | PLR |
Graziella Schaller | V'L |
Romain Belotti | UDC |
Jean-François Thuillard | UDC |
Monique Hofstetter | PLR |
Jacques-André Haury | V'L |
Fabrice Tanner | UDC |
Documents
- Rapport de commission - 23_POS_77_78_maj. Carole Dubois
- Rapport de commission - 23_POS_77_78_min. A. Démétriadès
- 23_POS_77-Texte déposé
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourEn préambule, je remercie chaleureusement M. Mascello pour la clarté et l'excellence des notes de séance. Par ailleurs, les deux postulats relevant d’une même unité de matière et faisant l’objet de discussions souvent communes, il a semblé pertinent de les aborder ensemble lors de la discussion générale en commission et dans les rapports de majorité et de minorité. L'ouverture de la discussion en plénum, comme l'a dit M. le président, sera faite séparément au sujet des deux postulats, et les prises en considération des objets votées séparément.
Le postulat de M. Moscheni rappelle qu'un des axes du Programme de législature du Conseil d'Etat consiste en l'agilité de l'Etat. Dans le cadre des comptes et du budget, les équivalents temps plein (ETP) sont un point important de l'aspect financier de l'Etat, s'élevant à 3,5 milliards selon le budget 2023. Entre 2013 et 2022, le nombre d'ETP de l'administration cantonale a augmenté de 19 % alors que la population a cru de 14 % durant cette période. L'utilisation des technologies numériques devrait permettre de faire décroître le nombre d'ETP, malgré la trajectoire démographique actuelle. L'objectif du postulat est de contrôler la croissance des ETP au sein de l'administration cantonale vaudoise (ACV).
Le postulat du député Weissert demande de réaliser un audit de l'efficience des ETP au sein de l'Etat de Vaud, département par département ; de proposer des pistes afin de couvrir les missions de l'Etat sans passer par la systématique d'augmentation des ETP , et de dresser un rapport comparatif avec les cantons présentant des similitudes. L'objet ne demande pas de supprimer des postes, mais de faire un état général de la situation. Le postulant précise en outre qu'il ne souhaite pas diminuer les prestations de l'Etat. Le rapport pourra présenter des pistes d'amélioration en cas de besoin.
Concernant la position du Conseil d'Etat, le postulat Moscheni aborde le sujet de manière quantitative, alors que le postulat Weissert étudie l'évolution qualitative du point de vue de l'efficience. Pour le Conseil d'Etat, la croissance du nombre d'effectifs et l'efficience seront intrinsèquement liées à partir du moment où il procédera à une évaluation. Pour délivrer des prestations publiques à la population, il est important que l'Etat soit agile, performant et efficient. Ces facteurs passent par une réflexion sur la croissance et sur le périmètre des actions étatiques. La conseillère d'Etat rappelle que la croissance des ETP n'est pas automatiquement liée à la seule croissance démographique. De nouvelles politiques publiques demandent que le périmètre d'action soit agrandi, comme pour l'école inclusive ou l'accueil des réfugiés ukrainiens imposé par la Confédération ou alors par des éléments conjoncturels.
En préambule du résumé de la discussion générale, je précise que certains arguments spécifiques en faveur du classement de ces postulats seront développés dans le rapport de minorité. Concernant tout d'abord le postulat Moscheni, dans toute organisation, le fonctionnement doit être vu régulièrement. En ce qui concerne l'Etat de Vaud, lors des débats du budget, de divers exposés des motifs et projets de décrets, les discussions portent en général sur les nouveaux ETP, mais une partie de la commission estime que le personnel pérenne est peu questionné, quelle que soit la légitimité des prestations fournies. Il est précisé par ailleurs que le postulat traite de la maîtrise de la croissance des ETP et non de la décroissance de ces activités. Le postulant rappelle que ces préoccupations sont financières, car toute politique se base sur des ressources économiques. L'augmentation de personnel est souvent justifiée par la hausse de la population. Il estime donc que l'Etat doit gérer cette croissance. Une comparaison avec des entreprises privées peut néanmoins être réalisée, car celles-ci doivent aussi mener des politiques d'optimisation financière malgré des contraintes différentes.
D'autre part, le nombre d'employés est évoqué, mais la question de l'internalisation, de l'externalisation et une comparaison de leurs coûts respectifs n'est pas traitée ; il serait intéressant que cette thématique soit abordée dans la réponse au postulat. D'autres députés sont d'accord avec le fait que la hausse de la démographie ne peut pas être directement liée au nombre d'ETP, mais sont favorables à ouvrir une réflexion sur le sujet du postulat. Selon ces députés, il serait judicieux d'agir dans un cadre et en amont, afin d'éviter une crise et des coupes ultérieures. Enfin, la question de recours accru à la numérisation est aussi abordée lors de la discussion, même s'il est admis qu'il ne faut néanmoins pas négliger le paramètre du transfert des charges lors de la numérisation d'un processus, en tout cas lors de la phase initiale.
Mme la conseillère d'Etat explique la méthodologie de l'Etat. Les demandes de postes de chaque département doivent être centralisées à la Direction générale des ressources humaines (DGRH), selon des catégories différentes. Les services procèdent à chaque renouvellement de poste et à un examen de la situation au cas par cas, notamment par une analyse du cahier des charges puis à une estimation si une simplification administrative informatique dématérialisée est possible ou pas.
En ce qui concerne l'usage à l'externalisation, elle montre pour imager cet usage le projet Bedag, en 1999, qui est très parlant. La décision d'externaliser certains postes et par conséquent de privatiser le service informatique a posé de grands problèmes financiers et technologiques. Par la suite, les postes ont été réinternalisés, ce qui a permis à l'Etat de faire des économies conséquentes malgré l'augmentation des ETP. En outre, il convient de rappeler que des financements externes existent pour certains postes, par exemple par l’Office fédéral des routes (OFROU).
Concernant spécifiquement le postulat Weissert, la conseillère d'Etat explique que contrairement au postulat Moscheni la question de l'efficience vise le coût des prestations. Cet aspect peut être évalué par plusieurs méthodes. Par exemple, lorsqu'un Projet de décret informatique est présenté et adopté, il peut nécessiter deux types de ressources : soit des spécialistes engagés en CDD pour des tâches spécifiques, soit des équipes dites de métier, engagées par le département qui a parfois besoin de renforcer ses projets. Lorsque des services sont confrontés à une forte augmentation de tâches, ils demandent fréquemment un examen de processus auprès de l'unité de contrôle et d'appui afin de l'optimiser. L'efficience passe par ces processus.
Des comparaisons intercantonales ont déjà été effectuées, mais ne montrent aucune conclusion pertinente, car les facteurs d'influence sont trop différents. Le département souhaite créer plus de transparence sur l'utilisation des ressources ETP au sein des services. Pour ce faire, un cockpit sera mis en place sur l'efficience des services de l'Etat. Des données seront extraites et partagées pour modifier les processus décisionnels de l'Etat, notamment dans le cadre de la création de postes. Mme la conseillère d'Etat confirme que l'idée générale du postulat a été comprise par le département et qu'en cas de renvoi du postulat au Conseil d'Etat, l'audit d'efficience aurait lieu par groupe de prestations. Une analyse comparative avec des indicateurs de coûts pourrait être menée permettant de comparer l'efficience et les gains de productivité. Il s'agit d'une analyse des processus pour identifier des inefficacités et pour aider les services. La délivrance des prestations serait intéressante également à étudier.
En conclusion, la majorité de la commission remercie Mme la conseillère d'Etat pour la clarté de ses réponses. Cependant, contrairement à la minorité qui estime que lesdites réponses pourraient faire office de rapport aux deux postulats, elle souhaite renvoyer ces deux objets au Conseil d'Etat pour un développement plus exhaustif, afin que des pistes explorables soient clairement développées dans ses réponses.
(remplaçant M. Alexandre Démétriadès, rapporteur de minorité) Comme ma collègue rapportrice de majorité, je vais également commencer par le postulat Moscheni, puis par le postulat Weissert, étant entendu que nous avons traité les deux postulats de façon plus ou moins groupée en commission. Pour rappel, la minorité de la commission est composée de Mme la députée Glauser Krug et de MM. les députés Démétriadès, Keller, Roten et moi-même.
La minorité estime qu'il se dégage de ce postulat, comme du suivant, l'image d'un Etat de Vaud qui ne connaîtrait aucune règle en matière de maîtrise de création de postes et d'une administration qui ne disposerait pas de processus ou de volonté de questionner le périmètre de son action et l'adéquation des ressources qu'elle y consacre, ce que nous déplorons, ce d'autant plus que les informations données en commission par Mme la conseillère d'Etat sont claires. Le fait de limiter la croissance du nombre d'employés de façon qu'elle soit inférieure ou égale à la croissance de la population vaudoise apparaît hautement problématique.
Premièrement, car l'utilisation d'une variable uniquement démographique n'est pas un indicateur pertinent pour cadrer l'évolution du nombre de postes à l'Etat de Vaud. La préoccupation principale du postulat relevant des finances publiques, une variable population ne permet par exemple pas d'apprécier le niveau d'activité économique de ladite population et les perspectives qu'il dessine en matière de rentrées fiscales. On peut dès lors aisément penser que le choix de cette variable tend uniquement à trouver un indicateur, arbitraire, permettant de justifier une limitation de la croissance des postes de l'Etat de Vaud.
Deuxièmement, ce postulat, en prévoyant un mécanisme limitatif automatique, élude complètement une appréciation politique du périmètre des actions dudit Etat et des politiques publiques qu'il entend mener. Pourtant, certaines demandes des milieux soutenant ce postulat, comme des mesures sécuritaires ou de soutien au monde agricole, nécessitent un Etat fort et agile. En outre, le postulat ne tient pas non plus compte du fait que certaines augmentations de postes peuvent être liées à des obligations fédérales, parfois elles-mêmes subventionnées, ou servent à affronter des situations ou phénomènes conjoncturels, comme une crise sanitaire ou migratoire.
Troisièmement, le postulat se focalise sur le nombre d'employés à temps complet et son évolution en éludant les impacts financiers que peuvent avoir des variations d’ETP. Concrètement, des internalisations augmentent régulièrement le nombre d'employés avec un impact financier pourtant neutre, voire faible – si ce n'est même parfois des économies. Plusieurs exemples peuvent ainsi être cités pour 2023 : maintenance des sirènes à la sécurité civile et militaire ; les prestations de logopédie, psychomotricité et psychologie en milieu scolaire ; appels 114 au CHUV et central téléphonique des médecins de garde à Unisanté. Par ailleurs, des externalisations peuvent provoquer à moyen ou long terme des charges plus importantes, en plus des problèmes technologiques qu'il a occasionnés. Le projet Bedag cité en séance par la conseillère d'Etat en fournit un très bon exemple. Proche du concept d'externalisation – cela a été évoqué dans le rapport de majorité – la numérisation d'une prestation occasionne en réalité des transferts de charges vers le back-office qu'il s'agit de ne pas négliger. Cet affaiblissement marqué de l'agilité de l'Etat pousse donc la minorité de la commission à refuser ce postulat. Je vous invite à en faire de même.
La question soulevée par le postulat Weissert est plus intéressante, de surcroît dans une période de turbulence financière sur le plan cantonal, mais la demande du texte nous paraît toutefois gargantuesque au vu des éléments qu'il faudrait mettre en œuvre pour y répondre – ce qui va paradoxalement demander beaucoup de moyens et aller à l'encontre donc de ce qui est demandé, c'est-à-dire une certaine forme d'efficience.
La minorité s'interroge tout d'abord sur l'opportunité de réaliser un audit qui se bornerait à questionner l'efficience des ETP au sein d'administrations cantonales au sens où le postulant l'entend, sans adopter une perspective empirique plus globale qui questionne le niveau actuel des prestations délivrées par l’Etat, les éventuels besoins en ETP pour assurer correctement ses missions ou encore la problématique du manque d'activité de certains secteurs – je pense particulièrement aux conditions de travail et au niveau de rémunération. Or, on sait que certains secteurs sont sous-dotés, ce qui est régulièrement évoqué d'ailleurs au sein de ce plénum par des interventions parlementaires ou dans les rapports de la Commission de gestion, mais également dans la presse. La demande d'un audit général sur l'efficience des ETP de l'Etat est superfétatoire, car cet enjeu est pris constamment au sérieux par l'administration cantonale.
Deuxièmement, contrairement à ce qu'affirme le postulant, il n'existe aucune systématique d'augmentation des ETP – c'est important d'insister là-dessus – au sein de l'administration cantonale ou de toute autre administration publique. Au contraire, les processus de création de postes sont généralement particulièrement rigides et laissent des secteurs d'activité malgré tout en sous-effectif, comme déjà évoqué.
Enfin, le rapport comparatif intercantonal sur l'efficience de l'administration est une démarche qui a déjà été effectuée par l'Institut des hautes études en administration publique (IDHEAP) et qui a montré de très nombreuses limites, tous les cantons n'étant pas comparables, certaines tâches étant tantôt communales, tantôt cantonales, en fonction du canton duquel on parle. De manière générale, la minorité de la commission est attachée à des services publics de qualité et à la qualité des prestations délivrées à la population. Elle aurait été ouverte à une démarche constructive qui aurait visé à faire une analyse la plus complète possible de l'efficience, mise en regard des besoins de la population, des besoins en ETP et des recettes actuelles et futures de l'Etat, mais pour que cette démarche soit effectivement constructive, elle ne devrait pas partir de présupposés caricaturaux. Il y a trop de postes à l'Etat, les charges ne sont pas maîtrisées, les fonctionnaires sont moins efficaces que dans le privé, elle ne devrait pas ériger la réduction des dépenses publiques comme seule finalité possible, alimentant par là un discours dommageable pour le service public. En résumé, si la notion d'efficience de l'Etat est légitimement questionnable, elle doit l'être de façon non orientée et ouverte, raison pour laquelle la commission minoritaire vous recommande le rejet de ce second postulat.
La discussion est ouverte.
Ce postulat a été déposé début 2024, cela fait donc plus d'une année. Combien de choses se sont passées depuis ? Quels comptes 2024 a-t-on reçus ? Si nous y avions implémenté un peu de ce postulat, peut-être aurait-on eu des comptes 2024 un peu moins négatifs ? On sait que le canton de Vaud a un problème de dépenses et non de revenus. Le canton est bien armé au niveau des revenus, car c'est l'enfer fiscal suisse – je cite Mme Dittli, ancienne responsable des finances dans ce canton, qui disait « n'oubliez pas que le canton de Vaud est classé 26e parmi les cantons aux impôts les plus lourds du pays ». Je précise, pour ceux qui n'ont pas compris la lapalissade, qu'il y a 26 cantons en Suisse ; notre canton est donc dernier et le plus confiscatoire en termes d'impôts dans notre beau pays.
Mesdames et messieurs, d'où vient cette croissance ? D'où vient cette problématique liée aux dépenses ? On sait qu'une grosse partie des dépenses de l'Etat vient des salaires. Il est intéressant d'examiner le pourcentage de fonctionnaires cantonaux – hors école et domaine hospitalier – par habitant dans d'autres cantons. Pour le canton de Vaud, nous étions à 2,24 % de fonctionnaires par habitant en 2018, et nous sommes passés à 2,35 % en 2023, alors qu'en 2022, à Berne par exemple, il y avait 0,98 % fonctionnaire par habitant et 1,77 % à Zurich. Dès lors, par rapport à Zurich, le canton de Vaud a environ 25 % de plus de fonctionnaires. Il s'agit donc clairement d'un problème de dépenses, même si, pour les comptes 2024, on nous répète que c'est lié à la croissance de la population et que c'est pour cela que les dépenses et le nombre d'ETP croissent. Je demande au secrétariat de projeter le graphique que j'ai préparé spécialement pour vous.
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En rouge, vous pouvez voir la croissance des dépenses totales du Canton de Vaud, c'est-à-dire des comptes, et en vert la croissance de la population. Depuis l'année 2000 jusqu'à l'année 2024, que constatons-nous ? La croissance des dépenses de 2000 à 2024 est de plus 244 %, et la croissance de la population de 2000 à 2024 est de plus 39 %. Il y a donc clairement un gap assez important, voire immense, entre la croissance de la population et la croissance des dépenses de l'Etat. Nous devons vraiment nous poser cette question : que s’est-il passé pendant ces 24 ans ? De plus, nous pouvons constater que cela continue et continuera sans doute ces prochaines années. C’est pourquoi il faudrait peut-être réaligner les dépenses de l'Etat sur la croissance de la population.
Mesdames et messieurs, ce postulat demande que le Canton gère de façon plus raisonnable ses dépenses et la croissance de sa masse salariale. Celle-ci doit être plus en ligne avec la croissance de la population. Il est temps de gérer ce Canton à la manière d'un bon père ou d'une bonne mère de famille, à l'instar de la majorité de la commission.
Je déclare mes intérêts : je suis secrétaire générale de la Fédération des Sociétés de fonctionnaires et associations du parapublic vaudois. La droite décrit l'Etat comme un corps malade, trop gros, trop gras, en surcharge pondérale, un Etat qui devrait faire une cure d'amaigrissement ou souscrire un abonnement au fitness. Cette rhétorique méprisante vise non seulement l'institution, mais surtout les femmes et les hommes qui la font vivre au quotidien : le personnel, la fonction publique vaudoise. Soyons clairs, derrière l'image, c'est une vision profondément réductrice de l'Etat et de son rôle qui se dessine. Le postulat Moscheni, en apparence technique, cache une intention bien politique : établir une règle automatique qui lierait la croissance du nombre de postes dans l'Etat à celle de la population. Ce raisonnement est trop simpliste, car les besoins en personnel public ne dépendent pas uniquement de la démographie ; ils dépendent avant tout des politiques publiques décidées par ce Parlement et du niveau de prestation que nous voulons offrir à la population vaudoise. Nous ne vivons pas dans une feuille Excel où une colonne « habitants » dicterait mécaniquement celle des ETP.
La réalité ? l'Etat est constamment sollicité pour répondre à de nouveaux défis, souvent imposés par la Confédération, ou résultant de crises et transformations rapides. Qu'il s'agisse de la mise en œuvre de nouvelles politiques sociales, de la transition énergétique, de la numérisation ou de la prise en charge de problématiques sanitaires ou environnementales, ces actions nécessitent du personnel qualifié. Et parfois, ces créations de postes ne pèsent même pas sur le budget cantonal, elles sont financées par des fonds fédéraux, comme c'est le cas pour certains postes liés à l'OFROU ou à des projets nationaux.
Quant au postulat Weissert, il se présente sous un jour encore plus technocratique. Il s'agirait de mener un vaste audit de l'efficience des ETP, un audit poste par poste, avant que le postulant lui-même ne reconnaisse que ce serait trop coûteux, trop lourd, trop irréaliste... Dès lors, on se demande bien ce qu'il reste du projet initial… Veut-on vraiment évaluer sérieusement les conditions dans lesquelles l'Etat délivre ses prestations, ou simplement alimenter un discours de suspicion à l'égard du service public ? Si l'intention avait été honnête, elle aurait cherché à comprendre où sont les besoins criants en personnel, là où le manque de ressources empêche aujourd'hui l'Etat d'assurer ses missions, car ces situations existent et elles sont nombreuses : au service des bourses, par exemple, où les retards engendrent du stress, des frais, voire du décrochage scolaire ; dans les soins infirmiers, où la pression constante pousse au burn-out ; au service de la population ; dans les services informatiques ; dans les secrétariats parlementaires ; bref, partout où la surcharge est devenue la norme.
Ce que nous devons questionner, ce n'est pas la présence de personnel, c'est leur absence, aux endroits où les prestations sont aujourd'hui fragilisées. En effet, tout cela renvoie à une question de vision. La droite nous dit aujourd’hui : « l'Etat coûte trop cher, il faut couper ». Mais couper dans quoi ? Dans les soins, dans l'école, dans l'accompagnement social, dans la formation, dans la régulation du loup ou dans la sécurité ? Chacun ici le sait : ce sont ces services que nous mettrions en péril en suivant aveuglément cette logique de réduction des charges, et ce sont les personnes les plus vulnérables qui en paieraient le prix. A gauche, et en particulier tout à gauche, nous défendons une autre stratégie : augmenter les produits de l'Etat pour garantir le maintien et l'amélioration des prestations. C'est une politique juste et durable. Les conséquences d'un affaiblissement du service public sont lourdes, à court terme pour les individus, à long terme pour la collectivité tout entière. Ce n'est pas en sous-dotant nos institutions que nous ferons des économies, c'est en garantissant leur efficacité et leur capacité d'intervention.
Certes, l'efficience est un objectif légitime, mais elle ne doit pas être un prétexte à l'austérité ; elle doit être au service de la population et non au service d'un agenda idéologique qui rêve d'un Etat réduit à sa portion congrue. Le personnel de l'Etat mérite notre respect, pas notre mépris. Il est la condition de prestation de qualité, pas un fardeau dont il faudrait se débarrasser. C'est pourquoi je vous invite à classer ces deux postulats et à défendre une vision exigeante, mais constructive de notre service public, une vision qui ne confond pas rigueur et régression et qui considère que garantir l'accès au droit est un investissement dans notre avenir commun.
Tout d’abord, sur la question soulevée par M. Moscheni concernant le lien entre l’évolution démographique et l’augmentation des charges : contrairement à ce que dit M. Maury, je pense que c’est bel et bien un critère pertinent. D’ailleurs, c’est exactement ce critère qu’on utilise lorsqu’on souhaite augmenter le nombre de postes : on dit qu’il y a plus d’élèves, donc il faut plus d’enseignants pour s’en occuper, etc. Ce raisonnement est donc valable quand il s’agit de créer des postes. Il me semble logique qu’on puisse également se demander s’il existe une corrélation entre l’augmentation de la population dans le canton et les prestations, via les postes créés dans l’administration publique – dont, je précise, je fais moi-même partie.
Cela dit, une phrase du rapport m’a laissé pour le moins pantois : « Les comparaisons intercantonales ne sont pas parlantes, car souvent les cantons sont peu comparables ». En d’autres termes, on ne peut pas comparer parce qu’on ne peut pas comparer ; c’est ce que cela signifie ! Faisons donc quelques comparaisons concrètes :
- Genève : 541 millions de bénéfice
- Fribourg : 240’000 francs
- Neuchâtel : 56,4 millions
- Valais : 400’000 francs
- Zurich : 150 millions
Et puis, il y a le canton de Vaud, un peu à la traîne. Je ne sais pas si nous sommes « incomparables », mais en tout cas, cela donne l’impression d’être incomparablement mauvais. Il apparaît que nous ne maîtrisons pas nos charges. D’ailleurs, le rapport indique que le Conseil d’Etat « vise à maîtriser la hausse des charges », ce qui est très révélateur : il ne s’agit même plus de maîtriser les charges, mais simplement la vitesse à laquelle elles augmentent. C’est dire l’ambition dévorante de maîtrise des charges...
A mon sens, dire qu’on est incomparable – ou qu’il n’y en a pas d’autres comme nous, pour la version moderne – équivaut à un déni de réalité. C’est une posture qui laisse entendre qu’il n’y aurait rien à faire. En l’occurrence, ce n’est pas une critique adressée personnellement à Mme Gorrite, ici présente pour répondre, mais bien à l’ensemble de la majorité de gauche du Conseil d’Etat. Je vous invite donc à faire deux choses, au sein du Conseil d’Etat. Premièrement, répondre sérieusement à l’excellente interpellation de mon collègue, M. Favre, intitulée : Match de l’efficacité : Valais 267 – Vaud 0, dans laquelle on apprend – ô miracle ! – que le Valais a réussi à optimiser 267 postes sans licenciement, tout en simplifiant son administration et en cherchant une véritable efficience. Si le Valais y parvient, pourquoi pas nous ?
J’ai même tenté une règle de trois – peut-être fausse – qui suggérerait qu’on pourrait optimiser plus de 1’000 postes dans le canton de Vaud. Et, si mes chiffres sont sous-estimés, alors c’est que le potentiel est encore plus grand. Dès lors, je vous encourage à répondre à M. Favre et, pour ce faire, peut-être faudrait-il téléphoner aux Valaisans pour leur demander comment ils s’y sont pris pour faire ce que nous, Vaudois, sommes incapables de faire. Car si nous n’y parvenons pas, c’est sans doute parce que nous ne le voulons pas vraiment. Je vous invite à soutenir les postulats de MM. Moscheni et Weissert, comme s’y emploiera la majorité de mon groupe.
Nos années parlementaires sont rythmées par trois points fixes immuables : en automne, la présentation du budget, avec un nombre important de nouveaux ETP ; la revue, en décembre ; en avril, la présentation des comptes, avec une croissance importante des recettes et – encore plus importante – des charges. On a beau dire que comparaison n'est pas raison, il n'en reste pas moins que dans la plupart des organisations dans lesquelles nous travaillons, vous et moi, le reste de la semaine, qu'il s'agisse d'entreprises privées, d'entreprises publiques, d'institutions ou même de syndicats, il n'est jamais question d'engager une nouvelle personne pour chaque nouveau projet.
Malgré cela, nous sommes capables de développer des services et d'offrir des produits et prestations toujours plus pertinents. Les postulats proposés par nos collègues Weissert et Moscheni ont le mérite de poser de bonnes questions. Le groupe PLR va soutenir la prise en considération des deux postulats qui nous sont proposés ici.
Dans un premier temps, je vais m'en tenir au postulat Moscheni. Il vise une stratégie visant à limiter la croissance du nombre d'ETP de la fonction publique afin qu'elle soit inférieure, ou au maximum égale, à la croissance de la population vaudoise. Le fait de vouloir corréler l'évolution des postes à l'évolution démographique est, selon le groupe des Verts, une démarche profondément risquée. D'une part, parce qu'elle limite la création de postes indispensables en cas d'atteinte de plafonnement, y compris ceux qui sont imposés, voire financés par le niveau fédéral, mais aussi parce qu'elle pousse à l'externalisation des postes qui, dans de nombreux cas, coûte plus cher que d'employer directement le personnel.
Dès lors, cette demande n'apporte pas de garantie de diminution budgétaire. Pour prendre une situation concrète, on peut envisager de devoir faire face à une nouvelle pandémie qui implique l'engagement de personnel supplémentaire, tout en observant une augmentation de la mortalité, soit une baisse démographique. Vous l’aurez compris, le groupe des Verts va refuser ce postulat et vous invite à en faire de même.
Je déclare mes intérêts : je suis membre de la Commission des finances et sous-commissaire au Département de l’enseignement et de la formation professionnelle (DEF). Pour répondre à nos collègues du POP : oui, nous voyons toutes celles et ceux qui travaillent à l'Etat, et en particulier au DEF, nous discutons avec eux de différents points, dont un en particulier : l'engagement ou non de personnes supplémentaires dans l'administration. Je rassure tout de suite la présidente de la Commission des finances : je ne trahirai aucun secret ! La position de la minorité m'apparaît en tout cas pour l'instant assez rigide et réfractaire à toute réflexion sur l'efficacité administrative publique. C'est ce que nous recherchons un maximum quand, avec mon collègue, nous nous présentons au DEF pour les questionner sur différents points.
Plutôt que de rejeter ces deux postulats, on devrait plutôt reconnaître l'importance de la transparence et de l'évaluation objective des ressources humaines. Un audit ciblé sur une approche plus équilibrée entre les besoins de postes et la responsabilité budgétaire offrirait une voie constructive au niveau du budget, qui est déficitaire. Qu’est-ce que cela garantirait ? Un service public performant, sans tomber dans des logiques d'austérité. Il faudrait freiner certaines dépenses publiques – et je n’attaque pas l'Etat ou ses services en disant cela. L'efficience administrative n'est pas forcément synonyme de coupe budgétaire ou arbitraire ; elle consiste à veiller à une gestion optimale des ressources qui garantit à la fois la qualité des prestations et la responsabilité financière de toutes et tous. En refusant toute remise en question au travers de ces deux postulats, qu’adopte la minorité ? Une posture défensive qui nuit à l'amélioration continue des services publics. Or, c'est exactement la vision réfutée. Je vous encourage à soutenir ces deux postulats pour que nous puissions avoir une vision beaucoup plus constructive, afin de ne pas donner à tous nos concitoyens, qui paient ou non des impôts, mais qui sont soumis aux services de l'Etat, une image qui ne serait pas forcément très bonne et performante.
Pour le groupe socialiste, le postulat Moscheni soulève plusieurs problèmes. Le premier concerne l’usage d’une variable démographique. Or, lorsqu’on parle de finances publiques – au cœur du texte de M. Moscheni – la variable démographique n’apporte que très peu d’indications sur les perspectives de recettes de l’Etat. En effet, elle ne mesure pas du tout le niveau d’activité économique du canton : ni le nombre d’emplois, ni le taux d’emploi, ni le dynamisme des entreprises, ni l’évolution des salaires ou des autres revenus et patrimoines, ni la croissance économique. Or, ces éléments me semblent essentiels si l’on souhaite calibrer correctement les activités de l’Etat, en fonction des prévisions fiscales et de la santé financière du canton, sur le moyen et long terme.
Ensuite, même en supposant qu’un indicateur mieux calibré soit choisi, instaurer un tel indicateur limitant automatiquement la croissance des ETP est problématique. Cela élude complètement l’appréciation politique du périmètre d’activité de l’Etat et des prestations offertes à la population. Or, c’est précisément notre rôle, en tant que législatif et Parlement – ce que nous faisons chaque mardi, tout comme la droite via ses divers dépôts. Ce type de mesures pourrait conduire à des situations particulièrement absurdes : imaginons que la population stagne, mais que la criminalité augmente. On ne pourrait alors pas engager davantage d’agents de sécurité publique. Autre exemple, la population stagne, mais la santé psychologique des jeunes se détériore : on ne pourrait pas engager des spécialistes dans le domaine. Ce serait incohérent et très limitant quant au rôle de l’Etat.
Par ailleurs, ce postulat se focalise sur le nombre d’employés à temps complet et son évolution, sans prendre en compte les véritables impacts financiers de ces variations d’ETP. Il est courant que l’internalisation de certains postes, donc une augmentation des effectifs, ait un impact financier faible voire neutre, voire permette des économies. À l’inverse, l’externalisation de postes peut à long terme générer des charges supplémentaires.
De plus, comme l’a relevé le rapporteur de minorité, la numérisation des prestations entraîne souvent des transferts de charges vers le back-office. Dès lors, le postulat ne tient pas compte des postes financés partiellement ou totalement par des subventions fédérales. Imaginez un système absurde qui refuserait la création de postes supplémentaires simplement parce que la Confédération a instauré une nouvelle politique publique impliquant une prise en charge partielle de plusieurs postes par l’Etat de Vaud. Cela ne serait pas cohérent. Dans ce contexte, vous comprendrez que le groupe socialiste ne soutiendra pas ce postulat.
Permettez-moi également un mot à l’attention de M. Moscheni : comme presque chaque semaine, vous venez nous répéter vos comparaisons et affirmer que le canton de Vaud serait un « enfer fiscal ». Je tiens à lui dire que répéter une affirmation plusieurs fois ne la rend pas vraie. Vous comparez régulièrement des taux de fonctionnaires par habitant ou des taux d’imposition, mais vous ne prenez jamais en compte la répartition des prestations entre Canton et communes. Par exemple, dans certains cantons, les enseignants sont employés par les communes, tandis que dans le canton de Vaud, le personnel du CHUV est considéré comme fonctionnaires de l’Etat, ce qui n’est pas le cas dans d’autres cantons. Vous ne comparez pas non plus les prestations offertes. Si l’on compare Vaud à Zoug – qui n’a ni hôpital universitaire ni université – on fait, à mon sens, une comparaison entre des pommes et des poires. Je vous invite donc à avoir une analyse plus fine des enjeux autour de ces comparaisons et, plus globalement, à rejeter le postulat de notre collègue Moscheni.
(remplaçant M. Alexandre Démétriadès, rapporteur de minorité) J’aimerais répondre aux interrogations de MM. Vogel et Jobin qui ont interpellé la minorité de la commission. Cette dernière n'a jamais dit qu'elle était, par principe, opposée à discuter des prestations de l'Etat. Ce qui nous dérange, c'est de corréler strictement et uniquement ETP et démographie. Le critère, en tant que tel, peut être pertinent, mais regarder la problématique uniquement au travers de cette focale, sans autre angle d'analyse, est quelque peu problématique ; cela enlève toute souplesse et agilité à l'Etat. Or, si l'Etat n'est pas suffisamment souple, il ne pourra pas faire face à certaines situations extraordinaires, comme celle relevée par M. Cala à l'instant, qui a signalé un cas hypothétique, mais tout à fait plausible, où la criminalité pourrait tout à coup augmenter sans que la démographie n'augmente. Nous nous retrouverions alors bloqués.
Or, je pense que même les moins étatistes parmi nous reconnaissent que sans une administration suffisamment dotée, l'Etat ne peut pas remplir ses missions et ne pourra pas faire face à certaines crises, alors que c'est le rôle d'un Etat de protéger sa population. Et si l'Etat ne remplit pas ses missions régaliennes à cause de cautèles trop strictes et limitantes, la population pourrait perdre confiance en ses autorités. Or, lorsqu'une population perd confiance en l'Etat, la démocratie est affaiblie, car c'est la porte ouverte aux postures populistes.
Cela fait un moment que je ne comprends plus : si on désire faire quelque chose, on peut le faire ! Je travaille depuis 35 ans dans une entreprise privée et nous avons fait une expérience : nous ne réengageons pas de nouveau personnel. Il y a des solutions ; il faut arrêter d'imaginer que rien n'est possible. Il faut simplement savoir oser. Ce poste a l'avantage de laisser à notre gouvernement la possibilité de nous proposer enfin des idées d'innovation.
Je souhaite répondre à M. Cala qui me demande de mieux analyser la situation et le rassurer : j'ai bien analysé la situation et j'aimerais lui ouvrir les yeux. Le secrétariat peut-il afficher le document que je viens de lui envoyer ?
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Il s’agit de l'indice de l'exploitation du potentiel fiscal des personnes physiques par canton. Monsieur Cala, je vous laisse lire : à droite, vous verrez un sigle « VD ». L'enfer fiscal suisse est bien le canton de Vaud ! Or, quand je vois la situation de nos comptes 2024 qui sont déficitaires, alors que les autres cantons ont des bénéfices, je pense avoir bien analysé la situation – peut-être contrairement à vous ! Je vous invite à ouvrir les yeux !
Je regrette, monsieur Moscheni, mais vous nous transmettez un document qui n’a aucune nuance. Nous ne savons même pas de quoi on parle ! Ce document parle de potentiel fiscal des personnes fiscales par canton, l'exploitation du potentiel fiscal, mais nous ne savons pas si cela comprend aussi les communes. Quand quelqu’un s'installe dans le canton de Vaud, il paie l'impôt communal et l'impôt cantonal, puis les communes prennent en compte les prestations. Est-ce qu'on parle de familles avec deux revenus et deux enfants ? Est-ce qu'on parle d'une personne célibataire ? Est-ce qu'on parle d'un revenu de 200'000 francs ou d'un revenu de 100'000 francs ? Est-ce que le bouclier fiscal entre dans cette réflexion ou non ? Il n'y a pas du tout de nuance là-dedans ! Nous avons justement besoin d'une analyse beaucoup plus fine, car quand après une analyse plus approfondie, nous n'arrivons pas tout à fait à la même comparaison. Je pense que le cas d’une famille composée d’un couple et de deux enfants n'a pas forcément une situation beaucoup plus compliquée dans le canton de Vaud qu'elle ne l'aurait dans le canton de Berne, par exemple. Il faut analyser plus finement la situation et définir quelles catégories de population sont les plus touchées et quelles catégories ont une situation tout à fait enviable dans ce canton.
Tout d'abord, le gouvernement aimerait commencer cette prise de parole en remerciant le personnel de l'administration cantonale vaudoise pour le travail qu’il accomplit au quotidien. Et je crois que, face aux temps durs financiers présents et à venir, et aux exigences croissantes qui pèseront sur leurs épaules pour assurer au quotidien les prestations attendues par la population, les exigences d’excellence vont s’intensifier. C’est pourquoi le gouvernement s’attèle à déployer une politique du personnel respectueuse, inclusive, et qui permette à chacune et chacun, dans la mesure du possible, de s’épanouir dans son travail.
Je crois que vous, députées et députés de milice, êtes particulièrement sensibles à cette dimension de qualité du lieu de travail, que doit garantir un employeur public exemplaire dans ce canton. Nous le savons tous : le canton de Vaud a déjà traversé des crises économiques et financières qui ont secoué l’administration cantonale ; cette dernière a contribué à l’assainissement des finances cantonales. Aujourd’hui, l’histoire semble se répéter, et le Conseil d’État, lors des travaux en commission, a été clair sur sa position : il s'agit ici de deux postulats, et je répéterai devant vous la même déclaration que celle faite en commission. Le Conseil d’Etat n’est pas opposé à la prise en considération de ces postulats, et ce, pour plusieurs raisons.
D’abord, et cela a été dit, la situation financière du canton de Vaud s’est considérablement dégradée depuis le traitement de ces textes en commission. Les temps sont relativement incertains. Nous devons d’ores et déjà trouver 94 millions d’économies pour cette année. Cela oblige le Conseil d’État à chercher, dans tous les domaines, des gisements d’efficience et d’économie, en vue de retrouver le petit équilibre dès le budget 2026. Et quand je dis « tous les domaines », cela inclut évidemment l’administration cantonale. Mais ce travail, nous comptons le mener de manière intelligente, équilibrée, en nous basant non pas sur des chiffres arbitraires sortis du chapeau, mais en tenant compte d’un équilibre entre les ressources et les besoins de la population, qui ne sont pas liés exclusivement – et c’est le seul reproche qu'on pourrait aussi adresser à M. Moscheni à ce stade – à la croissance démographique ; c'est très contrasté entre services. Il y a des services qui ne sont pas du tout liés à la croissance démographique et d’autres qui le sont très fortement, par exemple le milieu scolaire.
Au gouvernement, nous essayons précisément de nous garder de toute comparaison qui n'aurait pas de sens. Cela a été dit par le député Cala – et je le rejoins : l’exemple du canton de Zurich a été cité, qu'il faudrait tout à coup comparer au canton de Vaud en matière de nombre d'employés de l'administration cantonale. Mais, évidemment, si on omet de dire que les enseignants dans le canton de Zurich sont tous engagés par les communes, on enlève alors déjà un certain nombre de milliers de personnes, de même que tout le personnel technique ou de secrétariat, qui est aussi engagé par les communes dans le canton de Zurich. D’ailleurs, c'est la même chose pour le canton de Berne : les communes engagent les enseignants des écoles obligatoires primaires et secondaires II. Toutefois, le canton de Berne engage les enseignants dans le post-obligatoire.
Toutes ces comparaisons ne sont donc pas pertinentes. Il faut comprendre ce qui est pertinent pour le canton de Vaud et admissible sur le plan politique, tant pour le Conseil d'Etat que pour le Grand Conseil. C'est précisément cet exercice auquel nous nous livrons. De la même manière, les comparaisons entre les recettes fiscales ne peuvent pas complètement être valables – j'ai entendu la comparaison avec Genève, mais nous n’avons évidemment pas la même structure économique, monsieur Vogel. Il est vrai que le canton Genève a des bouclements qui nous font pâlir d'envie, mais ils ont aussi une structure économique qui repose beaucoup sur des sociétés de trading en matière première qui sont très intéressantes sur le plan financier. Toutefois, beaucoup d'observateurs ne prévoient pas que cet élément soit forcément très durable. Il y a une volatilité importante en matière de recettes fiscales, principalement sur les personnes morales. Or, je relève que, sur les personnes morales dans le canton de Vaud, les recettes fiscales se tiennent plutôt bien.
Mais on ne peut pas dire que le canton de Vaud est à la fois un enfer fiscal et en même temps se plaindre d’avoir un problème de pression sur les routes et un problème de pression de croissance démographique, n'est-ce pas ? On ne peut pas dire les deux choses à la fois. On ne peut pas être à la fois un enfer où les gens ne voudraient pas s'installer et vivre, et en même temps vouloir limiter la croissance, sinon il y aurait un enfer de croissance. C'est un équilibre à trouver et c’est notre objectif pour le budget 2026.
Tout à l'heure, j’ai été invitée à m'exprimer au nom de la majorité de gauche, mais je vous rappelle qu’il n'y a pas de majorité de gauche au Conseil d’Etat, que le Conseil d'Etat s'exprime de manière collégiale. Je m'exprime donc ici au nom de l'entier du gouvernement vaudois : nous allons effectuer ce travail en profondeur, en conscience et avec, en ligne de mire, l’objectif d’atteindre le petit équilibre en 2026. Ce travail nécessitera des efforts dans tous les domaines, y compris de la part du personnel de l'administration cantonale vaudoise.
La majorité de la commission recommande au Grand Conseil de prendre en considération ce postulat par 6 voix contre 5 et de le renvoyer au Conseil d'Etat.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 73 voix contre 55.