25_HQU_69 - Question orale Florence Bettschart-Narbel - Réflexion sur le deal de rue : une position partagée par le Conseil d'Etat?.
Séance du Grand Conseil du mardi 10 juin 2025, point 3.9 de l'ordre du jour
Texte déposé
Dans une réflexion parue le 3 juin dans 24heures, le Conseiller d'Etat en charge de la jeunesse, de l'environnement et de la sécurité fait un plaidoyer pour la libéralisation de toutes les drogues. Cette réflexion ne dit nulle part qu'il s'agirait d'une position personnelle.
Ma question est la suivante: cette position est-elle celle du Conseil d'Etat ?
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourQuestion orale Florence Bettschart-Narbel - Réflexion sur le deal de rue : une position partagée par le Conseil d’Etat ? (25_HQU_69)
Dans une réflexion parue le 3 juin dans 24heures, le conseiller d’Etat en charge de la jeunesse, de l’environnement et de la sécurité fait un plaidoyer pour la libéralisation de toutes les drogues. Cette réflexion ne dit nulle part qu’il s’agirait d’une position personnelle. Ma question est la suivante : cette position est-elle celle du Conseil d’Etat ?
Je remercie Mme la députée pour sa question. Ma tribune n’était clairement pas un plaidoyer personnel, comme vous le dites, pour la libéralisation de toutes les drogues. Je ne sais pas où vous avez lu une telle citation. Elle avait pour but de questionner le modèle prohibitif. Elle reprenait ainsi les avis de nombreux spécialistes du domaine, dont la Commission fédérale pour les questions liées aux addictions. Dans le canton de Vaud, année après année, nous renforçons les mesures sécuritaires pour apaiser l’espace public et pour démanteler les filières. Nous avons renforcé ces mesures cet automne – j’en avais informé en primeur votre Parlement en octobre – et nous continuons à le faire avec de nouvelles opérations et de nouvelles places de détention, notamment 40 places de détention supplémentaires à Bellechasse, dans le canton de Fribourg.
Je m’interroge sur cette fuite en avant, car nous ne luttons pas à armes égales. D’un côté, des narcotrafiquants qui brassent des milliards de francs et inondent l’Europe à coups de millions de tonnes de cocaïne. De l’autre, des Etats aux moyens importants dédiés à la lutte, mais qui resteront toujours insuffisants. Dans les années 1990, confrontées à l’héroïne, les autorités ont eu le courage de questionner le modèle alors en vigueur, et de dépasser le modèle simpliste de l’abstinence pour développer la politique des quatre piliers. Aujourd’hui, plus de 30 ans après la fermeture de la Platzspitz, nous arrivons aux limites de cette politique. Une réflexion globale doit être menée sur l’évolution de notre modèle. Doit-on continuer comme avant en ajustant à la marge ce modèle, ou le questionner pour le faire évoluer en profondeur ? Je ne prétends pas avoir la réponse. Je note simplement que de très nombreux experts issus des milieux médicaux et sécuritaires, mais aussi que plusieurs partis politiques – notamment le vôtre, madame la députée – portent un regard critique sur le modèle actuel. Ainsi, un projet de loi fédérale de régulation du cannabis devrait être soumis à consultation dans quelques mois, soutenu par des élus de quasi tous les partis politiques représentés aux Chambres fédérales.
Autrement dit, premièrement, comme ministre responsable de la sécurité, je vois les limites au quotidien de la répression en bout de chaîne – par les retours de la police et du terrain. La répression est nécessaire, mais clairement insuffisante. Deuxièmement, comme homme politique, je pense qu’il est sain de s'interroger sur l’efficience de certaines politiques publiques. Je me demande si nous ne devrions pas avoir le courage d’ouvrir cette thématique complexe, sans dogmatisme, mais de manière pragmatique, comme nous l’avons fait dans les années 1990.
M. le conseiller d’Etat n’a pas vraiment répondu à ma question : la position exprimée dans le 24heures est-elle celle du Conseil d’Etat ?
Retour à l'ordre du jourMadame la députée, le Conseil d’Etat n’a jamais été formellement saisi de cette question. Par analogie, le Conseil d’Etat s’est positionné sur des projets pilotes en lien avec la régulation du cannabis, notamment en adoptant récemment un décret pour accompagner et encadrer des essais pilotes de vente de cannabis – notamment le projet lausannois. Néanmoins, à l’heure actuelle, une remise en question du modèle prohibitif n’a pas encore fait l’objet d’une décision du Conseil d’Etat.