Interview avec Maribel Rodriguez, Cheffe du Bureau cantonal pour l'égalité entre les femmes et les hommes (BEFH)
"La violence à l’encontre des femmes n’est pas une fatalité."
- Comment le BEFH agit-il pour les enfants et les jeunes ?
Le Bureau de l'égalité entre les femmes et les hommes (BEFH) du Canton de Vaud a pour mission d’encourager la réalisation de l’égalité entre les sexes dans tous les domaines. Il s’emploie à éliminer toute forme de discrimination directe ou indirecte.
Agir dès le plus jeune âge est essentiel, afin de construire une société où les femmes et les hommes bénéficient des mêmes droits et des mêmes opportunités dans tous les domaines de la vie.
La déconstruction des stéréotypes qui sont à l’origine de nombreux phénomènes de discrimination est fondamentale. C’est pourquoi, le BEFH met à disposition des établissements de formation différents instruments comme L’école de l’égalité et les Mallettes pédagogiques, disponibles dans toutes les bibliothèques scolaires.
De plus, le Bureau organise chaque premier jeudi du mois de novembre la Journée oser tous les métiers – JOM afin d’élargir les choix professionnels des jeunes et d’encourager la mixité dans tous les métiers.
- Quelles sont vos actions de prévention auprès des jeunes ?
D’autre part, le Bureau de l’égalité a développé différents programmes axés sur la prévention du harcèlement sexuel, des violences sexuelles et de la violence dans le couple. Ainsi, depuis 2019 il a impulsé le programme Stop harcèlement sexuel, pour prévenir et prendre prise en charge des situations de harcèlement sexuel dans les établissements du secondaire II.
En matière de prévention de la violence dans le couple et de promotion des relations empreintes de respect, le BEFH a lancé en 2023, la campagne Amoureux.se, destinée aux 15-20 ans. Elle se décline en 3 épisodes sur les réseaux sociaux et une page web qui permet d’approfondir la réflexion et de trouver les bonnes ressources. Dès 2025, un nouvel épisode abordera la question du consentement.
Enfin, depuis la rentrée 2025 nous mettons à disposition des jeunes de 16 à 20 ans ALTernatives, un parcours didactique sous la forme d’un jeu sérieux destiné à sensibiliser les élèves du Secondaire II à la violence domestique et de la violence dans le couple.
En effet, les chiffres sur la réalité suisse et vaudoise nous montrent qu’il s’agit d’un problème majeur de sécurité, de santé et simplement de droit de vivre une vie sans violence :
- 1 femme sur 5 subit de la violence physique ou sexuelle au cours de sa vie
- 1 mineur sur 5 est exposé à la violence dans le couple parental
- Cette exposition à la violence entraîne dans la plupart des cas des problèmes de développement psychique et affectif et de santé tout au long de la vie de ces enfants
- 55% des jeunes de 15 ans subissent de la violence ou de la surveillance de la part de leur partenaire
- 7% des jeunes de 18 ans subissent de la cyberviolence et enfin
- 13.3% des filles avaient subi des rapports sexuels contraints durant les 12 derniers mois
- enfin, depuis deux années consécutives, dans le Canton de Vaud, le 100% des homicides perpétrés l’a été dans le cadre de la violence domestique
Il est donc urgent d’œuvrer en prévention pour endiguer cette violence. Le Jeu Alternatives permet ainsi d’explorer cinq thématiques de la violence domestique en incarnant différents personnages. À travers ces histoires, les jeunes apprennent à reconnaître les signes de violence, à comprendre les dynamiques relationnelles abusives, et à adopter des réactions adaptées, que ce soit en tant que témoin, victime ou auteur·e et prennent connaissance des services d’aide et du cadre légal en vigueur.
- Quel est le défi majeur actuel pour les enfants et les jeunes en termes d'égalité ?
La Conférence suisse des délégué-e-s à l’égalité, dont le Bureau vaudois fait partie, a publié le Baromètre de l’égalité 2024 qui met l’accent sur la génération Z (les personnes nées entre 1997 et 2012 qui ont grandi avec les technologies numériques – internet, smartphone et réseaux sociaux) et qui révèle des importantes disparités : la majorité des jeunes hommes estiment que l’égalité est acquise, en revanche les jeunes femmes de la génération Z et les hommes des générations plus anciennes ont un avis plus nuancé et moins optimiste. Parfois même, les jeunes hommes ce la génération Z expriment en certain agacement vis-à-vis de la question de l’égalité.
Il est donc important de veiller à ce que ce changement de tendance ne se creuse pas, au risque de mettre à mal les avancées en matière d’égalité entre les sexes dans notre pays. En particulier face à la montée de certaines tendances comme les masculinistes ou les incels (les célibataires involontaires), il est important que les jeunes puissent trouver leurs repères dans un projet de société où le respect, l’égalité et l’inclusion soient des valeurs socles du vivre ensemble.
- Qu'est-ce qui vous passionne dans votre métier ?
La conviction que notre travail est utile, que nous œuvrons avec de nombreux services et entités pleinement convaincus la violence domestique et la violence à l’encontre des femmes n’est pas une fatalité. Mas surtout, que rien n’est perdu, tant que l’on n’a pas baissé les bras.