21_RAP_5 - Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le Postulat Arnaud Bouverat et consorts - Fermeture d'office(s) de poste(s) : agir avant une nouvelle salve de fermetures (20_POS_191).
Séance du Grand Conseil du mardi 26 août 2025, point 18 de l'ordre du jour
Documents
- Texte adopté par CE - RAP-CE POS Bouverat 20_POS_191 - publié
- Rapport de la commission-RC 21_RAP_5-Aurélien Demaurex
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa commission a examiné le rapport du Conseil d’Etat en réponse au postulat de notre collègue Arnaud Bouverat. Ce dernier demandait la création d’un groupe de travail interdépartemental pour anticiper et contrer les fermetures d’offices postaux. Le Conseil d’Etat a rappelé qu’il agit dans les limites de ses compétences, en accompagnant les communes concernées, en dialoguant avec la Poste, en soutenant des projets alternatifs grâce à la Loi sur l’appui au développement économique (LADE), et en relayant les positions vaudoises auprès de Berne. Plusieurs exemples locaux ont été cités – comme au Pont et au col des Mosses –, mais ceux-ci restent difficiles à reproduire systématiquement.
La commission a longuement débattu des impacts économiques et sociaux de ces fermetures : pertes d’emploi, affaiblissement des commerces de proximité, difficulté pour les usagers dans les villages notamment, etc. De son côté, la Poste est aussi critiquée pour son manque de transparence et sa communication parfois trompeuse. Beaucoup regrettent qu’il n’existe pas de stratégie plus structurée du côté cantonal, mais reconnaissent que des outils existent et que des démarches sont en cours, notamment au niveau fédéral avec la motion 24.3816. En fin de compte, la commission recommande d’accepter le rapport du Conseil d’Etat par 8 voix contre 1 et 2 abstentions.
La discussion est ouverte.
Comme membre de l’Union syndicale vaudoise qui comprend le syndicat de la Poste, je déclare tout d’abord mes intérêts bien que très indirects quant à ce sujet. Je remercie le Conseil d’Etat pour sa réponse ainsi que le rapporteur de commission, qui a très bien résumé les enjeux et les différences entre les intentions du postulant et le retour du Conseil d’Etat. Pour exposer plus précisément ma position, j’estime que le Conseil d’Etat a très bien agi à la suite de la prise en considération du postulat, en tout cas au début. En effet, l’ampleur de la chose a été révélée : plutôt qu’une étude indépendante, l’Etat était prêt à coordonner une étude relative à la situation du tissu postal dans notre canton. A nouveau, je considère que le Conseil d’Etat a agi de manière satisfaisante au départ en menant un sondage entre fin 2019 et début 2020 qu’il est possible de retrouver en annexe à la réponse au postulat. Pour l’époque donnée, il procède à un état des lieux probablement inégalé en matière de situation du service public postal dans un canton.
Cependant, j’exprime quelques frustrations par rapport à ce qu’il s’est passé entre ce sondage datant de 2020 et la réponse du Conseil d’Etat du 11 décembre. En effet, il s’est passé une période particulièrement longue pendant laquelle des mesures et des propositions, comme le demandaient les postulats auraient pu être attendues. L’idée n’était pas forcément d’être exhaustif et d’avoir des solutions pour chaque office de poste, mais de soutenir les collectivités publiques locales par des solutions types en mettant à disposition une boîte à outils à l’attention des communes. De plus, il avait été discuté lors de la prise en considération de favoriser davantage un modèle de coordination des services publics pour maintenir les prestations plutôt qu’un système d’agences postales dont on voit dans le rapport du Conseil d’Etat qu’elles souffrent d’un grand manque de transparence. Sur celles-ci, nous n’avons pas les coudées franches pour assurer un avis définitif sur la pérennité de ces agences, puisque les critères économiques et les agissements stratégiques de la Poste ne sont pas ouvertement connus et disponibles pour un canton ou une commune. Ainsi, nous attendions plutôt l’ébauche d’alternatives – et pas seulement la citation de deux exemples, celui du Pont et des Mosses – mais bel et bien un kit qui aide les communes, car il ne fait pas sens que chaque municipalité ou chaque service communal doive réinventer la roue.
Enfin, je vous remercie pour l’inventaire ainsi que pour le sondage de 2019-2020. En revanche, j’estime qu’il n’a pas été répondu au postulat sur le volet des solutions et des alternatives à élaborer. Je m’attendais à davantage que deux exemples, c’est-à-dire à des solutions plus clés en main, à l’adresse des communes. Considérant cet état de fait, le groupe socialiste se répartira entre le refus et l’abstention – à l’image du vote de la commission à l’époque – et je plaiderai tout simplement pour une solution plus constructive, celle du soutien au point suivant du postulat de mon collègue Pilloud afin que le Conseil d’Etat puisse poursuivre ses efforts.
Nous pouvons comprendre la volonté de la Poste d’alléger certains bureaux de leurs obligations de distribution de courrier, d’autant plus si la fréquentation devenait très faible. Cependant, le principe consistant à déplacer ses offices postaux dans des commerces – boulangeries ou épiceries – est totalement inadéquat et n’est pas près de remplacer la confidentialité qu’offre un bureau de poste. En effet, il est très désagréable d’aller chercher un recommandé dans une épicerie où certains voisins pourraient entièrement entendre la nature de celui-ci. Je n’ose même pas imaginer les rumeurs dans le village s’il s’agit, par exemple, d’une réquisition de poursuites.
Par rapport à la fermeture des bureaux de poste, cela peut être compréhensible, si la fréquentation est faible. Toutefois, j’estime qu’il n’incombe pas à des privés de gérer ce service, à la fois privé et confidentiel. Sur cet aspect, j’aimerais savoir si le Conseil d’Etat envisage qu’un endroit confidentiel et fermé puisse être mis en place pour assurer la confidentialité du client, dans le cas où les bureaux postaux étaient déplacés dans des épiceries ou boulangeries.
De manière générale, la Poste suisse agit de manière unilatérale, sans présenter de stratégie. Ses décisions se font au gré des pertes financières ou d’opportunités liées à des fins de baux, notamment. Les pouvoirs décisionnels de la Poste ayant déserté la Suisse romande, il est difficile à notre département d’avoir des interlocuteurs tangibles pour évoquer une vision de réseau postal, ainsi que des prestations relevant du service universel. La Commission fédérale Postcom ne se soucie pas plus de cette évolution. Ainsi, plus que jamais l’insatisfaction et l’absence de coopération doivent être relayées au niveau fédéral.
Enfin, aller retirer un recommandé devient aléatoire si nous devons le faire en transports publics, cela correspondant de moins en moins à la desserte idéale que nous devons désormais définir. En ce sens, le groupe PLR soutient à l’unanimité la réponse du Conseil d’Etat à ce postulat, et soutiendra à la quasi-unanimité la prise de considération partielle du postulat au point suivant.
Tout à l’heure, le mot « frustration » a été évoqué, un sentiment que le Canton partage. En d’autres termes, une fois par année, la Poste, via son service de communication – il ne s’agit même pas d’un responsable romand – , nous explique la situation de manière très générale. A notre tour, nous formulons la position du Conseil d’Etat, relayée à plusieurs reprises au sein de la Conférence des ministres de l’économie, afin qu’elle soit transmise directement aux dirigeants de la Poste et du conseiller fédéral en charge. De plus, nous relayons également la position du Grand Conseil. Cependant, nous ne sommes pas partie aux procédures : ce rôle échoit aux communes. Nous restons informés par courrier une fois que les premières décisions sont prises, mais nous n’avons pas de réelle possibilité d’agir dans ces procédures entre les communes – ou la commune concernée – et la Poste.
Comment agissons-nous en dehors de cette procédure ? D’abord, par un lien contact avec les communes concernées, qui sont elles aussi frustrées que le Canton ne puisse pas plus les aider, ce dernier n’étant pas partie à la procédure. Nous leur rappelons que si elles souhaitent agir du point de vue juridique, la procédure leur incombe. Et, si plusieurs communes souhaitent agir de concert, nous essayons de les mettre en contact. Nous leur expliquons la procédure.
J’ai appris que la Poste avait normalement prévu de rencontrer le Grand Conseil vaudois ; je vous encourage à vous rendre à cette séance pour qu’ils entendent de vive voix que ce n’est pas uniquement le Conseil d’Etat et les communes qui se plaignent de la situation, mais que nous portons aussi la parole du Grand Conseil.
Des discussions ont lieu au sein des communes, dont certaines s’opposeront peut-être juridiquement ; d’autres discutent d’alternatives. Je me suis rendue dans l’association régionale de Morges particulièrement touchée par ce lot de fermetures récentes pour en discuter avec les partenaires économiques de la région, afin qu’eux aussi s’engagent à trouver des solutions. Le Service de promotion économique et de l’innovation (Service de promotion de l'économie et de l'innovation (SPEI)) qui dispose des différentes possibilités d’aides de la LADE, se rend auprès des communes qui le souhaitent pour leur expliquer les possibilités, peut-être le coup de pouce financier que pourrait donner le Canton dans le cadre d’un partenariat, comme cela a été fait dans d’autres régions évoquées tout à l’heure.
Dans le cadre de la commission et de ce nouveau postulat qui permet au Conseil d'Etat de continuer ses démarches, les relations avec les associations économiques et les partenaires sociaux ont été évoquées. Et, si vous acceptez ce postulat, je vais pouvoir poursuivre mes démarches avec ces derniers. En outre, la piste des guichets de proximité pourra être poursuivie avec les services concernés par ce projet.
En conclusion, je vous remercie de bien vouloir accepter le rapport et le postulat, ce qui nous permettra d’essayer de développer de nouvelles démarches donnant sens à des pistes que vous évoquez. Enfin, j’ajoute encore un point : le SPEI ne peut pas proposer des solutions clés en main, puisque chaque commune est différente, mais doit travailler avec une boîte à outils notamment basée sur la LADE. Pour pouvoir aller plus loin et impliquer d’autres services, il est nécessaire que vous nous renvoyiez ce postulat. Je reviens sur un élément évoqué tout à l’heure concernant la confidentialité du client par Monsieur Gaudard : le Conseil d’Etat ne peut pas intervenir sur des éléments aussi précis au sein d’un commerce ou au sein d’un office de poste. Ceci ne relève en effet pas de sa compétence, mais je l’enjoins à rencontrer la Poste dans la séance qui devrait être agendée au mois de novembre. Enfin, je ne manquerai pas de rappeler à la Poste la position du Conseil d’Etat et du Grand Conseil.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le rapport du Conseil d’Etat est approuvé par 88 voix contre 10 et 19 abstentions.