Méthode de biocimentation
Un projet pilote réalisé avec le soutien de la DGMR
Après dix ans de recherches, le Laboratoire de mécanique des sols (LMS) de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) a développé un ciment bactérien unique en son genre fabriqué à base d’urée (molécule de synthèse hautement soluble et non toxique), de bactéries naturellement présentes dans le sol et de calcium.
Cette nouvelle biotechnologie, la biocimentation, a pour but de lutter contre l’érosion des sols et les instabilités de terrain et, à terme, de faire évoluer le secteur de la construction. En accord avec la Direction générale de la mobilité et des routes (DGMR), elle a été testée pour la première fois en septembre 2018 sur une petite partie du terrain longeant la route cantonale entre Mathod et Rances (RC 271). Sur cette parcelle, un important mouvement de terrain avait déplacé en janvier 2018 quelques 2'000 m3 de terre sur la route.
Technique utilisée
Les chercheurs utilisent des bactéries naturellement présentes dans les sols, qu’ils lyophilisent et stimulent avant de les mélanger à un liquide contenant de l’urée et du calcium, selon une composition développée à l’EPFL. Les bactéries vont ensuite produire une protéine qui, en se liant au calcium, transforme l’urée en cristaux de calcite, un minéral très dur et durable. Cette calcite permet de lier les grains du sol pour consolider leur structure et renforcer la protection contre l'érosion due aux eaux de ruissellement.
Pour la phase test, les chercheurs ont dû creuser des forages de deux mètres de profondeur pour atteindre le limon (partie à consolider) avant d’injecter le biociment, à intervalles réguliers et pendant plusieurs jours, afin de stabiliser le talus. Cette méthode se substitue à la procédure traditionnelle visant à construire des infrastructures en béton et à injecter du ciment dans le sol.
Plus écologique et économique
Plusieurs raisons peuvent justifier l’utilisation du bio-renforcement du sol à la place d’autres technologies, notamment pour sa mise en place aisée et son faible impact sur l’environnement.
Concrètement :
- Méthode simple et peu intrusive : le biociment peut être produit sur place, à température ambiante. La méthode ne fait appel qu’à des moyens légers par rapport à une intervention traditionnelle;
- Besoin en énergie limité : réduction des émissions de gaz à effet de serre pour stabiliser le même volume de terre (jusqu’à 40% d’émissions de CO2 par rapport au traditionnel mélange terre-ciment);
- Technique et effets rapides : une fois le produit injecté dans le sol, les bactéries se développent toutes seules (pour un kilo de sol, 40 à 120 grammes de ciment bactérien peut être généré);
- Coûts globaux potentiellement inférieurs en comparaison aux méthodes actuelles.
Des essais prometteurs
Après de nombreux mois d’observations, la DGMR et l’EPFL se déclarent satisfaits des résultats obtenus. Le site d’essais s’est révélé intéressant, tant par ses dimensions (env. 50 mètres de long par 20 mètres de profil) que par la nature même des sols (sableux, granuleux et pas trop gras).
Un second test de biocimentation a par ailleurs été réalisé en juillet 2019 afin de consolider une molasse érodée (rocher composé de grains de sable, cimenté naturellement) située aux abords de la route cantonale entre Sottens et Moudon (RC 543). Le biociment a permis de cimenter à nouveau les grains dans une bonne proportion et son effet à long terme est en cours de suivi.
Au niveau cantonal, certains sites pourraient être traités grâce à cette méthode. Cependant, la plupart des risques de glissements concernent d’autres types de sols pour lesquels ce biociment n’est pas adapté.
A l’heure actuelle, les recherches se poursuivent et des améliorations ultérieures seront encore apportées à cette technique prometteuse.