24_LEG_145 - EMPL Exposé des motifs et projet de loi modifiant la loi du 10 octobre 2023 sur la réduction de l’impôt cantonal sur le revenu des personnes physiques (LRIPP) (3e débat).
Séance du Grand Conseil du mardi 17 décembre 2024 (suivie du Noël du Grand Conseil), point 6 de l'ordre du jour
Documents
- Tableau miroir - LRIPP - 3e débat
- Texte adopté par CE - EMPL modifiant la LRIPP
- Rapport de la commission - RC - 24_LEG_145_min._T. Schenker
- Rapport de la commission - RC - 24_LEG_145_maj._F. Gross
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourProjet de loi modifiant la loi du 10 octobre 2023 sur la réduction de l’impôt cantonal sur le revenu des personnes physiques (LRIPP)
Troisième débat
Il est passé à la discussion en troisième débat des articles modifiés en deuxième débat.
Article premier. –
Art. 4. –
Pour rappel, la situation financière de l’Etat se dégrade et n’a plus rien à voir avec celle que nous pouvions observer il y a quelques années, avec un déficit opérationnel de 39 millions aux comptes 2023. Les informations dont nous disposons à la Commission des finances (COFIN) ne sont pas non plus particulièrement rassurantes. Nous devrons attendre les résultats des comptes 2024 pour en savoir plus. Il faut également prendre en compte les coupes fédérales qui risquent de reporter certaines charges sur le canton. Dans ce contexte, il n’est clairement pas opportun de proposer des baisses fiscales, et encore moins de s’engager dans des réductions fiscales importantes à long terme. D’ailleurs, la COFIN a majoritairement rejeté un amendement visant à ancrer une baisse de 5 % jusqu’en 2027. La semaine dernière, une nouvelle proposition a surgi, suggérant de porter cette réduction à 7 % d’ici 2027. La minorité de la COFIN vous invite à privilégier la version adoptée lors du premier, qui se limite à une baisse pour 2025, tout en laissant la possibilité d’aviser pour la suite en fonction de l’évolution réelle de la situation financière de l’Etat. L’objectif ici n’est pas de faire des promesses qui s’avéreraient difficiles à tenir à l’avenir.
Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des arguments présentés lors du dépôt de cet amendement au deuxième débat, mais il est évident qu’il est grand temps de redonner du pouvoir d’achat aux Vaudoises et aux Vaudois. Cet amendement va dans cette direction, en offrant une véritable feuille de route pour les années à venir. C’est pourquoi, naturellement, je vous propose de suivre le texte du deuxième débat.
Du côté du groupe Ensemble à Gauche et POP, nous vous appelons à maintenir la version du premier débat. Il est crucial, aujourd’hui, de convaincre la population que l’impôt est un moyen de financer des prestations essentielles pour le bien-être de toutes et tous. Ces prestations permettent de garantir un enseignement et des soins de qualité. L’impôt permet également de soutenir des secteurs économiques vitaux, à l’instar de l’agriculture, qui garantit la souveraineté alimentaire. L’Etat met en place des mesures de soutien aux éleveurs, des améliorations foncières, ainsi que des initiatives visant à soutenir la formation agricole. On pourrait multiplier les exemples.
Dans les mois à venir, nous ferons campagne contre l’initiative des milieux patronaux en affirmant que l’impôt est un acte de solidarité, qu’il est la clé du bien-être pour toutes et tous, et que les citoyens reçoivent quelque chose de précieux en échange de ce qu’ils payent chaque année. C’est cette vision que nous défendrons dans notre campagne. C’est pourquoi il n’est pas nécessaire de se livrer à une surenchère en faveur des revendications du moins-disant fiscal, mais au contraire de mettre en évidence que l’impôt est utile, qu’il permet de construire une société prospère et bien développée.
Dans ces conditions, nous vous appelons à ne pas céder à la surenchère observée lors du deuxième débat, qui proposait des baisses fiscales supplémentaires, mais à maintenir fermement nos positions et à consolider les recettes de l’Etat pour le bien public et au service du plus grand nombre.
Au début de ce débat, le Parti socialiste nous a affirmé que toute baisse fiscale entraînerait des conséquences dramatiques : 38 élèves par classe, la fin des aides de l’Etat, la fin de tout, et quasiment la disparition du canton de Vaud. Rien ne nous a été épargné, à l’exception peut-être de la pluie de grenouilles… On nous a présenté un scénario de fin du monde si l’on consentait à une toute petite réduction des impôts. De son côté, le PLR s’est opposé à l’initiative de l’UDC, qui proposait une baisse de 10% – si je ne me trompe pas – en la qualifiant d’excessive, de totalement inacceptable, estimant que l’UDC faisait n’importe quoi et que toute réduction au-delà de 5% signifiait la mort assurée du canton.
Puis, tout à coup, des négociations extra-parlementaires ont eu lieu ; on a commencé à mélanger les pommes et les poires, les différents projets, qu’ils soient bons ou non. Chacun a dû manger son chapeau, et soudainement, nous avons entendu les socialistes dire : « Oui, finalement, 7 %, ce n’est pas si mal, c’est un peu dommage, mais bon, on va faire avec ». Et le PLR, de son côté, s’est engagé en déclarant que, au fond, il était possible de soutenir des projets, même s’ils n’étaient pas nécessairement excellents.
Au début du débat, le Conseil d’Etat avait affirmé que 5% était déjà impossible à atteindre et que faire plus était hors de question. Pourtant, soudainement, il a changé de position, affirmant finalement que 7 % pouvait aussi passer, qu’il n’y avait pas de problèmes. Ce Parlement semble avancer un peu comme un poulet sans tête, avec des déclarations qui varient au gré du vent entre les barreaux des chaises, en fonction des discussions en dehors de l’enceinte parlementaire. Pour cette raison, les Vert’libéraux choisiront de s’abstenir de soutenir ces magouilles extra-parlementaires et ne voteront donc ni pour ni contre, bien au contraire.
Je ne vais pas répéter ce qui a déjà été dit, mais pour les Verts, ce revirement entre les deux débats est également difficile à comprendre. Aujourd’hui, ce qui nous semble particulièrement dangereux, c’est que si nous confirmons notre vote du deuxième débat, nous risquons d’approuver des baisses fiscales à l’aveugle. En effet, nous manquons d’informations sur les impacts à moyen et long terme de ces réductions sur les prestations de l’Etat.
Nous avons en effet un exposé des motifs et un projet de loi du Conseil d’Etat qui nous explique qu’on peut aller jusqu’à 5 %, mais pas vraiment au-delà. Et puis, soudainement – je rejoins mon préopinant – on se retrouve face à un deal qui semble avoir été conclu, prévoyant moins de recettes et plus de dépenses. Cela soulève une question cruciale : comment cette situation pourra-t-elle être tenable à long terme ? La crainte des Verts est évidemment que les premières victimes de ce genre de politique soient les politiques environnementales et la lutte contre le réchauffement climatique, ce que nous avons déjà constaté dans ce canton et ailleurs. Concrètement, si nous continuons à affaiblir l’Etat, nous finirons par être contraints de couper dans certaines dépenses, et il est bien connu que ce sont généralement ces politiques qui sont les premières à être réduites. Or, c’est le pire calcul possible, car si nous n’investissons pas maintenant dans la lutte contre le réchauffement climatique, mais aussi dans l’adaptation aux changements, nous le paierons bien plus cher à l’avenir. Le coût le plus élevé, c’est celui de l’inaction, et à chaque catastrophe climatique, nous en prenons conscience… avant de l’oublier.
Aujourd’hui, dans un esprit de moindre mal, nous voterons en faveur des baisses fiscales telles qu’elles ont été décidées lors du premier débat. Bien que, comme nous l’avons maintes fois souligné tout au long de ce débat, nous nous soyons opposés à toute forme de baisse fiscale, nous soutiendrons néanmoins le moindre mal issu du premier débat. Cela dit, nous restons réalistes quant à la conclusion de nos débats et sommes profondément inquiets et anxieux pour l’avenir.
Comme nous l’avons souligné depuis le début de ce débat, le groupe socialiste est profondément soucieux et inquiet des conséquences de l’initiative des 12%, qui auront des effets ravageurs pour l’Etat. Cette initiative plongera assurément le canton dans une crise profonde. Face à cette situation, nous estimons que le contre-projet indirect du Conseil d’Etat propose des mesures qui soutiendront le pouvoir d’achat des Vaudoises et des Vaudois, notamment par le biais de facilités tarifaires, de la revalorisation des conditions de travail dans le secteur parapublic, ainsi que de l’augmentation des allocations familiales. Dans ce contexte, le groupe socialiste s’opposera majoritairement à la réduction de 7 %, tandis qu’une petite part du groupe choisira de s’abstenir lors du vote.
Je voudrais réagir brièvement à ce qu’a dit mon collègue David Vogel. Je pense que son interprétation de l’histoire récente est, en réalité, très subjective. J’espère que lorsqu’il enseigne l’histoire, il fait preuve de plus d’objectivité.
Pour en revenir à notre position, le groupe PLR soutiendra l’amendement du deuxième débat, car ce dernier ne modifie pas le budget 2025 que nous sommes en train de traiter. Il permet au Conseil d’Etat de faire des propositions et répond à la demande légitime de diminuer les impôts. C’est pour ces raisons que le groupe PLR soutiendra cet amendement de manière unanime.
En préambule, et comme l’ensemble de mon groupe, je suis opposée à toute baisse d’impôt. Nous discutons beaucoup, dans ce plénum, pour savoir à qui profitent ces baisses et si elles contribuent réellement à augmenter le pouvoir d’achat. Grâce aux chiffres que m’a transmis le département de Mme Dittli, j’ai pu élaborer les graphiques que vous voyez ici, qui illustrent les pertes fiscales cantonales que nous aurions si nous appliquions la baisse progressive de l’impôt de 4 % en 2025, 5 % en 2026, et 7 % en 2027, une proposition que l’on nous propose d’adopter en troisième débat. A première vue, comme le montre ce graphique pour ceux qui peuvent le voir, on pourrait penser que la classe moyenne serait la grande gagnante, puisque cette catégorie semble recevoir une grande fraction des baisses fiscales en termes de revenus totaux. Cependant, il est important de souligner que la classe au-dessus de 500’000 francs verra son impôt réduit de 108 millions au total.
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Passons maintenant au deuxième graphique. Si l’on regarde les baisses d’impôt au prorata des contribuables – c’est-à-dire ce que chacun d’entre nous va réellement obtenir de cette baisse d’impôt – on observe que la classe moyenne, qui semblait très grande dans le premier graphique, va recevoir en moyenne entre 400 et 600 francs par an. Les petits revenus risquent de ne bénéficier que de deux tickets de bus par an. En revanche, la classe aisée, avec un revenu annuel supérieur, recevra entre 3’000 et 10’000 francs. L’argument selon lequel la classe aisée, notamment celle au-dessus de 500’000 francs, pourrait être tentée de quitter le canton grâce à cette baisse d’impôt me semble peu convaincant. Franchement, est-ce que l’on quitte son travail ou son lieu de vie pour 3’000 francs par an quand on gagne 500’000 francs ? Je ne pense pas. Ce n’est donc pas un argument valable en soi. En réalité, on constate que cette répartition est loin d’être homogène et que la classe moyenne n’en bénéficie pas.
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La véritable problématique réside dans le barème des impôts, que vous pouvez voir sur ce troisième graphique. Comme vous pouvez l’observer, la courbe commence par croître autour de 20’000 et 30’000 francs, puis elle s’aplatit, avant de repartir fortement à la hausse en fin de courbe pour former un plateau. C’est ce qu’il est essentiel de modifier, et sur ce point je suis d’accord avec ceux qui souhaitent réformer le barème des impôts ou la courbe des impôts.
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Ces graphiques sont difficilement contestables en tant que tels, car il s’agit purement d’arithmétique. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que lorsqu’on effectue une baisse d’impôt en pourcentage, ce sont évidemment ceux qui paient le plus d’impôts qui vont en bénéficier le plus significativement, c’est proportionnel. Mais ce sont aussi ces mêmes personnes qui financent l’essentiel des prestations sociales. Et bien sûr, cet aspect, on se garde bien de le dire.
La deuxième chose à souligner, c’est que lorsque l’on dit que pour les plus faibles cela représente « deux tickets de bus », cet exemple est assez bon. En effet, il faut rappeler que dans le coût d’un ticket de bus, 50% des frais sont déjà couverts par des contributions et des subventions payées par les autres. On voit donc clairement un phénomène de vases communicants : ceux qui paient énormément d’impôts, en fin de compte, financent aussi des prestations destinées à d’autres, qu’il s’agisse de subventions pour les transports, pour l’assurance-maladie, ou pour d’autres types d’aides.
Je répéterai encore une fois que, bien que le graphique soit arithmétiquement correct, il n’en demeure pas moins une simple photo. L’économie, elle, est dynamique. Elle a déjà démontré comment elle réagit face à des baisses d’impôts. Je le dis et je le répète, notamment en ce qui concerne les baisses fiscales pour les entreprises, telles qu’elles ont été votées par une très grande majorité du peuple, à 87%, en 2018. A ce moment-là, toute la République, tous les partis confondus, ainsi que tout le Conseil d’Etat, se frottaient les mains en disant « Regardez, c’est formidable, on a baissé les impôts », même si certains criaient déjà au scandale, reprochant de ne faire bénéficier que les entreprises de cette mesure. Ce sont les mêmes arguments que l’on entend encore aujourd’hui. Cela n’a pourtant pas empêché le peuple d’approuver, d’une part, une baisse massive des impôts pour les entreprises, et d’autre part, une hausse des prestations sociales, notamment les subsides à l’assurance-maladie et les prestations complémentaires pour les familles (PC Familles). En réalité, cette votation, soutenue par 87% des Vaudoises et des Vaudois, représentait une double baisse des recettes pour le canton : une baisse d’impôts d’un côté et une hausse des dépenses de l’autre. Et malgré cela, le canton de Vaud s’en est plutôt bien sorti, puisque l’impôt sur les personnes morales rapporte aujourd’hui davantage qu’en 2018.
C’est cela, une politique fiscale intelligente : éviter de tondre les citoyens jusqu’au maximum, et permettre à l’économie, ainsi qu’aux finances publiques, de circuler dans la société pour générer plus d’impôts, plus de richesses, et encourager plus d’échanges économiques entre les différents acteurs. Je m’inscris donc en faux contre ceux qui prétendent qu’en procédant à des baisses d’impôts, on tue l’impôt. Je soutiens au contraire que, en réduisant les impôts, on soutient l’économie et la dynamique fiscale de ce canton, comme cela a été prouvé depuis la votation de 2018. C’est pourquoi je vous invite à soutenir cet amendement.
Une dernière remarque, si vous le permettez : il me semble que le vent a effectivement tourné au sein des partis politiques. Autrefois, on saluait les accords, ce que l’on appelait un compromis dynamique. Aujourd’hui, il m’est un peu désagréable d’entendre certains collègues parler de « magouilles ». Oui, il y a des discussions entre partis, et j’ose espérer que cela reste normal. Ces échanges sont non seulement judicieux, mais indispensables dans le cadre des débats parlementaires. C’est ainsi que l’on fait progresser les choses dans notre canton, plutôt que de recourir à des propositions ou initiatives parfois jusqu’au-boutistes. Je me réjouis que nous ayons pu trouver une solution, mais je rejette les termes de « magouilles » ou de « discussions d’arrière-salle ». Ce que l’on voit ici, c’est la construction d’un compromis dynamique, un modèle qui a très bien fonctionné dans notre canton depuis environ 25 ans.
Madame Billard, avez-vous également pris en compte les potentiels contribuables qui choisissent de ne pas venir dans notre canton en raison de notre dernière place dans les classements ? Une baisse fiscale présente l’avantage de redonner à notre canton l’attractivité qu’il mérite, en attirant des personnes désireuses de s’y installer, et en évitant qu’elles ne préfèrent une commune genevoise ou valaisanne. Car oui, madame Billard, notre canton est certes très beau, mais ce n’est malheureusement pas seulement pour notre paysage que l’on vient s’y installer, c’est un ensemble.
Concernant les contribuables qui bénéficient de cette baisse, il est logique, comme l’a souligné M. Buffat, que ceux qui ont le plus contribué en bénéficient également lorsque des baisses sont décidées. Il s’agit là d’une redistribution logique. Je rappelle que lorsque des fortunes importantes quittent notre canton, c’est l’ensemble de la population qui passe à la caisse. C’est à ce moment que les services à la population se réduisent, et non lors de baisses fiscales. Je vous invite donc une nouvelle fois à soutenir l’amendement que nous avions déposé lors du deuxième débat.
Pour répondre à ma collègue, effectivement, 80 % de nos charges sont financées par 20 % de nos contribuables. Je tiens à revenir sur le dernier graphique, celui de l’alpinisme. Heureusement que l’impôt s’arrête avec un taux marginal de 42,5 %. Cela signifie que sur un revenu déclaré d’un million, la personne paiera 425’000 francs d’impôt. En France, pour faire une comparaison, le taux marginal peut atteindre 70 %. La même personne, gagnant un million de revenus, devra alors payer 700’000 francs d’impôt. C’est la banqueroute du système. Aujourd’hui, les Français fortunés choisissent de s’installer en Suisse ou au Luxembourg.
Je dois avouer que je bois du petit lait en entendant ces discussions. Il convient de rappeler une chose importante : en 2023, nous avions proposé une baisse de 5 points d’impôt. Si nous avions été toutes et tous d’accord pour avancer ensemble sur cette motion, nous ne serions pas en train de nous chamailler sur ces points aujourd’hui. Je regrette, comme je l’ai déjà exprimé, que le Conseil d’Etat n’ait pas pris l’initiative de mettre cela en œuvre dès qu’il a pris les rênes. Néanmoins, je trouve tout de même cela assez fantastique et, pour ma part, je soutiendrai les 7 points.
Je souhaite rebondir sur les propos du député Weissert, qui évoque encore et toujours cette idée selon laquelle nous serions les derniers de la classe en matière de fiscalité. Je vous rappelle la suggestion que je vous ai déjà faite il y a une ou deux semaines : allez consulter les simulateurs fiscaux de la Confédération qui permettent de comparer l’imposition cantonale et communale à travers toutes les communes de notre pays. Vous pourrez y effectuer différentes simulations – il y en a une trentaine – et vous constaterez que le canton de Vaud n’est jamais à la traîne par rapport au reste du pays. Il est vrai que nous figurons dans le peloton de fin et que nous sommes un des cantons avec une fiscalité relativement lourde, mais nous ne sommes jamais seuls dans cette situation. Nous ne sommes jamais derniers. Le canton de Berne et celui de Neuchâtel sont systématiquement plus lourds que Vaud à cet égard, et nous sommes bien accompagnés. Le canton de Berne, par exemple, est un canton d’un million d’habitants, ce n’est donc pas un cas exceptionnel. Les cantons de Soleure, de Bâle-Campagne, et souvent celui d’Appenzell Rhodes-Extérieures, présentent également des niveaux de fiscalité similaires. Certes, les cantons que vous avez cités, comme le Valais ou Genève, sont plus favorables aux familles, mais ils se refont lourdement par des impôts plus lourds pour les personnes célibataires. Là encore, je vous invite à faire les simulations. Il est donc important d’arrêter de prétendre que le canton de Vaud serait exceptionnellement lourd dans le cadre de sa fiscalité. Il reste un canton relativement lourd fiscalement, certes, mais il est en très bonne compagnie.
Puisque j’ai la parole, permettez-moi de rebondir sur la question de la révision du barème par rapport à l’assiette fiscale et sur le fait qu’un article de journal de ce jour nous compare au canton de Zurich. Il est important de rappeler que tout n’est pas comparable. Nous évoluons dans un système fédéral où les assiettes fiscales varient d’un canton à l’autre. L’assiette fiscale du canton de Zurich est nettement plus favorable que la nôtre. Cela signifie que, à fiscalité égale, Zurich parvient à générer davantage de revenus, ce qui lui permet de maintenir une fiscalité plus légère tout en obtenant les mêmes recettes que dans le canton de Vaud. Ce dernier représente 53 % de la population de Zurich, mais parmi les contribuables fédéraux, 74 % des Vaudois déclarent des revenus inférieurs à 20’000 francs. Cela montre qu’une proportion importante de la population vaudoise est relativement plus paupérisée par rapport à Zurich. En revanche, pour chaque millionnaire en revenus vaudois, on en trouve trois à Zurich. Il est donc évident que l’assiette fiscale entre ces deux cantons n’est pas la même. Cela me permet de glisser une petite antienne à l’attention de mon collègue De Benedictis : il est illusoire de penser qu’une simple modification du barème suffira à résoudre cette question. Malheureusement, la situation est bien plus compliquée que cela.
Pour réagir aux propos de ceux qui affirment « Nous sommes contre toute baisse d’impôts, car elles ne profitent qu’à une certaine partie de la population », je ne reviendrai pas sur les arguments de mon collègue Marc-Olivier Buffat concernant la capacité contributive et les principes de proportionnalité de l’impôt. En revanche, je tiens à rappeler que la mesure que nous votons actuellement, inscrite dans la Loi sur la réduction de l’impôt cantonal sur le revenu des personnes physiques (LRIPP), fait partie d’un package. Celui-ci inclut également d’autres mesures que certains membres de l’hémicycle semblent avoir totalement oubliées aujourd’hui.
Ces mesures font partie d’un processus qui a déjà commencé les années précédentes, notamment avec l’augmentation des déductions pour les primes d’assurance-maladie et pour les frais de garde, qui ont été augmentées pendant deux années consécutives. Ce n’est pas tout, il existe d’autres mesures, en tout, pour un montant de 270 millions, proposées par le Conseil d’Etat. Bien sûr, une demande d’augmentation a été formulée via un amendement, mais ces 270 millions proposés pour les années à venir, jusqu’en 2027, viennent compléter d’autres mesures déjà existantes, qui ne sont pas remises en cause et qui profitent également à une partie de la population. Je tiens également à rappeler les 955,5 millions inscrits au budget pour les subsides d’assurance-maladie.
Ainsi, on ne peut pas dire que ces mesures ne bénéficient qu’à une certaine partie de la population. Au contraire, nous avons un package, une véritable feuille de route, avec diverses mesures ciblant différentes populations, et dont les coûts varient en fonction des mesures.
Lorsque M. Dessemontet déclare « nous ne sommes jamais les derniers, mais nous sommes toujours en queue de peloton », je crois que c’est justement ce que nous espérons changer dans ce canton : ne plus être dans les derniers, mais plutôt nous situer dans la moyenne du pays. Nous avons un réel problème d’attractivité. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises choisissent de ne pas s’installer dans notre canton – il n’y a pas seulement la fiscalité des entreprises – à cause de la fiscalité pesant sur les employés. Et bien sûr, cette fiscalité peu intéressante n’incite pas les entreprises à s’établir chez nous.
Il est évident que nous devons trouver la masse fiscale nécessaire pour financer les prestations à la population, et le canton de Vaud, si l’on regarde les comparaisons intercantonales en matière de prestations sociales, est un des cantons les plus généreux en la matière. Mais cela, il faut le financer, il faut que l’argent entre, et cet argent provient de personnes qui contribuent largement à cette fiscalité. Aujourd’hui, il est de notre responsabilité de garantir l’avenir de notre canton. Je suis convaincu que c’est en adoptant cette baisse de 7 %, inscrite dans la loi, que nous pourrons à terme voir ce que l’on peut attendre de notre fiscalité, laquelle est très importante. C’est pourquoi je soutiendrai cet amendement et je vous invite à en faire de même.
Je souhaite rebondir sur deux arguments évoqués précédemment, notamment en réponse aux graphiques que j’avais présentés. Le premier concerne le soutien à l’économie. Lorsque nous distribuons la grande majorité des avoirs que nous allons soustraire à l’impôt à seulement 4000 personnes, cela représente un total de 108 millions. Ces 4000 individus recevront chacun entre 10’000 et 30’000 francs de réduction. Cela n’est pas une véritable distribution dans l’économie. Une distribution économique se fait lorsque ces montants sont répartis de manière plus homogène sur l’ensemble de la population, avec des montants plus modestes, autour de 500 ou 1000 francs. De cette manière, on peut réellement favoriser une redistribution locale. C’est précisément pour cette raison que je souligne l’importance de rétablir le barème et de redonner plus de pouvoir d’achat à la classe moyenne, plutôt que de privilégier une petite portion de la population, soit ces 4000 personnes.
On a évoqué la question de faire revenir des contribuables plus aisés. Toutefois, il est important de rappeler qu’il s’agit ici de l’impôt sur le revenu. Pour attirer de tels contribuables, il faut avant tout des emplois. Pour compenser environ le même montant que celui que nous « perdrions » par cette baisse d’impôt, il faudrait attirer au moins 4000 contribuables générant chacun un revenu de 500’000 francs ou plus. Madame Bettschart-Narbel, pensez-vous qu’il suffirait de créer de nouvelles entreprises capables de générer autant ? Très honnêtement, je ne crois pas que nous puissions générer 4000 emplois avec des revenus de 500’000 ou 1 million de francs par personne physique. Et je n’ai pas de données économiques qui me permettent d’affirmer que cela est réalisable le canton de Vaud. Si vous disposez de ces données, il serait intéressant de les montrer. Pour ma part, je le répète, je pense que le seul moyen de parvenir à un consensus entre la gauche et la droite serait de revoir le barème, et non simplement de procéder à une diminution avec le barème actuel.
Pour répondre à M. Dessemontet, je prends bonne note de votre satisfaction d’être dans le peloton de queue. Cependant, vous n’aviez pas tout à fait le même avis la semaine dernière, lorsque mon collègue Moscheni a démontré que notre canton est le plus social de Suisse. A ce moment, vous étiez plutôt satisfait d’être dans le peloton de tête, vous avez même applaudi. Je constate donc simplement que vous appliquez deux poids, deux mesures.
Je voudrais rebondir sur certains propos de Mme Billard, qui fait une analyse qui, bien qu’intellectuellement correcte, ne correspond pas à la réalité. Si les perceptions en masse fiscale étaient les mêmes pour toutes les classes de revenus, elle aurait raison. Mais elle oublie un point très important : le meilleur allié de la classe moyenne, c’est le riche. En effet, la personne riche est celle qui paie tellement d’impôts qu’elle permet aux personnes de la classe moyenne d’en payer moins. Je crois que je reprends un chiffre de Mme la conseillère d’Etat Dittli, qui a précisé que 0,7% de la population paye 40% de l’impôt sur la fortune. Je connais beaucoup de phobies, comme l’apopathodiaphulatophobie ou la chérophobie, mais la phobie du riche me semble être un phénomène assez étonnant, surtout venant de personnes qui veulent réfléchir à l’avenir de notre canton.
Lorsqu’on regarde les chiffres et les faits, il devient évident qu’il nous faut des personnes riches qui paient beaucoup d’impôts, car elles sont, en réalité, nos meilleures alliées. Non seulement pour la classe moyenne, mais aussi, même, pour les personnes modestes. Aujourd’hui, par exemple, si nous finançons les transports publics à plus de 70% – comme le souligne M. Buffat, ce n’est pas 50% via les billets, mais 70% qui provient de l’impôt, on pourrait presque dire que les transports publics sont gratuits pour la population – cela est rendu possible grâce à des personnes qui possèdent une fortune conséquente et un revenu élevé. Ces mêmes personnes se trouvent aujourd’hui dans un véritable enfer fiscal dans notre canton.
C’est un choix de société, mais à terme, la politique de gauche pourrait tous nous entraîner dans un grand trou noir d’austérité. Comme je l’ai dit l’année dernière, la rigueur est une vertu, mais l’austérité est une faute. C’est la raison pour laquelle je soutiens la baisse de 7 %, et je voterai aussi pour les 12 % soutenus par l’initiative populaire, car je pense que 7% ne sont tout simplement pas suffisants.
Je ne peux pas m’empêcher de rebondir sur les propos de mon collègue Weissert. Oui, effectivement, et je l’assume pleinement, je suis extrêmement fier de mon canton pour toute une série de prestations sociales qu’il offre et qu’il est l’un des seuls, voire le seul, à fournir dans ce pays. Je suis très fier du plafonnement des primes d’assurance-maladie à 10% du revenu déterminant. Je suis également extrêmement fier qu’il existe, dans notre canton, un système de rente-ponts pour les chômeurs de plus de 60 ans. Je suis aussi très fier de notre revenu d’insertion et des prestations complémentaires que nous accordons à ceux qui en ont besoin. Il est vrai que nous payons des impôts qui sont souvent au-dessus de la moyenne nationale, mais pas plus que dans bien d’autres cantons de ce pays. A titre personnel, je suis très fier de les payer et, par ailleurs, je pense que cela fait partie intégrante de l’attractivité de notre canton.
Je pense que Mme Billard, et je l’en remercie, a mis le doigt sur un défaut important de ces baisses d’impôts linéaires en pourcentage, à savoir qu’il s’agit d’une très mauvaise manière de soutenir l’économie réelle et l’emploi, en particulier en ce qui concerne le tissu économique local. En effet, en orientant les baisses principalement vers les hauts revenus, ces réductions fiscales entraînent une part de l’argent public qui se dirige vers l’épargne, plutôt que vers la consommation. On sait que plus une personne est aisée, plus elle utilise ce prétendu soutien au pouvoir d’achat pour épargner, notamment dans des produits financiers, car plus l’épargne est élevée, plus la part investie en titres cotés en bourse l’est également. Des études le montrent. En fin de compte, cet argent est soustrait au tissu économique local pour aller alimenter des produits financiers placés en bourse.
Pour nous, ces baisses linéaires d’impôts sont une très mauvaise manière de soutenir et de favoriser le tissu économique. C’est en réalité tout le contraire de formes de soutien au pouvoir d’achat bien plus efficaces et mieux ciblées, telles que les subsides à l’assurance-maladie. Ces derniers, au contraire, sont directement réinjectés dans l’économie locale. En effet, les personnes qui en bénéficient n’ont pas les moyens d’épargner et, avec 100 ou 200 francs de plus par mois, elles pourront peut-être se permettre d’aller au restaurant, au cinéma, au théâtre, ou encore d’acheter des produits alimentaires locaux de meilleure qualité, plutôt que des produits chez des discounters. C’est pour cette raison que nous soutenons des formes de soutien au pouvoir d’achat autres que les baisses linéaires en pourcent. Elles sont bien plus ciblées sur les personnes qui en ont le plus besoin, et ont aussi un impact plus positif sur l’économie vaudoise, car elles stimulent la consommation locale, contrairement à l’épargne qui, souvent, se dirige vers des produits financiers. C’est pourquoi je vous remercie de revenir à la version du premier débat.
Monsieur Buclin, je n’avais pas prévu d’intervenir à la suite de votre intervention, mais comme vous êtes juste avant moi, je me permets de le faire. On continue avec cette haine du riche. Je sais que de votre côté, vous cherchez d’autres manières de soutenir le pouvoir d’achat, mais ces autres manières passent par des personnes qui payent des impôts. Car si vous souhaitez donner de l’argent pour permettre à des personnes de vivre décemment dans ce canton, cela implique des contribuables modestes. Encore une fois, je répète pour la 150e fois que, pour ma part, un canton est composé de personnes qui ont besoin de soutien et que l’on doit veiller à ne laisser personne sur le bord de la route. Mais alors, monsieur Buclin, pourquoi n’avez-vous pas demandé 0 % de baisse d’impôts dans ce débat ? Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ? Vous venez ici, au troisième débat, et continuez avec cette haine incessante du riche. Quant à moi, dans un canton comme le nôtre, j’aime tout le monde : les pauvres et les riches.
Madame Billard, merci pour votre cours ex cathedra. C’est la même remarque : pourquoi venir à la fin du troisième débat pour nous faire un tel cours ? Pourquoi ne l’avez-vous pas fait plus tôt ? C’est une vraie question que je vous pose. Vous avez sans doute raison, mais votre proposition de barème n’est pas si simple que cela. On ne va pas créer de l’argent avec un barème. Je sais que vous êtes scientifique, mais vous n’êtes pas une machine à créer de l’argent comme moi. Bien entendu, si on maintient la même masse imposable, il faudra prendre l’argent de certains contribuables pour en redistribuer à d’autres. Il y a sûrement une partie des contributions qui viendra des plus riches, car, dans le fond, vous avez un discours un peu plus alambiqué que mon collègue Buclin, mais qui est plus sincère dans ses propos. Et il y aura aussi des personnes, à contribution plus modeste, qui devront participer au processus. Certes, elles sont plus nombreuses, mais elles devront payer un peu plus.
Il faut arrêter de mentir aux gens. La modification du barème ne va pas créer de l’argent. La masse d’argent qui fait fonctionner ce canton restera la même ; elle sera simplement redistribuée différemment. Evidemment, la classe moyenne pourrait en bénéficier, mais je peux vous assurer que les personnes à faible contribution risquent de perdre beaucoup d’argent.
Je vous rappelle que nous en sommes à l’article 4. Lors du vote, j’opposerai la version du deuxième débat à celle du premier débat.
Monsieur Dessemontet, nous avons de la chance aujourd’hui, car nous sommes les deux fiers, ce qui montre que nous arrivons à trouver des points de ralliement. Moi, je suis fier, car cette baisse fiscale va bénéficier à notre population et lui redonner du pouvoir d’achat.
Je voudrais revenir sur les propos de M. Buffat, qui nous dit que l’économie est un système dynamique, et en conclure que les baisses d’impôts en pourcentage auront finalement pour effet d’augmenter les recettes fiscales. Pour ma part, je pense que c’est une théorie à laquelle on peut choisir de croire ou non. Nous avons effectivement affaire à un système complexe. Il est vrai que dans certains cas particuliers, des baisses fiscales peuvent augmenter les recettes, mais selon moi, penser que cela est systématique relève purement de la croyance. Ce qui est certain, c’est que si l’on poursuit dans la surenchère des baisses fiscales, il y a un moment à partir duquel ces baisses entraîneront une diminution des recettes fiscales.
Je voudrais également revenir sur les propos de MM. Buffat et Weissert, qui affirment qu’il est normal que ce soient ceux qui ont le plus contribué qui bénéficient des baisses décidées. Pour moi, ce n’est pas une évidence. C’est avant tout une décision. Si l’on souhaite baisser la fiscalité, il existe plusieurs moyens de le faire. On peut choisir de le faire en pourcentage pour redonner davantage à ceux qui contribuent le plus. C’est une option, un choix. Mais si vraiment l’objectif est de soutenir la classe moyenne, il existe d’autres choix. On pourrait très bien opter pour une baisse de la fiscalité via, par exemple, un crédit d’impôt ou d’autres mécanismes. Donc, ce n’est pas une question d’amour ou de haine des riches, mais bien une question de choix sur les bénéficiaires des baisses fiscales que l’on décide de mettre en place. Et il n’est pas automatique que ces baisses doivent forcément aller aux contribuables qui payent le plus d’impôts.
Je suis un peu étonnée, à l’instar de mon cher collègue Berthoud, que l’on arrive à ce troisième débat et que certains membres de la gauche viennent nous dire : « Finalement, ce ne sont pas des baisses d’impôts linéaires, mais il faudrait changer les barèmes ». C’est assez surprenant. Aujourd’hui, je constate que la motion de M. De Benedictis, qui propose justement de modifier les barèmes, n’a aucune co-signature de la part des membres de la gauche. Je pense que l’on se trouve aujourd’hui dans un débat un peu schizophrène, où l’on nous dit : « Finalement, la solution n’était pas la bonne, il aurait fallu opter pour une autre approche ». Mais la solution qui est sur la table aujourd’hui prévoit une baisse de la fiscalité et une amélioration du pouvoir d’achat des Vaudoises et des Vaudois. C’est cela que nous devons soutenir aujourd’hui, et c’est pour l’avenir de nos concitoyens que nous nous battons.
Je tiens à répondre brièvement à M. Berthoud, dont j’ai trouvé les propos déplacés. En effet, monsieur Berthoud, vous m’imputez une haine que je n’ai pas. Je n’ai de haine pour personne. Ce que j’éprouve, c’est de l’indignation, non pas contre les riches en tant que tels, mais contre un système économique qui creuse les inégalités et laisse sur le bas-côté des milliers de personnes. Rappelez-vous, par exemple, qu’il existe dans ce pays et dans ce canton, des milliers de familles touchées par la pauvreté, des personnes qui peinent même à se nourrir. Ce n’est pas une haine contre les riches que j’éprouve, mais bien une indignation face à ces inégalités. C’est pour cela que je me bats pour un système qui offre un minimum de redistribution des richesses. C’est pour cette raison que je défends un impôt progressif, sans aucune haine envers quiconque.
Paradoxalement, je dirais même que, d’une certaine manière, j’ai une vision plus positive des personnes riches que vous. En effet, je considère que ces individus n’ont pas pour seul objectif d’accumuler toujours plus d’argent sur leur compte d’épargne, mais qu’ils sont aussi prêts à contribuer au bien commun à travers leur contribution fiscale. D’ailleurs, je connais personnellement plusieurs personnes aisées qui sont fières de payer des impôts, car elles savent que cet argent sert à des tâches utiles, comme la santé ou la formation. Je trouve que c’est vous qui avez une vision plutôt négative des personnes riches. Vous leur prêtez uniquement des intentions égoïstes et vous semblez penser que, dès qu’on leur impose une augmentation d’impôt, même de 1%, elles partiront immédiatement du canton. Vous les considérez presque comme des mauvais patriotes, alors qu’au contraire, je suis convaincu que pour ces personnes, la fiscalité n’est pas le seul critère déterminant dans leur choix de rester ou non.
Je ne suis pas venu pour rien aujourd’hui : M. Buclin défend les riches. Je dois admettre que c’est une surprise. Merci, monsieur Buclin, car je ne vous connaissais pas sous cet angle. J’ai bien compris que vous souhaitez lutter contre les mesures qui creusent les inégalités. Je vous attendrai donc lors du prochain débat sur le budget, en ce qui concerne l’augmentation en pourcentage des salaires dans la fonction publique. Vous voterez avec nous, puisque, comme vous le savez, la semaine dernière, vous avez soutenu une augmentation linéaire, ce qui signifie qu’une personne gagnant 150’000 francs recevra une augmentation deux fois plus élevée qu’une personne touchant 75’000 francs. De fait, vous avez contribué, contre l’avis de l’UDC, à creuser les inégalités salariales au sein de la fonction publique. Soyez donc un peu cohérent, et je compte sur vous au prochain débat.
Je souhaite revenir rapidement sur deux points soulevés à propos du barème qui me concernait. Tout d’abord, en ce qui concerne Mme Bettschart-Narbel, je reconnais que je n’ai pas vu à temps le dépôt visant à modifier le barème. Soyez assurée que, si je l’avais vu, j’aurais co-signé, à condition qu’il aille dans le sens de ce que j’ai exposé. Ce n’est donc en aucun cas parce que je ne voulais pas le signer, mais simplement parce que je n’ai pas eu connaissance de cette proposition à temps. Je m’en excuse.
Quant à M. Berthoud, je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas d’un barème qui ferait payer plus les petits salaires. Au contraire, l’objectif est d’aplatir la courbe. Cependant, vous avez raison de souligner que si nous supposons une masse financière constante, tout en tenant compte de l’idée de réduction des impôts que vous évoquez, la masse financière pourrait effectivement augmenter. Mais, en partant du principe que nous restons dans une phase financière stable, ce système de répartition vise clairement à prélever davantage sur les hauts revenus pour redistribuer aux revenus plus faibles.
Pour clarifier une nouvelle fois, si vous avez examiné mon troisième graphique, vous verrez que je fais référence aux revenus allant jusqu’à 300’000 francs, donc principalement à la classe moyenne et aux catégories les plus pauvres. En termes de chiffres, si l’on effectuait une répartition du barème de l’impôt ayant un impact sur la courbe, les revenus supérieurs à 500’000 francs devraient contribuer de 4000 francs supplémentaires. Ce n’est vraiment pas un montant inconsidéré. Avec 4000 francs supplémentaires sur ces hauts revenus, nous pourrions redistribuer et donner davantage à la classe moyenne ainsi qu’aux autres classes sociales. Ce n’est vraiment pas un montant énorme en comparaison des 30’000 francs que nous allons octroyer via une baisse linéaire. Cela illustre bien le problème des courbes et des effets exponentiels. Je suis désolée si mes explications ont pu donner l’impression d’être un cours ex cathedra, ce n’était pas mon intention. Toutefois, j’essayais, avec des exemples concrets, d’aider à comprendre l’effet non linéaire que la courbe actuelle exerce sur la répartition des revenus, des impôts, et en fin de compte sur l’économie et le pouvoir d’achat.
Merci, monsieur Buclin, vous me rassurez vraiment avec vos propos sur les riches et la compassion que vous leur portez. Je suis heureux de l’entendre. Cependant, dans le fond, nous sommes dans la vraie vie et cela implique de prendre en compte que certains cantons ont des politiques fiscales qui diffèrent un peu. Comme l’a mentionné M. Moscheni, ou peut-être M. Belotti, à un moment donné, bien qu’ils puissent être sympathiques et contribuer positivement au fonctionnement d’un pays ou d’un canton, il y a des limites à cette contribution. A un moment donné, il faut un point respectueux pour ces contribuables. Je suis donc content de vous entendre sur ce sujet.
En ce qui concerne Mme Billard, ce que je déplore vivement, c’est de voir ces éléments présentés aujourd’hui lors du troisième débat. En tant que parlementaire, vous avez la possibilité d’apporter vos idées en amont, avant même que l’amendement ne soit déposé. Comme tout le monde, vous avez accès à SIEL – Solutions des institutions de l’exécutif et du législatif – où des textes arrivent de votre côté tout comme de l’autre. Vous avez donc la possibilité, je l’espère aussi dans votre parti, de signer un texte de manière totalement indépendante des idées de votre parti. Ce sera pour la prochaine fois.
Un certain nombre des points soulevés ne peuvent pas rester sans réponse. M. Schenker affirme que la théorie selon laquelle une augmentation des recettes fiscales ne serait pas démontrée, néanmoins, si vous examinez l’évolution des comptes et des budgets des cinq dernières années – y compris celui dont nous discutons aujourd’hui – vous verrez qu’il y a une augmentation de 443 millions de recettes supplémentaires. 443 millions, soit près d’un demi-milliard, dont 275 millions proviennent de l’impôt sur le revenu et la fortune. J’aimerais que cela soit bien enregistré : ces recettes supplémentaires incluent aussi les baisses fiscales, contre lesquelles la gauche a fait exactement les mêmes objections qu’aujourd’hui, en prétendant que cela mènerait au démantèlement de l’Etat social. Ces baisses fiscales incluent aussi les déductions supplémentaires pour les primes d’assurance-maladie, ce qui, au total, représente environ 5 à 6% de baisse fiscale sur l’impôt sur le revenu et la fortune. Et pourtant, malgré cela, nous avons une hausse des recettes fiscales provenant de l’impôt sur le revenu et la fortune de 275 millions. Alors, ne venez pas dire qu’une baisse, même linéaire, de 7% – ce qui représente seulement 3% supplémentaire – conduira à la faillite de l’Etat social. Ce n’est tout simplement pas crédible. Prenez également les chiffres relatifs à l’évolution de l’impôt sur les personnes morales : nous avons baissé cet impôt de 10%. Qu’avons-nous entendu ? Des accusations de cadeaux aux riches, aux entreprises, aux multinationales. Eh bien, si vous examinez ces chiffres, vous constaterez exactement la même courbe.
Il serait également pertinent de relire un document publié par le département de Mme Dittli, le 30 juin 2023. Il s’agit d’une synthèse sur les bénéficiaires des subventions et de l’aide sociale, ainsi que sur ceux qui supportent le taux d’effort. Ce document, qui est rarement cité dans cet hémicycle, mérite pourtant toute notre attention, car il met en lumière le système de redistribution dans ce canton, et en particulier la redistribution des plus riches vers les plus pauvres. Il est donc évident que le système actuel fonctionne, et les chiffres que j’ai partagés ne prétéritent en rien l’équilibre social.
Bien sûr, il est possible d’imaginer un système où il n’y aurait plus de riches, un système fondé sur un certain mépris, si ce n’est de la haine, envers les plus fortunés, avec l’idée d’une égalité absolue. Cependant, dans le passé, il y a eu des régimes où les riches n’existaient plus, mais cela n’a pas pour autant réduit le nombre de pauvres. Malheureusement, monsieur Buclin, à ce jour, les partis qui prônaient des régimes communistes n’ont pas prouvé qu’un tel système conduit à de meilleurs résultats. Bien au contraire, après près de 150 ans d’expériences diverses aux quatre coins du monde, les résultats sont loin d’être positifs.
Je vais être très rapide. Je me suis renseigné, alors voilà des chiffres. Concernant la fortune, 0,7 % des Vaudoises et Vaudois payent 43 % de l’impôt sur la fortune – c’est pour vous montrer que les riches sont quand même intéressants, monsieur Buclin. Et pour l’impôt sur le revenu, 25 % des Vaudoises et Vaudois payent 70 % de l’impôt sur le revenu. Sans ces 0,7 % et 25 %, le canton de Vaud serait donc en faillite.
Deux ou trois informations en réponse à ce débat qui me semble essentiel et très important pour notre canton. Il ne faut pas oublier que, nous offrons un véritable soutien aux plus vulnérables. Nous avons un tissu social très fort, qui est important pour notre canton. Je suis heureuse de constater que ce tissu social existe, avec des prestations primordiales pour ces classes sociales.
Ensuite, si l’on monte un peu dans les classes, le pourcentage fait partie d’un paquet plus global que le Conseil d’Etat a voulu proposer en réponse à une initiative. Nous avons aujourd’hui une initiative sur la table, et nous devons y répondre maintenant. Le Conseil d’Etat a décidé de vous soumettre une proposition plus large que ce seul pourcentage, car ce dernier n’en est qu’une composante. En effet, si l’on se limite à analyser uniquement ce pourcentage, je peux comprendre que certains puissent trouver qu’un pourcentage de réduction est plus avantageux pour une personne disposant d’un million de francs réels, par rapport à quelqu’un qui en a 100’000. C’est une réalité, et il s’agit d’un système linéaire. Mais il ne faut pas oublier, dans ce système linéaire, qu’il existe aussi une progression au niveau des impôts.
Comme vous le soulignez, il est un peu difficile d’avoir une fourchette concrète. Cependant, il ne faut pas oublier que ces personnes, comme l’a mentionné M. Moscheni, contribuent de manière significative à nos prestations. Ce système de pourcentage, on peut le remettre en question, mais aujourd’hui, le Conseil d’Etat a décidé de vous soumettre une solution immédiatement applicable, tout en allant plus loin que ce seul pourcentage. Car, oui, monsieur Jobin, nous avons rapidement commencé à mettre en œuvre ces changements et réformes fiscales : le Conseil d’Etat a pris la décision – et il l’a inscrite dans son Programme de législature – que réformer la fiscalité des personnes physiques faisait partie de ses priorités. Et c’est un fait, même si je ne peux pas énumérer toutes les classes et situations qui existent, nous figurons parmi les derniers dans la comparaison suisse.
Le Conseil d’Etat vous propose aujourd’hui une solution qui répond immédiatement à une initiative que nous allons traiter dans le semestre à venir. Cette réponse est plus large qu’un simple pourcentage. Elle inclut une augmentation des déductions pour les frais de garde et pour les primes, ce qui bénéficie largement à la classe moyenne, selon une définition large que je ne vais pas détailler ici. Je tiens à souligner que le Conseil d’Etat a besoin de fournir une réponse à cette initiative. Par ailleurs, le Conseil d’Etat a annoncé qu’en lien avec l’imposition individuelle, il sera nécessaire, et nous allons le faire, de revoir et d’ouvrir le vaste chantier des barèmes. Nous constatons aujourd’hui déjà que cela nécessite un grand débat politique, et c’est un débat que nous allons avoir.
Cependant, aujourd’hui, nous devons rester pragmatiques et répondre à cette initiative avec une solution immédiatement réalisable. Ce qui est faisable dès maintenant, c’est ce pourcentage, car il est simple à mettre en place, et nous pouvons aussi suivre le programme que le Conseil d’Etat a proposé. Je le répète, la fiscalité doit être réformée avec une vision à long terme, car on ne peut pas la réformer uniquement pour les deux prochaines années. Il faut avoir une vision à long terme qui nous permette de répondre à ce besoin que nous avons tous observé. J’espère que chacun dans cette salle pourra s’accorder sur le fait – je le dis avec des pincettes – que nous voulons maintenir nos prestations, qui sont précieuses pour notre population, tout en renforçant notre attractivité. Et cela, nous devons le faire dans une optique de long terme. Aujourd’hui, nous répondons à un besoin. Nous répondons partiellement à une augmentation de l’attractivité, par exemple avec l’impôt sur les successions et donations, mais nous répondons aussi à une urgence immédiate : celle de lutter contre la perte de pouvoir d’achat. Je peux vous assurer que ce gouvernement souhaite faire avancer ce canton avec vous, en développant son attractivité tout en préservant nos prestations essentielles.
Mme Dittli a très clairement exprimé la position du Conseil d’Etat. Je voulais, pour ma part, prendre la parole afin de faire un point précis sur les barèmes. Avant tout, il convient de rappeler que dans notre Programme de législature, nous avons clairement inscrit la volonté de mener des réformes fiscales et des baisses fiscales à hauteur de 270 millions. C’est une intention exprimée dès le début de la législature, monsieur Jobin. Aujourd’hui, nous présentons un plan axé sur le pouvoir d’achat. Quand on parle de pouvoir d’achat, il s’agit de l’ensemble de la population, pas simplement d’une catégorie particulière. C’est précisément cet équilibre entre, d’une part, le besoin d’agir pour ceux qui ont le plus besoin de soutien, et d’autre part, la nécessité de maintenir notre système global, qui est au cœur des discussions d’aujourd’hui. Et c’est un système particulièrement bien développé dans le canton de Vaud. Comme l’a justement souligné M. Dessemontet, notamment en ce qui concerne les subsides à l’assurance-maladie, c’est une mesure qui est unique en Suisse. Nous savons à quel point le canton intervient sur ce point, avec près d’un milliard inscrit au budget pour ces prestations sociales. Mais ce n’est pas tout : nous parlons également des facilités tarifaires inscrites dans le Programme de législature, ainsi que d’autres mesures comme celles concernant les frais de garde et les allocations familiales.
Dans le cadre de la question du pouvoir d’achat, qui est aujourd’hui la préoccupation numéro une de la population suisse, nous intervenons de manière globale sur l’ensemble de la société. D’une part, pour les personnes qui en ont le plus besoin, et d’autre part, en mettant l’accent sur la classe moyenne. Effectivement, si l’on reprend le contre-projet du Conseil d’Etat, sa grande force réside dans le fait qu’il s’agit d’un bouquet de mesures, comme l’a très bien souligné Mme Dittli, et non simplement d’un pourcentage. Dans ce bouquet, on retrouve des mesures comme celles concernant les successions et donations, les déductions sur les primes d’assurance, qui s’élèvent à 9900 francs pour un couple marié et à 5000 francs pour une personne seule en 2025. Ce type de mesure a un impact sur l’ensemble de la population, mais c’est surtout la classe moyenne qui en bénéficie davantage en pourcentage. De la même manière, en permettant des donations plus importantes qu’aujourd’hui, tout en maintenant des plafonds, nous ciblons de nouveau la classe moyenne. Le bouquet proposé par le Conseil d’Etat inclut bien sûr le pourcentage, mais également ces autres mesures. L’objectif est de répondre à l’initiative dite des 12% et de le faire sur le long terme, avec des mesures que nous avons déjà commencées à appliquer dès 2023. C’était également un point important pour nous.
Un dernier point sur les barèmes. Le Conseil d’Etat a souhaité prendre en charge cette question. Nous avons aujourd’hui une motion qui va être déposée et de nombreuses interventions sur ce sujet. Nous savons que c’est une question extrêmement complexe, qui ne peut pas être mise en œuvre immédiatement, comme l’a très bien expliqué Mme Dittli. Cela doit être abordé en lien avec l’imposition individuelle, mais il faut garder en tête que nous sortons d’une discussion particulièrement homérique sur la péréquation intercommunale. Cette discussion a abouti à un accord inédit entre le canton et les communes. Or, je rappelle que, lorsque l’on touche aux barèmes, la question des communes est centrale, car les barèmes impactent aussi les communes à hauteur d’un tiers. Ainsi, lorsque nous entamerons les discussions sur cette question, et comme le Conseil d’Etat l’a dit, nous les lierons à l’imposition individuelle. Mais il faut être conscient qu’il y aura des débats importants, notamment avec les collectivités locales. Ce sera donc un travail qui va prendre beaucoup de temps, d’autant plus que nous venons tout juste de conclure une nouvelle péréquation intercommunale, avec un rééquilibrage financier entre l’Etat et les communes. Il serait difficile d’imaginer que le canton puisse suppléer la part communale dans ce domaine. Les barèmes, c’est une question qui doit absolument être rediscutée en lien avec l’imposition individuelle, mais il y a aussi d’autres questions en ligne de mire, notamment celles liées aux communes. D’où la nécessité, aujourd’hui, d’intervenir avec un contre-projet directement applicable.
L’article 4 est accepté tel qu’admis en deuxième débat par 71 voix contre 54 et 18 abstentions.
L’article 2, formule d’exécution, est accepté tel qu’admis en deuxième débat par 70 voix contre 51 et 21 abstentions.
Le projet de loi est adopté en troisième débat.
La discussion générale est ouverte.
Pour des raisons que nous avons évoquées à plusieurs reprises, ce débat laisse un goût amer. Effectivement, couper autant de moyens pour le service public nous paraît totalement déraisonnable. Mais ce débat est d’autant plus amer pour une catégorie de contribuables qui est chère au groupe Ensemble à Gauche et POP : les bénéficiaires de prestations complémentaires. Et ce ne sont pas juste deux ou trois personnes, mais des milliers de citoyens, probablement autour des 20’000. Depuis quelque temps, nous assistons à une surenchère de baisses fiscales : 3%, 3,5%, 5%, 7%, 12%, et peut-être même 19% théoriquement, si l’on se fie aux annonces patronales. Qui dit mieux ? Pourtant, pendant ce temps, ces assoiffés de la baisse fiscale, ces militants du point d’impôt, n’ont pas été fichus de soutenir nos diverses propositions pour empêcher que les plus pauvres se voient imposer une hausse de leurs impôts de 50% à 100%.
Notre crainte exprimée devient malheureusement une réalité. En quelques années, les seuls à voir leurs impôts augmenter seront les bénéficiaires de prestations complémentaires. A terme, pendant que certains économiseront 3000, 5000, 10’000, voire 15’000 francs par an, ces contribuables continueront à payer entre 500 et 1000 francs de plus chaque année, prélevés sur un minimum vital. C’est tout simplement indigne. Ils auraient au moins mérité d’être inclus dans le marchandage qui a eu lieu ces dernières semaines, discussions qui ont un parfum de tambouille électorale. Notre groupe rejettera ce texte avec d’autant plus de détermination que les plus pauvres en sont non seulement exclus, mais, bien au contraire, qu’ils voient leur situation fiscale se dégrader. C’est inique, c’est injuste.
Dans quelques mois, nous risquons, sans exagérer, un véritable cataclysme. Un cataclysme pour l’Etat, mais surtout, à la fin, pour les citoyennes et citoyens de ce canton. Le Parti socialiste restera fermement opposé à des baisses fiscales générales mal ciblées, de type arrosoir. Nous l’avons déjà exprimé, et nous l’avons déjà fait dans ce même hémicycle en 2023, lorsque nous avons voté contre la baisse de 3,5%. Nous ne croyons pas non plus qu’il soit logique, suffisant ou juste de combattre les baisses fiscales par d’autres baisses fiscales. Les impôts ne sont pas une punition ; au contraire, ils représentent la forme la plus juste de solidarité envers le bien commun. C’est grâce aux impôts que nous pouvons limiter les inégalités. C’est ce qui permet au gouvernement et au Parlement de proposer des investissements et de tenir leurs engagements envers la population. C’est ce qui finance le salaire de dizaines de milliers de personnes qui travaillent pour un service public efficace, pour un service rendu au public. C’est aussi grâce à l’impôt que nous pouvons financer les mécanismes de cohésion sociale pour les plus précaires et pour la classe moyenne. Et c’est cette même solidarité qui permettra à l’Etat d’éviter des mesures d’austérité drastiques, pourtant déjà à nos portes, à coup de surenchères fiscales mortifères.
Mais oui, chers collègues, des propositions et des solutions pour le pouvoir d’achat, il en faut, surtout pour répondre à l’initiative des 12%. Notre vision repose sur des mesures concrètes qui changent la vie des Vaudoises et des Vaudois, qui remettent directement de l’argent dans leurs poches pour faire face au quotidien. Certaines de ces réponses se concrétisent notamment lors des débats sur le budget. La CCT-SAN, renforcée de manière durable de 9,5 millions par année sur proposition des socialistes, est une avancée majeure. Je le dis avec fierté aujourd’hui, cette somme permettra de lutter contre la pénibilité du travail pour le personnel de santé et pour les travailleurs dans le parapublic, tout en améliorant leur salaire. Jamais, ces dernières années, un amendement d’une telle ampleur n’avait passé la rampe dans le cadre du budget. De manière générale, le projet InvestPro témoigne aussi de l’engagement pris pour le personnel de santé. Ensemble, en 2025, ces mesures permettront d’offrir une augmentation moyenne du pouvoir d’achat de 1800 francs par an pour ces travailleurs. C’est un bond gigantesque.
De cette salle, je sortirai la tête haute, face à un plénum qui a maintenu au budget un projet de réduction des tarifs des transports publics, et qui, je l’espère, le validera lors de son futur passage en plénum. Cela aussi, chers collègues, est une avancée majeure. Très peu de mesures permettent de redonner 500 francs de pouvoir d’achat supplémentaire aux familles. Celle-ci le fait ! N’oublions pas non plus l’augmentation des allocations familiales, qui offrira 600 francs supplémentaires à une famille avec deux enfants en formation. Ces mesures sont ciblées et toucheront avant tout les personnes en situation de précarité et la classe moyenne. Elles représentent, pour la majorité des ménages, bien plus d’argent que ce que l’initiative des 12% leur apporterait.
Le groupe socialiste a, ces dernières semaines, travaillé sans relâche pour éviter de plonger le canton dans le chaos. Agir, c’est aussi savoir discuter et collaborer avec d’autres forces politiques. Je le redis, chers collègues, nous sortirons de cette salle la tête haute, pour les familles, pour les travailleuses et travailleurs, pour le personnel de santé, pour ce canton que nous aimons profondément et que nous refusons de voir sacrifié sur l’autel des intérêts patronaux. Car la situation qui nous amène aujourd’hui est grave, avec des conséquences lourdes, notamment celles qui proviennent de la Confédération. La réforme de la santé sur le financement uniforme des soins (EFAS) coûtera plusieurs centaines de millions au canton, et la suppression de la valeur locative, ainsi que les mesures d’austérité au niveau fédéral, viendront encore alléger les caisses du canton de plusieurs centaines de millions. Je le répète : la situation est grave, et il faut en prendre toute la mesure.
Au Parti socialiste, nous ne nous contentons pas de commenter ce qui se passe, nous faisons de la politique en agissant. Et agir, c’est aussi savoir discuter avec d’autres forces politiques. Nous appelons maintenant toutes les forces de gauche à s’unir contre cette initiative mortifère, qui attaque nos services publics, qui attaque les plus précaires, et qui fragilise la classe moyenne. Nous lançons également un appel aux partis de droite – en particulier au PLR – pour qu’ils rejoignent ce combat et qu’ils se dressent avec nous pour défendre notre bien commun contre l’offensive des milieux patronaux. Défendre la population ou les privilégiés, il faudra faire un choix en 2025. Le Parti socialiste l’a déjà fait : nous défendrons la population. C’est donc dans cette optique que le groupe socialiste vous invite à rejeter ce projet de loi.
Il est évident que le groupe PLR se retrouve aussi dans une partie des propos tenus. Il est vrai que nous pouvons en sortir la tête haute. Nous croyons fermement que ce plan de pouvoir d’achat offre plusieurs éléments positifs comme rappelé par mon préopinant, et nous sommes particulièrement fiers de cette baisse d’impôt de 7%. Bien sûr, cela ne se résume pas uniquement à du pouvoir d’achat. C’est également une façon de créer un contrat de confiance avec ceux qui investissent dans notre économie. Ceux qui, par leurs investissements, font fonctionner l’économie, car les impôts économisés ne restent pas sur des comptes en banque, ils passent dans l’économie et sont investis dans les entreprises. C’est ce qui fait partie de ce contrat de confiance entre la population, le gouvernement et le Parlement. C’est pourquoi le groupe PLR soutiendra ce projet de loi à l’unanimité.
Je suis un peu désarçonnée par les prises de parole que j’ai entendues ce matin. Le groupe des Verts vous invite à refuser ce projet de loi et reste ferme dans sa position contre cette baisse fiscale, pour les raisons évoquées à plusieurs reprises. Nous sommes face à une baisse très importante et nous avons tendance à minimiser ses conséquences sur les finances de l’Etat. Nous avançons dans le noir alors même que les effets seront colossaux, ce d’autant plus que d’après le 24heures, l’initiative des 12%, semble-t-il, ne sera pas retirée.
Je trouve que cette discussion est vraiment merveilleuse, car elle amène à une situation où personne n’est entièrement satisfait. Aujourd’hui, nous avons sur la table des baisses fiscales importantes qui vont grever le budget de l’Etat, remettant en question des politiques publiques pour lesquelles nous avons lutté dans ce Parlement, particulièrement de ce côté de l’hémicycle. Quelles seront les mesures exactes et dans quelles proportions ? Cela reste à définir, mais je crains qu’à partir de l’année prochaine et dans les années à venir, nous soyons contraints d’adopter des mesures de réduction des charges significatives. Cela ne doit pas être sous-estimé, surtout compte tenu de l’état des finances cantonales. Et finalement, tout cela pour quel résultat ? Pour risquer d’avoir encore davantage de baisses fiscales, ce qui pourrait mettre en péril la capacité de l’Etat à fonctionner comme il le fait actuellement. Il reste cette question, à laquelle peu de réponses ont été apportées : dans le cadre de ce débat budgétaire, que nous reprendrons après ce débat fiscal, nous avons entendu quelques propositions de réduction des charges, mais aucune d’entre elles n’atteint l’ampleur de l’initiative des 12%, ni même celle de la baisse de 7% que nous sommes en train de voter.
Aujourd’hui, concrètement, et c’est un point que je répète régulièrement, nous ne savons pas précisément quelles dépenses seront réduites, quelles politiques publiques seront diminuées et comment cela se déroulera. Pour moi, cela constitue un problème majeur, car il est difficile de prendre des décisions importantes sans savoir où l’on va. Je pense que ce n’est pas responsable, surtout face à une population qui attend de nous un certain niveau de prestations et de services. Actuellement, nous ne pouvons pas répondre à cette attente, et cela me semble grave. D’autant plus que nous allons probablement devoir nous engager dans une campagne de votation avec des positions qui, à ce stade, ne sont pas du tout claires. Est-ce que ce deal de dernière minute à 7% va convaincre une partie de la droite de l’hémicycle de s’opposer à la baisse de 12% ? Ou, pour finir, l’argument sera-t-il : « Nous avons eu 7%, alors pourquoi pas 12% ? » Honnêtement, je comprends la logique des milieux qui ont lancé cette initiative, et je me demande ce que nous pourrons répondre à cet argument. Personnellement, j’ai beaucoup de mal à imaginer une réponse claire à cela.
Effectivement, il a été question de certains éléments d’un deal qui entraîneraient une nouvelle baisse des recettes fiscales tout en augmentant certaines prestations, mais de manière beaucoup plus modeste en proportion. Les avancées dont on a parlé sont vraiment limitées, et les dépenses qui y sont associées sont bien petites comparées aux pertes colossales que ces 7% entraîneront, et à fortiori les 12%. Personnellement, j’ai de nombreuses craintes concernant l’avenir de ce canton. Bien sûr, ces préoccupations ne sont pas partagées par tout le monde, et pour beaucoup de personnes, la réduction de certaines prestations ne poserait pas de problème. Mais nous parlons ici de populations qui dépendent véritablement de ces prestations. Ce sont elles qui garantissent réellement le pouvoir d’achat des Vaudoises et des Vaudois, bien plus que des baisses fiscales qui profitent principalement à des classes sociales qui n’en ont pas besoin, et qui, malheureusement, ne réinvestissent pas cet argent dans l’économie. Plus une personne est riche, plus elle va mettre cet argent en épargne ou dans des investissements financiers, plutôt que de le réinjecter dans l’économie locale. C’est un phénomène qui limite les retombées économiques directes pour notre canton. Cela crée une situation où on offre davantage d’argent à ceux qui en ont le moins besoin et qui, de surcroît, ne le remettent pas dans l’économie réelle. Pour moi, c’est une situation lose-lose. C’est pourquoi je vous invite vivement à rejeter ce projet de loi.
J’ai bien entendu M. Pilloud affirmer que cet accord va changer la vie des Vaudois. Mais je ne suis pas d’accord : ce que vous allez améliorer, c’est la situation des personnes directement concernées par ces accords, pas l’ensemble de la population vaudoise. Vous avez mentionné qu’il faut discuter avec d’autres forces politiques, et vous avez raison de le faire. Cependant, l’accord qui a été conclu se traduit par une augmentation des charges et une baisse des revenus. Croire que cela va fonctionner, c’est simplement ignorer la réalité des chiffres. Lorsque l’on augmente les charges et que l’on baisse les revenus, je ne suis pas certain que cela soit possible.
Enfin, ce que vous avez dit m’étonne un peu, car vous avez agi de manière contraire à vos propos. Vous avez affirmé : « Il ne faut pas lutter contre des baisses fiscales par d’autres baisses fiscales ». Pourtant, lors du deuxième débat, vous avez courageusement voté contre, en sachant que cela allait passer. Mais cela revient exactement à ce que vous nous disiez la semaine dernière : il fallait accepter une baisse de 7% parce que sinon, il y aurait 12%. Vous avez donc suggéré de lutter contre les baisses fiscales par... d’autres baisses fiscales. Je pense qu’il serait bon d’être un peu plus cohérent dans vos discours. Pour la suite de la campagne, je me réjouis de voir le PLR répondre à l’appel de M. Pilloud et monter des stands contre les baisses d’impôts, aux côtés d’Ensemble à Gauche, du POP et de M. Buclin.
La discussion est close.
Le projet de loi est adopté définitivement par 70 voix contre 56 et 16 abstentions.
Je demande un vote nominal.
Retour à l'ordre du jourCette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui soutiennent ce projet de loi votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, le projet de loi est adopté définitivement par 69 voix contre 56 et 17 abstentions.
* insérer appel nominal