20.4. Degré d'artificialisation des cours d'eau

Thème: Utilisation du territoire

Signification de l'indicateur

La préservation de la biodiversité est un élément essentiel du développement durable (principes 15b, 18a). En quelques décennies, de nombreuses surfaces qui jouent un rôle important pour la diversité des espèces – cours d'eau naturels, prairies maigres, haies, bosquets – ont disparu, entraînant un recul de la diversité des espèces animales et végétales.

L’état écologique d’un cours d’eau ne dépend pas uniquement de la qualité de l’eau et des rejets de pollutions (eaux usées, apport diffus de substances diverses, pollutions accidentelles). En effet, de nombreux aménagements, tels que zones d’habitation, voies de communication, surfaces d’agriculture intensive, exploitations hydro-électriques, ont réduit l’espace dont disposent les cours d’eau et perturbent les biocénoses aquatiques et riveraines (principe 18b).

C'est pourquoi l’appréciation systématique des conditions morphologiques et hydrologiques, ainsi que de la dynamique des eaux en tant que biotope, est désormais indispensable pour permettre à l’aménagement du territoire de ménager un espace aux écosystèmes liés à l’eau. De fait, seul un espace suffisant leur permettra de remplir pleinement leurs fonctions protectrices, écologiques et sociales. Il s’agit là d’un enjeu majeur de l’aménagement du territoire en Suisse.

Cet indicateur présente le degré d'artificialisation des cours d'eau en classant ces derniers selon 5 niveaux d'atteinte.

Principes en rapport avec cet indicateur: 2a. Satisfaction des besoins, 15a. Sauvegarde des ressources naturelles, 15b. Sauvegarde de la biodiversité, 18a. Compensation écologique, 18b. Minimisation des risques écologiques, 20. Paysages naturels et cultivés convenables.

Type d'indicateur: (C) capital.

Evolution

Degré d'artificialisation des cours d'eau

Source :

SESA, SFFN (2005). Inventaire écomorphologique de niveau R des rivières vaudoises. Service des eaux et de l'assainissement; Service de la forêt, de la faune et de la nature.   

Données (xls, 140 Ko)

Comparaisons intercantonales, en kms par classe, 2005 (pdf, 555 Ko)

Inventaire écomorphologique de niveau régional des rivières vaudoises, 2005 (pdf, 711 Ko)

En bref

Tendance statistique :


Evaluation développement durable :


Commentaire

Commentaire statistique

Tendance: aucune conclusion possible (absence de tendance).

L'Inventaire écomorphologique de niveau R des rivières vaudoises constitue une référence de l’état actuel des cours d’eau vaudois. L’analyse a été effectuée sur près de 2800 km de cours d’eau, représentant environ 65 % du réseau hydrographique à écoulement permanent. Les résultats indiquent que les deux tiers des rivières vaudoises ont conservé leur état naturel. Au total, les rivières naturelles ou peu atteintes représentent plus de 75 % du réseau étudié. En revanche, environ 15 % des tronçons sont considérés comme "très atteints" ou "artificiels", sans tenir compte des ruisseaux enterrés (7 %).

Plusieurs régions comprennent majoritairement et sur de grandes distances des cours d’eau très atteints ou artificiels. Il s’agit des grandes régions des plaines du Rhône (Rhône et affluents dans leur partie aval, notamment Courset, Avançon, Gryonne, Grande-Eau, Grand-Canal et Eau-Froide), de l’Orbe (notamment Orbe, Thielle, Canal Occidental, Canal Oriental, Canal d’Entreroches et, dans leur partie aval Nozon, Talent, Mujon, Bey et Buron) et de la Broye (notamment Broye, Petite Glâne, Arborgne). Au contraire, les régions des Alpes, des Préalpes, le Jorat ainsi que le bassin versant de la Menthue présentent un état peu atteint à naturel prédominant.

Commentaire développement durable

Evaluation: pas d'évaluation (absence de tendance).

La répartition spatiale des tronçons très atteints ou artificiels indique que les zones des plaines (Rhône, Orbe, Broye) sont particulièrement touchées. D’autres part, l’inventaire des obstacles à la libre circulation de la faune (seuils et ouvrages) montre que les ouvrages artificiels sont nombreux et présents sur la presque totalité des rivières, notamment sur des portions de rivières qui ont gardé un caractère naturel marqué.

L’Inventaire écomorphologique de niveau régional confirme ce que beaucoup de spécialistes des cours d’eau, pêcheurs ou personnes intéressées connaissent, à savoir que les cours d’eau situés en plaine et aux abords des agglomérations ont été altérés par l’homme dans des proportions importantes. Cet inventaire présente les résultats sous une forme synthétique et facilement compréhensible, non seulement à l’attention des spécialistes, mais aussi à celle du grand public. Les résultats permettent pour la première fois de localiser et de chiffrer l’importance de la pression humaine sur les rivières.

L’amélioration effective de l’écomorphologie passe, d’une part, par la réservation d’un espace plus large pour les cours d’eau et, d’autre part, par un effort de longue haleine nécessitant des moyens financiers considérables. En terme d'enjeux pour le développement durable, il est important de signaler, du point de vue environnemental, que les progrès récents les plus importants ont consistés en une stabilisation de la dégradation écomorphologique du réseau des rivières, par exemple par l'introduction dans la loi de l'interdiction des mises sous tuyau des cours d'eau.

Depuis l'établissement de l'inventaire écomorphologique de niveau R en 2005, quelques aménagements ont été réalisés au titre de la renaturation/revitalisation. Il s'agit principalement des objets suivants:

Force est de constater que ces quelques objets ne constituent qu'une infinitésimale partie des actions qui restent encore à engager. Cette situation est principalement due au manque d'un budget alloué à la renaturation et à la revitalisation des cours d'eau vaudois. En matière de renaturation et revitalisation, la politique cantonale prévoit que ces dernières soient intégrées aux travaux de protection contre les crues gérés par la division de l'économie hydraulique du Service des eaux, sols et assainissement.

Méthodologie

Cet indicateur présente la part des cours d'eau analysés selon leur degré d'artificialisation, en classant ces derniers selon 5 niveaux d'atteinte. Les cours d'eaux analysés représentent environ 65% du réseau hydrographique à écoulement permanent.

Le système modulaire gradué a été conçu pour décrire l’état des cours d’eau suisses de manière normalisée. Ce système a été développé dès 1998 sous la forme de différents modules (ou méthodes) permettant d’apprécier l’état des rivières selon trois domaines principaux : l’hydrodynamique et la morphologie, la biologie, les effets chimiques et toxiques (cf. Références). Le système modulaire gradué est utilisé comme un instrument d’exécution de la Loi fédérale sur la protection des eaux et de ses ordonnances d’application.

Le module "Ecomorphologie de niveau R" a été développé dès 1995 par l’Office fédéral de l'environnement (OFEV), l’Institut fédéral pour l’aménagement, l’épuration et la protection des eaux (EAWAG) et plusieurs services cantonaux, dont l’Amt für Abfall, Wasser, Energie und Luft (AWEL) du canton de Zurich. La méthodologie se fonde sur cinq critères principaux qui décrivent "l’hydromorphologie, les mesures techniques entreprises dans le cours d’eau et sur ses berges, ainsi que les conditions environnantes".

Ces critères sont les suivants:
- largeur du cours d’eau et variabilité de la largeur du lit mouillé
- aménagement du fond du lit
- renforcement des pieds de berge
- étendue et nature des rives
- localisation et type de perturbations de la continuité

Les quatre premiers critères permettent de préciser l’état naturel du cours d’eau, alors que le cinquième concerne plus particulièrement la faune piscicole.

Selon les notes obtenues, les portions des tronçons étudiées sont classées sur une échelle qui est fonction du type d'atteinte:
I.Naturel / semi-naturel
II.Peu atteint
III.Très atteint
IV.Non-naturel / artificiel

On calcule ensuite le pourcentage de chaque classe dans la longueur des tronçons de cours d'eau étudiés.

La mise à jour des données peut comprendre la correction de données erronées ou l’introduction de nouvelles données (cours d’eau non répertorié, études spécifiques). Actuellement, il est prévu de définir les priorités de revitalisation en affinant partiellement les résultats au niveau des tronçons de cours d’eau.

Engagements à l'échelle nationale et cantonale

En 1998, l’OFEV a publié, dans son cahier n° 27, les "Méthodes d’analyse et d’appréciation des cours d’eau en Suisse, Ecomorphologie – niveau R (région)". La méthode explicitée permet d’établir un inventaire écomorphologique sur la base d’une démarche commune pour tous les cantons (module AWEL). Cette démarche doit permettre d’obtenir une appréciation préliminaire de l’état naturel des cours d’eau au niveau d’une région.

Le canton de Vaud n’a pas attendu la méthode de l’OFEV pour prendre en considération l’état de ses rivières. Ainsi, entre les années 1960 et 1990, l’Inspection cantonale de la pêche a réalisé un inventaire des cours d’eau vaudois documentant l’état morphologique et écologique par tronçon de rivière. Afin d’optimiser son exploitation, l’inventaire écomorphologique vaudois (IEM) a été intégré dans la base de données géoréférencées GESREAU du Service des eaux, sols et assainissement (SESA) en 1988.

Limites de l'indicateur

L'objectif du module de niveau R étant d'obtenir une information régionale sur l'état écologique des cours d'eau et sur les déficits correspondants, l’écomorphologie de niveau R ne constitue pas un outil adapté à une analyse de niveau local.

L’inventaire écomorphologique ne constitue pas directement une base pour l’élaboration de plans de mesures de revitalisation. C’est en effet avec l’écomorphologie de niveau "cours d’eau" que les objectifs de développement seront établis. Néanmoins, l’écomorphologie de niveau régional constitue un des modules fondamentaux du système d’appréciation des cours d’eau développé par l’OFEV. Son achèvement est gage d’intérêt pour la qualité des cours d’eau vaudois et permettra d’établir des priorités dans le choix des mesures de revitalisation.

La notion d’écomorphologie est une mesure du "contenant" de la rivière uniquement; elle n’intègre pas la qualité de l’eau, ni les problèmes d’érosion liés à la modification des régimes hydrologiques ("contenu"). L’analyse d’un cours d’eau doit être réalisée de manière transversale, c’est-à-dire intégrer différents domaines scientifiques. Cette démarche constitue le fondement du système modulaire gradué développé par l’OFEV.

Glossaire

Bassin versant: (ou bassin hydrographique) totalité d'une surface topographique drainée par un cours d'eau et ses affluents à l'amont d'un point défini.

Biocénose: communauté d'espèces animales et végétales en équilibre dynamique dans un biotope, une région donnée.

Ecomorphologie: totalité des conditions structurelles dans les cours d’eau et à leur voisinage, soit leur morphologie, les mesures d’aménagement hydraulique et les conditions environnantes.

Comparabilité

La comparaison de l’état écomorphologique des cours d'eau du canton de Vaud avec d’autres cantons est délicate. En effet, les résultats dépendent d'une part de la couverture de l’inventaire, les cantons étant libres de décider que leur inventaire soit exhaustif sur le réseau ou qu'il cible uniquement les principaux cours d’eau et, d'autre part, de la situation géographique du canton, les cantons de plaine étant plus affectés que les cantons alpins en raison de la pression humaine plus importante qu'ils subissent (agriculture et urbanisation principalement).

Références

OFEV (1998). Système modulaire gradué. Méthodes d’analyse et d’appréciation des cours d’eau en Suisse. Série : L’environnement pratique. Information concernant la protection des eaux n°26. Berne.

SESA, SFFN (2005). Inventaire écomorphologique de niveau R des rivières vaudoises. Service des eaux et de l'assainissement, Service de la forêt, de la faune et de la nature, Lausanne.

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