25_POS_43 - Postulat Alain Cornamusaz et consorts au nom UDC - Rénovations énergétiques bloquées et interprétations administratives douteuses : l'efficience de l'Etat de Vaud et la sécurité juridique des citoyens (Développement et demande de renvoi à commission avec au moins 20 signatures).
Séance du Grand Conseil du mardi 24 juin 2025, point 19 de l'ordre du jour
Texte déposé
Interpellation - Alain Cornamusaz au nom du groupe UDC :
Rénovations énergétiques bloquées et interprétations administratives douteuses : l'efficience de l'État de Vaud et la sécurité juridique des citoyens
Texte déposé :
Le Conseil d'État présente régulièrement l'administration vaudoise comme un modèle d'efficience au service des citoyens et de l'économie. Pourtant, cette image est fréquemment mise à mal par l'actualité récente et par de nombreux témoignages. Les entreprises et les particuliers ne sont pas seulement impactés par des lenteurs procédurales excessives, mais aussi, et c'est peut-être plus préoccupant, par des interprétations des textes légaux qui apparaissent parfois douteuses, voire contraires à la signification et à l'esprit même de la loi ; ainsi qu’à la volonté du législateur. Ces pratiques soulèvent des questions sur la sécurité juridique et la capacité réelle de l'administration à répondre efficacement et équitablement aux défis actuels. De telles décisions de préavis, lorsqu’elles sont perçues comme infondées ou arbitraires, ont un impact direct et parfois dévastateur sur la santé physique et financière des entreprises et des citoyens concernés, allant jusqu’à créer des dégâts sociaux.
Dans ce contexte, le cas d'un projet de rénovation énergétique particulièrement ambitieux est éclairant. Visant une performance CECB B pour un immeuble en altitude, avec une pompe à chaleur (PAC) et une large installation photovoltaïque de 500m2 destinée à assurer une quasi-autonomie énergétique, ce projet s'inscrit pleinement dans les objectifs de transition énergétique du canton et de la Confédération.
Cependant, cette initiative privée, qui devrait être exemplaire et dont la motivation première n'est pas l'obtention de subventions mais bien la réalisation d'un projet énergétique cohérent et durable, se heurte à ce qui s'apparente à un dogmatisme administratif de la part de la Direction Générale de l'Environnement (DGE). Les porteurs de projet font face à des interprétations réglementaires restrictives qui semblent parfois ne pas respecter pleinement le contenu ou l'intention des lois en vigueur (notamment l'art. 17 al. 3 RLVLEne pour les PAC en altitude, ainsi que la confusion entre les articles 3 et 4 du même règlement concernant la qualification des travaux). Les tentatives de dialogue se sont heurtées à une incompréhension technique avec le personnel de la DGE ceci malgré différents courriers et téléphones. Ce cas n'est malheureusement pas perçu comme isolé ; des professionnels du secteur (fabricants, bureaux d’études thermiques) relaient ces contraintes.
Ces difficultés spécifiques s'ajoutent à un contexte plus large préoccupant. La Présidente du Conseil d'État a elle-même évoqué le 10 juin 2025 devant le Grand Conseil, dans le cadre de l'heure des questions, la sous-utilisation du fonds d'aide pour le logement, citant les lenteurs administratives et le manque de terrains disponibles comme freins, alors que le canton traverse une crise du logement aiguë. Il est alors paradoxal de constater que des projets de rénovation exemplaires, susceptibles d'améliorer l'offre de logements, sont entravés par des blocages au sein de la DGE. Parallèlement, des orientations ou exigences souvent dogmatiques, émanant d'instances cantonales (relevant de l'aménagement du territoire) peuvent conduire les communes à des mesures telles que des dézonages de terrains équipés ou une sous-utilisation du potentiel constructible, qui semblent également en contradiction avec l'objectif de mobiliser les terrains et de répondre à la crise. Ce manque apparent de cohérence globale dans l'action de l'État, où différents services semblent faire preuve d'un manque de vision d'ensemble et de stratégie concertée, allant jusqu'à des actions contradictoires, freine l'efficacité des politiques de transition énergétique et de logement et une utilisation rationnelle du sol. Ces constats, allant à l'encontre des objectifs affichés et contredisant l'image d'efficience que le Conseil d'État s'efforce de promouvoir, impactent directement les citoyens et les entreprises.
Nous remercions le Conseil d'État pour ses réponses détaillées qui touchent à la fois à un cas concret préoccupant et à des enjeux plus larges pour la transition énergétique, la crédibilité de l'action administrative et la relation entre l'État et les citoyens dans notre canton.
Nous avons ainsi l'honneur d'inviter le Conseil d'Etat à répondre aux thématiques suivantes sous forme de rapport :
- Qualité des décisions administratives et respect de la loi :
Quelles garanties le Conseil d'État peut-il donner que ses services, notamment la DGE, fondent leurs décisions sur une application correcte et proportionnée de la loi, et non sur un dogmatisme ou des interprétations erronées qui freinent les initiatives citoyennes et entrepreneuriales ? - Qualifications des collaborateurs et efficience des procédures :
Quelles mesures concrètes sont prises pour assurer que les collaborateurs administratifs, à tous les échelons, possèdent les qualifications juridiques et techniques suffisantes et actualisées pour leurs prises de décision, et pour améliorer l'efficience réelle des procédures au-delà de la simple communication officielle ? - Application de l'Art. 17 RLVLEne (PAC en altitude) :
Le Conseil d'État peut-il clarifier l'interprétation et l'application par ses services de l'article 17 alinéa 3 de la RLVLEne (version en vigueur depuis août 2023) concernant l'équivalence CECB C pour les pompes à chaleur en altitude, et confirmer que cette équivalence doit être appliquée sans exigences supplémentaires restrictives ou références à d'anciennes dispositions réglementaires ? - Qualification des travaux (Art. 3 vs. Art. 4 RLVLEne) :
Comment le Conseil d'État justifie-t-il que l'article 3 de la RLVLEne (définissant le champ d'application du règlement) soit utilisé par l'administration pour requalifier juridiquement une transformation lourde d'un bâtiment existant (relevant de l'article 4 RLVLEne) en "construction neuve", avec les contraintes disproportionnées qui en découlent, telle que l'exigence contestable d'un label Minergie global pour une PAC ? - Dialogue avec les porteurs de projet et traitement des dossiers par la DGE :
Quelles mesures le Conseil d'État entend-il prendre pour améliorer la communication, la transparence, la réactivité des services de la DGE et l'accompagnement des citoyens et des professionnels dans la réalisation de projets énergétiques complexes, afin d'éviter les situations de blocage et d'absence de réponse ? - Problématique des "préavis" administratifs et accès au droit :
Face aux "préavis" administratifs négatifs non formellement révocables qui acculent les porteurs de projet à des choix coûteux ou à l'abandon, le Conseil d'État envisage-t-il des mécanismes pour améliorer la transparence, la motivation et la contestabilité de ces prises de position, afin de renforcer la sécurité juridique ? - Cohérence de l'action étatique, crise du logement et mesures correctrices :
Compte tenu des contradictions apparentes entre les objectifs affichés (logement, transition énergétique) et certaines pratiques administratives (blocages de rénovations, orientations d'aménagement du territoire parfois paradoxales), quelles actions concrètes et immédiates le Conseil d'État s'engage-t-il à prendre pour assurer une meilleure cohérence inter-services, surmonter ces blocages, et garantir une réelle efficacité des politiques publiques, particulièrement au regard de l'urgence de la crise du logement ?
RLVLEne (Règlement d'application de la loi du 16 mai 2006 sur l'énergie - RSV 730.01.1)
Art.3 Champ application
Art.4 Définitions
Art. 17 Pompes à chaleur
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Nicolas Glauser | UDC |
Romain Belotti | UDC |
Fabrice Moscheni | UDC |
Maurice Treboux | UDC |
Valentin Christe | UDC |
Yann Glayre | UDC |
Jean-Bernard Chevalley | UDC |
Fabien Deillon | UDC |
Michael Demont | UDC |
Denis Dumartheray | UDC |
Nicolas Bolay | UDC |
Aliette Rey-Marion | UDC |
Cédric Weissert | UDC |
Stéphane Jordan | UDC |
Philippe Jobin | UDC |
Olivier Agassis | UDC |
José Durussel | UDC |
Pierre-André Pernoud | UDC |
Fabrice Tanner | UDC |
Pierre-Alain Favrod | UDC |
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLe postulat que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui demande au Conseil d’Etat d’examiner en profondeur une problématique qui touche au cœur de l’action de notre Etat : l’efficience de son administration, la justesse de ses décisions et la sécurité juridique de nos concitoyens et de nos entreprises, particulièrement dans le domaine crucial de la transition énergétique. Nous entendons régulièrement le Conseil d’Etat souligner les efforts de l’administration vaudoise pour atteindre une meilleure efficience. Pourtant, sur le terrain, la réalité vécue par nombre de nos concitoyens est parfois bien différente.
A ce titre, ce postulat part d’un cas concret, détaillé dans la motivation écrite, mais vise à aborder ce qui semble être un problème plus large : un sentiment d’incompréhension, voire d’arbitraire face à certaines pratiques administratives. Ce cas exemplaire concerne un projet de rénovation énergétique ambitieux pour un immeuble en altitude, un projet visant une performance CECB-B, une quasi-autonomie énergétique grâce à une pompe à chaleur et une large installation photovoltaïque. Une initiative privée, alignée sur nos objectifs cantonaux et fédéraux, financée sur fonds propre et dont la motivation première n’est pas la course aux subventions, mais bien la réalisation d’un projet énergétique cohérent et durable. On pourrait s’attendre à ce qu’un tel projet soit salué et facilité. Or, il se heurte à ce qui s’apparente à un dogmatisme administratif de la part de la Direction générale de l’environnement (DGE). Les porteurs de ce projet font face à des interprétations réglementaires restrictives qui semblent parfois ignorer l’esprit des lois en vigueur, notamment concernant la qualification des travaux ou les conditions d’installation des pompes à chaleur en altitude. Leurs tentatives de dialogue se sont heurtées à une incompréhension technique déconcertante et à l’absence de réponse de la direction concernée – et ce n’est malheureusement pas un cas isolé. De nombreux professionnels du secteur confirment que la mise en œuvre de la politique énergétique rencontre des complexités administratives notables dans notre canton. Ces difficultés spécifiques ne sont pas anecdotiques : elles illustrent et s’inscrivent dans un contexte plus large, source de vives préoccupations.
Alors que notre Canton traverse une crise du logement aiguë, que la présidente du Conseil d’Etat déplore elle-même les lenteurs administratives et le manque de terrains, comment expliquer que des services de l’Etat freinent ou complexifient des projets de rénovation qui pourraient améliorer l’offre de logements de qualité ? Comment justifier que des objectifs de densification du territoire peinent à se concrétiser, en partie à cause de calculs de potentiel théoriques qui ne tiennent pas compte des contraintes réelles, menant potentiellement à des dézonages contestables, tout en laissant perdurer une sous-utilisation du sol ? Ne faut-il pas montrer du doigt un manque de cohérence globale, de vision d’ensemble et de stratégie concertée entre les différents services de l’Etat qui freinent l’efficacité de nos politiques publiques ? Ces situations créent une insécurité juridique majeure pour les investisseurs, les entreprises et les citoyens. Elles sapent la confiance de nos institutions et peuvent entraîner des conséquences dévastatrices sur la santé financière et le moral de ceux qui s’engagent.
C’est pourquoi ce postulat demande au Conseil d’Etat d’étudier en profondeur ces dysfonctionnements. Il l’invite :
- à présenter un rapport sur les mécanismes de contrôle de la qualité et de la légalité des décisions administratives, notamment au sein de la DGE,
- à clarifier l’interprétation des règlements énergétiques clés pour assurer une application uniforme et conforme à l’esprit de la loi,
- à proposer des mesures concrètes pour améliorer le dialogue, la transparence et l’accompagnement des porteurs de projets,
- à évaluer la problématique des préavis administratifs sans voie de recours direct,
- et, surtout, à identifier les actions pour assurer une meilleure cohérence de l’action étatique entre ses différents services et politiques, particulièrement en regard de l’urgence de la crise du logement et des impératifs de la transition énergétique.
Par conséquent, ce postulat est une démarche constructive visant à améliorer le fonctionnement de notre Etat au service de tous les Vaudois et de toutes les Vaudoises, avec des objectifs que nous nous sommes fixés collectivement. Il vise à s’assurer que l’administration soit un facilitateur de la transition énergétique et de la création de logements et non un frein. Par conséquent, j’invite le Conseil d’Etat, dans son rapport, à envoyer un signal clair en faveur d’une administration plus efficiente, plus juste et véritablement au service de l’intérêt public.
Retour à l'ordre du jourLe postulat, cosigné par au moins 20 membres, est renvoyé à l’examen d’une commission.